DHDI


groupe de travail Droits de l'Homme et Dialogue Interculturel

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Rapport de l'assemblée constitutive du groupe de travail

du 10/12/1997

Etaient présents : Abraham Catherine (INALCO), Caruajal Liliah R. (Institut des Hautes Etudes de l'Amérique Latine), Coulnecheff-Eloi Philippe (INALCO), de Graverol Gaël (INALCO), Designe Jean (Juristes-Solidarités), Dubois Jean (LAJP), Eberhard Christoph (LAJP), Gbago B. Georges (LAJP), Gincel Anne (LAJP), Huyghebaert Patricia (Juristes-Solidarités), Jouan Marie-Pierre (LAJP), Le Roy Etienne (LAJP), Martin Boris (Juristes-Solidarités), Nké Eyebe Véronique (LAJP), Parmentier Ingrid (LAJP), Soykan Muazzez (INALCO) et Zelmar Stéphane (INALCO).

La séance était divisée en trois parties. Christoph Eberhard a d'abord pendant une vingtaine de minutes exposé les grandes lignes de ce que pourrait être le groupe de travail DHDI. Puis les différents participants se sont présentés au cour d'un tour de table ou ils ont aussi exprimé leurs attentes et perspectives pour le groupe de travail. Enfin nous avons abordé les démarches concrètes à entreprendre et les problèmes techniques à résoudre.

Les grandes lignes du groupe de travail DHDI :

Le groupe de travail Droits de l'Homme et Dialogue Interculturel (DHDI) a pour but de créer un espace de rencontre, de dialogue et de recherche sur des problématiques relatives aux Droits de l'Homme et au Dialogue Interculturel. Il s'inscrit dans la continuité des démarches développées ces dix dernières années au sein du Laboratoire d'anthropologie juridique de Paris (LAJP). Il a pour vocation de canaliser ces différentes démarches en encourageant un travail d'équipe et en offrant un cadre dans lequel peut se développer une dynamique de travail continue sur la problématique des droits de l'homme et du dialogue interculturel. En outre le DHDI cherchera à faire un effort de communication envers des instituts de recherche ou d'organismes interpellés par cette problématique afin d'entrer en dialogue avec eux. Il n'est donc pas réservé aux chercheurs du LAJP mais est ouvert à tous, chercheurs ou praticiens, qui sont interpellés par notre dynamique.

(1) L'objet du DHDI est de réfléchir aux droits de l'homme dans une perspective interculturelle. En effet, il semble nécessaire de nos jours, de repenser les droits de l'homme et leur universalité, dans leur théorie aussi bien que dans leur pratique, dans le dialogue interculturel puisqu'ils apparaissent de plus en plus comme des requis que comme des acquis. Ils ne sont pas réalisés universellement dans les faits (l'idéal d'un "Etat de Droit" est loin d'être réalisé partout sur la planète) et leur universalité conceptuelle est de plus en plus remise en question par les différentes traditions culturelles (voir la Conférence de Vienne sur les droits de l'homme de 1993). Il s'agit donc de s'interroger sur les raisons de cette non-universalité et de réfléchir à des alternatives pouvant permettre la réalisation et l'acceptation universelle de l'idéal qu'incarnent pour nous les droits de l'homme, c'est à dire d'une vie humaine harmonieuse dans le respect et l'entraide mutuels et dans la paix. Engager un dialogue interculturel sur les droits de l'homme semble donc inévitable. En effet, ce n'est qu'ainsi qu'il semble possible d'enrichir l'universalisme occidental par les autres traditions afin de faire accéder les "Droits de l'Homme" au rang d'un symbole pouvant être véritablement partagé par les différentes cultures et permettant à chacune de le vivre à sa manière.

La démarche de l'anthropologie du droit, telle que pratiquée au LAJP, dont l'exigence fondamentale est de toujours ramener les discours et les pratiques observées aux logiques qui les sous-tendent, et qui a par son objet même un caractère fondamentalement dialogique, semble constituer un angle d'approche prometteur pour réfléchir aux droits de l'homme dans une perspective de dialogue interculturel. En effet le dialogue n'est pas uniquement échange de paroles mais voyages à travers différentes logiques qui nous mène au coeur des différentes perspectives sur notre commune humanité dont ces différentes logiques sont un reflet. La démarche dialogique est donc fondamentalement diatopique, c'est à dire qu'elle essaye de comprendre les différentes logiques et pratiques à partir de leur lieu de naissance (donc de l'intérieur) et ne se limite pas à observer l'autre uniquement à partir de son propre point de vue (donc uniquement de l'extérieur et en en donnant ainsi des vues réductrices et souvent caricaturales). La démarche dialogale en prenant l'autre au sérieux et en le traitant comme sujet et non pas uniquement comme objet nous permet de nous rendre compte de nos manières différentes de vivre et de mettre en lumière nos présupposés implicites quant à nos propres choix. Ainsi semble-t-il possible de créer un espace de partage ou nous pouvons véritablement apprécier nos différences et nous enrichir mutuellement en évitant les écueils de l'universalisme et du relativisme.

