La biodiversitŽ ˆ lՎpreuve des droits de propriŽtŽ intellectuelle.

Quels enjeux pour lÕAfrique ?[1]

 

Par Dr SITACK YOMBATINA BŽni,

Enseignant-Chercheur ˆ lÕUniversitŽ de NÕDjamŽna (Tchad)

sitackbeni@hotmail.com

 

 

Pour mieux comprendre la problŽmatiqueÉ

 

La question de la propriŽtŽ intellectuelle et de la biodiversitŽ a deux aspects distincts[2] : les droits de propriŽtŽ (DP) sur les ressources gŽnŽtiques et biologiques (propriŽtŽ physique) et les droits sur les contributions intellectuelles ˆ la mise en Ļuvre de la ressource (droits de propriŽtŽ intellectuelle).

 

Les droits de propriŽtŽ intellectuelle (DPI) sont conus pour favoriser la crŽation dÕinnovations et par lˆ mme, rŽaliser un progrs Žconomique et une amŽlioration du bien-tre des consommateurs[3].

 

Autrefois, les DPI ne portaient que sur les innovations effectuŽes par les sŽlectionneurs et les industriels de la chimie ou de la pharmacie[4]. Actuellement, on estime que le travail des gŽnŽrations dÕagriculteurs ayant crŽe et entretenu les variŽtŽs traditionnelles doit tre reconnu. On Žvolue donc vers une double reconnaissance : celle des droits des obtenteurs dÕun brevet par une exclusivitŽ de la vente dÕune variŽtŽ spŽcifique de plante cultivŽe, et celle des droits des agriculteurs qui correspond ˆ la contribution des communautŽs locales dans la crŽation et le maintien des ressources gŽnŽtiques.

 

Alors que pour les agriculteurs on peut considŽrer quÕil sÕagit dÕune forme de compensation, les pays industrialisŽs avancent de leur c™tŽ que les DPI sont un stimulant nŽcessaire ˆ lÕinnovation.

 

Par ailleurs, les progrs rapides du gŽnie gŽnŽtique ont encouragŽ le secteur des biotechnologies ˆ obtenir des brevets sur les organismes vivants, communŽment appelŽs Ē brevets sur le vivant Č. La protection par les brevets est un moyen de protŽger et de faire reconna”tre, comme leur propriŽtŽ intellectuelle, des variŽtŽs ou des produits mis au point le plus souvent aprs dÕimportants investissements. Pour certains, cÕest Žgalement un moyen de stimuler lÕinnovation[5].

 

Les pays dŽveloppŽs (PD) considrent que lՎlargissement de lÕaction des brevets aux organismes vivants Žtait essentiel ˆ la poursuite de leurs recherches, les pays en voie de dŽveloppement (PVD) redoutent en revanche une spoliation de leurs richesses et une monopolisation totale par les pays riches du marchŽ des semences, prŽjudiciable aux paysans des pays pauvres[6].

 

Le problme de lÕaccs des parties ˆ la technologie gŽnŽtique  ne fut pas des moins ardues lors des nŽgociations de la Convention sur la DiversitŽ Biologique (CDB). Deux conceptions sÕaffrontaient : pour les PD, la technologie est une propriŽtŽ des firmes dŽtentrices des brevets. Pour les PVD au contraire, les PD avaient ˆ agir sur leurs firmes, si puissantes soient-elles, et le problme Žtait simplement de savoir comment ces pays pouvaient leur assurer un accs ˆ la technologie sur des bases prŽfŽrentielles[7].

 

Logique du marchŽ contre logique volontariste et Ē Žquilibriste Č, donc il sÕagissait du type de confrontation toujours latente dans les relations Žconomiques entre les pays du Nord et ceux du Sud.

 

Ainsi, lÕaccs aux ressources biologiques et technologiques devient un sujet sur lequel se cristallisent les conflits entre pays pauvres et pays riches. Les premiers possdent des ressources, quÕils ne peuvent exploiter, les seconds disposent dÕavancŽes technologiques permettant cette exploitation[8].

 

Pour mieux apprŽhender la dŽmarche et les enjeux des DPI et de la biodiversitŽ pour lÕAfrique (II), il importe dÕexposer, tout dÕabord, le droit gŽnŽral de la propriŽtŽ intellectuelle et de la biodiversitŽ (I).

 

I. DPI et conservation de la biodiversitŽ. Deux rŽgimes diffŽrents.

 

Pour la clartŽ de notre exposŽ, lÕon prŽsentera, dans un premier temps, de manire systŽmatique, tous les rŽgimes de protection internationale et rŽgionale des DPI et la question du vivant (A) avant de parcourir, dans un second temps, de faon substantielle, la Convention sur la DiversitŽ Biologique ( ci-aprs, CDB).

 

 

A. RŽgimes de protection des DPI et lÕappropriation du vivant

 

A lՎchelle micro-Žconomique, deux voies sÕouvrent ˆ lÕinventeur, lÕune ignorante du brevet et de toute formule analogue (telle que, par exemple, celle concernant les obtentions vŽgŽtales), lÕautre qui est celle du brevet[9].

 

Le recours au droit des brevets permet ˆ celui qui entend sÕen prŽvaloir, de disposer dÕun droit privatif opposable erga ommes dont la traduction concrte rŽside en une action en contrefaon qui permet au brevetŽ de rester ma”tre de sa technique en pourchassant tout tiers qui prŽtendrait lÕexploiter[10].

 

Le brevet confre une propriŽtŽ exclusive dÕexploitation de la chose intellectuelle et lÕinventeur a seul le droit de la reproduire et dÕen tirer les fruits, en le cŽdant, en le louant, ou en interdisant son utilisation (une interdiction automatique du fait de lÕattribution du droit de propriŽtŽ) ˆ lÕinstar dÕun propriŽtaire de chose corporelle[11]. Cette propriŽtŽ suppose Ē une ma”trise aussi complte que possible du bien, une  exclusivitŽ et lÕopposabilitŽ absolue du droit Č[12].

 

En dŽterminant la nature de la protection (cÕest-ˆ-dire du droit exclusif de lÕinventeur), les DPI constituent les ŽlŽments juridiques de base qui permettent ˆ lÕinventeur de confŽrer ˆ dÕautres lÕinnovation par le biais dÕun accord de licence Š par exemple Š la protection des brevets permet au brevetŽ sans crainte de contrefaon de divulguer son innovation aux personnes intŽressŽes qui peuvent ainsi estimer la valeur[13]. Cette divulgation accro”t la certitude juridique, rŽduit les risques, et, par consŽquent, le cožt des transactions de licence (brevets).

 

Le but des DPI consiste ˆ promouvoir le dŽveloppement culturel ou technologique. Leur crŽation confre alors un monopole Žconomique en mme temps que toute une sŽrie de droits exclusifs reconnus par les lŽgislations nationales.

 

Les DPI relvent enfin de rgles qui sont non seulement intellectuellement originales mais encore institutionnellement spŽcifiques, tant ˆ lՎchelle internationale quՈ lՎchelle rŽgionale.

 

Nous examinerons dans les lignes qui suivent, les rŽgimes de protection internationale, rŽgionale, voire mondiale des DPI.

 

1. Les rŽgimes de protection internationale

 

Il nÕest gure besoin de rappeler que le droit relatif aux brevets a connu, au cours de la dernire dŽcennie, de profondes modifications sur le plan international.

 

Diverses conventions internationales ont ainsi ŽtŽ conclues. Ces conventions ont ŽtŽ ratifiŽes par bon nombre de pays et font donc partie de leur droit positif.

 

Au premier rang de celles-ci, figure, on le sait, la Convention pour la protection de la propriŽtŽ industrielle, dite Ē Convention dÕUnion Č de Paris qui, au fil de ses modifications successives, forme en quelque sorte la clef de vožte de la protection internationale en matire de brevets.

 

En outre, dÕautres conventions, traitŽs et accords ont vu le jour.

