EUROPEAN ACADEMY OF LEGAL THEORY

ACADEMIE EUROPEENNE DE THEORIE DU DROIT

EUROPESE AKADEMIE VOOR RECHTSTHEORIE

 

FACULTES UNIVERSITAIRES    KATHOLIEKE UNIVERSITEIT

 

SAINT-LOUIS-BRUXELLES                                        BRUSSEL

 

 

 

Droit de l’environnement à l’épreuve des représentations culturelles africaines : La nécessité d’une approche dialectique et plus responsable.

 

 

 

Mémoire présenté

en vue de l’obtention du Mastère (D.E.A) en Théorie du Droit

 
Par :

 

Monsieur SITACK YOMBATINA Béni

 

 

Sous la direction de :

 

M. le Prof. Dr. François OST.

 

 

 

 

 

 

Bruxelles, Septembre 2000

 

 

DEDICACE

 

 

A mes grands-parents, Koumatoloum et Madjimale qui m’ont appris au village à aimer la nature.

A tous ceux et celles qui souffrent en Afrique, et, dans le reste du monde des méfaits de la dégradation de l’environnement.

 

ii

REMERCIEMENTS

Le présent travail met un terme – du moins provisoire – au cheminement intellectuel effectué lors d’un séjour bruxellois stimulant, fructueux et riche en découvertes.

Ce séjour n’aurait jamais été possible sans le soutien financier de l’Académie Européenne de Théorie du Droit de Bruxelles, que nous remercions très chaleureusement.

Au cours de cette étude, les conseils, les avis et les observations d’un groupe de professeurs avertis de diverses parties du monde nous ont été particulièrement précieux. Qu’ils en soient vivement remerciés.

En particulier :

 

1 – A Paris .

Nous remercions ici le professeur Etienne Leroy, Directeur du Laboratoire d’Anthropologie Juridique de Paris1 (LAJP) et du D.E.A., des Etudes Africaines Interdisciplinaire à l’Université de Paris1 Panthéon-Sorbonne, Alain Rochegude, Consultant en Aménagement institutionnel et professeur associé à l’Université de Paris1, Camille Kuyu Mwissa, Professeur à l’Université de Paris1, Chercheur au LAJP et Directeur de l’Académie Africaine de Théorie du Droit, Ibra ciré N’DIAYE, Chargé d’enseignement et Chercheur au LAJP, Cathérine Choquet, Secrétaire Générale du GEMDEV à l’Université de Paris1.

Tous ont été pour nous des sources inestimables d’informations, d’idées, de jugements critiques et de conseils pendant notre stage d’un mois au Laboratoire d’Anthropologie Juridique de Paris1.

Nous voudrions également remercier, Monsieur Jean Tounkara et Madame Marina Krivitzky, respectivement responsable du Fonds Africaniste, la Bibliothèque du Centre de Recherche Africain (CRA) de l’Université Paris1 et responsable de la Bibliothèque d’Etudes Doctorales Juridiques de la Sorbonne à Paris1, qui nous ont procuré avec la plus grande compétence des documents difficiles à trouver, et les secrétaires des Etudes Africaines, Louise Villaréal et Danièle Bobinski, LAJP-université Paris1, pour leur accueil et hospitalité, on ne peut plus africaines.

 

2 – A Bruxelles.

Nous tenons à remercier les Professeurs Mark Van Hoecke, Serge Gutwirth, Petev V., Marie-Claire Foblets, dont les riches enseignements, les suggestions et les judicieuses réflexions sur le droit de l’environnement nous ont été utilement précieux.

Ils ne sauraient bien sûr être tenus pour responsables de la teneur de la présente étude.

Nos remerciements vont aussi à l’endroit des responsables des Bibliothèques des Facultés Universitaires Saint-Louis (FUSL) et de la Katholieke Universiteit Brussel (KUB).

Nous sommes également reconnaissant d’une part, à Mesdames Bayet et De Witte pour l’encadrement maternel dont elles nous ont comblé, d’autre part, au Criminologue Yves Cartuyvels dont la générosité et l’amitié ont été pour nous une source d’encouragement extraordinaire.

En tous cas, merci pour l’ordinateur mis à notre disposition pour la saisie de ce Mémoire.

Que nos camarades, notamment Julen Extabe, Monica Lopez, Céline Amar Vaidas V., Emmanuel Babissagana trouvent également dans ces lignes l’expression de notre sincère reconnaissance pour les échanges fructueux que nous avons eus au cours de l’année.

A tous ceux qui voudront bien lire ce travail, faire des amendements et formuler d’autres souhaits pour une réflexion plus approfondie, nous disons merci.

Enfin, pour terminer, nous ne saurions assez souligner à quel point la curiosité et l’honnêteté intellectuelles de Monsieur le Professeur François Ost, Directeur de l’Académie Européenne de Théorie du Droit, tant dans les cours dispensés que dans les conseils prodigués ont suscité en nous vocation, respect et admiration pour cet homme.

Notre dette à  son égard va bien au-delà du présent travail qu’il a, malgré ses nombreuses occupations, bien voulu diriger.

Nous lui devons une gratitude particulière et un remerciement spécial.

A toutes et à tous, merci.

Iii


 

SOMMAIRE

 

LISTE DES ACRONYMES……………………………………………………..iv

INTRODUCTION GENERALE…………………………………………………1

 

PREMIERE PARTIE : DES FONDEMENTS ET SOURCES DU DROIT DE L’ENVIRONNEMENT……………………………………………………………11

 

Chapitre premier : Des fondements scientifiques du droit de l’environnement…………………………………………………………………..13

Section I : Des rapports scientifiques de l’homme et de la nature………… 14

Section II : Des rapports juridiques de l’homme et de la nature……………..20

Section III : De la contribution africaine dans la formation du droit de l’environnement : entre l’espoir et la déception ……………………………….26

 Chapitre deuxième : Des sources générales du droit de l’environnement………………………………………………………………….42

Section I : Des sources internationales et communautaires du droit de l’environnement……………………………………………………………………43

Section II : Des sources du droit de l’environnement en Afrique…………….50

 

DEUXIEME PARTIE : POUR UN DROIT DE L’ENVIRONNEMENT PLUS RESPONSABLE , PLUS EFFICACE ET PLUS EFFECTIF EN AFRIQUE…57

 

Chapitre premier : La nécessité d’une réconciliation entre l’environnement et le développement.Condition sine qua non d’un développement « durable » pour les « générations futures »……………………………………………………………………………59

Section I : Notions et concepts en conflits et en débats………………………60

Section II : L’environnement doit s’allier le développement, lequel doit « être durable »……………………………………………………………………………69

Chapitre deuxième : La nécessité d’une réflexion théorique et plus constructive du droit de l’environnement en Afrique……………………………………………………………………………..77

Section I : Le droit de l’environnement : vers de nouveaux fondements scientifiques ? …………………………………………………………………….79

Section II : L’homme et la nature : une gestion à réinventer ?………………89

 

CONCLUSION GENERALE…………………………………………………….98

BIBLIOGRAPHIE SELECTIONNEE…………………………………………..102

TABLE DES MATIERES………………………………………………………..107

 

 

 

iv

LISTE DES ACRONYMES

 

AFDI : Annuaire Français de Droit International.

AFP : Agence Française de Presse.

ATP : Agence Tchadienne de Presse.

BAD : Banque Africaine de Développement.

CCE : Commission des Communautés Européennes.

CEA : Commission Économique des Nations-Unies pour l'Afrique.

CIJ : Cour Internationale de Justice.

CILSS : Comité Inter-États de Lutte contre la Sécheresse au Sahel.

CMED : Commission Mondiale sur l'Environnement et le Développement.

CNUED:Conférence des Nations-Unies pour l'Environnement et le Développement.

CRA : Centre de Recherche Africaine

DEA : Diplôme d’Etude Approfondie

DIE : Droit International de l'Environnement.

DIP : Droit International Public.

FME : Fonds Mondial pour l'Environnement.

FMI : Fonds Monétaire International.

FUSL : Facultés Universitaires Saint-Louis, Bruxelles.

GEMDEV : Groupement Economie Mondiale, Tiers-monde, Développement

KUB : Katholieke Universiteit Brussel.

LAJP : Laboratoire d'Anthropologie Juridique de Paris1.

NOEI : Nouvel Ordre Économique International.

OCDE : Organisation de Coopération pour le Développement Économique.

ONG : Organisation Non Gouvernementale.

ONU : Organisation des Nations-Unies.

OUA : Organisation de l'Unité Africaine.

PCH : Patrimoine Commun de l'Humanité.

PIB : Produit Intérieur Brut.

PNUE : Programme des Nations-Unies pour l'Environnement.

PUF : Presses Universitaires de France.

SADCC : Conférence de Coordination du Développement de l'Afrique Australe.

UICN : Union pour la Conservation de la Nature.

VUB : Vrieje Universiteit Brussel.

 

 

 

INTRODUCTION GÉNÉRALE

 

Notre planète, ou l'écosphère[1], de par ses composantes, constitue un système complexe et dynamique. Certaines activités humaines, que ce soit au niveau de la production ou de la consommation, peuvent déstabiliser ce système.

Au cours des dernières décennies, la croissance économique et démographique exponentielle, les sources de pollution, de plus en plus nombreuses et dangereuses, ainsi que l'exploitation excessive des ressources naturelles ont, en effet, accru, et, de façon alarmante, les pressions sur notre planète, allant jusqu'à potentiellement menacer la survie même de l'espèce humaine.

Il y a peu d'années encore, notre planète - ou pour le dire autrement - l'environnement apparaissait comme étant une idée à la mode[2], un luxe pour pays riches, un mythe[3], une nouvelle terreur de l'an 1000 liée à l'imprévisibilité des catastrophes écologiques, un cri d'alarme des économistes et philosophes sur les limites de la croissance, bref, une utopie contradictoire avec le mythe de la croissance.

Aujourd'hui éclate au grand jour ce qui résultait depuis longtemps des réflexions des naturalistes et écologues, à savoir que l'homme comme espèce vivante fait partie d'un système complexe de relations et d'interrelations avec son milieu naturel[4].

Il en résulte que toute action humaine a des effets directs ou indirects insoupçonnés.

De ce fait, l'environnement, ensemble des facteurs qui influent sur le milieu dans lequel l'homme vit, est devenu une préoccupation majeure non seulement des pays riches mais aussi des pays pauvres.

La protection de l'environnement a fini par s'imposer à la conscience universelle comme une nécessité.

Dès lors : la problématique de la gestion environnementale constitue un défi planétaire, auquel l'humanité est confrontée à plusieurs niveaux et dans les domaines différents.

Elle se trouve à toutes les échelles, du niveau local au niveau mondial, où elle se traduit en termes de conservation.

Objet de préoccupations pressantes, enjeu de grande importance, notamment pour les populations en situation de crise conjoncturelle, environnementale et socio-économique, il convient d'y répondre en apportant des éléments essentiels pour l'effectivité de solutions urgentes.

Ainsi, l'environnement, cette nature transformée par la modernité occidentale[5], se trouve à la confluence des jugements de valeurs et de vérités.

Au niveau de l'Afrique, la prise de conscience des préoccupations environnementales est perceptible dès l'accession de la plupart des États du continent à l'indépendance.

Elle se manifeste soit par l'adhésion des États en question à des conventions antérieures en matière de protection de l'environnement, soit par l'adoption de nouvelles conventions en la matière dont la plus importante alors est incontestablement la convention d'Alger de 1968 sur la conservation de la nature et des ressources naturelles. Cette convention est aussi un témoignage de l'intérêt que l'Organisation de l'Unité Africaine (O.U.A.) porte, dès cette époque, à la protection de la nature.

Le mouvement écologique touche cependant, l'Afrique bien tardivement, après la conférence de Stockholm de 1972 et surtout à l'approche de la conférence de RIO de 1992.

Mais par-dessus tout, c'est la découverte d'un trafic de déchets dangereux, entre pays industrialisés et certains pays africains, en 1998, qui aura véritablement déclenché l'alerte écologique en Afrique.

 Depuis lors, le continent est entré de plain-pied dans la dynamique environnementaliste qui véhicule un nouvel art de vivre à travers les notions de gestion écologiquement rationnelle et de développement durable[6].

Notions qui ont bien du mal à être intégrées et appliquées, eu égard, d'une part, aux représentations culturelles africaines de l'environnement, et, d'autre part à la nature même complexe du droit de l'environnement.

En Afrique, les représentations locales de l'environnement intègrent outre les problèmes juridiques, des problèmes humains, religieux et socio-anthropologiques qui rendent les distinctions occidentales entre <<nature>> et <<culture>>, <<objet>> et <<sujet>> inappropriées pour comprendre les conceptions africaines des relations entre les hommes et l'environnement.

Ainsi, l'idée de l'environnement renvoie à un ensemble de représentations inhérentes au système de gestion collective de la nature.

La présente réflexion se justifie d'une part, par le constat d'échec du droit de l'environnement, en dépit du nombre impressionnant des traités internationaux[7] relatif à cette nouvelle branche du droit international, d'autre part, par l'impératif catégorique de mettre en place une nouvelle approche dialectique et plus responsable du droit de l'environnement.

Dès lors, l'érection d'un nouveau contrat naturel (pas celui de Serres) peut constituer un objectif d'un nouveau droit.

Le point de départ de cette nouvelle construction peut parfaitement être en un sens l'homme lui-même, à condition de répondre à un certain nombre de questions qui nous viennent à l'instant à l'esprit.

À quoi sert le droit de l'environnement ? Ces quelques neuf cents instruments ont-ils contribué à améliorer l'état de notre biosphère ? Dans quelle mesure ces conventions sont-elles réellement appliquées ? N'est-ce pas surtout le nombre des catastrophes écologiques qui caractérise la situation actuelle ?.

 Le développement rapide des instruments du droit international de l'environnement au cours d'une période relativement brève - une trentaine d'année à peine - ne pose t-elle pas la question de leur efficacité ?

Il est certain que ces questions peuvent être posées sinon légitimement, du moins sous le signe d'un certain réalisme. Toutefois, le réalisme apparent ne signifie pas véritablement la prise en compte des réalités. Or, les réalités, en matière du droit de l'environnement sont de différents ordres. Il faut bien en tenir compte.

On l'aura compris : le nouveau contrat naturel impose la mise en place d'un droit de l'environnement respectueux de la terre de nos ancêtres, de la gestion rationnelle et responsable de notre environnement et soucieux des générations futures.

 La leçon de J. Dorst est significative à plus d'un titre : << le vieux pacte qui unissait l'homme à la nature a été brisé, car l'homme croit maintenant posséder suffisamment de puissance pour s'affranchir du vaste complexe biologique qui fut le sien depuis qu'il est sur terre.>>[8]On connaît la suite de l'histoire, du moins ce que la science a fait de la nature.

Il est peut être temps, face à l'incertitude scientifique, d'élaborer une éthique environnementale qui pourrait être du type : << si l'on ne voit pas où l'on va, mieux vaut questionner notre passé, pour savoir d'où l'on vient.>>

L'objet de notre étude ici n'est pas de faire l'histoire du droit de l'environnement, moins encore de présenter les institutions politiques, administratives ou institutionnelles au service de ce droit (une littérature abondante existe sur la question). Le sujet de notre Mémoire, qui avouons-le, est une préoccupation constante, de longue date, porte sur : Le Droit de l'environnement à l'épreuve des représentations culturelles africaines. La nécessité d'une approche dialectique et plus responsable.

Aussi, avant de revenir sur le sujet, il convient tout d'abord de tenter une approche de la matière.

 

I - Des difficultés d'une définition de la matière

Que l'environnement soit << à toutes les sauces >> explique que le droit de l'environnement ait acquis - au moins théoriquement - droit de cité. Mais de même que le mot << environnement >> peut faire l'objet d'acceptions diverses, les perceptions du droit de l'environnement sont multiples. L'étude du droit de l'environnement suppose que l'on se détermine préalablement sur une définition de ce concept sur laquelle bien des querelles étymologiques s'exercent.

 

A - Notion d'environnement

Importé d'Amérique dans les années soixante, l'environnement suscite un engouement trop rapide.

Rebattu par les médias, utilisé à tout propos, hors de propos, il souffre de cet excès. Le mot existe mais il ne correspond pas à un concept précis. L'environnement se situe entre une acception trop étroite : la protection de la nature et une approche trop globale attirant à elle l'ensemble des problèmes touchant à la qualité de la vie, au << bonheur >> des êtres dont déjà Saint Augustin avait dénombré deux cent vingt-huit définitions[9]. Le dictionnaire Larousse définit l'environnement comme << l'ensemble des éléments naturels ou artificiels qui conditionnent la vie de l'homme >>[10].

Il a fini par s'orienter progressivement vers une acception double : <<le cadre de vie de l'individu >>[11] ou << l'ensemble des conditions... susceptibles d'agir sur les organismes vivants et les activités humaines >>[12]

Toutefois, le juriste ne peut se contenter ni de ces imprécisions terminologiques - l'un de ses meilleurs spécialistes parle de "notion caméléon"[13] - ni de l'approche éminemment respectable des politistes ou des sociologues.

Pour ces derniers, en effet, l'objet "environnement" n'existe pas en lui-même mais n'est qu'une donnée politique ou sociale de nature conjoncturelle qui se construit à partir des objectifs déclarés par les pouvoirs publics et par les partis politiques[14],ou à partir des perceptions qui se dégagent sur le terrain chez les acteurs sociaux[15].

Pour le Conseil de l'Europe, l'environnement comprend :

- les ressources naturelles abiotiques et biotiques telles que l'air, l'eau, le sol, la faune et la flore et l'interaction entre les mêmes facteurs,

- les biens qui composent l'héritage culturel, et

- les aspects caractéristiques du paysage.

On le voit, toutes les définitions, si elles ont le mérite d'être présentées, ne prennent pas en compte, du moins pas suffisamment, les représentations et conceptions africaines de l'environnement.

Toutes se fondent sur une approche scientifique d'une part, et l'approche utilitariste d'autre part.

Aussi, proposerions-nous une définition de l'environnement dans la vision africaine comme suit : on entend par environnement, << l'ensemble des éléments et forces visibles (ressources naturelles, abiotiques et biotiques dont l'africain tire sa subsistance) et invisibles (l'ensemble des relations qu'il entretient avec la nature) qui conditionnent la vie de l'homme>>.

D'une part, cette définition proposée prend en compte les composantes traditionnelles de l'environnement, à savoir la nature (constituée des espèces animales et végétales) et les ressources naturelles (composée de l'eau, l'air, du sol, du sous-sol ...); d'autre part, elle intègre une dimension sacrée et communautaire constituant en même temps le lien et la limite dans l'action et la relation de l'homme à sa nature.

Ainsi, si le terme <<environnement>> ne fait pas encore l'objet d'une définition générale universellement admise en droit positif[16], le droit de l'environnement, lui, ne peut se définir que d'une manière fonctionnelle, par sa finalité qui est la protection de l'environnement.[17]

 

B - Le Droit de l'environnement

On pourrait définir le droit de l'environnement suivant un critère finaliste ou dans une perspective téléologique comme l'ont fait divers auteurs[18]; il s'entendrait alors de l'ensemble des règles juridiques tendues vers la suppression ou - à tout le moins -, la limitation des atteintes à l'environnement.

Cette définition par les fins ne renseigne cependant pas suffisamment sur la substance même du droit de l'environnement ni sur son champ d'application. Seule une définition matérielle permet d'y parvenir et de situer le droit de l'environnement par rapport aux droits voisins.

Les développements récents de la matière n'ont cessé d'élargir son champ d'application et le <<caractère horizontal et globalisant de l'environnement >>19 fait pénétrer cette matière dans presque toutes les branches du droit.

Il y aurait ainsi un noyau central constitué par le droit de la nature, le droit minier, le droit de l'aménagement du territoire, le droit applicable aux espaces fragiles (littoral, montagnes, zones humides); et enfin un second cercle constitué de droits plus éloignés du noyau central mais pouvant <<à l'occasion être affectés par le droit de l'environnement>> notamment le droit du travail, le droit de la consommation, le droit de l'énergie, le droit économique, le droit des sports et des loisirs, etc..

Ayant déjà défini précédemment le terme environnement, et au regard de ce qui constitue la subsistance du droit de l'environnement, on peut définir celui-ci comme étant l'ensemble des règles et techniques juridiques ainsi que des institutions relatives à la protection du milieu et à la conservation de la nature et des ressources naturelles.

Le droit de l'environnement poursuit principalement deux objectifs : le maintien de la diversité biologique et la promotion d'un développement durable.

L'enjeu immédiat de la poursuite de ces objectifs est évident : s'il s'agit d'éviter ou à tout le moins de freiner l'irréversible détérioration des ressources naturelles et des rapports humains, il s'agit surtout dans l'immédiat de tenter que les choses ne soient pas aggravées par la perpétuation d'une attitude de démiurges.

 En cela, le droit de l'environnement s'il veut être efficace et effectif doit avoir comme premier enjeu la régulation des excès potentiels de la science.

Ceci explique en partie notre hypothèse et approche méthodologiques dont il convient à présent de connaître.

 

II - Problématique et Hypothèse

Cette réflexion aborde la crise environnementale sous l'angle juridique, socio-anthropologique et éthique. Il pose donc, inévitablement, la question axiologique :<<Que devons-nous faire>> face à la crise écologique ? à la crise de notre représentation à la nature ? crise de notre rapport à la nature ?.

L'étendue du désastre est telle qu'il faut bien en revenir aux bases : l'écologie est la science des rapports de l'homme avec son milieu, écrit James Fairhead [19].

La prise de conscience de la nécessité de protéger l'environnement incite à porter une attention particulière aux représentations que se font les habitants eux-mêmes de relations entre les hommes et l'environnement.

Notre conviction est en effet que, tant que n'aura pas été repensé notre rapport à la nature, tant que n'aura pas été pris en compte la dimension sacrée et communautaire de l'environnement, nos efforts seront vains, comme en témoigne d'ailleurs la très relative effectivité du droit de l'environnement et la très modeste efficacité des politiques publiques africaines en ce domaine.

 La thèse fondamentale de cette étude est que le jeune droit de l'environnement n'a pas pris suffisamment en compte les spécificités locales de l'environnement.

 

III - Approche Méthodologique

Assurément, une théorie du droit de l'environnement reste à écrire : il faudrait, en effet, à la fois repenser les concepts et catégories juridiques classiques en fonction des préoccupations environnementalistes et forger des concepts et catégories juridiques nouveaux adaptés à la matière.

Cela devrait se faire dans le cadre d'un "paradigme dynamique et démocratique". Celui-ci suppose une rupture d'avec le "paradigme mécanique traditionnel" et implique une conception globale de la biosphère considéré comme un Tout unique (même si les représentations, elles, diffèrent d'une culture à l'autre).

Cette "découverte" de l'unité écosystémique de la planète implique une vision à la fois contextuelle et systémique des problèmes environnementaux, une conception évolutive et dynamique des processus écologiques qui impose en définitive une approche prospective prenant en compte le futur dans le présent.

Elle amène l'humanité à découvrir le lien indissoluble qui existe entre l'environnement et le développement, l'interpelle sur l'immense défi que lui lance la pauvreté depuis des décennies, et impose de trouver des réponses juridiques à des questions qui à première vue ne le sont pas.

Le nouveau droit de l'environnement doit cerner et meubler des notions aussi fuyantes et complexes que celles de <<développement durable>>, de <<patrimoine commun de l'humanité>>, de <<générations futures>>, de <<souveraineté étatique>>, de <<propriété privée>> etc.

On le voit bien : seule une approche dialectique définissant les relations entre l'homme et sa nature c'est-à-dire, ce que l'homme fait de sa nature et ce que la nature attend de l'homme peut permettre de faire un saut qualitatif et ainsi de prendre l'exacte mesure de la double réduction, antagonique : celle qui fait de la nature un objet et celle qui, par un simple changement de signe, la transforme en sujet.

Enfin, avant de présenter le plan de notre étude, il convient de souligner que, par sa nature, notre sujet est abordé à la fois dans ses aspects de droit interne africain et dans ses aspects de droit international et de droit comparé.

L'étendue de ce champ d'étude n'en constitue pas moins une difficulté de taille. Une telle ambition est cependant justifiée par la nécessité d'avoir une vue globale des problèmes écologiques et de la situation juridique actuelle à l'échelle continentale.

Reste néanmoins que la situation du droit de l'environnement dans les "Afriques" ne peut être étudiée avec toute la profondeur voulue.

C'est pourquoi, cette étude se veut avant tout un début de recherche même si l'approche est pluridisciplinaire et s'inscrit dans la logique de notre formation en théorie du droit.

 

IV - Plan de l'étude

Située au carrefour d'une conception occidentale et africaine de l'environnement, notre réflexion sur le droit de l'environnement, qui tente de surmonter les dualismes classiques se place dans une relation transformative, un jeu permanent d'interactions qui contribuent à redéfinir les termes en présence.

Aussi convient-il de structurer notre travail de manière à embrasser autant de facteurs et de paramètres que possible.

Notre plan de rédaction est organisé autour de deux parties .

 A travers la première partie , nous tentons une entrée en matière par une approche des fondements et des sources du droit de l'environnement.

Ainsi, nous passons successivement en revue les fondements scientifiques du droit de l'environnement (Chapitre premier) et les sources du droit de l'environnement (chapitre deuxième).

La deuxième partie pose quelques jalons pour un droit de l'environnement plus responsable, plus effectif et plus efficace en Afrique.