(2) Le DHDI se veut avant tout lieu de partage, d'échange et de dialogue comme défini ci-dessus. C'est en nous rencontrant régulièrement et en apprenant petit à petit à mieux nous connaître qu'il nous sera possible d'enrichir notre propre perspective par celle des autres, en apprenant petit à petit à voir la réalité des droits de l'homme et du dialogue interculturel en partie à travers leurs yeux. Mais si le DHDI a pour vocation de nous permettre de partager une démarche de recherche il a aussi pour vocation de faire connaître nos démarches. Il a une vocation à la communication de nos résultats aux instituts de recherche ou autres organismes (ex : ONG) intéressés. En effet, ce n'est que par cet effort de communication que nos démarches pourront devenir connaissables et connues, ce qui les rendra ensuite praticables et espérons le pratiquées.

Le tour de table :

Le tour de table nous a permis de faire connaissance et a révélé la diversité de nos recherches. Les aires géographiques étudiées sont l'Afrique, l'Amérique latine, l'Asie et l'Europe. Les thèmes sont, dans un angle d'approche anthropologique, rattachées à la problématique générale des droits de l'homme dans le dialogue interculturel, à l'Etat de droit, à l'immigration, aux droits de l'enfant et aux droits de la femme. Etienne Le Roy a soulevé deux axes fondamentaux pour notre recherche : réfléchir aux fondements d'un véritable dialogue interculturel et à la relation entre droits de l'homme et culture de la paix. L'UNESCO a en effet au début des années 1990 décidé d'inscrire l'anthropologie du droit et des droits de l'homme comme axe principal de sa pédagogie au niveau international et a mis en place un programme pour une culture de la paix. Mais "anthropologie des droits de l'homme" et "culture de la paix" restent des concepts vagues demandant à être travaillés, bien qu'il existe déjà depuis quelques années un cour sur les fondements anthropologiques des droits de l'homme à l'Institut International des Droits de l'Homme à Strasbourg. Jean Designe de Juristes-Solidarités a souligné l'enrichissement que pouvait constituer les apports de l'anthropologie du droit au travail des ONG. Ils peuvent leur permettre d'éclairer leurs pratiques et de leur donner un soubassement théorique solide. Dans certains cas ils peuvent permettre à des ONG de sortir de cercles vicieux générés par la reproduction de manières de penser et de faire pas toujours adaptées aux réalités des terrains. Il a aussi souligné l'importance de la communication et a suggéré d'aller au delà de la simple organisation de séminaires pour aller vers une véritable collaboration entre chercheurs du Laboratoire et des ONG pour que théories et pratiques puissent véritablement s'enrichir mutuellement. Il a proposé de démarrer une collaboration entre Juristes-Solidarités et le DHDI et plus largement le LAJP. C'est Boris Martin de Juristes-Solidarités qui sera notre interlocuteur pour ce projet.

Perspectives et détails techniques :

Une recherche sur l'évolution de la pensée sur les droits de l'homme au sein du LAJP ainsi qu'une mise en ordre des archives du LAJP sur les Droits de l'Homme est en cours. A partir du 07/01/1997 le DHDI se réunira toutes les deux semaines le Mercredi de 18h00 à 19h45 dans la bibliothèque du LAJP. Les chercheurs du Laboratoire y exposeront l'état de leurs recherches respectives. Des conférenciers extérieurs pourront aussi être invités. Les séminaires proprement dit commenceront à 18h30. De 18h00 à 18h30 nous aurons la possibilité de nous rencontrer de manière informelle afin de dialoguer et de nous tenir au courant de nos différentes initiatives. Tous les séminaires seront enregistrés et un compte rendu en sera fait. Nous aurons peut-être la possibilité de créer un site sur internet par l'intermédiaire du LAJP et nous avons un casier au secrétariat du LAJP qui pourra servir de "boîte aux lettres". Reste à trouver un logo et à nous organiser pour répartir les frais de photocopies, les frais postaux et celui de l'achat des cassettes. N'oublions pas non plus qu'en 1998 la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme fête ses 50 ans. A nous de voir ce que nous pourrions faire à cette occasion.

Bonne année à tous et à bientôt !

(Christoph Eberhard)