 

Pour mieux comprendre le cadre juridique et institutionnel de protection des brevets, nous prŽsenterons, ˆ la suite de la Convention dÕunion de Paris, les autres instruments fondamentaux qui, ˆ des titres divers, peuvent influencer la protection des inventions et dont lÕefficacitŽ est inversement proportionnelle ˆ leur champ dÕapplication territorial, voire rŽgional ou mondial.

 

 

1.1.La Convention dÕUnion de Paris de 1883

 

 La Convention dÕUnion pour la protection de la propriŽtŽ intellectuelle (CUP) Š tel est son titre Š a ŽtŽ signŽe ˆ Paris en 1883. SignŽe ˆ lÕorigine par onze Etats, la CUP en compte aujourdÕhui cent vingt-six[14].

 

Elle a subi plusieurs modifications ˆ la suite de confŽrences de rŽvision[15] .

 

Son objet porte sur les brevets dÕinvention, les modles dÕutilitŽ, les dessins ou modles industriels, les marques de fabrique ou de commerce, les marques de service, le nom commercial et les indications de provenance ou appellations dÕorigine, ainsi que la rŽpression de la concurrence dŽloyale (article 1. al.2.).

Elle sÕapplique par consŽquent ˆ la matire des brevets dÕinvention.

 

La CUP avait crŽe, ds 1883, un Bureau international, qui Žtait le seul organe permanent de lÕUnion, et elle lÕavait placŽ sous la haute autoritŽ de lÕAdministration SupŽrieure de la ConfŽrence helvŽtique. En 1893, pour des raisons Žconomiques, le Bureau fut rŽuni avec celui quÕavait instituŽ la Convention de Berne pour la protection des Ļuvres littŽraires et artistiques[16]. De cette rŽunion naquirent les BIRPI (Bureaux Internationaux RŽunis pour la protection de la PropriŽtŽ intellectuelle). Une des Conventions signŽes ˆ Stockholm le 14 juillet 1967 a modifiŽ cette organisation. Le Bureau international que prŽvoit lÕActe de Stockholm de la Convention dÕUnion a ŽtŽ placŽ, par la seconde Convention, sous lÕautoritŽ dÕune nouvelle organisation internationale, lÕOMPI (Organisation Mondiale de la PropriŽtŽ Intellectuelle).

 

Enfin, la CUP reconna”t aux Etats membres la facultŽ de conclure sŽparŽment entre eux des arrangements particuliers.

 

Trois arrangements dÕune importance capitale ont ŽtŽ conclu en matire de brevets : le TraitŽ de CoopŽration en matire de brevets, signŽ ˆ Washington en 1970, la Convention sur la dŽlivrance des brevets europŽens, signŽe ˆ  Munich en 1973 et la Convention sur le  brevet communautaire, signŽe ˆ Luxembourg en 1975

 

 

 

 

 

1.2.Le TraitŽ de CoopŽration en matire de brevet de 1970 (PCT)

 

 Le TraitŽ de CoopŽration en matire de brevets (soit, en anglais, Patent Cooperation Treaty, par abrŽviation PCT) fait ˆ Washington  le 19 juin 1970 offre la facultŽ de procŽder ˆ une demande internationale.

Ce traitŽ, appelŽ aussi Ē TraitŽ de Washington Č[17] a ŽtŽ modifiŽ le 2 octobre 1979 et le 3 fŽvrier 1984[18].

         Le PCT a pour objectif dÕinstituer une procŽdure internationale unique de dŽp™t, acceptŽe par les Etats contractants[19].

 

 La dŽlivrance dÕun brevet selon la procŽdure PCT comporte une phase internationale gŽrŽe par le Bureau international de lÕOMPI ˆ Genve, suivie dÕune phase nationale dans chacun des Etats o la protection des inventions est recherchŽe.

La phase internationale consiste en une procŽdure obligatoire organisŽe par le chapitre I du PCT et une procŽdure facultative organisŽe par son chapitre II.

Une demande internationale de brevet peut tre dŽposŽe auprs dÕun office de brevets national ou rŽgional, auquel le PCT donne le nom dÕoffice rŽcepteur[20]. LÕoffice rŽcepteur reoit la demande, en vŽrifie la rŽgularitŽ[21] et transmet les demandes rŽgulires au Bureau international de lÕOMPI.

 

2. Les rŽgimes de protection rŽgionale

 

2.1.La Convention de Munich sur le brevet europŽen de 1973 (CBE)

 

Aprs une gestation de plus de vingt ans, la Convention sur la dŽlivrance de brevet europŽen[22] (ci-aprs CBE), fut signŽe ˆ Munich, le 5 octobre 1973[23].

Selon le vĻu de ses promoteurs, elle aurait dž entrer en vigueur en mme temps que la Convention de Luxembourg de 1975 sur le brevet communautaire, toujours en attente de ratifications nŽcessaires (infra n”2.2).

 

Le point de dŽpart a ŽtŽ le principe de brevetabilitŽ des inventions se rapportant au domaine des industries chimiques, voire pharmaceutiques. Ce principe nÕayant fait lÕobjet dÕaucune controverse, il permit par suite ˆ la jurisprudence de lÕOffice europŽen des brevets (ci-aprs, OEB) et ˆ celle de la Cour Suprme amŽricaine de fonder la brevetabilitŽ des procŽdŽs micro biologiques et des produits obtenus par ces procŽdŽs.

 

 La CBE permet[24], par une seule demande de brevet europŽen, dŽsignant un ou plusieurs de ces quinze pays, dÕobtenir un titre de protection qui peut, moyennant certaines conditions, Žtendre ses effets aux pays dŽsignŽs.

LÕarticle 53 b de la CBE portant sur les Exceptions ˆ la brevetabilitŽ dispose que : Ē les brevets europŽens ne sont pas dŽlivrŽs pour les variŽtŽs vŽgŽtales ou les races animales ainsi que les procŽdŽs essentiellement biologiques dÕobtention de vŽgŽtaux ou dÕanimaux, cette disposition ne sÕappliquant pas aux procŽdŽs micro biologiques et aux produits obtenus par ces procŽdŽs Č.

 

La doctrine de lÕOEB a, dans un premier temps, semblŽ Žpouser celle de lÕUnion Internationale pour la Protection des Obtentions VŽgŽtales (ci-aprs UPOV) de 1961, avant de sÕouvrir par-ˆ-coup ˆ la brevetabilitŽ du vŽgŽtal, sous la pression de lÕavancŽe rapide de la biotechnologie.

 

2.2. La Convention de Luxembourg de 1975 (CBC)

 

 La crŽation dÕun brevet communautaire vise ˆ unifier le droit des brevets au plan europŽen et ˆ favoriser la libre circulation des produits brevetŽs dans lÕUnion europŽenne. Initialement, il Žtait envisagŽ de rŽgler la question par une seule Convention passŽe entre les Etats membres[25]. Aprs lՎchec de ce premier projet, les travaux furent scindŽs en deux parties : dÕune part, lÕorganisation dÕune procŽdure europŽenne de dŽlivrance des brevets ; dÕautre part, la rŽglementation des effets dans les Etats membres de lÕUnion europŽenne, des brevets ainsi dŽlivrŽs[26]. Le premier de ces objectifs fut rŽalisŽ par la CBE, signŽe ˆ Munich (supra n” 2.1) ; le second doit lՐtre par la CBC signŽe ˆ Luxembourg le 15 dŽcembre 1975.

 

 La CBC a pour objet de rŽserver lÕinvention au profit de son titulaire sur lÕensemble des territoires des Etats contractuels, considŽrŽs comme une unitŽ (CBC, art. 2.2).

 

2.3.LÕAccord de Bangui de 1977

 

AnimŽs du dŽsir de promouvoir la contribution effective de la propriŽtŽ intellectuelle au dŽveloppement de leurs Etats, dÕune part, et soucieux de protŽger sur leur territoire d'une manire aussi efficace et uniforme que possible les DPI, dÕautre part, quinze pays francophones[27] ont signŽ lÕAccord de Bangui du 2 mars 1977 instituant lÕOrganisation Africaine de la PropriŽtŽ Intellectuelle (OAPI).