Celui-ci passe aussi bien par la nécessité d'une réconciliation entre l'environnement et le développement. Condition sine qua non d'un "développement durable" pour les "générations futures" (Chapitre premier) que par la nécessité d'une réflexion théorique et constructive d'un droit de l'environnement plus effectif en Afrique (Chapitre deuxième).

 

PREMIERE PARTIE : DES FONDEMENTS ET SOURCES DU DROIT DE L'ENVIRONNEMENT

L'étude du droit de l'environnement soulève un certain nombre de problèmes de caractère général, ayant trait à la fois aux fondements mêmes de ce droit, aux sources et processus de fabrication de ses normes, de ses principes ainsi qu'à ses aspects transversaux et/ ou transectoriels.

 De tels problèmes touchant d'une part, à différents aspects du droit de l'environnement, déjà complexe, ne sauraient être abordés de façon fragmentaire sans porter préjudice à leur cohérence globale; on en aurait, en tout état de cause, qu'une vue partielle[20].

D'autre part, situé au carrefour du droit international, du droit communautaire et des droits nationaux, le droit de l'environnement entretient aussi des relations avec la science.

Cette première partie a un double objectif : d'abord, tenter de comprendre le droit de l'environnement par une approche des fondements scientifiques (Chapitre premier), ensuite, nous lancer autant que faire se peut, à la conquête des sources générales de ce droit (Chapitre deuxième).

 Ce travail de reconstruction préalable devrait nous amener à interroger le "présent" du droit de l'environnement.

Est-il un droit des textes, des concepts ou un droit au service de l'environnement et du développement ?

En d'autres termes, comment rendre ce droit efficace et effectif, notamment en Afrique ?

 

CHAPITRE PREMIER : DES FONDEMENTS SCIENTIFIQUES DU DROIT DE L'ENVIRONNEMENT

La liaison entre la science et le droit autour du paradigme environnementale postule l'existence d'une réflexion critique sur le droit de l'environnement, postulat de la remise en cause, justement de la science et du droit[21].

La question est essentielle : pourquoi plus que tout autre objet l'environnement repose t-il sans cesse le problème des fondements ?

S'agit-il d'édicter des normes similaires aux principes valides depuis que le droit est droit ou d'instaurer une spécificité juridique autour de deux règnes naturellement distinctes, l'humain et le non-humain ?

Quel peut être le fondement des fondements du droit de l'environnement ?

Considéré sous l'angle africain, le droit de l'environnement se trouve confronté aux représentations culturelles que l'homme africain a de l'environnement d'une part, et, d'autre part à son articulation en fonctions des réalités écologiques propre au continent.

Pour notre part, il s'agira ici de réfléchir sur les rapports science et droit de manière historique et dialectique afin d'appréhender ce que Michel Serres appelle l'épistémodicée[22] et de voir en quoi, cette singularité occidentale est différentes des spécificités africaines.

Aussi, avant de revenir sur l'apport de l'Afrique dans la formation et l'émergence du droit de l'environnement (Section 3), convient-il d'examiner, sans aucune prétention d'exhaustivité, cette question de fondements tant au regard des rapports scientifiques entre l'homme et la nature (Section 1) qu'au regard des rapports juridiques (Section 2).

 

SECTION I : DES RAPPORTS SCIENTIFIQUES DE L'HOMME ET DE LA NATURE

Le droit de l'environnement - ou pour le dire  simplement - le droit de la protection de la nature est l'expression d'un constat scientifique - la dégradation des milieux et la disparition des espèces - ainsi que la mise en oeuvre des moyens d'y remédier.

Ardente obligation, la protection de la nature ne saurait être restreinte à une mission de conservation sauvage. On a assisté peu à peu au passage d'une logique de gestion utilitaire des ressources naturelles à la prise en compte de la biodiversité, en tant que telle, dans la perspective d'un développement durable qui permette le renouvellement harmonieux des ressources.

Mais pour en arriver là, il y a eu une bifurcation de l'histoire : ou la mort ou la symbiose. Or cette conclusion philosophique, jadis connue et pratiquée par les cultures agraires et maritimes, resterait lettre morte si elle ne s'inscrivait pas dans un droit[23].

L'assertion de Michel Serres, si elle a le mérite de stigmatiser radicalement les présupposés épistémologiques du droit de l'environnement, interroge, en une problématique fertile, l'enracinement de cette branche de droit spécifique au sein de l'ordre juridique.

 

§ I - Au commencement était les dieux ....

Il faut scruter un peu l'histoire. Et comme le dit superbement un proverbe bien connu du sud du Tchad : <<pour mieux avancer, il faut au préalable avoir mesuré le chemin parcouru>>.

On ne souille pas ce qui est sacré[24].

Par les croyances porteuses de respect, les religions primitives exprimaient la solidarité de l'homme avec la nature. Les rites sacralisaient la prudence et l'exploitation mesurée. La source et l'arbre avaient une âme.

Les Égyptiens vénèrent les animaux. Et on chantait jadis en Russie pour calmer les génies des rivières[25].

On le voit, les rapports de l'homme à son environnement étaient fondées sur la solidarité, la prudence et la sacralité.

Cette vision était partagée, du moins en partie, et, à des exceptions près, par la culture occidentale, la culture indienne, la culture chinoise et la culture africaine.

Ainsi, à la différence de l'homme moderne qui, délivré de toute attache cosmologique, transforme sans frein le monde naturel par sa technologie, l'homme primitif, quant à lui, ne se risque à perturber l'ordre du monde qu'au prix d'infinies précautions, conscient qu'il est de son appartenance à un univers cosmique au sein duquel nature et société, groupe et individu, chose et personne, ne se distinguent guère[26].

En Afrique, (car c'est bien de l'Afrique qu'il s'agit ici) les rapports de l'homme à la nature, en d'autres termes, de l'agriculteur ou de l'éleveur africain à son environnement est un rapport fait de respect, de protection et de dialogue permanent et renouvelé.

 L'homme africain voit son environnement physique comme constitué de différents éléments mus et vivifiés par les forces divines et les esprits sont considérés comme les véritables propriétaires de la nature et de ses composantes.

Parlant de ces relations relativement amicales, Jean Pierre Magnant écrit : <<A côté des forces qui animent la nature et garantissent le bon fonctionnement de cycles saisonniers, d'autres esprits, sortes d'anges gardiens, protègent les lignages et leurs membres, tandis que d'autres esprits encore assurent une protection efficace contre telle ou telle menace>>[27].

Les anthropologues évoquent les innombrables rites par lesquels les sociétés traditionnelles entendent se concilier les éléments naturels ou racheter les prélèvements opérés : pièces de monnaies jetées dans les cours d'eau avant de les traverser, autorisations sollicitées des esprits de la forêt avant de procéder aux brûlis ....[28].

Mais est-ce pour autant dire que la nature est-elle encore <<enchantée>> ?

 Bien sûr que non, surtout avec l'arrivée de Descartes et des autres...

 

§ II - Puis Descartes est venu...

Avec Descartes, le monde se reconstruit autour de l'homme, qui pense - et la nature, qui ne pense pas, est reléguée au rang des accessoires - << Mundus est fabula.>> L'univers des choses, passif, ne vaut que par l'emprise qu'exerce sur lui l'animal pensant. Et l'humanisme de se doubler d'un corollaire pervers : l'anti-humanisme[29]. << L'homme doit se rendre maître et possesseur de la nature>>[30]. Ainsi s'amorce la lignée des philosophes qui ont façonné des nouveaux modes de pensée, Hegel, Bacon, Locke, Bentham.

Avec Descartes, naissait une science contemporaine conçue comme la science positiviste et inductiviste. Elle repose donc sur une rationalité et une objectivité. Elle devient une science prédictive, et entière expression de la raison. La science cartésienne se caractérise d'une part, par le rationalisme : la "foi" en la science (ses vertus, sa vérité, sa méthode) et, d'autre part, par le mécanisme (tout dans la nature est géométrie) contrairement au vitalisme hérité d'Aristote[31].

Cette philosophie mécaniste réduit ainsi la nature à une immense horloge : tout est loi de transmission et sciences des structures.

Dès lors, tout homme possède le droit de la raison et seule la méthode scientifique est susceptible d'aboutir à la connaissance vraie.

En somme, la science tente de <<rendre plus intelligible la complexité du monde>>[32] d'une façon <<élucidante, enrichissante, conquérante, triomphante>>[33] qui, inéluctablement, engendre certaines interrogations relatives à son statut suprême.

De ce fait, l'instrumentalisation de la connaissance ouvre la voie à la figure moderne de la science contemporaine. Celle-ci désigne alors une représentation déterminée de la nature qui s'est construite au cours d'un processus historique propre au monde occidental[34].

De cette philosophie, le livre II du code civil représente le reflet fidèle. Ce titre est consacré aux biens : le droit réel, rapport direct de l'homme et de la chose, exprime un rapport de soumission.

 L'ensemble du système est ordonné autour du droit de propriété. Or, le droit de propriété tel que le sacralise l'article 544 du code civil est le <<droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue>>.

 Ceci peut signifier que leur propriétaire peut non seulement s'en servir, non seulement en percevoir les fruits, légumes du jardin, loyers de l'immeuble, mais même en abuser.

On l'aura remarqué : le propriétaire peut d'une part, s'en priver, juridiquement, par don, vente ou legs mais aussi d'autre part, même physiquement, il a le droit de les détruire[35].

Conséquence : brûler, jeter, tuer en anéantissant sa chose, devient désormais possible pour quiconque, le propriétaire exerce sa maîtrise de la manière la plus absolue.

La question qui vient tout de suite à l'esprit est celle de savoir si notre histoire qui se voulait commune ne vient-elle pas de connaître une bifurcation ?

Il y a l'émergence d'un nouveau paradigme, c'est le moins que l'on puisse dire.

On comprendra très vite que le paradigme africain s'écarte sensiblement de celui que fournit l'Occident.

Et comme le dit à juste titre, le grand africaniste, Étienne Leroy, << la généralisation du droit de propriété privée se heurte à un certain nombre de problèmes. Le problème fondamental est que les sociétés africaines ne connaissent pas le droit de propriété privée de la terre.>>[36].

 Et donc ajoute t-il, <<toute réflexion qui aborde les rapports de l'homme à la terre en réfléchissant ces problèmes en fonction de notre définition du droit de propriété et de ses démembrements est vaine, parce que les Africains pensaient le rapport de l'homme à la terre en fonction d'autres paramètres que celui de la propriété foncière[37]>>.

Cette philosophie trouve un renfort de poids avec l'avènement de la société industrielle au cours des XIX et XX èmes siècles.

 A la soif de domination se joint alors la religion du profit.

Il était peut être temps de revenir à des meilleurs sentiments et de remettre les lunettes non pas  celles que nous proposent Galilée, moins encore celles de Copernic et de Bacon (celles de la technoscience) mais celles qui nous permettent de voir la nature comme du "donné" mais aussi du "construit".

Si la nature nous a été donnée, léguée : nous sommes alors des locataires et des gérants. Et comme tout bon locataire, nous devons protéger, nettoyer, garder notre nature, bref le construire pour les générations présentes et bien entendu, celles à venir. Il s'agit là en somme, d'une histoire, et un sens, tout aussi bien : une direction et une signification.

 

§ III - La prise de conscience universelle

La prise de conscience universelle de la protection de l'environnement s'est imposée comme une nécessité. En effet, l'altération des grands équilibres de la planète, l'érosion de la diversité génétique, la raréfaction ou la disparition des espèces vivantes, l'exploitation sans pause du minéral...[38] acculent l'homme à une prise de conscience réactive en vue d'une nouvelle problématisation de son rapport à la nature, en somme d'une approche fondamentale ouverte sur une perspective de mise en relation écosystémique entre le sujet et l'objet.

On a l'impression que l'homme vient de découvrir que les ressources n'étaient pas aussi illimitées qu'il pouvait le penser.

La conception suivant laquelle la puissance de la science et de la technique ne connaîtrait aucun frein, paraît soudain singulièrement naïve. Une très légère inquiétude trouble ses certitudes. Et beaucoup commencent à se demander si, à tant vouloir maîtriser, à se couper systématiquement de ses racines, la race humaine n'est pas en train de négliger une donnée vitale pour sa survie, qu'un obscur sens de la téléonomie la porte à prendre en compte.

 Dès lors on peut se demander : il avait conquit. Avait-il pour autant maîtriser ?.

D'autre part, n'est-il pas surprenant que le même sort soit réservé par principe à toutes les choses sans distinction ?

Il semble bien que certaines choses méritent plus. La terre pour commencer : <<Du fait de sa nature unique et du rôle crucial qu'elle joue dans l'établissement humain, elle ne peut être traitée comme un bien ordinaire, contrôlé par les individus et soumis aux pressions et aux échecs du marché>>[39]. Cette déclaration remémore la sagesse indienne perpétrée par les pionniers américains : << ils croyaient que la terre n'appartenaient pas aux hommes mais que les hommes appartenaient à la terre, et que la terre ne les laisserait vivre et se nourrir d'elle qu'autant qu'ils se comporteraient convenablement; et que s'ils se comportaient mal, elle les rejetteraient brutalement, comme un chien se secoue pour se débarrasser de ses puces>>[40]. L'image est belle, mais n'est-elle que cela ? Seulement voilà, l'on s'avise soudainement que la même croyance est répandue.     

D'abord, en Afrique, où un proverbe ivoirien rappelle que <<ce n'est pas l'homme qui est le maître de la terre, mais la terre qui est le maître de l'homme>>[41].

Ensuite, en Chine, la terre est tenue pour propriété des ancêtres.

Enfin, en Égypte, à Madagascar, pour celle des dieux[42].

De même, dans le Coran, suivant lequel l'homme, créature éphémère, simple passager sur terre, n'a pas les moyens de s'y affirmer comme propriétaire[43].

Et que dire de la tradition indienne pour qui la terre est le lien qui unit les générations : <<Nous n'avons hérité la terre de nos ancêtres : nous l'avons empruntée à nos enfants>>.

Par-delà la diversité des rites, ces croyances transmettent le même message : tout n'est pas permis à l'espèce humaine sur la terre. Ses droits n'y sont pas sans limites, ils s'accompagnent de devoirs.

On le voit clairement, l'humanité dans son ensemble est interpellée pour une seconde fois, dirons-nous.

La première fois fut à l'occasion du récit de Genèse[44] où Dieu confie à l'homme non seulement le dominium sur la création mais la mission de cultiver et de garder son environnement.

Les différents textes de la création traduisent le récit de l'alliance que Dieu passe, non seulement avec les hommes, mais avec la terre elle-même, avec tous les êtres vivants sur la terre et la nature. La nature désigne alors tout ce qui a existé, tout ce qui existe et tout ce qui existera[45].

La séparation absolue entre sujet et objet, ce que Bernard Latour[46] appelle le "grand partage" ou la "constitution moderne" entre l'homme et la nature va consacrer définitivement cette distanciation et ce, en dépit de l'émergence d'une nouvelle conception de la science, à la lumière du "pluralisme de vérité"[47]. Une conception qui devra modifier profondément l'attitude des philosophes, scientifiques, économistes, géographes, juristes et leur permettre de rechercher d'autres manières de concevoir les rapports de l'homme à la  nature.

 

SECTION II : DES RAPPORTS JURIDIQUES DE L'HOMME ET DE LA NATURE

 

 Les rapports juridiques entre le sujet et l'objet mettent en lumière la nature nécessairement pluraliste du droit. Non pas que les textes manquent. Ceux-ci revêtent les formes les plus diverses : espaces réservés, autorisations, interdits de tous ordres, règles d'aménagement du territoire, quotas de capture et seuils d'émission tolérés.

Le droit est alors mis à contribution dans sa dimension normative et régulatrice des rapports sociaux. Or, si pour Michel Virally <<on n'échappe pas au droit>>[48], il n'en demeure pas moins qu'il ne faut pas se lasser de dire que <<le droit n'est pas la chose des juristes>>[49]. Le droit procède du social.

Si le droit de l'environnement s'insère dans les rapports juridiques de l'homme et de la nature, ceux-ci tiennent, d'une part, dans un ordre juridique positif(§I) et, d'autre part, dans un ordre juridique naturel (§II). Ce faisant, le droit de l'environnement se positionne comme médiation juridique du pouvoir de l'homme sur la nature (§III).

 

§ I - De la nature juridique et pluraliste du droit

La vie juridique ne se réduit pas à ce que le droit constate. Le droit est lui-même issu des réalités locales et de la pratique du quotidien. la distinction entre les sources formelles et les sources réelles du droit est clairement énoncée en tant que procédés de constatation du droit, alors que l'essence même du droit résulte du produit de sources réelles[50], règles qui puisent leur existence dans des <<foyers>> pluriels[51].

En Afrique, le droit est considéré comme un instrument, parmi d'autres, destiné à faire violence aux Africains, à leur imposer des attitudes nouvelles, de nouvelles manières de faire, de vivre et de penser[52].

La Conférence de Londres (décembre 1959 - janvier 1960) sur l'avenir du Droit en Afrique, concluait que << les questions de relations familiales, de mariages, de divorce, de testaments et de succession sont si essentiellement personnelles qu'elles doivent pour une grande part continuer d'être régies par le droit coutumier de la communauté à laquelle l'intéressé appartient>>[53].

Dans le même ordre idées, le Ministre Malgache de la justice déclarait en 1962 : <<il n'est pas dans notre intention de substituer à des règles séculaires un système juridique nouveau, révolutionnaire, heurtant les populations et qui n'aurait aucune chance d'être appliqué>>[54]. La plupart des Africains, dit-il, sont donc conscient de cette vérité éternelle exprimée par le Doyen Ripert : <<pour qu'une loi vive, il faut qu'elle soit reine dans le milieu juridique>>[55]. Or, au stade actuel de l'évolution, les milieux africains résistent aux innovations trop brutales.

Voilà qui milite en faveur du respect des droits traditionnels.

Un tel discours, il est évident, reste d'actualité comme en témoignent aujourd'hui encore, l'ineffectivité et l'inefficacité des systèmes juridiques en Afrique.

On l'aura compris : le droit ne se conçoit pas, dès lors, comme un <<bloc d'une seule coulée, à l'intérieur duquel ne peut se discerner aucun pluralisme>>[56] mais comme un ordre qui se nourrit à partir d'éléments intérieurs et  extérieurs.

C'est à la lumière de ces données extérieures et intérieures qu'il est possible - nous semble t-il - d'élaborer un droit de l'environnement qui soit efficace et pratique.

On le voit : <<indéfinissable mais présent>>[57], le droit est règne de l'écart et du lien. Il pénètre tous les domaines de la vie et de l'activité humaine.

 

§ II - De la production normative d'une réalité en dehors de l'ordre naturel

L'on peut résumer l'évolution des rapports entre l'homme et la nature en trois moments forts :

D'abord, la naissance géométrique du droit naturel classique dans la nature des choses, en une bifurcation de la physis et du nomos, qui sous-entend que << la nature est essentiellement cachée par des décisions souveraines>>[58].

Ensuite, l'apparition d'un droit naturel <<conventionné>>, c'est-à-dire dont la nature de l'homme constitue la référence. Influence du mécanisme, rationalisation cartésienne après une sécurisation progressive, le droit suit l'évolution historique et épistémologique de la science. L'appel au droit de la nature change de perspective s'écartant de l'idéalisme métaphysique antique[59].

Enfin, le positivisme juridique, s'y oppose, en une querelle éternelle aux deux premières conceptions. Le positivisme juridique est une conception a-référentielle du droit. Il conçoit le droit tel qu'il est posé, d'une part, en dehors de tout dogme, d'autre part, à travers l'émergence d'une recherche de l'objectivité du droit car <<l'interprétation scientifique ne peut rien faire d'autre de plus que de dégager les significations possibles de normes juridiques>>[60]

Or, cette quête de l'objectivation des données juridiques va connaître très vite ses limites. Ainsi science et technique du droit se mêlent et s'emmêlent jusqu'à la crise contemporaine qui fait douter de la définition du positivisme juridique. Ce déclin se traduit par une inflation des règles juridiques, un <<trop de droit>>, véritable leitmotiv des temps modernes[61], une atténuation du caractère prescriptif des normes, pour faire bref, le phénomène s'apparente à une déstructuration fondamentale du droit, à une <<dilution des prescriptions juridiques dans la production juridique>>[62].

Dès lors se pose la question lancinante de savoir si le droit constitue une science[63]. Dans l'affirmative, est-elle une << science doublée de technique>>[64] ?. Technique et science du droit procèdent bien d'un même mouvement. << le droit se présente d'abord comme un ensemble de règles concrètes permettant de résoudre des problèmes et des conflits (...). En tant que science, il prétend réaliser, au même titre que les autres sciences humaines, une approche de la société et de l'environnement>>[65].

Le droit façonne le réel, imprime sa virtualité légale aux choses par le truchement de son nom, la loi. Par la subjectivation, et l'objet se singularisant, le droit devient alors l'enjeu de besoins sociaux divers, parfois contradictoires, dont l'expression privilégiée est la propriété individuelle,[66] celle du sujet, mythe de l'usus, fructus, abusus, ou "veau d'or"[67]. Le sujet en s'objectivant ainsi atteint à un sens, à la réalisation d'une destinée, maîtrise et possession, plénitude du sujet eu égard à l'objet.

Aux termes de ce double mouvement de réciprocité (maîtrise et possession) s'esquisse le droit de l'environnement. Il répond à l'asservissement de la nature en un postulat de réconciliation.

Ainsi, le droit, par la qualification, fait entrer la chose dans une catégorie, un statut, auquel s'applique de jure, un régime juridique. Cette juridicisation de la nature révèle un droit éminemment médiateur qui rend possible un processus d'émancipation de son objet, selon la conception relationnelle du droit décrite par Foqué et Hart[68].

Par conséquent, le droit devient traduction médiatrice de la nature, pendant que le droit de l'environnement tente d'abord, de réduire la distanciation homme-nature, le rationnel et le réel, ensuite de le transformer en un rapport de sens et de justice.

 

§ III - Du droit de l'environnement comme médiation juridique du pouvoir de l'homme sur la nature

Le réalisme positiviste tente de réconcilier l'homme et la nature en une dialectique hégélienne au sein de laquelle l'opération de qualification juridique apparaît comme une médiation enchaînant la chose (réel) à une logique (fiction) d'attribution d'un sens référent déterminable.

En effet, le droit devient un <<intermédiaire>> qui <<médiatise>>.

Du reste, on est pas loin de ce que propose le professeur François Ost : << au dualisme et au monisme, ces deux approches réductrices et finalement complémentaires, il faut opposer une pensée de la médiation, une pensée du milieu qui assure le "retour du tiers" >>[69].

Si le professeur Ost s'insurge contre les thèses de l'humanisme abstrait de Luc Ferry, il dénonce par ailleurs les thèses de la deep ecology  (écologie radicale) qui pour lui, ne sont pas un "juste" retour des choses. Plutôt que de gonfler inconsidérablement la catégorie de sujet, au risque de perdre l'homme, il convient de faire la <<part des choses>> et ainsi de retrouver le sens de lien et de la limite dans nos rapports à la nature.[70] Et la seule manière de faire justice à l'un (l'homme) et à l'autre (la nature), c'est de dire à la fois leur ressemblance et leur différence.

La "part des choses", voici un leitmotiv qui doit guider l'action humaine.

Il est peut être temps d'élaborer un savoir interdisciplinaire. Ce savoir, doit partir, nous semble t-il, d'une vision dialectique - ouverte - humaine du monde. Un monde entre nature et culture, entre nature et société. Un monde de dialogue - de vie et du sens.

Le savoir écologique doit être la résultante d'une réalité physique et du produit social. Ce savoir .écologique - ou pour le dire autrement encore - cette vision de la science écologique que nous appelons de tous nos voeux, confortera l'Afrique dans la gestion et la protection de la nature.

Comment cela pourrait-il en être autrement quand on sait que l'homme africain vit dans et avec son environnement. C'est de lui et en lui qu'il tire subsistance et protection.

Autrement dit, c'est l'environnement qui imprime un sens, une direction et une vie à l'Africain.

Il n'est pas fastidieux de souligner l'importance que joue la forêt, la brousse, le champ, le village, la terre, etc., dans la survie et le devenir de l'Afrique et partant de l'homme africain, fut-il de la ville ou du village. On nous objectera que tout ça n'est que du passé. Certes, dans une certaine mesure, mais qu'on nous permette de prendre juste quelques exemples, pour illustrer nos propos.

Le va-et-vient incessant des intellectuels entre la ville et le village, surtout à la veille des élections, nominations ou à l'occasion des consultations populaires en est un exemple patent. Que dire des rites initiatiques et du "maraboutage" à outrance que se livrent encore bon nombre d'Africains en ce début du 21ème siècle ?

Sur le plan de la médecine, d'après une étude faite, en 1999, dans les cantons de Kadada et Elfass au Tchad, plus de 90% des agro-pasteurs qui vivent dans ces régions préfèrent boire les racines, les feuilles des arbres et consulter les marabouts et autres forces que de se rendre dans un centre de santé.[71]

Sur le plan foncier, comme le soulignait à juste titre, Alain Rochegude[72], les Africains, du moins, ceux avec qui nous discutons ne comprennent rien à notre "système d'immatriculation des terres".

Dans le même sens, Étienne Leroy écrit : << De grandes superficies, de l'ordre de deux cent à trois cent hectares sont immatriculées à titre collectif - en nom collectif - et sont immatriculées pour protéger ces espaces contre l'arrivée des colons et contre les étrangers.