 

Cet Accord a pour objectif essentiel dÕassurer une harmonisation transnationale des lois sur la protection intellectuelle. Ainsi, les pays membres sont soumis aux mmes lois concernant la propriŽtŽ intellectuelle.

 

         CrŽŽe par lÕ Accord de Bangui de 1977, lÕOAPI est chargŽe, entre autres selon lÕarticle 2 ; de mettre en Ļuvre et dÕappliquer les procŽdures administratives communes dŽcoulant dÕun rŽgime uniforme de protection de la propriŽtŽ industrielle ainsi que des stipulations des conventions internationales en ce domaine auxquels les Etats membres de lÕorganisation ont adhŽrŽ et de rendre les services en rapport avec la propriŽtŽ intellectuelleÉ

 

LÕorganisation tient lieu, pour chacun des Etats membres, de service national de la propriŽtŽ industrielle, au sens de lÕarticle 12 de la CUP et dÕorganisme central de documentation et dÕinformation en matire de brevets dÕinvention (article 2. al. 2).

Pour chacun des Etats membres qui sont Žgalement parties au PCT, lÕorganisation tient lieu Ē dÕoffice national Č, Ē dÕoffice dŽsignŽ Č, Ē dÕoffice Žlu Č et Ē dÕoffice rŽcepteur Č (art.2. al.3 et 4).

 

Le sige central de lÕOAPI se trouve ˆ YaoundŽ au Cameroun. Une autre organisation dŽnommŽe ARIPO (Organisation rŽgionale africaine de la propriŽtŽ intellectuelle) dŽlivre des brevets valides pour quatorze pays anglophones dÕAfrique[28]. Son sige central se trouve ˆ Harare au Zimbabwe.

 

Toutes ces organisations ont ŽtŽ crŽŽes dans le seul but dÕappliquer des procŽdures communes dŽcoulant dÕun rŽgime uniforme de protection de la propriŽtŽ intellectuelle.

 

Mais si jusque lˆ, la protection des inventions par des brevets, Žtait gŽrŽe au niveau national,  pour la premire fois, lÕAccord sur les Droits de PropriŽtŽ Intellectuelle liŽs au Commerce (ADPIC) connu aussi sous lÕacronyme anglais de TRIPs va Žtablir des normes internationales minimum pour les systmes de brevets.

Celui-ci inclut lÕextension du brevet ˆ la protection de micro-organismes et processus non biologiques et pour la production de plantes ou dÕanimaux.

 

3. La protection mondiale des DPI : Accord relatif ˆ lÕADPIC

 

LÕintroduction de la propriŽtŽ intellectuelle dans les nŽgociations commerciales multilatŽrales est une tentative pour traiter les divergences entre les intŽrts des PVD et les PD. Les premiers considrent quÕune protection renforcŽe des droits intellectuels constitue un frein au dŽveloppement et rŽclament lÕaffaiblissement, en leur faveur, des normes de la CUP de 1883[29]. Les seconds estiment, en revanche, quÕune protection forte de ces droits est nŽcessaire pour garantir les intŽrts de leur industrie tant sur le marchŽ intŽrieur quÕinternational.

 

Le conflit, marquŽ par lՎchec des tentatives de rŽvision de la CUP de 1980 et 1984[30], sÕest exacerbŽ lorsquÕil a ŽtŽ proposŽ dÕintroduire dans lÕAccord gŽnŽral sur les tarifs douaniers et le commerce (plus connu sous ses initiales anglaises GATT- General Agreement on Tariffs and Trade) lÕobligation dÕassurer une protection minimale des DPI et dÕen Žriger le respect en conditions dÕoctroi des avantages douaniers prŽvus par cet Accord[31].

 

CÕest ainsi que la propriŽtŽ intellectuelle fut mise ˆ lÕordre du jour des nŽgociations commerciales du Cycle dÕUruguay en 1986. Un Accord gŽnŽral sur les Aspects des DPI liŽs au commerce[32] (ci- aprs dŽnommŽ ADPIC) a ŽtŽ annexŽ ˆ la Convention OMC signŽe ˆ Marrakech le 15 avril 1994.

 

 Les objectifs, ŽnoncŽs dans lÕexposŽ des motifs de cet Accord consistent, principalement, ˆ renforcer et ˆ harmoniser ˆ lՎchelle mondiale la protection de la propriŽtŽ intellectuelle. Ces objectifs sont poursuivis par une double voie. LÕAccord impose aux membres lÕobligation dÕassurer un minimum de protection des diffŽrents droits intellectuels, en leur laissant le choix des moyens pour y parvenir, ensuite, des dispositions substantielles spŽcifiques sont prŽvues dans certains domaines.

 

 LÕune des questions majeures que soulve cet Accord est celle de la brevetabilitŽ du vivant.

 

LÕarticle 27.3. (b) impose, aux Etats membres dÕassurer une protection des obtentions vŽgŽtales soit par le brevet, soit par un systme sui generis, soit par une combinaison de ces deux moyens. Cet article 27. 3 (b) a figurŽ parmi les dispositions les plus discutŽes lors de la nŽgociation de lÕAccord. Le Conseil de lÕADPIC a entrepris en 1999 le rŽexamen de cet article, sans aboutir pour lÕinstant ˆ une rŽvision[33].

        

Si le principal argument avancŽ en faveur dÕun renforcement des DPI est quÕil stimulera lÕinvestissement et lÕinnovation, on peut douter des avantages des DPI pour les africains. Pour LÕAfrique, lÕun des grands enjeux dans ce domaine est de savoir si la protection de la propriŽtŽ intellectuelle confŽrera plus de poids aux innovateurs locaux et, par consŽquent, si elle renforcera la capacitŽ des Maliens, SŽnŽgalais, BŽninois, Tchadiens, etc., ˆ innover ? Les agriculteurs africains auront-ils les moyens de payer la prime technologique quÕimpose lÕADPIC ? Ou doivent-ils attendre lÕexpiration du brevet pour que lÕinvention tombe dans le domaine public et soit librement disponible pour tous ? Autant de questions qui trouvent difficilement, leurs rŽponses dans la Convention sur la DiversitŽ Biologique quÕil convient de prŽsenter ˆ prŽsent.

 

B. La Convention sur la DiversitŽ Biologique (CDB)

 

  Au dŽbut des annŽes 90, la communautŽ internationale sÕest enfin dŽcidŽe ˆ reconna”tre que le systme de production industrielle et sa logique sans mesure de croissance perpŽtuelle avaient de consŽquences sur lՎcosystme[34]. Les systmes vivants de la plante sont durement menacŽs comme lÕillustrent : lÕinstabilitŽ croissante du climat causŽ par lÕeffet de serre ; un niveau alarmant dՎrosion gŽnŽtique et de dŽgradation des sols ; la sŽcheresse des forts Žquatoriale, entra”nant la prolifŽration sans prŽcŽdents dÕincendies ; la pollution marine et la diminution des ressources halieutiques ; lÕirrŽversible extinction de quelques 100 espces par jour,É[35]

 

Paralllement, il est apparu que les communautŽs locales et indignes des PVD, qui ont entretenu cette diversitŽ biologique et qui en dŽpendent, sont elles aussi menacŽes par ces mmes phŽnomnes. Non seulement leurs modes de subsistance mais aussi leurs systmes de savoirs et leurs pratiques innovatrices, ŽdifiŽes sur plusieurs gŽnŽrations, ainsi que leurs droits fondamentaux vis-ˆ-vis de ce patrimoine sont sapŽs par une industrie qui exploite et saccage la biodiversitŽ tout en revendiquant une propriŽtŽ exclusive sur le vivant[36].

 

La CDB adoptŽe le 5 juin 1992 ˆ Rio de Janeiro, signŽe par 153 pays[37] et entrŽe en application ˆ la fin de 1993  est un engagement ˆ valeur lŽgale pour mettre fin ˆ cette destruction et assurer la conservation et lÕutilisation durable de la diversitŽ biologique. Elle reste une Convention-cadre (1) mme si dans le souci de concilier les intŽrts antagonistes et de parvenir ˆ une gestion durable de la biodiversitŽ, la CDB a consacrŽ le brevet sur le vivant (2).

 

1. La CDB : une Convention-Cadre

 

La CDB est une convention cadre qui marque une Žtape importante dans le dŽveloppement du droit international de lÕenvironnement (DIE). Elle constitue ˆ ce titre un nouveau point de dŽpart pour la signature de nouveaux traitŽs[38]. CÕest la premire convention ˆ lՎchelle mondiale consacrŽe ˆ la biodiversitŽ au sens large.

 

A la diffŽrence des autres accords environnementaux traitant de lÕutilisation des espaces ou de la protection de la faune et de la flore qui ont toujours eu un caractre sectoriel, la CDB a une approche globale de la biodiversitŽ. LÕarticle 2 de la CDB dŽfinit en effet la biodiversitŽ comme Žtant Ē la variabilitŽ des organismes vivants de toute origine y compris entre autres, les Žcosystmes marins terrestres et autres Žcosystmes aquatiques et les complexes Žcologiques dont ils font partie ; cela comprend la diversitŽ au sein des espces et entre espces ainsi que celle des Žcosystmes Č.

 

 Pour faire bref, la biodiversitŽ est constituŽe par lÕensemble des tres vivants, de leur matŽriel gŽnŽtique, et des complexes Žcologiques dont ils font partie.

 

 La CDB crŽe en effet un nouveau rŽgime de la biodiversitŽ dont la principale nouveautŽ est la consŽcration du droit de souverainetŽ des Etats territorialement compŽtents sur leurs ressources gŽnŽtiques qui Žtaient jusquÕalors considŽrŽes comme patrimoine commun de lÕhumanitŽ.

 

Elle se prŽsente enfin comme un canevas international pour les actions concrtes des Etats. Elle laisse en effet ˆ la compŽtence des Parties lՎdiction des mesures dÕapplication. LÕarticle 6, qui traite des mesures gŽnŽrales en vue de la conservation et de lÕutilisation durable de la diversitŽ biologique, dispose que Ē chacune des Parties contractantes, en fonction des conditions et moyens qui lui sont propres :

a.    Žlabore des stratŽgies, plans et programmes nationaux tendant ˆ assurer la conservation et lÕutilisation durable de la diversitŽ biologique ou adopte ˆ cette fin ses stratŽgies, plans ou programmes existants, qui tiennent compte, entre autres, des mesures ŽnoncŽes dans la prŽsente convention ;

b.    intgre, dans toute la mesure du possible et comme il convient, la conservation et lÕutilisation durable de la diversitŽ biologique dans ses plans, programmes et politiques sectoriels ou intersectoriel pertinents Č.

 

Si les objectifs de la CDB ŽnumŽrŽs dans son article premier sont la conservation de la diversitŽ biologique, lÕutilisation durable de ses ŽlŽments et le partage juste et Žquitable des avantages dŽcoulant de lÕutilisation des ressources gŽnŽtiques, la CDB rŽpond aussi ˆ la question de la  Ē brevetabilitŽ Č du vivant de faon implicite ˆ travers son article 16 paragraphes 2 et 5.

 

2. La CDB : consŽcration du brevet sur le vivant 

 

La consŽcration du brevet sur le vivant est donc incontestablement une concession ˆ lÕexigence des pays dŽveloppŽs en cette matire.

Tout est parti des Etats-Unis, considŽrŽs comme le principal foyer mondial du dŽveloppement prodigieux de la biotechnologie et du gŽnie gŽnŽtique. Une dŽcision de la Cour Suprme amŽricaine[39] dispose en effet, en 1980, que Ē Tout ce qui vivait sous le soleil Žtait brevetable, pour peu que les conditions usuelles soient satisfaisantes (activitŽ inventive, nouveautŽ, application industrielle)[40] Č.

 

Cette dŽcision a eu une influence importante dans la pratique de lÕOffice amŽricain des brevets[41], la revendication des droits de propriŽtŽ sur toutes les formes de vie, y compris de vie humaine[42] Žtait dŽsormais possible.

 

Le mouvement sÕest dÕailleurs accŽlŽrŽ ˆ tel point que plus de mille brevets concernant les biotechnologies vŽgŽtales Žtaient dŽposŽs dans le monde en 1992[43].

Cette frŽnŽsie avait de quoi inquiŽter, car ce sont toutes les espces vivantes qui pouvaient potentiellement tre happŽes par les sphres privŽes. LÕon comprend et peroit aisŽment tout lÕenjeu quÕil y avait derrire cette question de brevet pendant la nŽgociation de la CDB surtout quand on sait que les pays du Nord sont les propriŽtaires de la trs grande majoritŽ des brevets qui existent dans le monde.

 

LÕarticle 16 de la CDB, le paragraphe 2 in fine dispose : Ē Lorsque les technologies font lÕobjet de brevets et autres DPI, lÕaccs et le transfert sont assurŽs selon des modalitŽs qui reconnaissent des DPI et sont compatibles avec leur protection adŽquate et effective Č. Le paragraphe 5 indique pour sa part : Ē Les Parties contractantes reconnaissent que les brevets et autres DPI peuvent avoir une influence sur lÕapplication de la CDB, cooprent ˆ cet Žgard sans prŽjudice des lŽgislations nationales et du droit international pour assurer que ces droits sÕexercent ˆ lÕappui et non ˆ lÕencontre de ses objectifs Č.

 

On le voit bien, malgrŽ le clin dÕĻil que la CDB fait aux DPI, de nombreux conflits sont possibles. Le rapport potentiellement conflictuel entre le rŽgime de la CDB et celui de lÕADPIC est en effet accentuŽ par la distribution inŽgale des ressources humaines, naturelles, matŽrielles et industrielles en question dans ces deux  accords[44], ce qui fait ressortir un vŽritable clivage Nord/Sud.

 

La deuxime partie de cette rŽflexion sera consacrŽe ˆ la mise en exergue des problmes que pose lÕopposition entre le rŽgime juridique de la biodiversitŽ, dÕune part, et celui des DPI appliquŽ au vivant, dÕautre part, et ce sous une perspective africaine.

 

II. LÕopposition entre les DPI et la BiodiversitŽ. Les enjeux pour lÕAfrique

 

De nombreux observateurs considrent que lÕADPIC ne peut que conduire au dŽveloppement du monopole du contr™le des transnationales sur la production et la distribution[45]. Certains discours trs relayŽs mettent aujourdÕhui lÕaccent sur lÕexistence dÕune opposition indŽpassable entre DPI et biodiversitŽ[46].

 

Dans cette veine, de plus en plus de PVD annoncent que les DPI ne leur seront jamais favorables[47], que lÕenjeu consiste dŽsormais ˆ dŽcider un moratoire sur les activitŽs de prospection, dÕinterdire toute  forme de propriŽtŽ intellectuelle sur les ressources biologiques[48], de rŽviser lÕADPIC (art. 27.3 (b)) et dÕy supprimer lÕobligation de protŽger les innovations biotechnologiques[49], car quelle que soit leur forme, les DPI sont forcŽment contraires aux intŽrts des PVD[50].

 

 Au demeurant, les DPI sont-ils ˆ rejeter en bloc ? SÕil est difficile de rŽpondre ˆ cette question, il nÕen demeure pas moins que les points de conflits entre les deux instruments sont lˆ.

 

Pour une analyse des enjeux et implications suscitŽs par lÕopposition entre les rŽgimes de DPI sur les formes de vie et celui de la biodiversitŽ pour les pays africains, il convient de noter ceci : les pays ont le choix entre lÕadoption de systmes classiques de DPI pratiquŽs dans les pays industrialisŽs (A), soit faire preuve dÕinnovation et recourir ˆ dÕautres systmes alternatifs de protection de DPI qui prennent en compte leurs rŽalitŽs propres (B).