Mais l'essentiel des modes d'accès à la terre, des modes de transmission, et des conflits, sont eux-mêmes réglés sur la base du droit coutumier malgache, sur la base du droit coutumier des Fokolonoana, c'est-à-dire des communautés familiales et villageoises (...) Il s'agit là, pour moi, d'un prototype des solutions que l'on devrait essayer d'expérimenter et généraliser en Afrique continentale, fondées sur un métissage des dispositifs traditionnels et modernes>>[73]

On peut en douter, il existe un vrai jeu qui ressemble un peu à celui de dupes.

On peut même se demander à qui profite t-il ? Va t-on continuer à pratiquer la politique de la table rase et assurer le triomphe du droit moderne ?

Va t-on, au contraire, réhabiliter les vieux droits traditionnels ? Va t-on continuer à admettre la coexistence de deux ordres juridiques ? Autrement dit de deux sortes de droits ? Ou va t-on enfin mettre un terme au dualisme en réalisant la synthèse du droit moderne et des droits traditionnels ? N'est-il pas temps de construire ensemble les fondements d'un droit de l'environnement qui soit accepté et acceptable pour tous ?

La question principale devra être quel droit de l'environnement pour le monde de demain - ou si l'on préfère - pour le village planétaire ?.

Cette question capitale est d'autant plus importante tant pour le monde occidental, oriental que pour le continent africain pour lequel les préoccupations environnementales n'ont jamais été totalement étrangères, contrairement à ce qu'on a pu penser.

 

SECTION III - DE LA CONTRIBUTION AFRICAINE DANS LA FORMATION DU DROIT DE L'ENVIRONNEMENT : ENTRE L'ESPOIR ET LA DÉCEPTION

 

Par sa géographie et son climat, sa démographie galopante et son état de sous-développement, et surtout sa flore et sa faune exceptionnelles, l'Afrique est sans doute, plus que tout autre continent, interpellée par la question environnementale. On l'a pourtant dit indifférente à ce problème. Bien à tort, car les préoccupations environnementales n'ont jamais été totalement étrangères au continent, même si elles ont été mises entre parenthèses à une époque où l'on exaltait l'industrialisation à tout crin.

L'objet de notre réflexion ici n'est pas de faire l'histoire du droit de l'environnement en Afrique (un excellent ouvrage du professeur Maurice Kamto consacré à ce sujet est disponible depuis 1996) mais plutôt de relever quelques moments forts qui ont permis à l'Afrique d'espérer (§I). Ensuite, d'établir un premier bilan de cette contribution, 28 ans après la rencontre de Stockholm et ce, dans l'optique de formuler quelques éléments de réflexions (§II).

 

§I - De la formation internationale du droit de l'environnement : la contribution de l'Afrique

L'Afrique a contribué de façon significative à l'émergence des droits dits de la troisième génération.

Si traditionnellement, l'élaboration des normes juridiques est l'oeuvre exclusive, soit des États et accessoirement des organisations interétatiques dans l'ordre juridique international classique, le processus de fabrication des normes du droit de l'environnement a introduit une innovation : la démocratie participative.

Cette novation démocratique a permis à l'Afrique, entre autres, de s'impliquer plus activement dans l'élaboration internationale du droit de l'environnement[74]. La participation des acteurs sociaux infra-étatiques ou transétatiques à l'élaboration des normes juridiques de protection de l'environnement ou la prise des décisions en matière environnementale est désormais consacrée au niveau international et s'impose de plus en plus dans l'ordre interne des États[75].

 Doivent être désormais impliqués dans l'entreprise de protection de l'environnement, les femmes, les jeunes, les populations et communautés autochtones et autres collectivités locales.

Les femmes d'abord. Leur participation à la gestion des écosystèmes nationaux et internationaux et à la lutte contre la dégradation de l'environnement est essentielle surtout en Afrique où les femmes jouent un rôle actif en milieu rural.

Il s'agit de mettre en oeuvre les stratégies prospectives d'actions de Nairobi pour la promotion de la femme[76], en privilégiant la participation de celle-ci à la vie politique, à la gestion de l'environnement et à l'élaboration et à l'application des programmes en faveur d'un développement durable.

Les jeunes ensuite. Par l'importance de leur nombre, leur absence de préjugés et leur enthousiasme pour la cause de l'environnement peuvent être des artisans particulièrement efficaces de la promotion de la défense de l'environnement en vue d'un développement en harmonie avec la nature. Encore faut-il leur assurer une éducation à l'environnement par le biais de leurs organisations et associations.

Enfin, les populations autochtones et les différentes structures et communautés de base ont, selon le principe 22 de la Déclaration de RIO, une meilleure connaissance du "milieu" et des "pratiques traditionnelles".

Importante est aussi la participation des agriculteurs et des éleveurs ou dans certaines parties de l'Afrique, des agro-pasteurs[77]. Ceux-ci doivent être associés étroitement à la conception et à la mise en oeuvre des projets de conservation en milieu rural. Ils doivent être encouragés à l'application du droit coutumier ainsi que des pratiques et techniques traditionnelles de conservation dont l'expérience a montré l'efficacité dans la protection de l'environnement.

Mais si l'Afrique ne s'est impliquée que très progressivement dans le courant mondial en faveur de la protection de l'environnement, force est de constater que, les populations et communautés autochtones ainsi que les autres collectivités locales ont joué un rôle vital dans la gestion de l'environnement, du fait de leurs connaissances du milieu et de leurs pratiques traditionnelles.

Pour faire bref, disons que l'évolution de la position de l'Afrique passe par trois phases importantes.

 

A - STOCKHOLM 1972 : ENTRE LES RÉTICENCES ET LA MÉFIANCE AFRICAINE

Le 3 décembre 1968, L'Assemblée Générale des Nations unies, par une résolution[78], réclama la convocation d'une conférence mondiale sur l'environnement humain. Celle-ci se tient à Stockholm en 1972.

Mais aussi paradoxal que cela puisse paraître, quelques pays ne marquèrent pas d'intérêt pour la proposition. D'autre part, la plupart des pays en développement en général, et africains en particulier[79] virent dans la conférence une menace.

En effet, la crainte, au demeurant fort compréhensible, des pays africains tenaient, entre autres, à trois raisons principales :

D'abord, ils redoutaient que la priorité donnée aux problèmes de l'environnement n'entame une diminution des ressources affectées à l'aide au développement par les pays développés. La protection de l'environnement devenant un problème sérieux dans ces pays, il y avait lieu de penser que ceux-ci distrairaient par sa résolution, des ressources que d'autres besoins urgents réclamaient ailleurs[80]. Ces pays exprimaient d'ailleurs leur crainte de voir l'idée de protection de l'environnement se transformer en un obstacle à leur développement.

 Du reste, la conférence de Founex[81] organisée peu avant la rencontre de Stockholm avec pour objectif d'apaiser les craintes des pays en développement ne changera rien.

Ensuite, les pays en développement, mais aussi certains pays développés craignaient que les dépenses d'environnement n'engendrent en hausse des coûts de production. Les pays africains en particulier ne pouvaient, en toute logique, manifester de l'enthousiasme, pour des mesures de protection de l'environnement susceptibles d'entraîner des charges additionnelles et impliquant par conséquent un supplément de ressources dont ils ne disposaient pas.

Enfin, et c'est la raison la plus plausible, pour les pays africains, les mesures de sauvegarde de l'environnement pouvaient constituer des obstacles non tarifaires à l'exportation de leurs produits vers les pays développés. L'exigence des pays développés à exiger que les produits circulant dans le commerce international respectent rigoureusement certains éco-standards, pouvaient donner naissance à un <<néo-protectionnisme>>[82].

La méfiance des pays africains, et plus généralement du Tiers-Monde, ne s'est point dissipée à cet égard, l'instauration du <<label vert>> pour l'exportation de certains produits tels que les bois tropicaux participant de la même démarche.

Ici comme ailleurs, il convient de se demander si justement la conférence de Stockholm n'était pas en fait, à la recherche d'un <<label planétaire>> pour justifier d'une part, les exportations des matières premières, et, d'autre part, des actions de pollutions. En tout état de cause, la méfiance tournait parfois à l'hostilité et le ton devint incisif : << Notre pollution, c'est la misère>>, lança un délégué africain, et poussant plus loin dans l'excès, un autre n'hésita pas à déclarer : << Let me die polluted>>[83]. Au fond, les pays du Tiers-Monde dans leur ensemble <<ne demandaient qu'à entrer dans le club des pollueurs industriels qui, pensaient-ils, n'étaient pas aussi blâmables>>.[84]

Mais au-delà de ce constat, on ne peut plus tendu, la conférence de Stockholm, outre sa déclaration, ouvrait donc une période de réflexion en vue de trouver une approche globale des problèmes prenant mieux en compte les préoccupations des pays pauvres ou en développement. Soit !

 

B - ENTRE STOCKHOLM ET RIO : LA PRISE DE CONSCIENCE AFRICAINE ?

La prise de conscience environnementale de l'Afrique a suivi une progression due à divers facteurs, des contraintes et d'expériences de désastres écologiques extra-continentales.

D'autre part, un travail méthodique d'explication de la problématique écologique entrepris à l'échelon international, mettant en relief les avantages d'un développement écologiquement équilibré a été remarquablement mis en place :

D'abord, à Stockholm et ce, dans le prolongement du travail préparatoire effectué par un groupe de personnalités faisant autorité dans le domaine du développement convoqué en une réunion extraordinaire à Founex, en juin 1971.

Ainsi, pour apaiser les inquiétudes des pays africains, quelques garanties leur furent accordées :

Premièrement, l'aide au développement ne serait pas réduite. Aussi, tous les organismes internationaux, régionaux ou nationaux d'aide au développement étaient invités à aider les pays non ou peu industrialisés à résoudre les problèmes environnementaux que posaient les projets de développement.[85]

Deuxièmement, les pays participant à la conférence acceptèrent de ne pas invoquer l'exigence de protection de l'environnement pour justifier des pratiques commerciales restrictives ou discriminatoires[86]. Dans les cas où une telle exigence constituerait un obstacle aux exportations des pays en développement, des mesures appropriées de compensation devraient être mises au point[87].

Troisièmement, il fut décidé que le siège du Programme des Nations Unies pour l'Environnement (PNUE) serait basé en Afrique, plus précisément à Nairobi au Kenya. La localisation de cette importante institution des Nations unies en Afrique permettait de penser qu'elle accorderait un intérêt particulier aux préoccupations spécifiques du continent et du reste du Tiers-Monde[88].

On le voit clairement, le clin d'oeil fait à l'Afrique en particulier, et aux pays en développement de façon générale est très stratégique, même si la prudence et méfiance de l'Afrique restent de mise.

Ensuite, la perception progressive des dangers d'un développement irrespectueux du milieu naturel a été facilitée par la complexité et la gravité manifestes des problèmes de l'environnement des pays industrialisés dues pour l'essentiel à une prise en compte tardive des données environnementales dans leur processus de développement.

Enfin, des contraintes extérieures durent amener les pays africains, du moins les gouvernements africains, à réviser leur position initiale par rapport à l'exigence de protection de l'environnement.

Au demeurant, la prise de conscience africaine à la problématique environnementale s'exprimera de diverses manières, en des occasions et dans des cadres variés, notamment sur le plan régional que mondial.

 

1 - Au niveau régional

Une Déclaration des chefs d'États africains au sujet de l'environnement initiée dès 1973 par la Commission Économique des Nations Unies pour l'Afrique (C.E.A.) et l'Organisation de l'Unité Africaine (O.U.A.), permit d'apporter un soutien à l'idée d'un "développement viable""[89].

Autre événement important : le séminaire régional africain sur les << modes de vie et de développement de substitution>> considéré comme thème essentiel de la relation Environnement/Développement, qui se tint du 5 au 9 mars 1979 à Addis-Abeba (Éthiopie) sous les auspices du PNUE et de la C.E.A..

Dans une perspective plus normative, l'importante rencontre au sommet des chefs d'États et de gouvernement africain à Lagos (Nigeria) en 1979 vouée au développement économique du continent consacra tout le chapitre IX du Plan d'Action qui en résulta à <<Environnement et Développement>>. Thème qui sera repris d'ailleurs par la première conférence ministérielle africaine sur l'environnement tenue du 16 au 18 décembre 1985 au Caire (Égypte)[90].

Il est bien clair : cette dynamique de concertation africaine en matière d'environnement, qui se poursuivra dans le cadre de la préparation de la CNUED préfigure bien la prise de conscience et l'engagement de l'Afrique dans la dynamique environnementaliste. Celle-ci est perceptible aussi bien sur le plan mondial.

 

2 - Au niveau mondial

Ici comme ailleurs, l'Afrique fut à l'origine d'initiatives importantes dont la moindre n'est pas la charte mondiale de la nature.

 C'est le président du Zaïre, Mobutu Sese Seko qui, en 1975, au cours de l'Assemblée Générale de l'Union pour la Conservation de la Nature (UICN) tenue à Kinshasa, en lança l'idée pour la première fois comme un défi.[91]

Sur le modèle de la Déclaration universelle des droits de l'homme, l'UICN mit au point un projet de charte.

Par ailleurs, la conférence de Bâle pour l'élaboration d'une convention mondiale portant sur les contrôles des mouvements transfrontières de déchets dangereux, réunie du 20 au 22 mars 1989 à Bâle en Suisse, fut une autre occasion importante pour l'Afrique de donner la mesure de son intérêt accru pour l'environnement.

Deux faits marquants à savoir l'unité de l'Afrique et son refus devant le déversement de déchets toxiques et de déchets industriels sur son sol, renforcèrent davantage sa prise de conscience.

On aura retenu, du reste, que la cohésion des États africains, qui permit de se présenter en un front uni, a indéniablement payé et marqué cette conférence de Bâle.

 

C - RIO 1992 : L'ENGAGEMENT DE L'AFRIQUE

Cet engagement transparaît à travers la participation active de l'Afrique aussi bien dans la phase préparatoire de la conférence (1) qu'au niveau du Sommet (2).

 

1 - De la préparation de l'Afrique à la phase de négociation de la CNUED

 Cette préparation s'est faite parallèlement au niveau national et au niveau international.

Au niveau national d'abord, chaque État a élaboré un rapport national sur l'environnement, document préparé à partir des travaux des ministères techniques et autres institutions publiques concernées d'une part, et des résultats des concertations avec les ONG nationales de l'environnement et du développement d'autre part.

Au niveau international, la préparation de ce sommet s'est faite parallèlement dans le cadre régional africain et à travers la participation des pays africains aux négociations portant sur les instruments juridiques et autres documents devant être approuvés à RIO.

Aussi, au niveau régional africain, s'est imposé très vite la nécessité d'adopter une "position commune africaine" en tant que contribution du continent aux principales décisions d'ordre politique qui allaient être prises au Sommet de RIO.

Plusieurs rencontres régionales et sous-régionales se tinrent à ce sujet.

La "position commune africaine" sur l'environnement et le développement[92], adoptée à la deuxième conférence ministérielle régionale africaine préparatoire à la CNUED réunie à Abidjan (Côte-d'Ivoire) du 11 au 14 novembre 1991, s'inspira des conclusions contenues dans différents documents élaborés au niveau régional.

La "position commune africaine" est un document d'importance capitale dans l'étude de l'approche africaine des problèmes d'environnement.

Si ce document qui comporte trois parties dont un préambule et des principes généraux n'est pas un traité international, il s'agit, à tout le moins, d'un engagement politique aux accents juridiques.

A travers leurs engagements, les États reconnaissent l'existence du lien étroit indéniable entre le développement et l'environnement et réaffirment, entre autres : le droit de leurs peuples à revendiquer les droits légitimes à la santé, au développement et à l'avenir, le <<droit légitime>> des pays africains d'exploiter leurs ressources naturelles à des fins de développement et de veiller à ce que les mesures de protection de l'environnement ne compromettent pas le processus de développement.

Les États africains reconnaissent par ailleurs la nécessité de fonder les politiques de l'environnement sur un "principe de prudence", lequel devrait régir le développement et l'utilisation de la science et de la technique au service de l'environnement au moyen de la "prévention" et de l'élimination des causes de la dégradation de l'environnement.

Peut-on proposer mieux quant on connaît les illusions des vérités scientifiques telles que nous les avons développées dans les deux premiers chapitres ?

A t-on le droit d'occulter, les vrais problèmes existentiels que posent l'environnement en Afrique ?

Une chose est certaine : à travers l'engagement de Bamako d'abord, et la position commune d'Abidjan ensuite, les préoccupations et exigences des États africains ont été diverses.

 Les préoccupations prioritaires étaient : la non-réalisation de la sécurité alimentaire, dont les conséquences sont la famine et la malnutrition; l'absence de sécurité énergétique, les problèmes liés à l'absence de croissance économique durable et d'emplois productifs, l'insécurité et l'instabilité du flux de ressources financières pour le développement; l'amélioration de la qualité de la vie et de l'habitat. Autant de problèmes qui ont pour nom commun "la pauvreté".

La pauvreté apparaît en tout état de cause comme l'une des cause principales de la dégradation de l'environnement en Afrique et constitue, avec la surexploitation des ressources naturelles qui lui est étroitement liée, les entraves majeures à l'adoption de politiques efficaces pour une gestion rationnelle de l'environnement.

La "position commune africaine" préconisait alors que l'élaboration des mesures bien déterminées visant à éliminer la pauvreté et à surmonter d'autres obstacles en matière de développement devienne une préoccupation stratégique essentielle pour l'Afrique au cours du processus menant à la CNUED.

 

2 - De la CNUED au Sommet de RIO : Une convention sur la désertification à l'arraché

L'objectif général du Sommet organisé par la Conférence des Nations Unies pour l'Environnement et le Développement (CNUED) à Rio de Janeiro au Brésil, du 3 au 14 juin 1992, était de définir de nouvelles priorités après l'échec de la guerre froide; malheureusement, celui-ci a été vidé de sa substance par l'inévitable affrontement entre pays riches et pays pauvres en particulier, entre les États-Unis et les pays en développement sur le degré d'urgence des mesures écologiques à prendre et la question de savoir qui financera les efforts à fournir[93].

Néanmoins, l'Afrique affirma ses positions à RIO, soit à travers le groupe des <<77>>, soit directement, par elle-même. Une bataille qui ne fut pas facile.

Les positions communes de l'Afrique et du groupe des <<77>> portaient essentiellement sur les questions institutionnelles et de financement qui furent parmi les pommes de discorde entre le Nord et le Sud.

Les États-Unis en particulier ne voulaient pas regarder la conférence comme un <<moment pour de grands engagements>>  de financement par le Nord au profit du Sud[94]

Un texte de compromis intitulé <<Éléments pour la discussion sur les finances>>, tenant compte à la fois des positions du Nord et du Sud et présenté par le Brésil, fut rejeté par le Groupe des <<77>>.

Sur un autre plan, l'Afrique a défendu séparément sa position au sujet de la désertification. En dehors de la reconnaissance de la pauvreté comme un obstacle majeur au développement durable et du problème de financement de l'Agenda 21, l'un des objectifs prioritaires de l'Afrique à RIO était d'obtenir un engagement des États participants sur le principe d'une convention sur la désertification.

L'Agenda 21, en dépit de son énorme volume, était considéré comme incomplet par plusieurs délégations de pays menacés par la perte des vies humaines et des moyens d'existence à cause de l'avancée inexorable du désert.

Ces pays voulaient donc une convention internationale pour faire face à ce problème. L'Afrique fut rejointe dans sa démarche par d'autres régions du monde menacées par la désertification, notamment l'Europe de l'Est, l'Asie et l'Amérique Latine, en particulier le Brésil. Mais les États-Unis s'opposèrent à une telle convention car bien que souffrant quelquefois de sécheresse, ils sont en mesure de s'occuper tout seuls de leur problème dans ce domaine[95].

Après quelques résistances et tergiversations de la part de certains États européens, en particulier de la Grande-Bretagne, la commission des Communautés européennes annonça son soutien au principe d'une convention sur la désertification.

Comment cela pourrait-il en être autrement, vu la gravité de la situation de l' Afrique dans ce domaine.

Point n'est besoin de rappeler que plus d'une dizaine de pays africains partagent leur territoire entre le désert et la savane. Une convention en la matière leur serait profitable au premier chef, dans la mesure où elle permettrait la mise en place de systèmes de gestion et de suivi des problèmes permettant de donner suffisamment tôt l'alerte en vue de contenir le désastre.

On le voit : Stockholm 1972 avait introduit l'environnement dans les préoccupations du monde; RIO 1992 a jeté des bases sérieuses pour faire face aux défis multiformes que l'environnement lance à la communauté humaine d'aujourd'hui et de demain.

Est-ce pour autant dire que les préoccupations africaines ont reçu un écho favorable ? Les vrais problèmes ont-il reçu les vraies réponses ? Rien n'est moins sûr.

§ II - DE LA CONTRIBUTION DE L'AFRIQUE : QUELQUES ÉLÉMENTS DE RÉFLEXION POUR UN BILAN

Au regard des préoccupations et des attentes, l'Afrique fit des propositions très précises tant pour la phase des négociations que lors du Sommet de RIO. Pour faire bref, il convient d'organiser ces préoccupations autour de trois thèmes essentiels : le développement institutionnel (A), le développement économique et financier (B) et les questions foncières en Afrique (C).

 

A - Le Développement institutionnel et normatif

 

1° Au niveau institutionnel

Sur le plan institutionnel, les États africains recommandaient entre autres que des mesures soient prises pour encourager, appuyer et renforcer : les institutions et mécanismes nationaux pour l'application des programmes environnementaux; les programmes régionaux et sous-régionaux africains portant sur le développement et l'environnement; les institutions intergouvernementales africaines, notamment l'OUA, la BAD, la conférence des ministres africains de l'environnement, le CILSS, l'GADD et la SADCC; les institutions des Nations-Unies ayant leur siège en Afrique; les bureaux régionaux en Afrique, afin qu'elles puissent accomplir leur mission dans le domaine du développement économique et social.

 

2° Au niveau normatif

Outre le fait qu'ils étaient déjà acquis à l'idée d'une <<charte de la terre>> (qui se transformera en une simple Déclaration), les États africains avaient recommandé l'élaboration et la signature d'une convention internationale en vue de stopper la désertification en Afrique grâce notamment à l'implantation, dans un effort collectif international, de ceinture vertes au nord et au sud du Sahara et du désert de Kalahari.

Toutefois, si certains de ces points reçurent quelques réponses mitigées, beaucoup de déceptions furent enregistrées.

 

B - Le développement économique et financier

 

1° Sur le plan économique d'abord

Les États africains recommandaient que le processus menant à la CNUED fut un moyen de renforcer les dialogues Nord-Sud et Sud-Sud et la coopération en matière de gestion de l'environnement, de faciliter la mobilisation des ressources à cette fin et de promouvoir l'interdépendance et la solidarité réelle à l'échelle planétaire.

Les États africains préconisaient, par ailleurs, la création d'un fonds de diversification de la production tenant compte des préoccupations d'ordre écologique, afin de promouvoir les transformations structurelles des économies africaines, la réactualisation des accords sur les produits de base et la recherche de solutions à ces produits en vue de garantir des cours minimum et d'accroître en conséquence la capacité des pays producteurs de générer des revenus[96].

On ne peut s'empêcher de constater que vingt-huit ans après la conférence de RIO, les attentes de l'Afrique sont loin d'être satisfaites.

Les cours des matières premières sont toujours et encore fixés sans aucune consultation préalable des États africains, par ailleurs producteurs de ces matières.

Les grandes décisions touchant aux problèmes de l'environnement sont soit prises par les multinationales qui sont en plus, les maîtres dans ce domaine, soit par les institutions de Bretton Woods.

Peut-on parler dans ce contexte d'une coopération basée sur l'interdépendance et la solidarité réelles à l'échelle planétaire ? Les valeurs de solidarité "environnementales" à défendre ici sont-elles les mêmes ?

 

2° Au niveau financier ensuite

 Outre la demande de création du fonds de diversification de la production, les africains recommandèrent le déblocage des ressources destinées à la protection de l'environnement, l'élargissement du mandat du mécanisme mondial de financement de l'environnement de façon à y inclure la diversification et d'autres sujets prioritaires pour l'Afrique.

Ils demandaient un mécanisme de financement géré par les signataires de la convention-cadre et qui serait indépendant des mécanismes ou des institutions déjà en place, en l'occurrence la Banque Mondiale et le Fonds Mondial pour l'Environnement (GEF) qu'ils considéraient comme non démocratiques et dominés par les pays riches[97].

Ils demandèrent en outre que la gestion de ce fonds soit transparente et repose sur une base suffisamment large pour inclure des pays en développement, en particulier l'Afrique.

C - Sur la préservation du milieu naturel et les préoccupations foncières

1° Au niveau de la préservation du milieu naturel

Les États africains ont recommandé l'interdiction de déverser en Afrique des déchets toxiques et dangereux conformément à la convention de Bamako. L'Afrique considère le déversement de déchets toxiques et de déchets industriels sur son sol <<comme une conspiration>> visant à porter atteinte à la santé de ses peuples et à déséquilibrer son environnement.[98] 

Aussi, <<dans la tradition et la philosophie africaines, c'est une insulte vis-à-vis de quelqu'un que d'aller déposer des déchets dans sa cour. Cela peut conduire à une sérieuse mésentente au sein de la communauté >>[99].

En dépit de tous les efforts déployés par l'Afrique au cours des dernières années <<en vue d'intégrer les problèmes de l'environnement à ceux du développement socio-économique>>, les pays industrialisés n'ont pas toujours échappé à la tentation de transformer le continent en un dépotoir. Ceci reste une menace voire une agression qui compromet sérieusement l'avenir des générations futures.

On comprend alors aisément la réticence de certains pays africains d'être partie à la convention de Bâle portant sur les contrôles de mouvements transfrontières de déchets dangereux.