 

 

 

 

A. Les systmes classiques de DPI sur le vivant : une option peu favorable ˆ lÕAfrique.

 

La protection des formes de vie par les DPI ou le brevetage du vivant est une question sensible dans beaucoup de PVD. Ces derniers craignent de voir le prix de la nourriture augmenter ˆ des niveaux inacceptables sÕil faut payer des royalties sur certains produits agricoles (comme les semences) et les mŽdicaments[51] couverts par lÕADPIC dans le cas dÕespce.

 

 Il sÕagit dÕune question sensible pour les Žconomies africaines de manire gŽnŽrale, puisque celles-ci sont largement dŽpendantes de lÕagriculture[52]. La disparitŽ entre les niveaux de dŽveloppement entre le Nord et le Sud dÕune part, et la nŽcessitŽ de prendre en considŽration les droits que les Etats tirent de la CDB dÕautre part, amnent ˆ conclure que les systmes de DPI classiques basŽs sur les brevets ne sont pas adaptŽs pour les pays africains. Relevons entre autres deux raisons essentielles.

 

A.1. Les DPI violent le principe de souverainetŽ des Etats

 

LÕun des principes de la CDB est celui du droit souverain que les Etats ont dÕexploiter leurs propres ressources selon leurs politiques dÕenvironnement, conformŽment ˆ la Charte des Nations Unies et aux principes de droit international (art. 3 et 15 de la CDB).

 

La consŽcration dÕun tel principe est considŽrŽe comme un acquis majeur des PVD. Elle satisfait une des revendications clefs pendant les nŽgociations : celle qui consistait en la remise en question du concept de patrimoine commun de lÕhumanitŽ qui, dÕailleurs, rŽgissait le statut des ressources biologiques. Le motif de cette revendication Žtait le constat que les ressortissants des PD rŽclamaient de plus en plus de DPI sur les innovations effectuŽes sur la base de ressources originaires des PVD. Ce qui Žtait de nature ˆ limiter lÕaccs aux rŽsultats des innovations, alors mme que lÕaccs aux ressources sur lesquelles elles sont fondŽes Žtait libre en vertu du concept de patrimoine commun de lÕhumanitŽ. Il sÕagissait alors pour les PVD de lutter contre la bio piraterie[53].

 

La protection des formes de vie soulve ainsi des interrogations sur le rapport entre lÕADPIC et la CDB. LÕADPIC sÕapplique ˆ tous les domaines de la technologie[54]. Il ne prend pas non plus en considŽration le fait que lÕaccs aux ressources gŽnŽtiques est rŽgi par des conditions convenues dÕun commun accord et quÕil est soumis Ē au consentement prŽalable donnŽ en connaissance de cause par les communautŽs locales et par lÕEtat dŽtenteur de ces ressources Č (art. 15, paragraphe 5 de la CDB).

 

On lÕaura compris : lÕADPIC vient en quelque sorte ramener ce que les PVD avaient voulu Žviter par la reconnaissance de leur droit souverain de disposer de leurs ressources  gŽnŽtiques comme ils lÕentendent. Du coup, il prive le principe de la souverainetŽ tel que prŽvu par lÕarticle 3 de la CDB de son sens.

 

A.2. Les DPI mŽconnaissent les droits des communautŽs locales

 

La CDB dans ses articles 8j et 10 exige des Etats parties ˆ la convention de promouvoir les droits des communautŽs, des agriculteurs et des populations autochtones en ce qui concerne lÕusage traditionnel des ressources biologiques et des systmes de connaissance. Au contraire, les systmes de DPI, on lÕa vu, ne prennent pas en considŽration cette prŽoccupation. Les critres quÕils posent pour quÕune innovation puisse bŽnŽficier dÕune protection[55] Ē mettent les paysans en position de faiblesse et Žcartent les innovations traditionnelles Č[56].

 

 En rŽalitŽ, lÕADPIC ne reconna”t ni explicitement, ni implicitement aucun DPI ˆ lՎgard des droits des communautŽs autochtones et locales. LÕADPIC considre uniquement les DPI des individus et non ceux dŽtenus sur une base collective par la communautŽ ou par la nation dans sa totalitŽ. Les connaissances traditionnelles et locales, compte tenu de leur nature mme ne peuvent jouir dÕune protection sous lÕADPIC. Pour sÕen convaincre, le critre de nouveautŽ ne semble pas pouvoir sÕappliquer aux connaissances et inventions traditionnelles qui, eux sont, par essence, anciennes.

 

De mme, lÕobligation pour le demandeur de brevet de divulguer le contenu dŽtaillŽ de son invention en contrepartie de sa protection par le brevet risque de permettre lՎrosion des droits des peuples indignes et locaux qui verront leurs connaissances ancestrales manipulŽes par les intŽrts commerciaux et de contredire leurs valeurs spirituelles et religieuses[57].

 

De plus, le fait que les connaissances traditionnelles et les droits qui sÕy attachent sont en gŽnŽral des droits collectifs alors que les DPI sont des droits privŽs est un exemple patent.

 

On le voit bien, les DPI sur les formes de vie ne rŽpondent pas aux besoins des PVD. Il en est de mme, du systme de Droits dÕObtentions VŽgŽtales (DOV), considŽrŽ comme plus souple par rapport au brevet et qui sÕinscrit parfaitement dans la philosophie des Žconomies industrielles, o lÕaccent est mis sur la protection des investissements et des intŽrts de grandes et influentes entreprises semencires, qui emploient les sŽlectionneurs professionnels.

 

Enfin, les systmes classiques de DPI ont des implications profondes sur la sŽcuritŽ alimentaire nationale et rŽgionale, ainsi que sur le dŽveloppement rural et la santŽ des populations africaines. Ils encouragent la biopiraterie en ce sens quÕils permettent dÕexploiter les innovations et crŽativitŽs des communautŽs tout en leur privant des bŽnŽfices Žconomiques en dŽcoulant, qui sont pourtant essentiels pour leur survie[58].

 

LÕensemble de ces ŽlŽments permet de constater que le rŽgime des DPI, sÕil para”t raisonnable dans le contexte des pays industrialisŽs, est injuste pour les PVD, dÕo la nŽcessitŽ pour ces derniers de trouver des alternatives plus adaptŽes.

 

B. La nŽcessitŽ de trouver des systmes sui generis de protection des DPI pour lÕAfrique

 

Les PVD membres de lÕOMC ayant souscrit ˆ lÕADPIC se trouvent donc dans lÕobligation dÕadopter un systme sui generis efficace et adaptŽ pour la protection des variŽtŽs quand ils ne prŽvoient pas le systme de brevet[59]. CÕest lˆ un des enjeux majeurs des rapports entre la CDB et lÕADPIC pour les PVD de manire gŽnŽrale et ceux dÕAfrique en particulier. LÕarticle 27.3 b de lÕADPIC se contente de prescrire lÕapplication sur les formes de vie du brevet ou dÕun systme sui generis efficace, ou la combinaison des deux sans donner plus dÕindication sur la nature de ce systme. Le mot sui generis veut dire simplement spŽcifique et unique Ē de son espce Č[60]. Les Etats ont donc une multitude de possibilitŽs pour adopter les systmes quÕils veulent pourvu que ceux-ci soient efficaces.

 

Pour marquer sa rŽticence vis-ˆ-vis de lÕoption de lÕADPIC qui fait la part belle aux industries biotechnologiques et aux semenciers-obtenteurs de lÕUnion Internationale pour la Protection des Obtentions VŽgŽtales (UPOV)[61], lÕOrganisation de lÕUnitŽ Africaine (OUA) devenue Union Africaine (UA) sÕest placŽe ˆ lÕavant-garde dÕune autre rŽflexion sur lÕusage du vivant.

 

LÕinitiative de lÕOUA de dŽvelopper une Ē LŽgislation modle sur la protection des droits des communautŽs locales, des agriculteurs et des sŽlectionneurs, et pour la rŽgulation de lÕaccs aux ressources biologiques Č - tel est le titre de la LŽgislation Š a dŽbutŽ en 1997 quand lÕOrganisation sÕest embarquŽe dans un processus pour assister les pays africains ˆ remplir leurs obligations vis-ˆ-vis de la CDB et des accords ADPIC de lÕOMC. Le modle de lŽgislation de lÕOUA pourrait servir de base pour un systme sui generis adŽquat aux conditions et au niveau de dŽveloppement des pays africains et rendre compatible leur position avec lÕADPIC. Il a certes beaucoup dÕavantages pour les pays africains (1) mais reste toutefois trs limitŽ (2).

 

B.1. Les avantages de la Loi-modle de lÕOUA

 

Ils consistent essentiellement dans la prise en considŽration de plusieurs ŽlŽments importants pour les pays dÕAfrique. ElaborŽe[62] sous la direction du groupe de travail de la Commission de Recherche Scientifique et Technique de lÕOUA (OUA/CRST) sur les droits communautaires et lÕaccs aux ressources biologiques, la Loi-modle a avant tout le mŽrite de souligner lÕinadaptation du systme de lÕADPIC.

 

Ce dernier est en effet accusŽ dÕaccorder des monopoles sur des tre vivants tout en refusant catŽgoriquement dÕadmettre les innovations communautaires collectives et dՐtre opposŽ aux aspirations des communautŽs qui sont en premier lieu les innovatrices de la biodiversitŽ nŽcessaire ˆ la survie de la plante[63]. La Loi-modle refuse le brevetage du vivant et ne fait pas obstacle au privilge de lÕagriculteur (article 3).

 

En matire dÕaccs aux ressources biologiques ainsi quÕaux connaissances associŽes, la Loi-modle affirme non seulement la nŽcessitŽ du consentement de lÕEtat, mais aussi celle du consentement des communautŽs locales et autochtones.

LÕarticle 5 reconna”t les communautŽs locales comme Žtant Ē les conservatrices lŽgitimes et uniques des connaissances, innovations et pratiques Č et engage les Etats ˆ respecter leurs droits.

 

De plus, elle sÕinscrit parfaitement dans la logique de la CDB car elle rŽitre ses principes les plus importants pour les PVD. DÕune part, elle donne sa vŽritable valeur au principe de souverainetŽ dont on a vu (voir supra, A.1), dÕautre part, elle prend en considŽration les vraies prŽoccupations des populations africaines : sŽcuritŽ alimentaire, partage Žquitable,É

 

Si la Loi-modle est silencieuse sur certaines questions, notamment sur les dŽfinitions des termes utilisŽs ainsi que sur la concrŽtisation finale des mŽthodes de partage entre les diffŽrentes communautŽs, elle reste par ailleurs trs critiquŽe par lÕOMPI et lÕUPOV.

B.2. Les controverses sur la Loi-modle de lÕOUA

 

La Loi-modle de lÕOUA doit relever deux dŽfis majeurs.

Le premier est liŽ au fait que le projet ne semble pas prendre en considŽration certaines questions importantes aux yeux des PD. La Loi-modle remet en question ce qui est convenu dans lÕADPIC, notamment en matire de la brevetabilitŽ du vivant et de la protection des DPI de manire gŽnŽrale. Elle a fait lÕobjet de nombreuses rŽunions dÕexperts, dont la toute dernire a eu lieu en mai 2001 ˆ Addis-Abeba[64], suivie dÕune rŽunion panafricaine dÕexperts en AlgŽrie 2001.

 

Nombreuses sont les critiques actuelles que lÕUPOV et lÕOMPI adressent ˆ lÕOUA. Loin de faciliter le dialogue, elles remettent en question la Loi-modle. LÕ OMPI sÕest empressŽe de mettre en avant que lÕinterdiction des brevets sur les organismes vivants allait contre lÕarticle 27.3 b des accords ADPIC qui exige la reconnaissance des brevets au moins sur les micro-organismes (supra, I.3). Elle rejette le principe dÕinaliŽnabilitŽ des droits des communautŽs inclus dans la Loi-modle. Pour le reste, la thse de lÕOMPI souligne de nombreuses imperfections concernant la manire dont la Loi-modle entend la dŽfinition et lÕopŽrationnalitŽ des droits des communautŽs.

 

Pour sa part, lÕUPOV a retravaillŽ plus de 30 articles de la Loi-modle afin de la rendre conforme aux standards de leur propre convention.

On lÕaura bien compris, la bataille ne fait que commencer !.

 

Le second dŽfi est celui de garder lÕunitŽ du groupe africain qui commence ˆ se perdre. Les nombreuses pressions quÕexercent les pays industrialisŽes sur certains pays africains ne sont pas de nature ˆ rendre le dŽbat plus serein et Žquitable.

 

Devant cette situation, les incohŽrences entre le rŽgime de la biodiversitŽ de la CDB et celui des DPI de lÕADPIC, illustrŽes par lÕincompatibilitŽ entre les objectifs et moyens de lÕun et les dispositions de lÕautre ne pourrait en fin de compte se rŽsoudre quÕau dŽtriment des PVD.

 

Faut-il conclure ?

 

La prŽsente rŽflexion a permis de tirer quelques constats gŽnŽraux sur les rapports entre lÕADPIC et la CDB. Le constat est la faiblesse, si on peut ainsi dire, du droit de la biodiversitŽ par rapport ˆ celui de la propriŽtŽ intellectuelle.

 

Une telle faiblesse reflte en effet le rapport de forces entre les enjeux en question dans chacun des accords. Il sÕagit en premier lieu des compagnies multinationales des pays riches qui disposent dÕun pouvoir de lobbying inŽgalable et jouissent dÕune reprŽsentation Žtatique efficace. Ce pouvoir sÕest en effet trouvŽ accru par la fin de la guerre froide et la remise en question du droit international de dŽveloppement, illustrŽe par le nouveau systme commercial mondial.

Si la CDB est considŽrŽe comme une rŽussite pour les PVD, il reste que ce succs doit tre relativisŽ. Les PVD devraient se montrer plus conquŽrants, plus unis sinon les PD continueront ˆ  leur imposer Ē une vision culturellement spŽcifique de la propriŽtŽ intellectuelle qui repose sur la propriŽtŽ privŽe Č[65]. Nous espŽrons que lÕUnion Africaine saura relever le dŽfi.

 

 

 

 

Bibliographie sŽlectionnŽe

 

1. Ouvrages gŽnŽraux A. CHAVANNE et J. AZEMA, Le nouveau rŽgime des brevets dÕinvention, Paris, Sirey, 1979. B. EDELMAN, M. A. HERMITTE et al., LÕhomme, la nature et le droit, Paris, Ch. Bourgeois, 1988. B.V. REEPINGHEM et M. De BRABANTER, Les brevets dÕinvention, Bruxelles, Larcier, 1987. C. AUBERTIN et F. D. VIVIEN, Les enjeux de biodiversitŽ, Paris, Žd., Economica, 1998. C. LEVEQUE, La biodiversitŽ, Paris, P.U.F., 1997. C. NOIVILLE, Ressources gŽnŽtiques et droit, Paris, Pedone, 1997. G. DUTFIELD, Intellectual Property Rights, Trade and Biodiversity, Earthscan Publications,IUCN, Londres. J. SCHMIDT-SZALEWSKI et J. L. Pierre, Droit de la propriŽtŽ industrielle, Paris, Litec, 1996. M. KAMTO, Droit de lÕenvironnement en Afrique, Paris, EDICEF/AUPELF,1996.