On peut se demander si ces États africains étaient même suffisamment préparés et outillés pour contrôler le respect d'une telle convention tant au plan moral que juridique ?

Une chose est sûre, ces derniers ne signèrent pas la convention de Bâle et quelques uns seulement signèrent l'Acte final de la conférence[100]

 

2° La politique de protection de l'environnement en Afrique passe par les préoccupations foncières

En Afrique, il existe un lien étroit entre le statut des sols et la protection de l'environnement, en particulier la gestion écologique des espaces et la conservation de la biodiversité.

Problème sensible et combien épineux, la question foncière en Afrique reste un défi pour la plupart des pouvoirs publics africains. Ignorer cette réalité, c'est passer à côté du problème de la protection de l'environnement et partant du droit de l'environnement.

Se pose en filigrane la question de l'effectivité et de l'efficacité du Droit d'abord, et du droit de l'environnement ensuite.

La résolution de la question foncière et des nombreux conflits de droit qui lui sont attachés est en tout état de cause, un préalable indispensable au succès de la lutte contre les atteintes à l'environnement, notamment en milieu rural. Il est manifeste que les populations paysannes ne se sentent impliquées dans l'opération de préservation de la nature que lorsqu'elles y trouvent un intérêt subjectif[101].

Par conséquent, il serait surtout présomptueux de continuer à agir comme si les droits traditionnels ignoraient les considérations écologiques ou comme s'ils n'offraient pas de réponses efficientes aux problèmes environnementaux.

Dans certains cas, le droit coutumier traditionnel se révèle plus efficace dans la protection de l'environnement que nombre de législations modernes.

Les réalités des terroirs tiennent en effet tête et souvent font échec à l'impérialisme juridique de l'État et au légicentrisme des politiques foncières[102].

Ainsi, au Burkina Faso, bien que le régime foncier coutumier ne soit pas reconnu par la loi, il continue de gouverner l'essentiel des rapports juridiques portant sur la terre, et notamment en ce qui concerne l'exercice des droits d'usage forestier par les populations locales.

Au Cameroun, le conflit entre droits coutumiers et droit moderne est patent dans ce domaine : les populations locales, heurtées par une législation forestière qui ampute leurs droits traditionnels sur les forêts, restent attachées, par ignorance ou par contestation, à leurs droits coutumiers et apparaissent en bien des circonstances comme des braconniers au regard de la législation moderne[103].

Le cas de la Côte-d'Ivoire est révélateur en cette matière : les droits fonciers coutumiers, après avoir été voués à la disparition par la politique officielle ont été réhabilités en 1971 comme simples droits d'usage personnels, non transmissibles et non cessibles, sans pour autant du reste que leur exercice ait cessé d'alimenter de nombreux litiges locaux.

Au Congo, on a relevé un amalgame entre droits fonciers traditionnels et divers textes modernes, ce qui forme un ensemble hétéroclite et<<explosif>>, en tout cas complexe et inextricable.

Le Mali connaît également une superposition entre les droits fonciers coutumiers et le droit moderne colonial, ce qui place le paysan dans une situation d'insécurité foncière nettement préjudiciable à la protection de l'environnement, notamment aux forêts.

Au Tchad, quatre principaux types de régimes fonciers tous différents les uns des autres[104] basés sur quatre systèmes de droit : le droit musulman, le droit traditionnel, le droit colonial et le droit moderne écrit qui associe maladroitement ces différents systèmes tentent de cohabiter. Cette coexistence, parfois conflictuelle, entre le droit coutumier traditionnel et le droit écrit dit moderne ne persiste pas seulement en matière de statut foncier.

Elle existe également dans d'autres domaines touchant à la protection de l'environnement. Ainsi, la gestion de certains types de forêts y compris des <<bois sacrés>> que l'on trouve dans les chefferies traditionnelles échappe à la réglementation forestière moderne qui a pourtant une portée générale.

De même, bien que le régime de l'eau soit fixé dans tous les pays par un acte du législateur moderne, le droit coutumier traditionnel fournit encore les principales règles régissant l'utilisation des eaux, même si la propriété des eaux est clairement consacrée par les textes dans la plupart des cas. Cette propriété privée demeure généralement méconnue en pratique et les particuliers ne jouissent que d'un droit d'utilisation, l'eau demeurant encore au regard du droit traditionnel une res communis[105].

De façon générale, on observe une résistance des droits coutumiers à l'emprise du droit moderne, et, il est probable qu'elle durera longtemps encore. Cette résistance se traduit par une application praeter legem, voire contra legem, des normes coutumières au détriment des législations étatiques en la matière[106].

Car, même lorsque celles-ci ont suivi, pour leur adoption, une procédure de consultation populaire sous forme d'enquête publique, comme ce fut le cas pour les ordonnances de 1974 portant régime foncier et domanial au Cameroun[107], elles n'ont pas toujours su saisir et refléter les logiques juridiques profondes des différents terroirs[108].

On le voit clairement, le droit de l'environnement - si l'on veut qu'il s'applique réellement à l'Afrique -  doit tenir compte des préoccupations, du moins des représentations culturelles de l'homme africain, à travers les systèmes de son droit coutumier traditionnel.

Il est plus que jamais temps - nous semble  t-il - d'arrêter de jouer à la politique de l'Autruche, et de réhabiliter et la science et le droit écologiques traditionnels pour une meilleure protection de l'environnement en Afrique.

Ne faudrait-il pas a priori, repenser les fondements du droit de l'environnement afin de tenir compte des spécificités et réalités locales ? Comment faire pour que le local, le particulier et le global soient dialectiquement construits ? Comment faire pour mieux concilier droit de l'environnement et exigences d'un développement sain et durable en faisant l'économie de certains conflits fonciers de plus en plus nombreux en Afrique ?

Autant de questions qui devraient trouver des réponses satisfaisantes et efficaces si l'on veut - une fois de plus - que le discours se rapproche de la pratique.

En attendant, les pouvoirs publics africains, directement confrontés à cette réalité devraient être plus attentives aux préoccupations locales.

Il n'est pas superflu, de réaffirmer à la suite de Maurice Kamto[109], qu'il faudrait à cet égard insérer dans les législations modernes, une clause de préférence coutumière ou du droit traditionnel s'énonçant comme suit : << chaque fois qu'une règle du droit coutumier ou une pratique traditionnelle éprouvée est plus protectrice de l'environnement qu'une règle du droit moderne, la première doit prévaloir>>.

On l'aura compris : il se pose dès lors une autre question, non des moindres, celle des sources du droit de l'environnement dont il convient à présent d'en examiner les contours.

 

CHAPITRE DEUXIEME : DES SOURCES GÉNÉRALES DU DROIT DE L'ENVIRONNEMENT

Le jeune droit de l'environnement puise à diverses sources. Compte tenu de sa jeunesse et de son caractère universel, le droit de l'environnement présente le grand intérêt d'être accompagné, sur l'ensemble de la planète, d'expériences coutumières, législatives et de réflexions doctrinales, qui, au-delà des systèmes culturels, économiques et sociaux particuliers, pose en fait le même problème : quel droit pour un meilleur environnement ?

S'il n'est plus de société qui puisse prétendre vivre en autarcie, l'apparition concomitante de droits de l'environnement dans les divers pays du monde rend indispensable l'étude comparative de ces droits.

Ces réflexions comparées doivent permettre la détermination de tendances générales de développement du droit de l'environnement[110] et une harmonisation ou une unification future de ce droit.

 Reste donc à révisiter les diverses sources du droit de l'environnement en vigueur ainsi que les caractères généraux de ce droit.

Pour notre étude, nous nous efforcerons de reconstruire l'édifice des sources du droit de l'environnement en y recourant à la méthode comparative d'abord, à travers l'apport international et communautaire (Section I), ensuite à travers ce qui pourrait être les sources africaines du droit de l'environnement ( Section II).

 

SECTION I : DES SOURCES INTERNATIONALES ET COMMUNAUTAIRES DU DROIT DE L'ENVIRONNEMENT

Nous évoquerons ici tour à tour et de manière succincte l'apport du droit international (§ I) et du droit européen de l'environnement (§ II).

 

§ I - L' ENCADREMENT NORMATIF INTERNATIONAL

La communauté internationale par l'intérêt qu'elle porte aux problèmes d'environnement permet incontestablement une accélération de la mise en place de règles juridiques nouvelles.

Les multiplications des conventions internationales concernant la pollution des mers par les hydrocarbures, le déversement des déchets toxiques en mer et la pollution tellurique prouvent la volonté des États concernés d'attaquer de front le problème.

Les réglementations nationales prises en vues de l'exécution ou de l'application de certains de ces traités sont de ce fait, des normes relativement unifiées quant à leur contenu.

Le droit international de l'environnement (DIE) fait partie du droit international public (DIP). Il est constitué par le droit international général et par un ensemble de domaines d'application qui sont autant de branches du DIP : ainsi le droit de la mer, le droit du développement, le droit du désarmement etc.[111]

Comme dans l'ensemble du droit international public on retrouve ici l'importance des sources conventionnelles (A) mais aussi d'autres sources formelles (B).

A - DES SOURCES CONVENTIONNELLES DU DROIT INTERNATIONAL DE L'ENVIRONNEMENT (D.I.E.)

Le droit international de l'environnement comporte de nombreuses conventions internationales, des résolutions obligatoires d'organismes internationaux et un certain nombre de textes non-obligatoires ( <<soft law>>) dont l'importance ne saurait être méconnue.

Tout comme les textes législatifs et réglementaires dans les différents pays, les traités internationaux se sont aussi multipliés depuis la fin des années 1970, au point de pouvoir parler d'un véritable déferlement.

 A l'heure actuelle, le nombre des traités multilatéraux concernant l'environnement, soit entièrement, soit par l'une ou plusieurs de leurs dispositions, dépasse les 300. A ce chiffre s'ajoutent environ 900 traités bilatéraux[112]

Du point de vue de l'objet des conventions, on peut distinguer des conventions qui s'inscrivent dans le cadre des luttes contre des pollutions et d'autres qui ont pour objectif la conservation de la nature.

Du point de vue de leur portée géographique, on trouve la distinction, bien connue dans d'autres domaines du Droit international public, entre les conventions à vocation universelle et celles à vocation régionales. Pour les premières, il s'agit le plus souvent de conventions conclues dans le cadre des Nations Unies et de leurs institutions spécialisées, pour les secondes, il est bien sûr très fréquent que des organisations régionales jouent un rôle essentiel.

Du point de vue, enfin et surtout, de la variété des conventions qui concernent l'environnement, on peut distinguer quatre grandes catégories : d'abord les conventions entièrement consacrés à la protection de l'environnement; puis les traités réglementant un espace ou une activité mais qui contiennent quelques dispositions spécifiques relatives à l'environnement ainsi les traités sur l'Antarctique, l'espace atmosphérique, la convention sur le droit de la mer.

Ensuite, il ne faut pas oublier deux autres catégories de conventions qui, bien que non rattachées directement à la protection de l'environnement ont une influence sur celle-ci : ainsi un certain nombre de traités qui n'ont pas pour objectif de protéger l'environnement mais qui peuvent avoir des conséquences bénéfiques sur celui-ci, telle une convention de pêche ayant des effets sur la gestion des ressources maritimes.

Enfin, on ne peut passer sous silence des conventions qui peuvent avoir des effets destructeurs sur l'environnement telles des conventions de commerce sans clauses écologiques.

Il est évident que les conceptions de la protection de l'environnement développées par le droit international sont au total très variables.

Si certaines sont purement utilitaristes, on notera que d'autres, plus généreuses mais souvent moins effectives, reposent sur des notions et principes souvent liées à la recherche d'un Nouvel Ordre Économique International (NOEI) et axées sur le développement : ainsi, par exemple, la notion de développement soutenable (que nous discuterons dans la deuxième partie) préconisée par le Rapport Bruntland (<<our common future<<), ou celle plus ancienne de patrimoine commun de l'humanité[113] sont-elles souvent utilisées par les textes d'environnement, pour mieux lier le développement à la nécessité de préserver les ressources naturelles d'une surexploitation.

On notera d'ailleurs que ces notions, floues, sont souvent l'objet de doubles lectures : Là où M. Rémond-Gouilloud voit une <<sacralisation de la res communis>>[114], tout de même riche de perspectives, B. Edelman a par exemple critiqué vigoureusement l'emploi du concept de <<patrimoine commun de l'humanité>>[115], dont il estime au contraire que l'usage permet une gestion rigoureuse de ressources inexploitées jusque là.

Au demeurant, la valeur du droit international dépend de l'effectivité des normes posées que de la valeur philosophique de ces principes et notions, qui ne saurait être en l'absence de traductions normatives que fort relatives : elles constituent tout au plus un <<vivier de normes coutumières potentielles>>[116] quand elles ne figurent pas dans l'instrumentum de conventions dûment ratifiées par un nombre suffisant de nations.

 

B - DES AUTRES SOURCES FORMELLES DU DIE

Elles sont définies par l'article 38 du statut de la Cour Internationale de Justice (CIJ) : coutume international, et comme <<moyens auxiliaires>> les décisions judiciaires et la doctrine.

 Cependant la catégorie des résolutions des organisations internationales, non prises en compte par l'article du statut de la CIJ, est importante en droit international public et plus particulièrement en DIE.

Une place essentielle peut être accordée aux déclarations de principes, les autres résolutions peuvent être plus ou moins importantes.

Ainsi, du point de vue des types de déclarations de principes, on peut distinguer d'abord les déclarations globales qui essaient d'embrasser un ensemble de problèmes liés à l'environnement : ainsi la Déclaration de Stockholm adoptée par la conférence des Nations Unies sur l'environnement (1972), la Déclaration de RIO sur l'environnement et sur le Développement (1992), de même la Charte Mondiale de la Nature (1982).

 Ensuite, les Déclarations de principes plus spécifiques à tel ou tel domaine : ainsi la charte européenne de l'eau (Conseil de l'Europe, 6 mai 1968), ou les principes relatifs à la pollution transfrontière (OCDE, recommandation du 14 novembre 1974), la Déclaration de principes sur la lutte contre la pollution de l'air (Conseil de l'Europe, 1968) et la charte des sols (Conseil de l'Europe, 1972).

Du point de vue de leurs caractères, les déclarations de principes constituent une forme de reconnaissance, de consécration de valeurs sociales que la communauté internationale tend à protéger.

Quant aux autres résolutions, elles se présentent sous trois formes. En premier lieu, les programmes d'action qui sont de deux sortes : les uns généraux, ainsi le <<plan d'action pour l'environnement>> (Stockholm 1972) et l'Agenda 21 (RIO 1992). D'autres programmes d'action sont spécifiques à tel ou tel domaine : ainsi le PNUE en 1974 a lancé un programme d'action pour les mer régionales.

Si ces programmes ne sont pas juridiquement contraignants, ils sont, du reste, incitatifs.

En second lieu, les organisations internationales ou régionales peuvent adopter des recommandations à destination de leurs États membres ainsi par exemple l'OCDE en matière de déchets dangereux, le Conseil de l'Europe du point de vue de la protection de la faune et de la flore.

En troisième lieu, il est par contre beaucoup plus rare qu'elles adoptent des résolutions obligatoires même si l'on peut citer par exemple des résolutions du Conseil de sécurité relatives aux sanctions liées aux conflits armés, résolutions ayant des conséquences indirectes, heureuses ou malheureuses, pour l'environnement.

En outre, du point de vue du DIE, les décisions judiciaires ne sont pas très nombreuses à ce jour.

En dépit de tout l'arsenal juridique mis en place par le DIE, le problème semble pouvoir s'énoncer, ainsi : les normes internationales de protection peuvent être considérées comme habilitant les autorités publiques à développer des pratiques, et comme leur interdisant certaines  pratiques; elles ne peuvent que rarement en l'état actuel des choses et de la jurisprudence être considérées comme les obligeant à développer certaines pratiques.

L'effectivité du droit international n'est donc sur ce point que réduite : il en est autrement, pour le droit communautaire.

 

§ II - L'ENCADREMENT NORMATIF COMMUNAUTAIRE

Derrière les enjeux de la communauté se profile le spectre des disparités propres à chaque pays, à chaque région. << Chacun bénéficiera t-il d'un partage équitable du gâteau européen ? Ou bien les <<petits>> continueront-ils à être mangés par les <<gros>>... en toute impunité ? >>[117].

La question mérite d'autant plus d'être posée qu'elle ne concerne pas que l'économie, mais également la qualité de la vie dans chaque État membre, et plus largement les ressources naturelles et l'environnement de l'Europe.

 

A - AVANT L'ACTE UNIQUE

Avant l'Acte Unique, c'est la pression des faits, en dehors de toute base juridique, qui ira conduire la CEE à formuler une politique de l'environnement et à prendre ponctuellement des mesures juridiques[118].

L'article 100 du Traité de Rome assignait aux institutions européennes le soin de réaliser une harmonisation des dispositions nationales pour éviter les distorsions de la concurrence; son article 235 permettait à ces institutions d'intervenir quand le traité n'avait pas prévu d'attributions spécifiques pour réaliser l'un des objectifs inscrits à l'article du traité CEE, dont <<l'amélioration constante des conditions de vie et de travail dans les États membres... >>[119].

Ces deux articles pouvaient fournir les fondements juridiques à l'élaboration du corps de règles européennes en matière d'environnement.

Mais leur emploi supposait l'unanimité, ce qui rendait cependant difficile l'élaboration d'une véritable politique communautaire de l'environnement.

Quand le parlement européen a élaboré un projet de révision du Traité CEE[120] et quand le Conseil s'en est inspiré pour adopter en décembre 1985 l'Acte Unique Européen, cette difficulté a été prise en compte, et l'Acte Unique fournit aux institutions communautaires une base d'intervention plus solide en matière de protection de l'environnement[121].

 

B - DEPUIS L'ACTE UNIQUE

Ainsi depuis l'Acte Unique, entré en vigueur le 1er juillet 1987, l'avenant du Traité de Rome introduit expressément l'environnement dans le traité.

 Deux instruments juridiques sont disponibles. Une politique spécifique pour l'environnement est instituée par l'article 130 R §1, qui définit l'objectif poursuivi par la politique communautaire de l'environnement comme suit : << préserver, protéger, améliorer la qualité de l'environnement>>, << contribuer à la protection de la santé des personnes et assurer une utilisation prudente et rationnelle des ressources naturelles >>.

Sans définir l'environnement, ils délimitent néanmoins les objectifs poursuivis et les fondements des actions à entreprendre à travers trois principes : principe de la prévention, principe pollueur-payeur, principe de la correction à la source des atteintes à l'environnement[122].

L'article 130 R §2, in fine, prévoit en outre que << les exigences en matière de protection de l'environnement sont une composante des autres politiques de la communauté >>, privilège unique accordé à cette nouvelle politique à part entière de la CEE.

L'article 130 R-4e a été analysé comme instituant le principe de subsidiarité selon lequel la compétence de la communauté ne serait que si la nature envisagée est plus efficace à ce niveau qu'au niveau national.

L' autre instrument juridique disponible depuis 1987 repose sur la mise en place du marché intérieur (article 100 A). Lorsqu'une mesure touchant à l'environnement a une incidence directe sur l'établissement ou le fonctionnement du marché intérieur et nécessite un rapprochement des législations, elle peut être prise à la majorité qualifiée en coopération avec le parlement européen.

Par dérogation, un État peut être autorisé à appliquer une mesure nationale justifiée par la protection de l'environnement (a priori, il s'agira d'une mesure plus sévère).

Enfin, l'existence de sources internationales ou communautaires peut aider à l'émergence de normes nationales; elle peut s'y substituer.

Dans les Pays fédéraux, des problèmes se posent quant à la compétence respective de l'État fédéral et des États fédérés en matière de l'environnement. En France, le système restant unitaire, malgré la décentralisation de 1983, l'État reste seul compétent pour légiférer. Les problèmes de compétence respective du parlement et du gouvernement se posent en termes classiques.

L'article 34 de la constitution n'attribue pas directement au parlement une compétence exclusive en matière d'environnement mais celui-ci est néanmoins amené à décider dés que le projet touche aux principes fondamentaux concernant les garanties fondamentales accordées aux citoyens par l'exercice des libertés publiques[123].

Le débat sur les bruits et nuisances sonores des avions engagé en Belgique, en 1999, sous la pression des riverains et  qui a connu fort heureusement, une suite favorable (réglementation des vols de nuit etc.) est un exemple patent en la matière.

En somme, il convient de reconnaître que plusieurs pays européens ont fait inscrire dans leurs constitutions le<<droit à un environnement sain et écologiquement équilibré>>.

Mais s'il est vrai que cette inscription ne résout pas, loin de là, tous les problèmes et n'empêche pas la destruction de l'environnement, elle revêt, à défaut d'être juridiquement effective, une importance symbolique importante.

Ce caractère symbolique mais tout au moins présent est encore plus caractéristique, en Afrique Noire à travers les sources du droit dont il convient à présent d'en examiner.

 

SECTION II : DES SOURCES DU DROIT DE L'ENVIRONNEMENT EN AFRIQUE

 

Les sources du droit de l'environnement en Afrique apparaissent nombreuses et variées, associant normes du droit international et règles des droits internes.

Nous nous limiterons ici aux sources internes.

Toutefois, il faut rappeler que l'expression <<source du droit>> est justiciable de deux acceptions dont l'une est non juridique et l'autre juridique.

Au sens non juridique, elle désigne <<toutes les représentations qui influencent effectivement les fonctions de création du droit et d'application du droit>>[124], c'est-à-dire le substratum moral, politique, économique et social, les théories juridiques et les avis d'experts, pour faire bref, la doctrine dans lesquels toute règle de droit ou tout ordonnancement juridique plonge ses racines.

Suivant cette signification, le droit de l'environnement serait fondé, d'une part, sur une sorte de morale écologique inspirée par la redécouverte par l'homme de la beauté et des richesses de la nature et, parallèlement, des menaces graves qui pèsent sur elles; d'autre part, sur un réalisme économique dicté par les perspectives catastrophiques d'une croissance échevelée fondée sur une exploitation anarchique et irrationnelle des ressources naturelles -  pour la plupart non renouvelables - susceptibles d'hypothéquer tout développement durable[125].

Cette acception de la notion de <<source du droit>> est nettement distincte de son sens juridique dans lequel elle désigne les sources du droit positif, celui-ci s'entendant comme l'ensemble des règles juridiques applicable ou en vigueur dans un État ou en une matière à un moment donné.

Au sens juridique, l'expression <<source du droit>>, désigne alors le socle juridique sur lequel repose un système de normes - ou pour le dire autrement - c'est le fondement de la validité d'un ordre juridique donné, c'est-à-dire ses bases juridiques positives.

En Afrique, le droit de l'environnement puise aux trois sources traditionnelles en droit : les droits traditionnels (§1), le droit colonial (§2) et le droit écrit post-colonial (§3).

 

§ I - Des droits traditionnels

Les droits traditionnels sont définis comme les droits dont la formation et le mode de légitimation ne relèvent pas du droit de l'État qu'ils précèdent.

Il s'agit en définitive, de droits originaires qui témoignent d'un état de société et d'une conception particulière, qui structure les rapports sociaux autochtones.

Appelé aussi droit coutumier traditionnel, celui-ci constitue la première source du droit de l'environnement dans les États africains.

On peut définir la coutume comme <<l'ensemble des manières de faire, considérées comme indispensable à la reproduction des relations sociales et à la survie des groupes lorsque ces groupes ne font pas appel à une instance extérieure ou supérieure (tels Dieu ou l'État) pour les réguler >>.

Pour le dire autrement, la coutume n'est pas particulièrement judiciaire ou juridique. Elle suit les articulations sociales dont elle s'inspire ou qu'elle habille.

En d'autres termes, la coutume constitue le cadre fondamental du mode de reproduction et de transmission des attitudes et valeurs.

On connaît le processus de formation de la coutume. Ce qui caractérise cette source du droit, c'est son caractère populaire ou impersonnel, c'est-à-dire que personne en particulier n'est chargée de créer la règle coutumière.

Elle est l'oeuvre de Monsieur tout le monde, des particuliers comme des gouvernants. <<C'est la source <<naturelle>> au sens plein du mot, faite de précédents, d'imitations, de comportements héréditaires>>[126]

Mais si le mécanisme de formation des coutumes africains est relativement simple, il est plus difficile de savoir, d'un point de vue sociologique, comment ces coutumes ont pris naissance.

 Elles sont en réalité des solutions adoptées par les groupes sociaux pour résoudre leurs problèmes, dont les caractères dépendent de données fournies par les faits. Ceci explique que les caractères des droits précoloniaux dérivaient directement des caractères des sociétés où ils avaient pris naissance et que ces sociétés parvenues à un degré analogue d'évolution, les coutumes, malgré leur diversité présentent une certaine unité.

 Il est clair, que c'est dans ce contexte que les représentations culturelles africaines de l'environnement prennent forme.

La protection de la nature et le souci de préserver l'équilibre du milieu  sont une préoccupation constante de la plupart des sociétés africaines traditionnelles dans la mesure où, l'homme y vit généralement en harmonie avec la nature dont il se conçoit comme un des éléments.

Cette préoccupation se traduit sur le plan juridique par des prescriptions du droit coutumier réglementant, suivant les zones considérées, la coupe de l'arbre, l'utilisation des cours d'eaux communs, la chasse, les feux de brousse, l'affectation et l'utilisation des sols,...

En dépit des mutations actuelles, le droit coutumier traditionnel reste encore très vivace en zone rurale, et joue dans certains cas le rôle de droit supplétif.

On l'aura noté : l'existence des sources traditionnelles implique que les systèmes juridiques africains sont de systèmes complexes, des systèmes sédimentaires faits d'apports successifs.

Dans la plupart des États, les procédés modernes sont en concurrence avec l'un des procédés traditionnels de création de droit, parfois même avec les deux. Inévitablement, cette coexistence que nous évoquions tantôt, soulève le problème des rapports entre le droit moderne et les droits traditionnels et entre ces derniers eux-mêmes.

D'un point de vue statique, comment régler les conflits éventuels entre des règles d'origine différente ?

D'un point de vue dynamique, quel est l'avenir des droits traditionnels ? Faut-il les marier aux droits modernes ? Dans l'affirmative, à quel prix, selon quelle méthode ? Est-il préférable de confier cette tâche aux tribunaux ou aux législateurs, chargés d'élaborer dans chaque État une <<common law>> africaine à partir des règles existantes ?

Si nous n'avons pas la prétention de répondre à toutes ces interrogations, une chose est sûre et certaine : au-delà de ces problèmes posés, c'est toute la réflexion sur l'efficacité et l'effectivité des différents types idéaux des ordres normatifs (qu'il soit accepté, négocié, imposé ou contesté) [127] en vigueur dans le champ juridique et judiciaire en Afrique qui doit être menée.

Ceci est d'autant plus urgent eu égard à l'impact de la colonisation sur les droits "locaux".

 

§ II - Du droit colonial

La colonisation apportera des modifications importantes aux procédés traditionnels de création de droit que nous venons de décrire.

Ces procédés fonctionnent désormais dans un contexte nouveau qui réagit inévitablement sur l'évolution des droits traditionnels, en dehors de toute action volontaire des autorités coloniales.

La colonisation est à l'origine de transformations économiques, sociales, culturelles, religieuses, qui contraignent les droits traditionnels à évoluer dans un sens déterminé, celui du modernisme.

La sclérose des structures socio-économiques, précoloniales et le culte des ancêtres qui avaient précédemment déterminé une cristallisation des droits traditionnels sont mis en cause[128].

L'exemple de la politique domaniale et foncière de la colonisation en est une parfaite illustration.

Il est évident que les droits fonciers coutumiers africains, on le sait, sont d'une très grande complexité. Ils constituent surtout un fait social total qui dépasse la seule réglementation des prérogatives résultant de l'appropriation ou de l'utilisation de la terre. Cette dernière est l'objet d'enjeux multiples dont certains sont de nature méta-juridique.

La terre est d'abord une chose sacrée qui assure dans la plupart des sociétés africaines la médiation de l'homme au sacré; elle est ensuite un élément du statut social dans la mesure où elle détermine les rapports de l'homme aux différents groupes sociaux dont il est membre; elle est enfin un enjeu économique en tant que moyen de production[129]

Ce pluralisme de l'objet ou des fonctions de la terre soustrait celle-ci à une réglementation par du <<droit pur>> et désincarné, indifférent à la sociologie et notamment au religieux, comme l'est le droit occidental depuis qu'il a été placé sous le règne du positivisme normativiste.

La terre n'est donc pas perçue en Afrique, comme une chose morte, sans âme, susceptible d'appropriation privative individuelle, mais comme le sanctuaire des forces et des esprits.

C'est pourquoi les droits sur les terres sont concédés, non cédés, étant entendu qu'il s'agit de droits à la fois précaires et définitifs[130].

Précaires, en ce sens que nul ne peut les comparer au droit de propriété européen, absolument opposable à tout tiers et à toute autorité sociale, sauf en cas de procédure d'exploitation pour cause d'utilité publique.

Définitifs cependant, dans la mesure où ils sont partie intégrante du statut de l'individu au sein de l'ordre dont il est membre.

Pour autant, ce ne sont pas des droits réels, mais plutôt des << droits personnels de l'individu sur le groupe, dans le cadre du groupe, comme expression du groupe >>[131]

Aussi longtemps que l'individu est reconnu comme membre du groupe, c'est-à-dire tant qu'il n'aura pas été banni, que sa filiation ou son alliance avec le groupe pourra être établie, il aura un droit absolu à une terre de la communauté et éventuellement à celle de son lignage et de son père.

On le voit : la double dimension sacrée et communautaire de la terre dans l'Afrique traditionnelle lui assure un rôle capital dans la protection de l'environnement.

D'une part, la terre en tant que chose sacrée est soigneusement préservée comme en témoignent les nombreux bois sacrés qui la protègent par leur couvert végétal jalousement conservé et soigneusement entretenu.

D'autre part, la terre est une chose communautaire dont le chef lui-même ou le maître de la terre n'est que le gardien[132], et la personne, la famille ou le clan à qui elle est confiée pour servir à la fois de lieu de culte, de sépulture et de domaine exploitable doit la gérer d'autant plus <<rationnellement>> suivant une rationalité cosmologique et cosmogonique propre à chaque communauté qu'elle n'est pas un simple bien qu'on use, abandonne ou aliène à sa guise.

 

§ III - Du droit écrit post-colonial

On peut distinguer ici, suivant l'ordre chronologique de leur formation, les sources législatives et réglementaires, d'émergence plus ancienne et des sources constitutionnelles d'apparition plus récente.

Depuis la Conférence de Stockholm de 1972 sur l'environnement et quelquefois avant, de plus en plus de pays africains ont édicté des réglementations relatives aux parcs et réserves naturelles, à la protection des sites et de certaines espèces fauniques.

La question était abordée indirectement à travers certaines branches du droit liées à la gestion des ressources et de l'espace, tels que le droit de l'urbanisme, le droit de l'aménagement du territoire, le droit minier et le droit forestier etc.

Il en est résulté un éparpillement des normes juridiques relatives à la protection de l'environnement tenant à leur fragmentation sectorielle.

En revanche, le renouvellement du constitutionnalisme africain, consécutif aux mutations politiques en cours depuis le début des années 1990, révèle une plus grande attention des constituants africains aux considérations environnementales. Cette attention est liée à une prise, de conscience exceptionnelle enclenchée par la CNUED et galvanisée par le Sommet de RIO.

Ainsi, la plupart des constitutions africaines adoptées depuis lors consacrent une ou plusieurs dispositions à l'environnement, soit dans leurs préambules, soit dans leurs dispositions mêmes.

Sur le plan régional, l'apport de l'Organisation de l'Unité Africaine (l'OUA) à la protection de l'environnement est double : en premier lieu, l'OUA a contribué à élaborer un droit régional de la conservation de la nature.

Au-delà de la convention d'Alger de conservation de la nature et des ressources naturelles (1968) et de la convention phytosanitaire pour l'Afrique (1969) contre les maladies des végétaux, c'est surtout la réplique africaine à la convention de Bâle qui est la plus marquante.

En second lieu, l'OUA a participé à l'élaboration du DIE à travers les conférences de Stockholm et de RIO.

En troisième lieu, on peut dire qu'au-delà des obstacles politiques, juridiques et institutionnels liés à l'OUA (il n y a pas, par exemple, d'organes permanents et indépendants en matière d'environnement) le problème dramatique de la précarité de la situation financière est plus que jamais posé en particulier pour contribuer à promouvoir et appliquer des législations dans chaque État africain et ce, à travers des associations et des organisations régionales africaines[133].

On le voit, la bataille pour la protection de l'environnement se déroule sur tous les fronts.

Aujourd'hui, se dessine un fort mouvement de constitutionnalisation du droit de l'environnement en Afrique.

Il reste toutefois, que ce droit ne peut être véritablement efficace et effectif que si d'une part, les représentations culturelles africaines de l'environnement sont prises en compte dans son élaboration, et, d'autre part, si la plupart des concepts qui accompagnent le droit de l'environnement : ainsi le concept de développement durable, le concept de générations futures, de patrimoine commun de l'humanité et bien d'autres principes encore dont il convient à présent d'en discuter leur portée en Afrique sont bien étayés et revisités.

 

DEUXIEME PARTIE : POUR UN DROIT DE L'ENVIRONNEMENT PLUS RESPONSABLE, PLUS EFFICACE ET PLUS EFFECTIF EN AFRIQUE.

Lorsque l'on est amené à l'application du droit de l'environnement, il faut parler en terme d'effectivité et d'efficacité.

L'effectivité peut être définie comme la correspondance entre la règle et le comportement de ses destinataires.

On peut à cet égard distinguer, d'une part, des destinataires primaires qui seraient les citoyens, le commun des mortels, et, d'autre part, des destinataires secondaires qui seraient les autorités chargées de veiller à l'application de la règle.

L'efficacité peut être définie comme les moyens mis en oeuvre pour atteindre un résultat, un but déterminé, ce qui pose les problèmes de la qualité des moyens mis en oeuvre par rapport au but visé.

On l'aura compris : les problèmes d'effectivité et d'efficacité sont intimement liés.

Cependant, quelque soit le type de phénomène privilégié (conciliation, répression ou négociation) l'effectivité et l'efficacité seront toujours imparfaites, dans la mesure où le droit de l'environnement et notamment la dimension morale qui pourrait y être attachée est ambiguè.

Ambiguè et incertain, le droit de l'environnement l'est aussi dans ses fondements et contradictoire dans son contenu.

L'absence de choix clair et de priorité nettement affichée conduit à l'altération des textes, à leur contournement.

Faute d'une élaboration d'ensemble, on en est réduit aujourd'hui à pointer d'innombrables incohérences qui ne sont que le reflet de l'incapacité de nos sociétés à conjuguer réellement environnement et développement[134].

Ces contradictions ou du moins ces discours ambiguès sont, en partie, à l'origine de l'ineffectivité du droit de l'environnement - si l'on veut se donner la peine -  d'observer la pratique quotidienne.

En Afrique, la situation se complique avec l'émergence des nouvelles questions posées par l'environnement et notamment des nouveaux concepts pour le moins trop imprécis et vagues qui accompagnent le droit de l'environnement.

S'il est manifeste que le droit de l'environnement ne peut être dissocié des études menées en biologie, physique, chimie, géographie, sociologie, océanologie etc., il devrait aussi permettre la réconciliation si ardue à entreprendre, entre d'une part, le droit positif et le droit naturel, d'autre part entre l'environnement et le développement.

En clair, le droit de l'environnement ne saurait se réduire au constat des règles existantes (comme nous venons de le voir) mais doit se livrer à une opiniâtre recherche fondée sur l'observation de la nature, ses causes finales, ses orientations natives, les victoires sur l'entropie de la conservation et de la perpétuation des espèces.

Dans cette démarche téléologique, l'utilité n'est pas utilitarisme car elle sert le Mieux-Etre, le Mieux-Vivre préférés au Mieux-Avoir.

Cette deuxième partie a une double ambition.

D'abord, à travers une approche dialectique, un jeu permanent d'interactions, nous voulons redéfinir les concepts en présence, et ce, dans le seul but de mettre en place quelques éléments pour une véritable réconciliation entre l'environnement et le développement (Chapitre premier);

Ensuite, au-delà du droit-recherche et du droit règle, il faudra mettre en place quelques éléments de réflexion théorique et constructive pour un droit de l'environnement plus effectif en Afrique (Chapitre deuxième).

 

CHAPITRE PREMIER : LA NÉCESSITÉ D'UNE RÉCONCILIATION ENTRE L'ENVIRONNEMENT ET LE DÉVELOPPEMENT. CONDITION SINE QUA NON D'UN DÉVELOPPEMENT "DURABLE" POUR LES "GÉNÉRATIONS FUTURES"

 

 Trois questions pour nous introduire dans ce débat.

Le droit de l'environnement est-il un instrument aux mains des décideurs, de l'État ou plutôt un outil de sauvegarde de la nature ?

 La protection de l'environnement peut-elle concilier en un temps record, les faveurs de son principal rival : le droit du développement et de la croissance économique déchantés aujourd'hui ? Le droit de l'environnement tel que prêché aujourd'hui est-il un correctif au droit du développement tant exalté en Afrique dès les années 1960 ? S'agit-il enfin d'une "voie de salut"? ou encore d'un autre "machin" ?

Difficile à dire, du moins pour l'instant.

L'admonestation pathétique : <<halte à la croissance>>,  si elle n'eût pas pour résultat une remise en cause du progrès que la crise économique se chargea peu après de provoquer, favorisa une prise de conscience des liens intimes entre la matière, l'énergie et la vie, entre le développement et l'environnement[135] 

La protection du patrimoine et des équilibres naturels ne sauraient se concevoir comme une simple politique de conservation en l'état primitif et de préservation contre les dégradations. Sa survie appelle une politique d'entretien, d'exploitation, de gestion et parfois d'aménagement :l'environnement doit s'allier le développement, lequel doit être <<durable>> (Section II).

En outre, la réconciliation entre l'environnement et le développement ne peut être scellée de façon solide et porteuse que si les diverses notions qui ont émergé récemment à la faveur du développement du droit de l'environnement au niveau international ne reçoivent un contenu précis (Section I)

 

SECTION I :  LES NOTIONS ET CONCEPTS EN CONFLITS ET EN DÉBATS

Le droit de l'environnement est un terrain idéal pour l'innovation juridique.

Sa fertilité le prédispose à un foisonnement conceptuel d'autant plus riche que les sciences de la nature lui apportent régulièrement des données nouvelles. Seulement, ce foisonnement d'idées et de notions en vient quelquefois à dérouter le juriste, car les notions nouvelles suggérées à partir de considérations écologiques ne sont pas toujours faciles à appréhender sur le terrain juridique et pratique.

C'est le cas des principes ou des concepts de développement durable, des générations futures, d'intérêt commun de l'humanité qui sont au coeur de la problématique environnement et développement aujourd'hui.

 La science du droit se doit de construire ces notions sur le plan juridique en donnant à chaque concept une signification juridique précise (§ I).

D'autre part, se pose le problème de la réception en droit de l'environnement de notions certes consacrées par ailleurs, mais dont l'application en matière d'environnement apparaît malaisée, suivant le domaine en cause. Il en est ainsi de la notion de <<patrimoine commun de l'humanité>> dont l'application à certaines ressources de la nature reste débattue et apparaît à bien des égards comme un sujet de controverses (§ II).

 

§ I - Comment construire une notion juridique de << développement durable>>

L'intérêt de la question est le suivant : le Droit International de l'Environnement repose essentiellement sur une notion, celle du développement durable, or celle-ci fait l'objet de diverses interprétations, que peut-on en penser ?

Au niveau international, le concept apparaît dans les années 1960 sous d'autres appellations, la conférence de Stockholm dégage le concept d'éco-développement (1972), l'UICN invente le concept de développement durable (1980).

Cette expression est définie puis proposée au niveau international par la commission mondiale sur l'environnement et le développement (CMED).

Créée en 1983 par l'Assemblée Générale des Nations Unies son rapport <<our common future>> ( 1987) est à l'origine de la notion de << substainable development>> : << ce qui s'impose, c'est une nouvelle approche : l'ensemble des nations devrait viser un type de développement où s'articuleraient la production et la conservation de ressources, et où les deux seraient associés à une politique permettant à tous de vivre correctement et d'accéder équitablement aux ressources. La notion de développement soutenable offre un cadre permanent d'intégrer politiques d'environnement et stratégies de développement, ce mot étant entendu au sens le plus large. (...) Le développement soutenable c'est s'efforcer de répondre aux besoins du présent sans compromettre la capacité de satisfaire ceux des générations futures...>>[136]

Au regard de cette définition, deux observations s'imposent .

D'abord, le concept de<<besoins>>, et plus particulièrement des besoins essentiels des plus démunis, à qui il convient d'accorder la plus grande priorité.

Peut-on dire, en l'état actuel des choses que les besoins essentiels des plus démunis sont pris en compte ?

Peut-on vivre correctement et accéder équitablement aux ressources quand les discriminations entre le Nord et le Sud d'une part, et entre le Sud-Sud d'autre part, sont des plus criantes en cette fin de siècle ?

Peut-on protéger les "générations futures" quand les générations présentes n'ont pas le strict minimum pour vivre ?

Le qualificatif de <<durable>> ne signifie t-il pas ce qui est stable ?

Ce qui correspond à une gestion d'un bien-être qui dure ? Mais pour qui ?

Ensuite, l'idée même d'une croissance économique ne constitue t-elle pas un danger pour l'environnement, puisqu'elle exerce des pressions sur les ressources. On connaît la chanson du développement et de la croissance économique plus précisément les théories des "développeurs" de l'Afrique.

Nous empruntons ce terme à Robert Chambers[137]

Il existe certainement un << piège du développement durable>>, comme le fait remarquer, d'ailleurs, excellemment l'économiste Serge Latouche <<le développement durable, soutenable ou supportable n'est pas que la dernière née d'une longue suite d'innovations conceptuelles visant à faire rentrer une part de rêve dans la dure réalité de la croissance économique.

Cette inflation des qualificatifs ajoutés au développement est une tentative de conjuration magique de ses effets négatifs. Le développement a été successivement : endogène, autocentré, socialiste, intégré, intégral, harmonieux, participatif, autonome et populaire (...). On a là un bel exemple de diplomatie verbiale, consistant à changer les mots quand on est impuissant à changer les choses.

Si c'est le développement et non l'environnement qu'il s'agit de rendre durable, on a affaire à une mystification. Si durable veut dire préserver l'environnement, alors c'est incompatible avec la logique économique.

Pour comprendre le jugement pessimiste que l'on peut porter sur la probabilité et la consistance d'un développement durable et en tirer les conséquences pratiques il faut rompre avec ces stratégies incantatoires et regarder les choses en face.

Le <<développementisme>> manifeste la logique techno-économique dans toute sa rigueur. Il n'y a pas de place dans ce <<paradigme>> pour le respect de la nature réclamé par les écologistes (...). Le développement durable est comme l'enfer, il est pavé de bonnes intentions.

 Les exemples de compatibilité entre développement et environnement qui lui donnent créance ne manquent pas. Il ne faut pas se leurrer pour autant.

 Ce n'est pas l'environnement qu'il s'agit de préserver, mais avant tout le développement. Là réside le piège >>[138]

Serge Latouche ajoute dans son ouvrage sur les Dangers du marché planétaire que <<le slogan du développement durable permet de satisfaire dans l'imaginaire deux aspirations antagonistes, la poursuite indéfinie d'une forme d'économie fondée sur la domination et la destruction de la nature, et la préservation d'un environnement sain>>[139]

On le voit, le "développement durable" tel que consacré solennellement par la Déclaration de RIO est un concept flou, difficile à transcrire en droit et a fortiori  dans la pratique juridique.

Par ailleurs, s'il apparaît d'emblée comme une notion économique, la notion de développement durable a, un champ plus vaste que celle initiale, de développement économique : elle propose un modèle de croissance et d'activité humaine qui inclut explicitement les considérations environnementales et le principe d'une allocation et d'une utilisation progressives et, donc durable, des ressources.

Enfin, devant les deux thèses du développement durable en présence, il faut construire une relation du <<milieu>> ou d'un <<juste milieu>> (nous empruntons ce terme à François Ost).[140] Une relation transformative qui soit en fait déterminante de leur identité même.

La première thèse explicite ou implicite, est celle en particulier d'un grand nombre d'hommes politiques, d'industriels, et plus généralement de décideurs : l'important ici c'est que le développement puisse durer.

La seconde thèse, qui est celle en particulier de chercheurs en sciences écologiques, des responsables d'ONG, consiste à affirmer que le développement durable est avant tout respectueux de l'environnement, de la préservation des écosystèmes.

Pour les ONG, le terme développement contenu dans cette expression s'entend par opposition à la croissance, et vise un développement socialement juste et écologiquement sain.

Loin d'être une médiocre moyenne entre deux extrêmes, le juste milieu apparaîtra comme une alternative ou du moins un "médium".

De nombreux juristes insistent sur cette vision.

Pierre Marie Dupuy écrit :<< le développement constitue désormais l'axe autour duquel les négociations multilatérales menées dans le cadre universel tentent de regrouper les principales règles constitutives du droit contemporain de l'environnement>>[141]

Pour sa part, Alexandre Kiss écrit : <<on peut estimer que désormais la fusion est définitive entre protection de l'environnement et développement. Elle est exprimée par le terme <<développement durable>> qui ne signifie pas nécessairement croissance économique. Elle impose des devoirs aux pays pauvres, mais aussi aux pays industrialisés : les relations entre les deux ne sont plus basées sur des considérations humanitaires ou politiques, mais sur la solidarité inévitable de toute l'humanité devant les grands problèmes auxquelles elle doit faire face[142]

Si pour Stéphane Doumbé-Billé[143], l'enseignement qu'il faut tirer de la double crise écologique est l'émergence d'un droit des générations actuelles et à venir à satisfaire équitablement leurs besoins de développement et d'environnement, Edith Brown Weiss[144] plaide pour un véritable "Droit intergénérationnel" destiné à préserver la qualité de l'environnement et de la vie des futures générations.

On le comprend aisément l'entreprise est loin d'être facile.

Peut être que l'entreprise s'avère t-elle simplement impossible; elle est à tout le moins difficile, d'autant que la notion de développement est, même sur le terrain économique où elle a fait en premier son apparition, une notion controversée, impliquant en tout état de cause des éléments non matériels et non quantifiables.

Il est sans doute bien plus aisé en droit de dire quelles sont ses implications juridiques, que ce soit au niveau interne d'un État ou au niveau international. Qu'à cela ne tienne, si ces différents concepts ne sont pas clairement définis, le droit de l'environnement en Afrique ne peut être, une fois de plus, comme l'a été jusque là, le droit foncier, qu'un instrument aux mains des décideurs, de l'État plutôt qu'un outil de sauvegarde de la nature.

Pire encore, les acteurs les mieux informés, se prêteront à une utilisation opportunistes des règles juridiques en fonction du résultat recherché. Paradoxalement, le<<panjuridisme>> ou envahissement d'un champ déterminé par un amoncellement de règles en modification permanente, conduira alors au <<non-droit>>. C'est donc bien l'ambivalence qui caractérise l'application du droit de l'environnement en Afrique.

On le voit, la notion de développement durable reste un problème entier sous l'angle juridique. Il en est de même de celle de patrimoine commun de l'humanité qui se pose non seulement en termes de temps et d'espace mais entre en conflit avec le principe de souveraineté des États.

 

§ II - Comment concilier le principe de la souveraineté des États sur leurs ressources naturelles et l'environnement comme <<patrimoine commun de l'humanité>>

En droit, le concept de <<principe>> est autre chose qu'un simple énoncé constatatif ou axiomatique. Il signifie[145]:

* Soit une règle ou une norme générale de caractère non juridique d'où peuvent être déduites des normes juridiques : ainsi en est-il du principe de la souveraineté de l'État ou du principe de coopération par exemple.

* Soit une règle juridique établie par un texte en termes assez généraux, destinés à inspirer diverses applications et s'imposant avec une autorité supérieure. Le terme principe renvoie dans ce cas au "principe positif du droit" c'est-à-dire à une norme explicitement formulée dans un texte de droit positif, à savoir, soit une disposition légale, soit une norme construite à partir des éléments contenus dans ces dispositions.

Le droit international de l'environnement à émergé dans une société internationale déjà travaillée par d'autres préoccupations liées à l'émergence de nouveaux États et à leurs soucis de développement.

Nouveaux venus sur la scène internationale, ces États avaient à coeur d'affirmer leur souveraineté en tant qu'entités indépendantes.

Confrontés aux difficultés du sous-développement, ils tenaient à avoir la maîtrise juridique de leurs richesses afin de les mettre au service de leur essor économique.

Le principe de la souveraineté permanente des États sur leurs ressources naturelles est né de la rencontre de ces deux préoccupations.

Parallèlement, s'est développée la conscience que les problèmes environnementaux ne peuvent être résolus efficacement au niveau d'un seul État, mais, en bien des domaines, au niveau régional ou planétaire comme en témoigne la Déclaration de RIO.

La progression au sein de la communauté internationale de l'idée majeure selon laquelle l'environnement doit être préservé non seulement dans l'intérêt des habitants actuels de la planète mais aussi dans celui des générations à venir a conduit à la nécessité d'ériger l'environnement en un <<patrimoine commun de l'humanité>>.

Il faut indiquer d'emblée que cette expression très usitée, empruntée manifestement au droit de la mer, est critiquable, et d'abord sur le plan de la terminologie.

Elle est redondante dans la mesure où l'humanité étant formée de l'ensemble de l'espèce humaine regroupée au sein des États, son patrimoine est nécessairement commun. L'épithète <<commun>> est donc de trop et inutilement emphatique.

Par ailleurs, dans le langage courant, le mot "humanité" est parfois confondu avec l'ensemble des peuples du monde.

Il s'agit, en fait, des générations passées, présentes et à venir. C'est probablement une solidarité intergénérations qui caractérisait le mieux l'humanité avec, bien sûr, le fait qu'existent une unité autour de l'espèce humaine et une diversité très importante[146]

Il est clair que l'humanité fait ici partie intégrante de la nature.

Il reste, toutefois, que deux logiques contradictoires s'affrontent en permanence en droit international de l'environnement.

D'abord, celle issue de la pente naturelle des souverainetés qui conduit à l'accaparement prédateur des ressources prises dans la masse du territoire et enserrées dans ses frontières.

Ensuite, celle qui résulte au contraire du constat lucide des faillites auxquelles mène la première tendance, et engendre non plus la dynamique de l'accaparement mais celle de la coopération et de la coordination internationales des usages d'un environnement perçu comme un bien collectif[147].

Cette contradiction fondamentale est encore irrésolue, en particulier lorsque les aspects en cause de l'environnement concernent des ressources naturelles situés sur le territoire des États.