2. Articles. C. AUBERTIN et V. BOISVERT, Ē Les droits de propriŽtŽ intellectuelle au service de la biodiversitŽ. Une mise en Ļuvre bien conflictuelle Č, Revue Nature Sciences SociŽtŽ, 1998, vol.6. n”2.  C. CORREA, Ē Biological ressources and intellectual property rights Č, Journal European Intellectual Property Review 5 : 154, 1992. J. P. BEURRIER, J. P. MARECHAL, Ē Quand la biodiversitŽ est assimilŽe ˆ une marchandise Č, Le Monde Diplomatique, juillet, 1999. M. E. FOOTER, ŅIntellectual Property and AgrobiodiversitŽ : Towards Private owership of the genetic CommonsÓ, Yearbook of International Environnemental Law, 11, 1999, pp. 48-81 S. MALJEAN DUBOIS, Ē BiodiversitŽ, biotechnologies, biosŽcuritŽ : le droit international dŽsarticulŽ Č, J. D. I., 4, 2000. PP 949-996. S. YOMBATINA B., Ē Droit de lÕenvironnement ˆ lՎpreuve des reprŽsentations culturelles africaines : une gestion ˆ rŽinventer ? Č, Revue de Droit Africain, 2000, n” 15, PP. 327-345.

 



[1] Cet article est une version succincte et simplifiŽe dÕune Žtude que lÕauteur a rŽalisŽe et qui a ŽtŽ publiŽe dans un Ouvrage collectif de droit international de lÕenvironnement ˆ Bruxelles. LÕAuteur a ŽtŽ Assistant de Recherche au Centre dÕEtude du Droit de lÕEnvironnement (CEDRE)/FacultŽs Universitaires Saint Louis (FUSL) de Bruxelles.

[2] C. LEVEQUE, La biodiversitŽ, Que sais-je ?, Paris, PUF., 1997, p. 70

[3] OCDE, Politique de concurrence et propriŽtŽ intellectuelle, Rapport OCDE, 1989, p. 11.

[4] C. LEVEQUE, op.cit., p.71

[5] ibid.

[6] M. KAMTO, Droit de lÕenvironnement en Afrique, EDICEF/AUPELF, 1996, p. 123.

[7] Ibid, p. 124.

[8] N. HOMMAN, PropriŽtŽ et protection du matŽriel vŽgŽtal, CIRAD, 1995, p. 7.

[9] J. FOYER et M. VIVANT, Le droit des brevets, Paris, PUF, 1991, p. 9.

[10] Ibid. p.9

[11] J. DABIN, Rev. De Legis. Et de jurisp., 1939 p. 427 et 437 citŽ par F. POLLAUD-DULIAN, Droits de la propriŽtŽ industrielle,  Paris, Žd. Montchrestien, 1999, p. 10-11.

[12] Ibid., p. 12.

[13] OCDE, Politique de concurrence et propriŽtŽ intellectuelle, op. cit., p. 11.

[14] G.-H.-C. BODENHAUSEN, Guide dÕapplication de la Convention de Paris pour la protection de la propriŽtŽ industrielle, La Haye, 1969. J.C.COMBALDIEU, La ratification de la Convention de Paris pour la France et les rŽactions quÕelles a suscitŽes : propr. Ind. 1984, 408. S. LADAS, Les bases fondamentales de la protection de la propriŽtŽ industrielle, propr. Ind. 1954, 93.

[15] Actes de Bruxelles (1900), de Washington (1911), de la Haye (1925), de Londres (1934), de Lisbonne (1958) et, en dernier lieu, de Stockholm (1967). Une septime rŽvision fut entreprise en 1980, pour examiner les demandes des pays en dŽveloppement, qui rŽclamaient diverses mesures tenant compte de leurs intŽrts Žconomiques (essentiellement la libertŽ de rŽtablir la dŽchŽance comme sanction de la non-exploitation et celle de confŽrer des licences autoritaires exclusives), mais nÕa pas abouti.

[16] J. FOYER et M. VIVANT, op.cit., p.49

[17] Pour lÕexamen complet de cette Convention, voir L. GRUSZOW et B. REMICHE, La protection des inventions, t.1, Bruxelles, Larcier, 1978.

[18] Voir le texte complet du PCT, tel que modifiŽ en 1979 et en 1984, ainsi que son rglement dÕexŽcution (en vigueur au 1er janvier 1985), OMPI, Genve, 1985.

[19] Au 1er janvier 1996, le TraitŽ est en vigueur dans 83 Etats. Le texte du traitŽ est complŽtŽ par un rglement dÕexŽcution,  ainsi que par des instructions et directives destinŽes a en Žclairer la signification. Le PCT et la CBE sont des systmes complŽmentaires, en cas de divergence, les dispositions du PCT prŽvalent sur celles de la CBE (art.150.2 de la CBE).

[20] Le dŽposant doit effectuer la demande auprs de lÕadministration qui est lÕoffice des brevets de lÕEtat dont il est le national ou le rŽsident, ou de lÕoffice agissant pour cet Etat (par ex.,  lÕOffice europŽen des brevets).

[21] Selon les conditions de fond et de forme prescrites par le PCT.

[22] Le texte de cette Convention a ŽtŽ publiŽ par lÕOffice europŽen des brevets, deuxime Ždition, juin 1981, W.  VERLAG, wilhelm lampl. Munich.

[23] Au 1er janvier 1996, la Convention de Munich est en vigueur dans 16 Etats. J.O 16 oct. 1977; Gaz. Pal. 1977, 786, F. PANEL, La protection des inventions en droit europŽen des brevets, Litec 1977. P. MATHELY, Le droit europŽen des brevets dÕinvention, Librairie JNA 1978. L. GRUSZOW et B. REMICHE, La protection des inventions (PCT, brevet europŽen, brevet communautaire), Bruxelles, Larcier 1978.

[24] L. GRUSZOW et B. REMICHE, op.cit.

[25] Sur la construction et la mise en place du systme europŽen des brevets, voir J. M. MOUSSERON, TraitŽ des brevets, t. 1, 1984, n. 55 et s. A. KRIEGER, The Luxembourg  Convention on the community patent : IIC 1998, 143.

[26] J. M. MOUSSERON, TraitŽ des brevets, op. cit., p. 55 et s.

[27] Burkina Faso, BŽnin, RŽpublique Centrafricaine, Congo, C™te dÕIvoire, Cameroun, Gabon, GuinŽe Conakry, GuinŽe Bissau, Mali, Mauritanie, Niger, SŽnŽgal, Tchad et Togo.

[28] Botswana, Gambie, Ghana, Kenya, Lesotho, Malawi, Sierra Leone, Somalie, Soudan, Swaziland, Ouganda, Tanzanie, Zambie, Zimbabwe.

[29] J. FOYER, Problmes internationaux contemporains des brevets dÕinvention : Rec. Cours AcadŽmie dr. Int., t. 171, 1981.

[30] H. P. KUNZ Š HALLSTEIN, The revision of the international system of patent protection in the interest of developing countries, IIC 1979, p. 649 et s.

[31] F. Benech, La place du droit de la propriŽtŽ intellectuelle dans le droit international Žconomique : RG dr. 1991, p. 423 et s.

[32] ADPIC, souvent dŽsignŽ par ses initiales anglaises TRIPS Š Trade Related Aspects of Intellectual Property Rights, Including Trade in Counter Feit Goods, Texte anglais de lÕAccord dans ILM, vol. XXXIII, 1994/1, p. 83-111. Texte franais : JO 26 novembre 1995, annexe, p. 40123.

[33] Sur ce rŽexamen, voir GRAIN, Pour un rŽexamen total de lÕarticle 27.3 (b) de lÕADPIC. Une mise ˆ jour de la position des pays en dŽveloppement sous la pression de lÕOMC pour breveter le vivant, mars 2000, p. 2 ; OMC, IP/C/19, 21 octobre 1999 (99-4590”, Rapport annuel 1999 du Conseil de lÕADPIC.

[34] GRAIN et GAIA, Commerce mondial et biodiversitŽ en conflit, n”1, Avril 1998, Grain Š Barcelone, p.2.

[35] J. M. LAVIEILLE, Droit international de lÕenvironnement, ELLIPSES, Paris, 1998, p. 25. Voir aussi, R. BARBAULT, BiodiversitŽ, Hachette, Paris, 1997. S. YOMBATINA B., Ē Droit de lÕenvironnement ˆ lՎpreuve des reprŽsentations culturelles africaines : une gestion ˆ rŽinventer ? Č, Revue de Droit Africain, Bruxelles, 2000, 15, pp. 327-345.