Ainsi l'érection de l'environnement en patrimoine de l'humanité implique en effet que de chose d'un seul (État) les ressources concernées deviennent un<<bien>> collectif.

Or, on le sait bien, ces ressources (c'est en particulier le cas des forêts) ou d'autres biens culturels, naturels ou mixtes sont avant tout des ressources naturelles à valeur économique.

Elles constituent par conséquent des richesses nationales au même titre que d'autres richesses, et, les États qui, par le hasard de la géologie et de la géographie abritent ces richesses sur leurs territoires les percevant d'abord sous cet angle avant toute autre considération.

Dès lors, déclarer ces ressources "patrimoine de l'humanité" apparaît à leurs yeux comme une spoliation de leurs richesses naturelles nationales.

Du coup, la notion de "patrimoine commun" entre alors directement en conflit avec le principe de la "souveraineté permanente" des États sur leurs ressources naturelles.

Ce principe, consacré par la résolution 1803 (XVII) adoptée par l'Assemblée générale des Nations Unies le 14 décembre 1962, est considéré comme un des principes fondamentaux du Nouvel Ordre Économique International (NOEI)[148].

Le recul du NOEI n'a pas entamé ce principe qui fait désormais partie intégrante du droit international positif[149], au même titre que le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes[150] dont il constitue un <<élément fondamental>> (cf. préambule de la résolution 1803).

Cette résolution indique d'ailleurs que toute mesure prise aux fins de la résolution 1514 (XV) <<doit se fonder sur la reconnaissance du droit inaliénable qu'à tout État de disposer librement de ses richesses et de ses ressources naturelles, conformément à ses intérêts nationaux et dans le respect de l'indépendance économique des États>>.

L'Assemblée Générale des Nations Unies déclare par ailleurs dans la même résolution que <<<le droit de souveraineté permanente des peuples et des nations sur leurs richesses et leurs ressources naturelles doit s'exercer dans l'intérêt du développement national et du bien-être des populations de l'État intéressé.>>

On le voit : la souveraineté contrarie ici, au moins sur certains points, les desseins écologiques planétaires, et la difficulté n'est pas aisée à surmonter sur le plan des principes.

Trois questions nous viennent à l'esprit.

D'abord, du point de vue des objectifs du patrimoine, il s'agit de soustraire des espaces ou des biens à la souveraineté étatique et d'organiser leur gestion commune, rationnelle et durable.

La question est de savoir au nom de quoi et de qui peut-on prendre une telle décision ? Qui doit organiser cette gestion rationnelle ?

L'expression <<gestion écologiquement rationnelle>> présente dans l'Agenda 21 ne demande t-elle pas à être précisée dans ses moyens et ses fins ?

Jean Jacques Gouguet, économiste, écrit d'ailleurs dans une analyse critique d'Agenda 21 : <<les rédacteurs d'Agenda 21 auraient dû se poser cette question : avons-nous besoin d'une gestion rationnelle ou bien d'une gestion raisonnable ? Les termes ne sont pas neutres. Ils sont porteurs de sens.

 Le fait d'utiliser de façon continue le concept de rationalité renvoie inévitablement à une logique économicienne de marché, ce qui n'est pas nécessairement le meilleur moyen de concevoir un développement durable>>[151].

Ensuite, du point de vue des problèmes posés par le <<patrimoine commun de l'humanité>> (PCH) : comment institutionnellement représenter l'humanité en particulier les générations futures ? Un être qui n'existe sous aucune forme car ni né, ni conçu peut-il se voir reconnaître un droit ? Les droits sont -ils reconnus aux générations futures ou aux personnes, ut singuli, qui les composeront ?

Les États parties à une convention assureront-ils cette représentation ?

Comment politiquement et économiquement ne pas transformer le <<patrimoine commun de l'humanité>> en une machine juridique participant à une mainmise des pays les plus puissants du Nord et de leurs firmes internationales sur les pays du sud ?

Autant de questions qui, si elles ne sont pas prises en compte, compliqueront davantage les discours sur le droit de l'environnement en Afrique.

Enfin, du point de vue du contenu du PCH, des éléments qui appartiennent juridiquement à l'humanité doivent être clairement définis.

A t-on vraiment besoin, comme nous le confiait, le professeur Alain Rochegude[152], de préserver ou de garder tous les insectes du monde parce qu'ils doivent appartenir au patrimoine commun de l'humanité ?.

En définitive, il convient d'imaginer des formules juridiques susceptibles de concilier le principe de la souveraineté des États sur les ressources en cause, considérées comme richesses naturelles, et l'exigence de la gestion écologiquement rationnelle de ces ressources dans l'intérêt des générations actuelles et à venir.

C'est à cette condition que l'environnement peut s'allier le développement, lequel doit être durable et profitable aux peuples et non seulement aux industriels.

 

SECTION II : L'ENVIRONNEMENT DOIT S'ALLIER LE DÉVELOPPEMENT, LEQUEL DOIT <<ETRE DURABLE>>

Les préoccupations écologiques allaient se révéler comme un élément indispensable au développement lui permettant d'être durable et de n'être pas entaché d'effets secondaires imprévisibles ou fâcheux.

C'est dans ce contexte qu'apparu <<l'écodéveloppement>> entendu comme un développement rationnel du point de vue écologique accompagné d'une gestion judicieuse du milieu[153].

Autrement dit : l'environnement est un facteur de développement comme le précise d'ailleurs le principe 25 de la Déclaration de RIO : <<la paix, le développement et la protection de l'environnement sont interdépendants et indissociables>>.

Dans le même sens, le principe 4 affirme <<pour parvenir à un développement durable, la protection de l'environnement doit faire partie intégrante du processus de développement et ne peut être considérée isolement>>.

Pour notre part, l'environnement ne peut être conçu à la fois comme porteur de paix et de développement que si au-delà de la consécration juridique du droit à l'environnement et au développement (§ I), l'idée qu'il y a un lien étroit entre le droit à l'environnement et le droit au développement connaît une application effective en Afrique (§II).

 

§ I - La promotion du droit à l'environnement

Ce droit, reconnu aux individus et à leurs regroupements, comprend le droit à l'information, à la participation et au recours. C'est un droit à la conservation de l'environnement.

 Du point de vue global, il est consacré dans la Déclaration de Stockholm (1972) <<l'homme a un droit fondamental à la liberté, à l'égalité, et à des conditions de vie satisfaisantes, dans un environnement dont la qualité lui permette de vivre dans la dignité et le bien-être (...) >> (principe 1)

Le texte de la déclaration fait une confiance absolue à la science et à la technique pour permettre à l'homme d'améliorer son environnement.

Les facteurs culturels et spirituels sont malheureusement, une fois de plus, ignorés.

Si la Déclaration de RIO (1992) apparaît bien ambiguè dans la formulation du droit à l'environnement, c'est l'Afrique, qui, la première, a donné une consécration juridique formelle au droit à l'environnement à travers la Charte africaine des droits et des peuples adoptée à Nairobi (Kenya) le 28 juin 1981, dont l'article 24 dispose que <<tous les peuples ont droit à un environnement satisfaisant et global, propice à leur développement>>.

Cette charte, entrée en vigueur le 21 octobre 1986, a introduit désormais le droit à l'environnement dans le droit international positif, fut-il- de portée régionale.

Toutefois, jusqu'à aujourd'hui, ce nouveau droit de l'homme, placé sous le signe de la solidarité internationale, mais qu'il est possible de rattacher au"droit du bien-être" évoqué dans la Déclaration Universelle des droits de l'homme de 1948, ne figure que depuis peu dans des instruments contraignants de portée universelle, et encore dans un contexte très marqué.[154]

Ce droit à l'environnement a, par rapport à d'autres droits de l'homme, une spécificité notable : il a naturellement pour destinataires des individus, des communautés, des peuples mais aussi des "générations futures".

On a même parlé de "trust planétaire", chaque génération recevant un legs qu'elle détient pour le compte des générations suivantes[155].

Seulement la même question se pose : comment assurer la représentation des intérêts de ces dernières ?

Et, dans la mesure où le temps <<abolit les barrières érigées par les vies humaines>>[156], comment arriver à apprécier les risques d'irréversibilité ?

On le voit bien : une éthique de la responsabilité s'impose ici (nous y reviendrons).

Par ailleurs, le droit à l'environnement est consacré par un certain nombre de constitutions africaines récentes, soit indirectement à travers la référence à la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples (ex; article 7 de la Constitution du Bénin de 1990; préambule de la constitution nigérienne du 26 décembre 1992), soit directement en lui consacrant une disposition explicite (article 29 de la constitution sud-africaine de 1983 amendée plusieurs fois depuis lors); (les articles 47 et 48 de la constitution tchadienne du 31 mars 1996), soit enfin en utilisant les deux techniques à la fois : ainsi du préambule et de l'article 29 de la constitution du Burkina-Faso du 11 juin 1991 qui dispose :<<le droit à un environnement sain est reconnu...>>

Certains pays africains paraissent ainsi, sur un plan purement formel, tout au moins, bien en avance sur de nombreux pays développés où la constitutionnalisation du droit à l'environnement, voire sa simple consécration juridique au moyen même des catégories normatives inférieures à la constitution, demeure une revendication.

Reste tout de même - nous semble t-il - deux questions transversales mais sous-jacentes à cette consécration d'un droit de l'homme à l'environnement tant revendiquée. Ce droit est-il promis à être un droit humain ordinaire, semblable dans sa nature et dans ses conséquences à ceux qui l'ont précédé ? Ou s'agit-il des droits égaux à l'existence et au développement de chaque élément de la nature parmi lesquels l'homme deviendra un citoyen biotique[157] (biotic citizen) ou encore d'une <<communauté juridique naturelle>> (natürliche rechtsgemeinschaft)[158]. Autrement dit : s'agit-il d'élargir les droits fondamentaux à la nature elle-même ?[159].

On ne reprendra pas ici le procès, amplement développé par le professeur François Ost, que l'on peut instruire à charge de la deep ecology et, sur des bases différentes, à l'utilitarisme des intérêts qui conduit à doter les animaux de droits subjectifs[160].

Le danger en effet, est qu'en donnant trop d'importance à la vision radicalisée et faussée de la deep ecology, on en arrive à lui assimiler la cause écologique tout entière, qui serait alors rejetée sans même avoir été débattue.

Qu'il nous suffise donc de dire que, si nous (Africains, Européens, Asiatiques, Américains etc.;) avons des responsabilités à l'égard de la nature et des animaux, ils ne sauraient, en revanche, prétendre faire valoir des droits.

D'ailleurs, comment, en effet, prétendre s'inspirer des commandements de la nature alors que c'est nous mêmes qui la faisons parler ?

Est-ce vraiment nécessaire de mettre en place un <<parlement des choses>>, comme le préconise Bernard Latour ?

On le voit : les hésitations des uns et des autres sont, du moins compréhensibles.

Certains, insistant sur la finalité humaine de ce droit, sont conduits parfois à parler de droit d'accès à la nature mais se contentent souvent d'évoquer un droit au bien-être qui, dans cette hypothèse, se distingue mal du droit à la santé.

D'autres ont une conception plus innovante : préconisant une vision moins anthropocentrique du droit de l'environnement, ils suggèrent la prise en compte de la nature comme vecteur de ce droit.

Enfin l'hésitation est permise, nous semble t-il, car la mise en oeuvre du droit à l'environnement s'avère d'autant plus malaisée que son contenu est mal défini et paraît en tout cas trop englobant, donc extrêmement large.

Il faudrait en tout état de cause comprendre le droit à l'environnement comme un <<droit bidimentionnel>>, c'est-à-dire à la fois comme un droit humain et un droit de la nature.

Cette approche écarte naturellement l'anthropocentrisme juridique si fréquent en droit de l'environnement qui, par son objet même devrait mettre en avant la nature dans toutes ses composantes.

Nous pensons qu'il n'y a pas d'un côté la société, de l'autre la nature.

La réalité nous fait voir un <<milieu>>, produit dialectique de leurs interactions. La prise en compte de ce <<milieu>> implique assurément une révolution épistémologique mobilisant des savoirs interdisciplinaires et une pensée de la complexité qui saisisse les logiques multiples et circulaires de leurs transformations réciproques .

D'ailleurs, <<l'éco-développement>> en fournit un bel exemple de ce changement de paradigme.

On l'aura compris : revendiquer le droit à l'environnement, c'est aspirer à un milieu sain et équilibré, aspiration universelle qui ne peut cependant être pleinement réalisée que dans un contexte de développement économique harmonieux et durable.

De ce point de vue, le droit à l'environnement, ne peut se concevoir, pour les pays en développement en général, et, les pays africains en particulier, qu'en articulation avec le droit au développement.

 

§ II - La promotion de la relation entre droit à l'environnement et droit au développement

Dans la société internationale, le village économique a précédé le village écologique, en sorte qu'il est difficile d'envisager le second en ignorant le premier.

C'est, en effet, une certaine conception de l'économie et du progrès qui est à l'origine de la plupart des problèmes écologiques auxquels le monde est confronté aujourd'hui.

Mais le village économique est un lieu des inégalités, où les plus pauvres côtoient les plus riches et aspirent légitimement à accéder, eux aussi, au niveau du progrès atteint par ces derniers.

Dans cette perspective, l'environnement apparaît étroitement lié au développement, d'une part, parce qu'un certain mode de développement- notamment celui pratiqué jusqu'aux années récentes par les pays du Nord - est destructeur de l'environnement, d'autre part, parce que la pauvreté est l'un des principaux facteurs de la dégradation de la nature par l'homme et que les pays sous-développés se livrent à une surexploitation des ressources naturelles afin de se donner les moyens de réaliser leurs objectifs de développement économique et social.

La problématique s'énonce en des termes fort simples : si l'environnement n'est pas protégé, le développement sera compromis; sans développement, il ne sera pas possible de protéger l'environnement.[161]

 Par ailleurs, si l'Afrique a été la première à consacrer formellement le droit à l'environnement dans un instrument juridique régional ayant force contraignante, elle a été aussi à l'origine de la notion de droit au développement[162]

C'est, en effet, M. Keba M'Baye, alors premier président de la Cour suprême du Sénégal qui a été le promoteur de l'expression dans son cours inaugural[163] à la session de 1972 de l'Institut International des Droits de l'Homme (IIDH) de Strasbourg.

Cette problématique du droit au développement sera portée par le mouvement de revendication d'un Nouvel Ordre Économique International (NOEI) dont l'un des temps forts fut la VIe session spéciale de l'Assemblée Générale des Nations Unies de mai 1974.

 Entre 1971 et 1974, tous les documents importants issus de rencontres internationales ont souligné avec force le lien étroit entre l'environnement et le développement : le rapport de Founex (Suisse) de juin 1971, le Plan et la Déclaration de Stockholm (Suède) de juin 1972 et la Déclaration de Cocoyoc (Mexique) d'octobre 1974.

C'est, en effet, à Founex que l'environnement et le développement se sont révélés être deux aspects de la même question, et c'est grâce aux pays en voie de développement qu'une telle réalité devint une évidence pour tous.

De plus, le Rapport de Founex souligne <<l'urgence impérieuse des problèmes d'environnement qui naissent de la pauvreté, de la nécessité de prendre à nouveau conscience de l'importance des mesures correctives, et par dessus tout, l'obligation nationale aussi bien qu'internationale de se consacrer au développement en tant que tel>>[164].

Peut-on interpréter la politique de la Banque Mondiale aujourd'hui en matière des affaires environnementales comme une réponse à la réaction des pays en voie de développement ?

Le moins que l'on puisse dire, c'est que l'insertion de la Banque Mondiale dans la dynamique environnement-développement a été lente et mouvementée, - nombre d'ONG, surtout nord-américaines, l'ont vivement critiquée-,[165] mais elle est aujourd'hui acquise.

Son Rapport annuel de 1992 intitulé<<le développement et l'environnement>> fait de la lutte contre la pauvreté un impératif d'ordre moral, indispensable à une gestion avisée de notre environnement et précise ; <<D'ici à 2030, la population mondiale aura augmenté de 3,7 milliards d'habitants et il faudra pour répondre à la demande doubler la production alimentaire et tripler la production d'énergie... Cependant, cette croissance apporte avec elle une épouvantable dégradation de l'environnement (entraînant) un retour à un appauvrissement de la qualité de la vie pour les générations actuelles et à venir...

Déjà de très graves problèmes se posent qui appellent des solutions urgentes... Il incombe aux pays à revenu élevé de contribuer pour une large part au financement, dans les pays en développement, d'activités de protection des habitats naturels et de la biodiversité dont le monde entier bénéficiera.

Le financement doit être considéré comme un paiement pour importation et non comme une aide.

Les pays riches doivent aussi prendre en charge la majeure partie de ce que coûtera l'assainissement de l'environnement mondial ainsi que tous les problèmes de portée mondiale dont ils sont la cause principale, comme l'effet de serre et l'appauvrissement de l'ozone stratosphérique>>[166].

 Toutefois, en dépit de cette bonne volonté qui ne peut plus être mise en doute, il semble évident que la Banque Mondiale ne soit pas encore en mesure de renoncer à son idéologie, l'économie de marché et le libéralisme et à ses critères traditionnels de rentabilité et de compétitivité et surtout, des effets pervers menacent : <<la concentration plus importante de la Banque sur les problèmes mondiaux et la distribution afférente des ressources vers les pays qui contribuent le plus aux changements mondiaux pourraient nuire aux intérêts de beaucoup d'autres pays démunis incapables d'exercer le même chantage, à moins qu'ils ne jouissent de ressources uniques>>. On connaît la suite.

Ainsi, alors que certains pays sont sur la liste de tout le monde (Chine, Indonésie, Inde), d'autres manquent. Ces derniers sont presque tous situés en Afrique.[167]

On comprend aisément, d'une part, le souci des pays en développement, en particulier ceux d'Afrique, d'insister sur le lien indissoluble entre l'environnement et le développement, notamment à travers leurs réticences et leurs inquiétudes exprimées à la conférence de Stockholm, d'autre part, leur volonté de recentrer la problématique de la protection de l'environnement sur celle du développement.

Le moins que l'on puisse dire, c'est que vingt huit ans après Stockholm, la situation ne semble guère s'améliorer.

An contraire, elle s'accentue avec la globalisation économico-financière menée par les firmes et entreprises multinationales.

Qu'il nous suffise de citer l'affaire de Seveso en 1976 et surtout, peu de temps après la conférence mondiale de l'industrie sur la gestion de l'environnement, l'affaire de Bhopal en 1985.

 Que dire alors de l'affaire Erika (1999) en France qui n'a pas fini de choquer tous ceux qui espèrent encore au droit à un environnement sain et écologiquement viable ?

Ou encore la puissance effrénée des multinationales au Gabon, Cameroun, Kenya pour ne citer que ces pays là.

En tous cas, Droit à l'environnement et Droit au développement présentent des similitudes d'approches en termes de rapport Nord-Sud et de doctrine de solidarité.

Le droit au développement impose d'éliminer, au niveau international et national, tous les obstacles d'ordre juridique qui se dressent devant les efforts des peuples pour sortir du sous-développement.

Quant à la solidarité, elle trouve en matière de protection de l'environnement comme en matière de développement, son fondement dans l'exigence pour les auteurs internationaux de déployer une action collective par voie de concertation et de négociations permanentes, dans le but de réduire les inégalités de développement entre nations et de rendre possible des actions communes pour une meilleure conservation de la nature pour les générations actuelles et celles à venir.

Au demeurant, devant l'insuffisance des explications épistémologiques et conceptuelles du droit de l'environnement, ses incertitudes scientifiques, sa relative effectivité et efficacité, se pose dès lors, la nécessité d'une réflexion théorique et plus constructive du droit de l'environnement.

 

CHAPITRE DEUXIEME : LA NÉCESSITÉ D'UNE RÉFLEXION THÉORIQUE ET PLUS CONSTRUCTIVE DU DROIT DE L'ENVIRONNEMENT EN AFRIQUE

Trois questions pour nous introduire dans ce dernier parcours.

En fait, comment penser nos rapports au non-humain sans référence à une nature conçue de façon essentialiste, hors du politique pour les uns, non historique, immuable, éternellement identique à elle même pour les autres ?

Comment penser nos rapports à la nature et aux choses au-delà des grands partages et des concepts antagonistes du sujet et de l'objet et des idéologies antagonistes de l'anthropocentrisme et de l'écocentrisme ?

Comment concevoir un droit de l'environnement plus efficace, plus effectif si celui-ci ne tient pas compte des interactions, des représentations diverses, des réseaux, d'emmêlements incessants entre les hommes, la nature, les choses et les discours ?

S'il n'y a pas de réponses toutes faites à ces questions, on peut néanmoins ébaucher quelques pistes utiles qui peuvent donner une direction à la réflexion.

Avant d'aller plus loin, essayons de dissiper deux malentendus possibles.

Le premier malentendu pourrait être relatif à la nature des propos : la protection de l'environnement ne doit pas servir de prétexte à la renaissance d'idéologies collectivistes qui ont montré leur caractère fatal pour la liberté, la croissance et l'environnement. Ainsi certaines conceptions étroitement réglementaires de la lutte pour les objectifs de l'écologie pourraient se révéler nuisibles pour la propriété et les droits qu'elle permet de protéger.

Inversement, et c'est le deuxième malentendu, une conception de la propriété comme un absolu pourrait faire obstacle à l'amélioration et à la protection de l'environnement, comme nous l'avons vu, tout au long de ce parcours.

Si les deux concepts de propriété et d'environnement peuvent être liés par une relation négative, l'objet de notre réflexion est de montrer qu'ils peuvent être placés dans un rapport positif : il n'y a pas lieu de sacrifier les droits de l'homme à ceux de la nature, ni les droits de la nature à une conception prédatrice de l'homme et de son activité industrieuse.

Nous ne plaidons pas pour autant pour un retour à la pensée holiste et prélogique qui identifiait sujet et objet.

Bien entendu, il ne faut pas tomber dans le piège des résurgences du passé et de voir tout en "traditionnel" en Afrique. La situation d'aujourd'hui est très complexe[168].

Il est nécessaire de dépasser la périodisation tripartite (précoloniale, coloniale, post-colonial) qui tend littéralement à tout enfermer dans la problématique de l'État-nation et du développement d'une part[169], et la tentation de confondre les pratiques culturelles vivantes africaines avec les discours intellectuels ou politiques sur les représentations culturelles et traditionnelles en Afrique, d'autre part.[170]

On le voit : la véritable alternative est dialectique. Elle se pose en termes des relations que nous pourrons avoir avec la nature comme : élément de survie, de protection mais aussi  et surtout ce que la nature peut attendre de nous : que nous la cultivions et la protégions.

Tout dépendra de ce que nous aurions fait de et avec la nature.

Se pose dès lors le problème de notre responsabilité présente qui nous engagera à rendre compte aux générations futures.

Le temps est peut être venu de souligner qu'un village (qui se veut planétaire) n'est viable, durable que si des charges sont assumées collectivement par les citoyens qui le compose.

Notre contribution qui s'inscrit dans cette logique déplore l'absence d'un droit de l'environnement cohérent et constate qu'en l'état actuel des choses, la superposition des textes ne donne pas, du moins en Afrique, un "corpus juridique" guidé par une logique interne.

D'où notre souci, à présent, de tenter de repenser d'une part, les fondements scientifiques du droit de l'environnement (Section I) et de requestionner - pour le dire simplement - de revisiter la gestion des rapports homme/nature d'autre part (Section II).

 

SECTION I : LE DROIT DE L'ENVIRONNEMENT : VERS DE NOUVEAUX FONDEMENTS SCIENTIFIQUES ?

Ce n'est, en effet nullement un hasard si dans le débat entre science et droit, le droit de l'environnement occupe une place à part et délicate.[171]

Si l'environnement est en danger, c'est en  grande partie parce que la science a donné à l'humanité l'illusion de maîtriser la nature, avant que de la détromper cruellement.

Et maintenant que, à peu de choses près, toute avancée comme potentiellement créatrice de nouveaux dangers, la tentation est grande de croire que le droit de l'environnement est un ennemi irréductible de la science. Loin de là.!

Toutefois, les limites imparties par les dimensions de cette introduction ne permettent pas de lever cette ambiguïté génératrice de plus de questions que de solutions[172], mais il est possible de tracer quelques pistes.

Nos pistes passeront au travers des fondements philosophiques du droit de l'environnement (§ I), des fondements socio-anthropologiques (§ II) ainsi que des fondements juridiques et conceptuels (§ III).

Toutes montreront que, si, à bien des égards, la collaboration entre droit de l'environnement et science (lato sensus) est inévitable, la confrontation de ces deux <<blocs de savoir>>, objets et résultats de recherches et de démarches radicalement différentes, n'est pas une confrontation en champ clos, mais bien une opposition influencée par des facteurs socio-culturels, juridiques et politiques extrêmement complexes.

 

§ 1 - Des fondements philosophiques du droit de l'environnement

Pour obtenir des résultats par rapport aux objectifs, qui sont fixés dans ce domaine, à savoir une protection effective et efficace de l'environnement, il est plus que jamais nécessaire d'en assurer les fondements philosophiques.

Ceci, afin, selon les mots de François Ost, <<d'en déterminer la place dans une hiérarchie des valeurs, et d'en dégager un ordre de priorité clair pour les décideurs>>[173].

En effet, selon lui, la question de la responsabilité envers l'environnement est devenue une priorité, et ce, en raison de l'importance des déséquilibres écologiques qui sont d'une telle ampleur que la question d'une survie douée de sens pour les générations futures se pose véritablement.

D'autres auteurs soutiennent également la même position, et notamment Edgar Morin et A. B. Kerne dans leur ouvrage Terre-patrie.[174]

Selon eux, la communauté de destin, les risques liés aux déséquilibres écologiques, la mondialisation de l'économie et des moyens de communication ébauchent une conscience panétaire et imposent des valeurs.

Les questions qui viennent à l'esprit sont entre autres : de quelles valeurs s'agit-il ? Quel système de rationalité mettre en place ?

Peut-on logiquement parler de l'environnement sans se référer aux systèmes de représentations, à la diversité des cultures, civilisations, croyances  vis-à-vis de cet objet, lui même insaisissable?

Pour se réconcilier avec lui-même et pour lui-même, le droit de l'environnement ne doit-il pas rendre compte des rapports qu'entretiennent ou que devraient entretenir le <<traditionnel>> et le <<rationnel>> ?

Il n'est pas besoin d'être grand clerc, philosophe ou socio-anthropologue pour se poser de telles questions.

Si la domination accule à un retour sur soi, qui est la première forme de la réflexion[175], la domination de la nature imposée par l'homme doit être combattue par la réflexion nous semble t-il.

Dans son ouvrage, la philosophie bantoue (1945), le Franciscain belge Placide Tempels posa la question d'une pensée philosophique d'essence africaine. Partant de ce postulat que tout comportement humain repose sur un système de principes et la permanence d'un certain nombre d'attitudes, Placide Tempels estime que cette permanence ne se justifie que par l'existence, dans les différents groupes humains, d'un système de pensée logique, d'une "sagesse" à laquelle se réfèrent les membres du groupe : <<faut-il dès lors s'étonner de ce que nous trouvions chez les Bantous, et plus généralement chez tous les primitifs, comme fondement de leurs conceptions intellectuelles de l'univers, de la nature, quelques principes de base, et même un système philosophique, relativement simple et primitif, dérivé d'une ontologie logiquement cohérente.>>

Dans un tel élan d'unanimité, l'administration belge, la presse coloniale et le milieu ecclésiastique lui reprochèrent de mettre ainsi en doute la grandeur et la dignité de l'entreprise coloniale, et plus encore de délayer dans un universalisme subversif l'essence occidentale de la philosophie et de la raison[176].

Mais sa position n'était pas isolée et des anthropologues comme Melville J. Herskovits et Georges Balandier accompagnèrent jusqu'à l'indépendance, dans le cadre de leur discipline, l'effort théorique de compréhension et de réhabilitation de l'Afrique.

Ainsi, dans un Rapport paru dans Présence Africaine (octobre 1960-janvier 1961) sur les traditions et bouleversements de la culture en Afrique,[177] MelvilleJ. Herskovits écrit : <<nous découvrons aujourd'hui et apprenons à apprécier la valeur intrinsèque des cultures du continent africain.

Si nous admettons qu'il est empiriquement impossible d'établir un échelle absolue des valeurs pour ses différents modes de vie, nous avons des chances d'apercevoir avec plus de réalisme historique un avenir culturel de l'Afrique qui héritera des valeurs traditionnelles, quelles que soient les innovations enregistrées, et qui continueront, de toute évidence, de l'être.>>

Voici un message dont la teneur et la quintessence restent d'actualité, si l'on veut se donner la peine de faire un détour par le continent africain.

 Question : combien sont-ils à entendre un tel message aujourd'hui ?

D'abord dans le rang des dirigeants et intellectuels africains ?

Ensuite dans le monde occidental ?.

Il ne serait pas fastidieux de rappeler le cri de coeur du théoricien le plus connu de l'africanité, Léopold Sedar Senghor[178] qui, après avoir dégagé les <<éléments constitutifs d'une civilisation d'inspiration négro-africaine>> au deuxième Congrès des artistes et écrivains noirs, en 1959[179], se plaint de <<l'inconscience>> de la plupart des chefs des peuples noirs, de leur <<mépris des valeurs culturelles négro-africaines>>. Et <<les voilà qui importent, ajoute t-il, telles quelles, les institutions politiques et sociales de l'Europe, voire les institutions culturelles>>. Plus loin il affirme : <<ce n'est pas en important telles qu'elles, les institutions européennes, qu'elles soient de l'Est ou de l'Ouest, qu'on atteindra le but recherché : l'indépendance réelle, non seulement des peuples, mais encore des personnes>>. Alors, que faire ?

Le problème est d'intégrer les valeurs négro-africaines au monde actuel.

Sans doute, il n'est pas question de ressusciter purement et simplement le passé, de vivre dans le musée négro-africain. <<Il est question d'animer ce monde, hic et nunc, par les valeurs de notre passé>>, dit L. S. Senghor.

Le souci de l'africanité conduirait donc à une synthèse des droits traditionnels, dans la mesure où ils expriment les valeurs négro-africaines, et du droit importé.

C'est également la conclusion de Abdoulaye Wade (l'actuel Président du Sénégal) au premier Congrès des écrivains et artistes noirs[180] : <<les composantes d'un éventuel droit africain doivent être nécessairement le droit coutumier, le droit musulman, le droit français>>.

Il soulignait d'ailleurs que <<la question est moins dans une adaptation de certains textes des codes, dans un ajustement, que dans une refonte totale>>[181]

Sans doute, les coutumes ne sont-elles pas parfaites, mais elles renferment <<des principes d'orientation vers une synthèse>>.

On le voit : s'il est plus que jamais urgent de repenser les droits africains, il importe cependant de leur donner un contenu précis.

A ce propos, le grand théoricien du droit africain, que l'on citait à l'instant écrit : <<Récapitulons les "thèmes" et les "totems" de la civilisation négro-africaine.

Il y a, d'abord, l'environnement, le milieu agricole et pastoral, qui a informé le corps, surtout le tempérament et l'esprit du négro-africain. Celui-ci se caractérise essentiellement par sa faculté d'être ému, l'émotion se définissant comme la projection dans le monde mystico-magique.

Dans ce monde de la participation, les principaux éléments du milieu - l'arbre, l'animal, le phénomène naturel et le fait matériel - sont vécus comme images-analogies, comme symboles. C'est ce qui explique les caractères originaux des relations...>> [182]

Le droit de l'environnement aujourd'hui en construction doit tenir compte de ces réalités et les inscrire dans la hiérarchie des valeurs dont parle Ost. L'ébauche de la reconnaissance d'une communauté de destin pour l'humanité ne peut être complète que si elle prend en compte les visions globales du monde.

En d'autres termes, la question de la survie douée du sens pour les générations futures doit être une question non seulement partagée mais discutée par  toutes les parties en présence. Ceci est d'autant plus important dans la mesure où l'avenir est largement indéterminé et incertain.

Il convient alors d'établir des impératifs d'un type nouveau, qui dépassent largement l'espace contemporain de l'action qui fournit l'horizon pertinent de la responsabilité.

Il apparaît clairement, au regard de ce qui précède, que les fondements d'un droit africain de l'environnement, du moins sur le plan philosophique, existe. Reste à le construire et à le promouvoir.

Cette philosophie africaine de l'environnement doit nécessairement se confronter à l'héritage occidental et s'ouvrir à l'ensemble de la communauté scientifique internationale.

Le Béninois Paulin Hountondji dans son ouvrage sur la "philosophie africaine", (1977) le montre d'ailleurs clairement : <<la véritable philosophie commence avec les discours explicites produites par des Africains>> et que l'écriture est indispensable pour permettre une accumulation du savoir, de l'apparition d'une tradition scientifique : celle-ci ne pourrait émerger dans une société de l'oralité, nécessairement occupée à préserver les acquis et ne pouvant donc exclure provisoirement, mettre en cause ou interroger - opérations qui fonderaient la pratique scientifique, donc la philosophie véritable>>.[183]

Un véritable défi qui doit être relevé par les Africains, en commençant par les philosophes, juristes, sociologues, anthropologues...

 

§-2 Des fondements socio-anthropologiques du droit de l'environnement

<<Ce que nous voulons, ce n'est pas connaître, disait Nietzche, c'est qu'on ne nous empêche pas de croire que nous savons déjà>>[184]

Les peuples africains savaient déjà, même si leur savoir n'a pu évoluer et s'adapter aux conditions de la vie moderne.

Ils savaient la médecine, l'agriculture, l'élevage, la chasse, l'astronomie etc.

Se cultiver devrait, pour eux, consister à pouvoir, à même les responsabilités mondiales, développer leur savoir et les aptitudes de leur génie : il leur faut briser toutes les gangues qui les empêchent de se révéler en toute plénitude[185].

Cette réaction montre, une fois de plus, si besoin en était, que les représentations culturelles africaines des phénomènes environnementaux ne sont pas aisément séparables de ce que font les populations, par ailleurs majoritairement rurales.

Le <<savoir>> est lié au <<faire>> qui donne à ces phénomènes toute leur signification.

Les savoirs varient en conséquence selon le contexte et les opinions les concernant, selon la perception de ceux qui les utilisent à des fins différentes.

En ce sens, tout aspect particulier de l'environnement constitue l'objet de multiples expériences et de multiples savoirs[186].

Ainsi, pour beaucoup de populations africaines, la terre et la végétation conservent des liens durables avec ceux qui les ont travaillées ou façonnées dans le passé.

Maintenir de bons rapports avec les ancêtres est souvent considéré comme essentiel pour assurer à la fois la productivité continue des cultures et la fertilité humaine qui perpétuent le lignage.

Les rapports avec les ancêtres comme avec les vivants font partie des relations socio-environnementales.

A cet effet, des sacrifices individuels, familiaux ou collectifs sont utilisés pour renouveler les rapports avec les ancêtres, solliciter leurs faveurs ou pour réparer des ruptures de ces relations avec toutes leurs conséquences sociales et écologiques. De même, des intermédiaires non-humains - esprits ou divinités - jouent un rôle important dans ces relations socio-environnementales.

Pour de nombreuses populations ouest-africaines, le monde à l'extérieur du village est peuplé de djinns qui établissent leur <<demeure>> soit dans certains arbres, soit dans des rochers ou dans des mares et s'associent quelquefois à des animaux.

Les Kouranko de Sierra Leone, par exemple, pensent que les multiples formes de djinns (djina) ont une vie <<sociale>> séparée de celle des êtres humains. Ainsi, quand les agriculteurs kouranko, par exemple, abattent des forêts galeries pour créer des champs de riz, ils laissent soigneusement intacts certains bosquets à l'entrée de la vallée ou sur la pente, expliquant que ce sont les endroits où les djinns ont élu domicile ou les lieux qu'ils affectionnent pour passer le jour et la nuit.

Abattre la totalité de la forêt reviendrait à les chasser et les conduirait à se venger, en provoquant la maladie ou la mort de l'agriculteur et quelquefois en tourmentant une famille pendant des décennies[187].

Pour prendre un autre exemple, dans de nombreuses régions d'Afrique orientales, les déesses de l'eau et de la terre ainsi que leurs prêtres servent d'intermédiaires pour l'intégration de l'écologie humaine et <<naturelle>>.

Chez les Aouan de Côte-d'Ivoire, la terre est personnifiée sous le nom d'Assie, ou une <<déesse>> qui prescrit certains comportements aux Aouan à l'égard de l'environnement forêt-savane.

Ces réglementations désignent ceux qui peuvent défricher et cultiver telles ou telles parties de la terre en dehors du village, déterminent les <<jours de repos>> pour la culture et interdissent certains animaux ou certaines plantes, y compris le riz. Ils considèrent que la culture du riz conduit Assie à retirer son contrôle sur la fertilité, les précipitations et le feu, ce qui aboutit à dévaster l'environnement et à l'effondrement de la société humaine.

Il est clair que les interactions entre les hommes et les esprits peuvent impliquer des conflits aussi bien que de l'harmonie.

Néanmoins, il reste, comme nous l'avons vu, tout au long de cette réflexion, que des relations socio-environnementales jouent un rôle extrêmement important dans la protection des ressources naturelles en Afrique.

Il parait évident que toute politique de protection de l'environnement conçue en dehors de ces logiques est vouée d'avance à l'échec.

Aussi, si un ordre de priorité clair doit être dégagé pour les décideurs[188], l'on devra éviter de retomber dans la <<politique de l'autruche>> qui, pendant trente ans, a contribué à une politique de <<mal développement>> en Afrique. Qu'on nous permette simplement de relever pour le déplorer l'échec de plusieurs projets dits de développement en Afrique.

Pendant longtemps, les projets, plans et évaluation ont été estampillés du sceau d'une rationalité principalement économique et technique[189].

Les aspects environnementaux et culturels ont été souvent ignorés, voire occultés.

L'écart de plus en plus grand entre la littérature et le discours sur la planification du développement et les réalités concrètes doivent amener les uns et les autres à être plus réalistes dans la construction du droit de l'environnement en cours, mais aussi et surtout dans les politiques environnementales mises en place ici et là.

Peut-on souhaiter mieux au Zimbabwe dont la politique de reformes foncières engagée, vient d'être soutenue, lundi soir, 7 août 2000, lors d'un sommet régional par les chefs d'États de la Communauté de Développement de l'Afrique Australe (SADC) ?[190].

Voilà un bel exemple à suivre et à encourager.

La prise en compte des analyses locales ainsi que des processus écologiques peuvent permettre - nous semble t-il - de faire l'économie normative de la société à travers une régulation plurielle et de ce fait, mieux comprendre le droit de l'environnement en Afrique.

 

§ 3 - Des fondements juridiques du droit de l'environnement

 

D'un point de vue strictement juridique, Jadot et Ost[191] défendent la reconnaissance des intérêts écologiques, et notamment les notions d'intérêts collectifs, d'intérêts des générations futures, et d'intérêts de l'environnement.

Jadot s'interroge sur la portée d'une jurisprudence qui accepte que des particuliers soucieux de défendre des intérêts écologiques puissent agir devant les tribunaux[192]. Il pense que la reconnaissance de ces intérêts peut se faire à partir d'institutions juridiques présentes dans différents systèmes juridiques comme les choses communes qui n'appartiennent à personne, et dont l'usage est commun à tous.

Si l'on peut ne pas être d'accord sur tout, avec ces deux auteurs, deux de leurs préoccupations méritent une réflexion, du moins en ce qui nous concerne, car elles se rapprochent de celles qui nous intéresse au premier chef.

D'abord, les images des sociétés africaines contemporaines sont presque toutes brouillées pour des raisons, qui n'ont d'ailleurs que partiellement changé depuis 1957, lorsque Georges Balandier évoquait une <<Afrique ambiguè>>.

Le modèle de la société post-coloniale telle qu'on la découvre dans la littérature scientifique relève de considérations générales tenues pour valables à l'échelle du continent tout entier.

Mais un tel point de vue se trouve infirmé, paradoxalement, lorsqu'on découpe et émiette la culture africaine en de multiples particularités ethniques et linguistiques.

Il est évident que l'Afrique Noire doit se lire au pluriel et que ses sociétés sont analysées à des niveaux microsociaux et locaux avec prédilection pour les sciences sociales[193].

Il n'est plus possible de brosser aujourd'hui, comme il y a trente ans, de vastes fresques culturalistes et historiques qui définissaient des aires écologiques, politiques, voire des civilisations.

Les sociétés africaines sont fondées sur plusieurs systèmes juridiques où les groupes sociaux engendrent et appliquent des droits non-étatiques.

Ce pluralisme juridique rend le choix d'autant plus complexe qu'il n'est pas toujours aisé de distinguer le droit appliqué de celui qui ne l'est pas.

Comment cela pourrait -il en être autrement quand on sait que l'étude de l'environnement et l'élaboration du droit qui s'y réfère suppose un certain nombre de choix éclairés qui présupposent entre autres les paradigmes de complexité et de système.

Gaston Bachelard pense d'ailleurs, à propos de la complexité, que c'est un problème fondamental, puisqu'il n'y a rien de simple dans la nature, que du simplifié. Bien sûr, cela prend le contre-pied des idées exprimées par Descartes, et de ce fait, et selon les mots d'Edgar Morin, le simple n'est plus le fondement de tout chaos <<mais un passage obligé entre des complexes>>[194].

Ensuite, et c'est le point le plus important, peut être : on ne peut pas comprendre les systèmes juridiques africains si l'on n'a pas en tête le fait que les individus ne sont conçus que comme éléments de groupes sociaux imbriqués les uns aux autres. La notion d'intérêts collectifs, voire d'intérêts des générations futures a tout son sens ici.

Ainsi, les sociétés africaines sont constituées sur la base d'alliances entre les hommes (groupes, individus) entre eux ou entre les hommes et les dieux.

Ces relations d'alliance - soulignons-le - déterminent des rapports de complémentarité et de hiérarchie entre les groupes et entre les individus. Comme le dit excellemment Verdier[195], ces rapports déterminent des statuts sociaux. La notion d'alliance et de statuts sont déterminants pour la compréhension des droits africains.

Il apparaît évident, que la réciprocité entre les droits et les devoirs qui déterminent le statut d'une personne ainsi que la hiérarchie des statuts sont les deux éléments fondamentaux qui permettent de comprendre les droits individuels de chaque homme non pas comme des droits absolus sur les choses, mais comme des droits par rapports aux autres membres du groupe et par rapport aux choses.

C'est là - nous semble t-il - que le problème se pose surtout dans les matières de droit public et dans celles qui sont à la frontière du droit public et du droit privé (droit de travail, droit pénal, droit foncier, organisation judiciaire...).

C'est aussi là - la grande différence entre d'une part, les droits européens contemporains, tels qu'ils s'imposent aux sociétés rurales africaines, et, d'autre part, les droits traditionnels d'Afrique Noire, qui, nous le dirons jamais assez doivent être mis en adéquation avec les normes du droit positif, et ce, dans le but de jeter les bases d'un droit étatique de l'environnement légitimé par tous (population et État) pour une sécurisation foncière en Afrique.

On le voit, la situation actuelle ressemble fort à la description que faisait Kuhn de la structure de révolutions scientifiques lorsque l'ensemble des paradigmes dominants est remis en question, ou bien s'avère inadéquat ou insuffisant.

On assiste en quelque sorte à une mutation des connaissances, à une crise générale des réflexions, des représentations, des discours et des perceptions. Mais il faut reconnaître que d'un certain point de vue, la situation est remarquable et exceptionnelle car, elle nous invite à revisiter la relation homme/nature.

 

SECTION II : L'HOMME ET LA NATURE : UNE GESTION À RÉINVENTER ?

Cette question fondamentale trouve sa justification dans une autre série de questions : veut-on un droit de l'environnement qui participe à la marchandisation de l'environnement à travers la sacralisation de la compétition ? veut-on un droit de l'environnement qui participe au verdissement du marché à travers un certain contrôle de la compétition ? va t-on vers un droit de l'environnement qui participe à la remise du productivisme à travers une remise en cause de la compétition ?

Quel environnement pour quel monde ?

Toutes ces questions, si elles ne peuvent, malheureusement, trouver de réponses précises, se résument néanmoins en une question centrale : celle des rapports entre le développement et l'environnement.

Trois thèses à ce sujet : pour certains, le développement scientifique, technique, industriel ne saurait être freiné par la protection de l'environnement, pour d'autres, le développement doit être durable, pour d'autres enfin le développement durable est <<piégé>>, c'est-à-dire le développement que l'on protège d'abord[196].

Question : ne faut-il pas que la référence soit la société et non plus l'économie, une société humainement soutenable dont la protection de l'environnement est une des composantes ?

Réponse : pour permettre un développement durable de la planète; c'est-à-dire préserver le potentiel de reproduction garantissant la pérennité des ressources vitales et éviter les processus irréversibles propres à la compromettre, il convient de privilégier une gestion prudente et responsable de l'environnement, réservant l'avenir.

A ce prix, les contraintes du présent n'obérant pas le long terme, le support de vie des générations futures se trouve préservé, libres à elles d'en user à leur guise.

Conséquence : tout se tient.

La construction dans laquelle s'inscrit la gestion environnementale témoigne d'une cohérence remarquable.

Cependant, son application concrète reste embryonnaire, laissant craindre que cette éthique novatrice ne soit que velléité et construction théorique sans lendemain.

La gestion environnementale, "nouvelle version" passe nécessairement par deux constituants implicites à savoir l'idée d'une obligation de gestion écologiquement rationnelle (§ I) et celle d'une responsabilité intertemporelle qui implique à son tour une <<réelle démocratisation>> (§ II).

 

§ 1 - De la gestion à la "responsabilité": une obligation de gestion écologiquement rationnelle des ressources environnementales

Lorsque la Genèse évoque l'avènement de l'humanité, c'est pour lui soumettre la nature - la Terre (Gn, 1, 2).

L'écologie trouve là l'un de ces fondements éthiques : l'homme est convié à user de la nature, non à le détruire.

Il nous incombe de la transmettre de génération en génération en la mettant à l'abri de toutes les formes de destruction. Celles-ci peuvent atteindre le règne minéral par contamination des sols, de l'atmosphère et des océans, l'univers végétal par destruction des forêts, le règne animal par extinction des espèces.

Que se passe t-il aujourd'hui ?

Tous les onze ans, une grande marée noire, prenant en défaut le système juridique de lutte et d'indemnisation, oblige la société industrielle à se remettre en cause[197]. Pis : de nature en nature, de l'environnement à la consommation et à la thérapeutique, le même trait affecte l'ensemble des activités liées au progrès des connaissances sur la nature.

Dans les drames de l'amiante, du sang contaminé ou de la maladie de la vache folle, nombre de questions se posent en effet dans les mêmes termes qu'en matière d'environnement.

En Afrique, la situation est plus que préoccupante.

Les populations rurales, notamment agricoles, qui vivent du travail de la terre et de la cueillette sont de plus en plus confrontées aux grands problèmes de la société contemporaine.

La crise écologique, foncière et démographique (la rareté de la force de travail active) met tout cela en péril, aussi bien dans le Sahel des sécheresses (Niger, Mali, Soudan, Tchad...) que dans l'Afrique orientale surpeuplée (Burundi, Kenya, Rwanda) ou encore dans les États aux guerres civiles larvées ou ouvertes (Éthiopie, Mozambique, Afrique du sud...)[198].

Ainsi l'Afrique des villages et des terroirs est menacé.

Le risque de la dégradation écologique fait maintenant partie des contraintes de la production et de la reproduction rurale.

Tout ceci pose le problème de la responsabilité et de la solidarité de toute la communauté humaine. Le problème étant local et global en même temps.

Aussi, au-delà des solutions locales qu'il faudra envisager, n'est-il plus temps de s'arrêter aux manifestations du phénomène; il importe, aujourd'hui, remontant à la crise, de centrer l'interrogation sur la relation de l'homme avec la nature face aux conséquences incontrôlables du progrès technologique. <<L'organique, si on la viole, ne pardonne pas>>, prévenait déjà Teilhard de Chardin (1951). Les philosophes expliquent le danger. La nature est <<feuillet de l'être>> (Merleau Ponty); ainsi <<en portant atteinte à la nature hors de nous, c'est à la nature en nous que nous portons atteinte>> déclarait sagement Hans Jonas (1971).

Cette mise en garde porte à s'interroger d'une part sur les institutions juridiques exprimant les relations homme-nature, d'autre part, sur ce que nous avons fait "de" et "avec" la nature.

Seules des obligations comme celles d'une gestion écologiquement rationnelle des ressources de l'environnement peuvent arrêter, du moins restreindre, les appétits humains en vue de préserver la nature et de miser sur un développement durable.

Le développement durable impose, d'une part, une exploitation durable des ressources naturelles, d'autre part, une gestion écologique et non pas essentiellement économique des déchets.

L'exploitation durable consiste à ne prélever des ressources renouvelables qu'en quantités qui n'affectent pas leur aptitude à se renouveler mais aussi à utiliser rationnellement les ressources non renouvelables.

Cet impératif de la gestion écologiquement rationnelle induit un principe de précaution. Ce principe énoncé au point 15 de la Déclaration de RIO repose sur l'idée essentielle d'une nécessité d'adoption diligemment des mesures effectives visant à prévenir la dégradation de l'environnement même en l'absence de certitude scientifique absolue[199]. Il englobe un autre principe de gestion écologiquement rationnelle : celui de prévention.

On peut en inférer également une obligation de s'abstenir de faire ou d'agir, lorsque l'action comporte pour l'environnement des risques graves connus ou simplement prévisibles. Cette obligation induit par ailleurs, l'idée d'une équité intergénérationnelle en ce sens qu'elle impose à chaque génération de gérer les ressources de la nature en ayant à l'esprit le droit des générations futures à jouir au moins autant qu'elle des dites ressources.[200]

Ainsi, si le principe de précaution met en avant le long terme (la dimension qui manque souvent dans les politiques environnementales, du moins en Afrique), il veut aussi contribuer à exercer un certain contrôle en amont de la technoscience. Ce principe admet l'incertitude c'est-à-dire qu'il reconnaît que les êtres humains ne maîtrisent pas toutes les données scientifiques, il conclut à la prudence face à des risques encore inconnus ou mal connus[201].

Qu'est-ce qu'une société qui ne se donnerait pas de limites ?

Jean Rostand disait : <<la science a fait de nous des dieux avant que nous méritions d'être des choses>>.

L'humanité a vécu avec les incertitudes plus ou moins importantes. On est parti de la chasse aléatoire faite par les hommes préhistoriques pour en arriver depuis un siècle à la complexité découverte en mathématiques, en physique, en biologie, l'incertitude étant un élément de cette complexité. <<Penser c'est dialoguer avec l'incertitude>> nous dit d'ailleurs Edgar Morin et du point de vue de l'environnement de la planète, il existe un grand nombre d'incertitudes.

Dès lors, nous devons assumer notre responsabilité. Celle-ci se pose - nous semble t-il - à la fois en termes d'un droit à exercer et d'un devoir à respecter.