[36] GRAIN et GAIA, op.cit. p.3.

[37] C. LEVEQUE, La biodiversitŽ, op.cit, p. 114

[38] LÕadoption du Protocole de Carthagne sur la bio sŽcuritŽ en fŽvrier 1999 est une illustration ˆ ce phŽnomne.

[39] Dans un arrt Diomond vs Chakrabarty de 1980, la Cour Suprme a rompu le principe constamment affirmŽ jusque lˆ selon lequel : Ē puisque cÕest vivant, cela ne peut tre brevetŽ Č  (Voir J. RIFKIN, le sicle biotech, 206 USPQ 193, p. 91 et s ; S.B. WILLIAMS, Aspects de propriŽtŽ intellectuelle du gŽnie gŽnŽtique appliquŽ aux variŽtŽs vŽgŽtales : le point de vue dÕun juriste amŽricain, in Rapport de symposium sur le gŽnie gŽnŽtique et lÕamŽlioration des plantes du 13 octobre 1982, XIIIe Session ordinaire du Conseil de lÕUPOV, Genve, p. 29. Y. STAYANOVITCH-SALTY, La protection juridique des biotechnologies en droit international, droit communautaire et droit comparŽ, Thse universitŽ de Nice, Institut du droit de la paix et du dŽveloppement, Thse, 1989.  J. P. BERLAN, Ē Cette vie devient marchandise Č, Le Monde Diplomatique, dŽcembre 1988, pp. 20-22.

[40] P. B. JOLY Ē Du patrimoine commun ˆ la privatisation des ressources gŽnŽtiques Č, Le Monde Diplomatique, mai 1992, pp. 10-12.

[41] Voir M. KEGNE KAMGUE, La Convention des Nations Unies sur la diversitŽ biologique (5 juin 1992), Thse, IRIC, 1993, p. 123.

[42] Voir en ce sens lÕarrt rendu dans lÕaffaire Moore le 31 juillet 1988 par la Cour dÕappel de Californie, ŽvoquŽ par J. P. BERLAN, op.cit., p. 21.

[43] P. B. JOLY, op. cit.

[44] La Convention sur la DiversitŽ Biologique et lÕAccord sur les Droits de PropriŽtŽ Intellectuelle liŽs au Commerce.

[45] M. SHALIN, Trade and Environment : how real is the debate ? in Trade, Environment and the millenium, G.P. SAMPSON, W.B. CHAMBERS, Žd., United Nations University Press, 1999, p. 52.

[46] C. NOIVILLE, BiodiversitŽ et propriŽtŽ intellectuelle. LÕimpossible conciliation ?,in Ouvrage intitulŽ Ē lÕOutil Žconomique en droit international et europŽen de lÕenvironnement Č sous la direction de S.MALJEAN DUBOIS, 2002, p.11.

[47] Cf. par exemple, Biodiversity Conservation and Intellectual Property Rights, New-Dehli, 29-31 janvier 1999, spŽcialement les recommandations relatives aux rŽgimes nationaux, voir aussi G. DUTFIELD, Intellectual Property Rights, Trade and Biodivesity, IUCN, Eartscan Publications, Londres 2000, p.139.

[48] Coordinating body for the Indigenous PeopleÕs Organisation of the Amazonie Basin (COICA) Consultation of Indigenous peopleÕs knowledge and intellectual property rights, Final Statement, Suva, UNCTAD Expert  meeting.

[49] P. MULVANY, TRIPs, Biodiversity and Commonwealth Countries : capacity Building Priorities for the 1999 Review of TRIPs article 27. 3. (b). Commonwealth Secretariat  and Quaker peace and Service, Rugby and London, citŽ par G. DUTFIELD, Intellectual Property Rights, Trade and Biodiversity, op. cit. pp 92-93.

[50] Ibid.

[51] W.A. KERR, The next step will be harder, Issues for the new round of agricultural negociations at the WTO, JWT, 34 (1), 2000, p. 136.

[52] F.S. RINGO, TRIPs Agreement in the GATT and legal implications for SS Africa, JWT 28 (6), 1994, p. 131

[53] Le groupe des 77 qui regroupe, du moins, la plupart des PVD avait demandŽ en vain lÕextension du libre accs gŽnŽralisŽ aux variŽtŽs dŽveloppŽes par les obtenteurs dans les PD et aux produits de la biotechnologie. Et cÕest face au refus de leurs collgues du Nord quÕils ont rŽclamŽ lÕapplication du principe de la souverainetŽ nationale sur les ressources biologiques.

[54] Selon lÕarticle 27.1 : Les brevets doivent tre utilisables pour toutes les inventions, que ce soit un produit ou un processus, dans tous les domaines de la technologie.

[55] La distinction, la nouveautŽ, lÕuniformitŽ et la stabilitŽ pour les Droits dÕObtention VŽgŽtales (DOV) ; la nouveautŽ, la distinction et lÕapplicabilitŽ industrielle pour les brevets.

[56] J. MUGABE, Intellectual property protection and traditional knowledge : An exploration in international policy discourse, paper prepared for the WIPO, Geneva, switzerland, December 1998, p. 8.

[57] A ce sujet voir S. YOMBATINA B., Ē Droit de lÕenvironnement ˆ lՎpreuve des reprŽsentations culturelles africaines. Une gestion ˆ rŽinventer ? Č, Revue de Droit Africain, op. cit., pp. 327-345.

[58] J. EKPERE, TRIPs, Biodiversity and Traditional knowledge : OUA Model Law on Community Rights, Discussion Paper presented at the ICTSD Multi-Stakeholder Dialogue on Trade, Environment and Sustainable Development,Libreville, Gabon, July 13-14, 2000, p. 3.

[59] LÕarticle 27.3 b dispose : ŅLes Membres pourront aussi exclure de systme de la brevetabilitŽ : Les vŽgŽtaux et les animaux autres que les micro-organismes, et les procŽdŽs essentiellement biologiques dÕobtention de vŽgŽtaux ou dÕanimaux, autres que les procŽdŽs non biologiques et micro biologiques. Toutefois, les Membres prŽvoiront la protection des variŽtŽs vŽgŽtales par des brevets, par un systme sui generis efficace ou par une combinaison des deux moyens. Č

[60] P. ROBERT, Le petit Robert : dictionnaire, Paris, 1990, p. 1882.

[61] Au 1er janvier 1996, La Convention UPOV est en vigueur dans 30 Etats. La plupart sont des PD.

[62] En juillet 1998, les chefs dÕEtats de lÕOUA ont approuvŽ la Loi modle et recommandŽ quÕelle devienne la base de toutes les lois nationales sur le sujet ˆ travers lÕAfrique. Depuis lors, des discussions se sont engagŽes dans les pays africains pour adapter la Loi modle dans les cadres nationaux. Des rŽunions de coordination rŽgionales et nationales ont lieu rŽgulirement et des consultations dÕexperts sont en cours afin dÕamŽliorer la proposition. En  septembre 2000, les ministres africains du commerce, rŽunis ˆ Caire, ont passŽ une rŽsolution insistant sur le besoin de continuer ˆ renforcer la prise de conscience sur la Loi modle et invitant lÕUPOV et lÕOMPI, entre autres, ˆ collaborer Ē ˆ lÕavancement de cette initiative Č.

[63] Selon la dŽclaration de lÕOUA/CRST accompagnant le projet de lŽgislation.

[64] LÕOrganisation Mondiale de la PropriŽtŽ intellectuelle (OMPI) et lÕUnion Internationale de la Protection des Obtentions VŽgŽtales (UPOV) ont ŽtŽ conviŽes ˆ cette rŽunion. Ce qui aurait dž tre un Žchange de vue sans consŽquence sÕest transformŽ en une tentative non dissimulŽe de subvertir lÕensemble du processus de lÕOUA pour les intŽrts de lÕindustrie.

[65] M. HUFTY, La gouvernance internationale de la biodiversitŽ, Etudes internationales, vol. XXXII, n” 1. mars 2001, p. 18