Un droit à exercer car, des Associations, des collectivités, des citoyens tout court doivent prendre leur responsabilité en main. Celle de dire non aux scientifiques, aux industriels et aux autorités politiques, administratives quand l'environnement est menacé de destruction. Ceux-ci ont le droit de décider de leurs vies, de leurs santés, de leur environnement, et cela au nom des générations présentes et futures.

Un devoir à respecter par les autorités politiques, administratives qui, dans leurs compétences respectives, vont ou non autoriser la mise en oeuvre de projets. Devoir à respecter enfin, par les créateurs des risques ainsi des scientifiques, des industriels d'une part, et par des générations présentes d'autre part.

En définitive, l'obligation de gérer l'environnement de façon écologiquement rationnelle a pour destinataires aussi bien les individus, les entreprises, que les États, et de façon globale, l'ensemble de la communauté humaine en ce qu'elle a collectivement la charge du riche patrimoine que nous a légué la nature. Une telle obligation est forcément source de responsabilité collective.

 

§ 2 - : De la responsabilité à la gestion "démocratique" : une obligation dialectiquement permanente

 

Ne faut-il pas admettre, en effet, cet adage de départ selon lequel <<on a autant de responsabilité que de pouvoir>> ?.

Dès lors que le bras de mon action met l'avenir à ma disposition, j'en suis responsable, d'autant que je tire profit de ce comportement.

L'idée de responsabilité, c'est-à-dire "répondre de" (ses actes), n'est pas cependant mal venue ici, dès lors que l'effet concerné résulte de mon action. Soyons clair. Il ne s'agit plus de la responsabilité au sens quasi pénal d'imputation d'une faute passée à un agent qui devra payer le prix, mais de la responsabilité au sens d'une charge qu'on assume collectivement pour l'avenir.

À l'exemple de la répression pénale se substitue ici le modèle parental de l'éducation des enfants, ou le modèle politique de la participation aux affaires de la cité[202].

Il ne fait aucun doute que cette responsabilité collective trouve son fondement dans l'impératif catégorique de Kant qui lie explicitement respect de soi et respect de l'autre, partageant une commune humanité : <<agis de telle sorte que tu traites l'humanité, aussi bien dans ta personne que dans la personne de tout autre, toujours en même temps comme une fin et jamais simplement comme un moyen.>>[203]

On le voit : cette responsabilité , si responsabilité il y a (si nous sommes d'accord sur ce principe) ne peut aller sans prendre en compte les enjeux de la démocratie, de la solidarité et de la paix.

Enjeux relatifs à la démocratie, disons nous.

Si l'on pense que protection de l'environnement et démocratie doivent être interdépendants, cela signifie qu'il est nécessaire de concevoir et de mettre en oeuvre des partages de pouvoirs, d'avoirs, de savoirs à l'intérieur des sociétés et entre sociétés par exemple du Nord et du Sud.

Qu'il nous suffise de prendre un seul exemple, pour être plus clair.

Dans une réunion convoquée en mai 2000 à Malmore, dans le sud de la Suède, par le Programme des Nations Unies pour l'Environnement (PNUE) et qui a rassemblé les Ministres de l'environnement de 101 Pays, l'Inde, le Venezuela, la Thaïlande, le Nigeria et la Chine ont déploré, une fois de plus, le manque de moyens financiers nécessaires à la réalisation de l'Agenda 21 sur le développement durable. <<Si nous ne recevons pas l'aide garantie par les principes de cette déclaration, nous aurons épuisé nos ressources en eau à très court terme>> a indiqué à l'A.F.P. le Ministre palestinien de l'environnement, Youssef Abu Safieh, avant de marteler : <<les pays les plus pauvres, qui avaient déjà dénoncé en 1998 le manque d'engagement du PNUE à l'égard des pays en développement, pourraient remettre en cause leur participation aux sommets à venir si les promesses n'étaient pas tenues>>[204]. Le sommet s'est terminé, on le sait, sur l'adoption d'une Déclaration. Soit!.

La démocratie en matière d'environnement comme en d'autres domaines, doit se traduire par de nouveaux rapports entre l'État et la société civile, entre le Nord et le Sud, entre les ONG et les institutions internationales, entre les complexes de la technoscience et les citoyens.

Cette démocratie participative est synonyme à tous les niveaux géographiques et bien sûr aussi au niveau international, du droit à l'information, du droit au recours, de participation aux décisions et bien entendu du respect des engagements car, en Afrique, la parole est sacrée.

Enjeux relatifs aux solidarités, avions nous dit encore.

Le droit de l'environnement (s'il en existe un) doit être un carrefour de solidarités. Solidarités entre les êtres humains et la nature, solidarités entre les peuples, solidarités entre générations présentes et futures, solidarités financières et institutionnelles en matière d'environnement.

Sur le plan institutionnel, il importe donc que chacun ne se considère pas comme le référent de l'Autre. Ainsi, chacun doit prendre conscience de son carcan culturel pour éviter de retomber dans le piège ethnocentriste, c'est-à-dire pour ne pas <<considérer une autre société en fonction de ses propres catégories idéelles, ce qui conduit bien souvent à la déconsidérer>>[205]

Une telle déconsidération se répercute sous la forme d'une acculturation juridique, consistant dans la greffe d'un droit étranger sur une culture locale. Or, un droit comme celui de l'environnement doit tenir compte des représentations culturelles de l'homme chinois, africain, européen, américain etc.

Si le droit est un produit du social, comme le dit Louis Assier Andreu[206], il doit coller aux réalités culturelles et sociales de chaque société car, <<la conception qu'on a de la vie détermine la conception qu'on a du droit>>[207].

Un problème comme celui de la transmission de l'héritage ou même de la gestion des espaces verts et des cimetières ne se conçoit pas de la même façon en Europe, en Asie et en Afrique.

Enjeux relatifs à la paix, enfin.

Nul doute que la nature a besoin de la paix. Le principe 24 de la Déclaration de RIO affirme : <<la guerre exerce une action intrinsèquement destructrice sur le développement durable (...). >>

Pour sa part, la paix a besoin aussi de la nature comme le montre d'ailleurs le Rapport <<Notre avenir à tous>> de la commission mondiale sur l'environnement et le développement (CMED) : <<la perturbation de l'environnement est à la fois une cause et un effet de tensions politiques et de conflits militaires. Des pays ont souvent combattu pour acquérir ou résister à un contrôle sur des matières premières, des sources d'énergies, des territoires, des bassins fluviaux, des détroits maritimes et d'autres éléments clefs de l'environnement. Il est vraisemblable que les différends de ce genre deviendront de plus en plus fréquents, à mesure que les ressources se raréfieront et que la concurrence pour en disposer s'intensifiera (...)>>[208]

Inversement, on peut dire que l'utilisation durable et équitable des ressources naturelles contribue à la paix et, de façon plus générale, on peut affirmer à la suite du principe 25 de la Déclaration de RIO que <<la paix, le développement et la protection de l'environnement sont interdépendants et indissociables>>.

On le voit : le droit de l'environnement au-delà de la dimension scientifique et économique doit contribuer à des avancées démocratiques, solidaires et pacifiques.

La dimension éthique doit être fondamentale. Celle-ci implique une gestion responsable, démocratique et solidaire de la nature.

Des rapports dialectiques doivent s'instaurer entre l'homme et la nature, de sorte que A se porte vers B et B vers A. Il y a de l'un dans l'autre, vu que d'une certaine façon, l'un existe par l'autre. C'est cette relation de récursivité qui doit exister entre l'homme et la nature. Comme l'observent très judicieusement B. Kalaora et G. R. Larrière, <<il faut remettre en question la vieille opposition entre la  nature et l'artifice, penser l'homme dans et hors de la nature, et la nature comme produit et comme condition. >>[209]

Cela suppose, on l'a vu, une reformulation des approches scientifiques de la nature.

Nous nous contenterons d'ajouter que, du même mouvement, c'est l'homme aussi qui apparaît <<comme condition de la nature>>, de sorte que s'impose également une reformulation des approches scientifiques et philosophiques de l'homme[210].

Ainsi, le principe de la pensée dialectique est donc de distinguer sans séparer, et de relier sans confondre. Voilà exactement le type d'articulation qu'il convient d'établir entre l'homme et la nature.

N'est-ce pas là la vision africaine de la vie sociale et juridique ?.

De la même façon que l'un n'existe pas sans l'autre, l'homme africain n'existe pas sans la nature et vice-versa. Les droits et obligations réciproques entre les groupes, entre les individus ou entre groupes et individus découlent de la généalogie.

En définitive, la relation qui lie l'homme africain à son environnement n'est pas une relation de domination, ni de possession, moins encore de soumission. Elle est une relation dialectique - fait de négociation - vivante - dynamique basée sur le respect des droits et devoirs de l'autre et de soi : on est en présence ici d'une relation de l'autre et de soi.

N'est-ce pas là aussi l'approche que nous avons voulu privilégier à travers une étude et une matière aussi complexes et périlleuses, le droit de l'environnement ?.

Qu'on soit Africain, Asiatique, Européen ou autre, une chose est certaine : Nous ne  sommes que les <<locataires>>, ou plutôt les <<occupants usufruitiers>> de notre environnement.

A ce titre, nous avons le droit à une <<jouissance paisible>> de la terre mais nous avons également des devoirs, en premier lieu, celui d'éviter toute dégradation de <<patrimoine commun>>, afin de transmettre un héritage intact, voire même amélioré, aux générations à venir.

Enfin, une histoire pour terminer (à moins que ce ne soit la fin de notre histoire commune).

Dieu dit à Caïn : où est ton frère Abel ?. Il répondit : je ne sais pas; suis-je le gardien de mon frère ? Et Dieu dit : Qu'as-tu fait ?. <<La voix du sang de ton frère crie de la terre jusqu'à moi. Maintenant tu seras maudit de la terre (...) Quand tu cultiveras le sol, il ne te donnera plus sa richesse. Tu seras errant et vagabond sur la terre>>[211]

Au demeurant, nous devons non seulement être prêt à assumer notre responsabilité mais aussi et surtout à répondre de nos actes.

 

CONCLUSION GÉNÉRALE

Nous voici rendus au terme de cette étude, du moins de cette réflexion.

Faut-il conclure ? Résister ou construire ?

 Non, il ne faut pas conclure.

C'est Merleau-Ponty qui disait : <<il n'est de bonne dialectique que sans synthèse[212]. Ou mieux encore : les synthèses ne sont jamais que provisoires, entraînées à leur tour dans une interrogation plus vaste>>.

Donc, il faut, au contraire, ouvrir le cercle. Le voilà devenu spirale et tourbillon circularité en mouvement comme la vie elle-même et les idées.

Comment cela pourrait-il en être autrement quand on sait que le droit de l'environnement est, on ne peut plus clair, un droit nouveau, incertain, et fondamental.

Droit nouveau, car ses concepts fondamentaux doivent être forgés, ses principes dégagés, ses valeurs définies.

Droit incertain, car ses règles doivent être garanties, ses solutions mieux assurées, ses prescrits davantage respectés.

Droit fondamental, enfin, car, il est à la base de toute l'activité humaine de l'homme. Il doit préserver pour les générations présentes et futures, <<le patrimoine naturel d'une valeur esthétique, scientifique, culturelle, récréative, économique et intrinsèque>>[213].

Tout au long de cette réflexion, nous nous sommes placés du point de vue de l'habitant de l'hémisphère Sud, (même si nous séjournons, pour l'instant au Nord) ayant toujours vécu les problèmes de l'environnement (entre autres, l'avancée effrénée du désert, la déforestation et la destruction systématique des espèces animales, les ravages des feux de brousse...).

Nous avons envisagé son environnement à travers l'environnement global et plaidé pour un droit de l'environnement plus responsable, plus efficace, plus démocratique et respectueux des valeurs des populations vivant directement et sous diverses formes avec la nature.

Ensuite, face à la débâcle et à l'impasse écologiques - mais aussi sociale, politique, économique, nous avons compris que le droit de l'environnement en construction n'est certes qu'un remède parmi d'autres mais d'autant plus porteur de changement qu'il sera appliqué.

Une question reste alors posée : au-delà de l'aveuglement et de l'impuissance n'y a t-il pas les courages et les volontés personnelles et collectives ? Courages et volontés pour résister et construire. Résister au productivisme insoutenable qui bannit toutes les différences, construire une société humainement soutenable; c'est-à-dire fondée sur des moyens et des fins démocratiques, équitables, pacifiques et durables.

Le 21e siècle pourra t-il enfin se transformer en aube d'humanité ?

Comment nier, pourtant, les populations du sud de la planète, sont les premières victimes de la dégradation de l'environnement et aussi bien, que malgré elles, elles y contribuent à leur tour ?

Comment croire aux bonnes intentions à l'endroit du milieu et des générations futures si déjà fait défaut la solidarité, ou même simplement la conscience de l'interdépendance à l'égard des générations futures ?

Tenez ! <<En 1999, la fortune cumulée des 200 personnes les plus riches de la planète a franchi la barre des 1.000 milliards de dollars, alors que le revenu cumulé de 582 millions d'habitants des 43 pays les moins avancés n'était que 146 milliards de dollars>>[214]

Comment faire pour que les générations présentes qui croupissent sous le poids de la pauvreté et de la dette ne disparaissent pas au profit des <<générations futures>> si chères[215] à l'équipe Cousteau ?

Sait-on que l'Afrique Noire ne représente plus que 1,3% environ des échanges mondiaux et constitue la zone la plus endettée du monde, si l'on reporte cette dette (134 milliards de dollars selon la Banque Mondiale; plus de 200 milliards selon d'autres sources) au Produit Intérieur Brut (PIB). Et pourtant cette dette ne constitue que 10% du total de la dette mondiale[216].

La rareté des ressources naturelles et la dégradation de milieux de vie investis par des populations de plus en plus nombreux engendrent des risques de guerre d'un nouveau genre, les <<conflits verts>>, dont les signes avant-coureurs sont annoncés par ces cohortes de personnes errantes à la recherche d'un lieu où s'établir : <<les réfugiés écologiques>>[217].

Hier, les Indiens d'Amérique du Nord, chassés de leurs terres ancestrales et parqués dans de sinistres réserves, aujourd'hui, les Ruandais, Burundais, Congolais, Éthiopiens, Soudanais errent sur les routes de l'exode.

Demain, ce sera peut être le tour des pygmées d'être chassés de leur forêt !

On le voit, il est fécond, le lit de la misère.

Outre le fait, déjà évoqué, que la surpopulation résulte directement de la misère, on doit aussi admettre que le mal-développement procède d'un système économique mondial qui reste défavorable aux pays du sud.

Enfin, les pratiques de délocalisation des entreprises les plus polluantes, ainsi que le trafic des déchets les plus toxiques en direction des pays pauvres, la surconsommation pratiquée dans l'hémisphère Nord sont entre autres des questions qui appellent à une "responsabilité partagée", dès lors que le milieu est une réalité globale.

Ici, comme ailleurs, tout reste à faire.

Le Droit International de l'Environnement (DIE) a du pain sur la planche.

En attendant, un droit africain de l'environnement doit voir le jour.

Celui-ci ne sera que s'il fait siens pluralisme et complexité qui caractérisent l'Afrique contemporaine.

Il est clair, que dans sa construction, le droit de l'environnement africain doit prendre en compte non seulement les similitudes mais aussi les différences de sensibilité individuelle, c'est-à-dire une forme généralisée de respect de l'autre considéré non pas seulement comme un vis-à-vis du dehors, mais finalement comme constitutif de soi.

À cet égard, la création de l'Académie Africaine de Théorie du Droit[218] est une initiative encourageante.

Elle contribuera, nous l'espérons, à former des chercheurs africains et africanistes spécialisés dans l'étude des fondements du droit et capables de réfléchir non seulement sur les conditions d'une adéquation des normes du droit positif aux réalités sociologiques, mais aussi et surtout sur les possibilités de fonder une modernité, qui ne soit pas le récopiage de l'Occident mais le produit d'un génie proprement africain.

À ces chercheurs, il reviendra de promouvoir les solutions originales qu'exige le contexte africain en conciliant les meilleurs apports du passé africain et de la modernité avortée ou inachevée dans un contexte de post-indépendance[219].

Au demeurant, les questions que nous avons posées, tout au long de cette étude, - si l'on veut bien leur accorder un peu d'attention - permettraient d'améliorer l'effectivité et l'efficacité des problèmes de l'environnement, et partant du droit de l'environnement, car elles tendent à démasquer les difficultés qui sont présentent dans ce domaine.

 

BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIONNÉE

 

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Revue Juridique de l'Environnement (RJE) de 1976 à 1998.

 

TABLE DES MATIERES

 

 

 

DEDICACE………………………………………………………………………….i

REMERCIEMENTS…………………………………………………………………ii

SOMMAIRE………………………………………………………………………….iii

LISTE DES ACRONYMES………………………………………………………iv

INTRODUCTION GENERALE…………………………………………………..1

I – Des difficultés d’une définition de la matière…………………………………4

A  - Notion d’environnement………………………………………………………4

B  - Le droit de l’environnement……………………………………………………6

II – Problématique et hypothèse…………………………………………………..7

III – Approche méthodologique……………………………………………………8

IV – Plan de l’étude…………………………………………………………………9

 

PREMIERE PARTIE : DES FONDEMENTS ET SOURCES DU DROIT DE L’ENVIRONNEMENT…………………………………………………………….11

 

Chapitre premier : Des fondements scientifiques du droit de l’environnement…………………………………………………………………13

 

Section I :: Des rapports scientifiques de l’homme et de la nature………….14

§ 1 : Au commencement était les dieux…………………………………………14

§ 2 : Puis Descartes est venu…………………………………………………….16

§ 3 : La prise de conscience universelle………………………………………..18

Section II : Des rapports juridiques de l’homme et de la nature………………20

§ 1 : De la nature juridique et pluraliste du droit………………………………..21

§ 2 : De la production normative d’une réalité en dehors de l’ordre naturel……………………………………………………………………………….22

§ 3 : Du droit de l’environnement comme médiation juridique du pouvoir de l’homme sur la nature…………………………………………………………….24

Section III : De la contribution africaine dans la formation du droit de l’environnement : entre l’espoir et la déception……………………………….26

§ 1 : De la formation internationale du droit de l’environnement : la contribution de l’Afrique………………………………………………………….27

A – Stockholm 1972 : entre les réticences et la méfiance africaine…………28

B – Entre Stockholm et Rio : la prise de conscience africaine ?…………….30

1 – Au niveau régional…………………………………………………………….31

2 – Au niveau mondial…………………………………………………………….32

C – RIO 1992 : l’engagement de l’Afrique………………………………………32

1 – De la préparation de l’Afrique à la phase de négociation de la CNUED..32

2 – De la CNUED au Sommet de RIO : une convention sur la désertification à l’arraché……………………………………………………………………………..34

§ 2 : De la contribution de l’Afrique : quelques éléments de réflexion pour un bilan………………………………………………………………………………….36

A – Le développement institutionnel et normatif………………………………..36

1° Au niveau institutionnel………………………………………………………..36

2° Au niveau normatif……………………………………………………………..37

B – Le développement économique et financier……………………………….37

1° Sur le plan économique d’abord………………………………………………37

2° Sur le plan financier ensuite…………………………………………………..36

C – La préservation du milieu naturel et les préoccupations foncières………38

1° La préservation du milieu naturel……………………………………………..38

2° La politique de protection de l’environnement en Afrique passe par les préoccupations foncières………………………………………………………….39

 

Chapitre deuxième : Des sources générales du droit de l’environnement…………………………………………………………………..42

 

Section I : Des sources internationales et communautaires du droit de l’environnement…………………………………………………………………….43

§ 1 : L’encadrement normatif international………………………………………43

A – Des sources conventionnelles du Droit International de l’Environnement (D.I.E)………………………………………………………………………………44

B – Des autres sources formelles du DIE………………………………………46

§ 2 : L’encadrement normatif communautaire…………………………………47

A – Avant l’Acte Unique………………………………………………………….47

B – Depuis l’Acte Unique…………………………………………………………48

Section II : Des sources du droit de l’environnement en Afrique……………..50

§ 1 : Des droits traditionnels……………………………………………………..51

§ 2 : Du droit colonial……………………………………………………………..53

§ 3 : Du droit écrit post-colonial………………………………………………….54

 

DEUXIEME PARTIE : POUR UN DROIT DE L’ENVIRONNEMENT PLUS RESPONSABLE, PLUS EFFICACE ET PLUS EFFECTIF EN AFRIQUE….56

 

Chapitre premier : La nécessité d’une réconciliation entre l’environnement et le développement.Condition sine qua non d’un développement « durable » pour les « générations futures »……………………………………………………………………………59

 

Section I : Notions et concepts en conflits et en débats………………………60

§ 1 : Comment construire une notion juridique de « développement durable » ?………………………………………………………………………….61

§ 2 : Comment concilier le principe de la souveraineté des Etats sur leurs ressources naturelles et l’environnement comme « patrimoine commun de l"humanité » ?……………………………………………………………………..65

Section II : L’environnement doit s’allier le développement, lequel doit « être durable »…………………………………………………………………………..69

§ 1 : La promotion du droit de l’environnement……………………………….69

§ 2 : La promotion de la relation entre droit à l’environnement et droit au développement……………………………………………………………………73

 

Chapitre deuxième : La nécessité d’une réflexion théorique et plus constructive du droit de l’environnement en Afrique…………………………………………………………………………….77

 

Section I : Le droit de l’environnement : vers de nouveaux fondements scientifiques ?……………………………………………………………………..79

§ 1 : Des fondements philosophiques du droit de l’environnement…………79

§ 2 : Des fondements socio-anthropologiques du droit de l’environnement 83

§ 3 : Des fondements juridiques du droit de l’environnement………………..86

Section II : L’homme et la nature : une gestion à réinventer ?……………….89

§ 1 : De la gestion à la « responsabilité » : une obligation de gestion écologiquement rationnelle des ressources environnementales…………….90

§ 2 : De la responsabilité à la gestion  « démocratique » : une obligation dialectiquement permanente…………………………………………………….93

 

CONCLUSION GENERALE……………………………………………………..98

BIBLIOGRAPHIE SELECTIONNEE…………………………………………102

TABLE DES MATIERES………………………………………………………..107



 

[1] l'écosphère se compose de quatre éléments : l'atmosphère (l'air), l'hydrosphère (l'eau), la lithosphère (le sol) et la biosphère (les organismes vivants).

[2] COING, l'environnement une nouvelle mode, projet, octobre, 1970.

[3] J. ELLUL, le mythe de l'environnement  Économies et Sociétés, cahiers de l'EA, 1973, n° 25, P. 1551.

[4] V. D. SIMMONNET, l'écologisme ? Que sais-je ?, 1979.

[5] François OST, La nature hors la loi. l'écologie à l'épreuve du droit, Paris, La Découverte, 1995, P. 9. A. Rogier, Maîtres et protecteurs de la nature. Contributions à la critique d'un prétendu "contrat naturel", in Maître et protecteurs de la nature. A. Rogier et GUERY (dir.), Seyssel, Champ Vallon, 1991, P. 7.

[6] Maurice KAMTO, Droit de l'environnement en Afrique, Paris, EDICEF, 1996, P. 16.

[7] Plus de neuf cents conventions internationales, tantôt sectorielles, tantôt globales, tantôt bilatérales ou régionales, tantôt mondiales, ont ainsi été adoptées. Cet édifice normatif ne présente pas une grande cohérence; il a au contraire été élaborée au coup par coup, et dans l'urgence. Voir, Sandrine MALJEAN - DUBOIS, le foisonnement des institutions conventionnelles, in l'effectivité du droit international de l'environnement, Ed. Économica, 1998.

[8] Raphaèl ROMI, Droit et administration de l'environnement, Ed. Montchrestien, Paris, 1994. P. 7.

[9] J. MORAND - DEVILLIER, le droit de l'environnement, Paris, P.U.F., Que sais-je ?., 3ème éd., 1996, P.6.

[10] Grand Larousse, édition de 1976.

[11] Cf. par exemple l'édition de 1987 du petit Larousse : il s'agit en l'espèce de retenir une approche chère aux urbanistes.

[12] Cette définition du petit Robert (édition de 1987) précise que ces conditions sont" des conditions naturelles (physiques, chimiques, biologiques) et culturelles (sociologiques)".

[13] M. PRIEUR, Droit de l'environnement, Dalloz, 1990, 2ème  éd. , P. 1.

[14] L'exemple le plus typique est l'article 130 R du traité CEE modifié par l'acte unique qui se contente à la demande du parlement européen d'indiquer les objectifs de la politique communautaire en matière d'environnement : préserver et améliorer la "qualité de l'environnement", protéger "la santé des personnes" gérer au mieux les ressources naturelles.

[15] M. BODIGUEL, " Analyse des processus de gestion locale de l'environnement : le cas de la pollution de la baie de Saint-Brieuc et des étangs littoraux de l'hérault", Rapport général au PIREN-CNRS, septembre 1992, P. 24.

[16] Maurice KAMTO, op.cit., P. 16.

[17] Jean UNTERMAIER ,in préface au droit de l'environnement en Afrique, op.cit., P. 7.

[18] Voir notamment Michel DEXPAX, Droit de l'environnement, Paris, Litec, 1980, P. 15; Robert SAVY, Droit de l'urbanisme, Paris, P.U.F, 1981, P. 55; R. HERTOG, "la fiscalité de l'environnement," Année de l'environnement, P.U.F, 1984, P. 60.

19 M. PRIEUR, op.cit., P. 8.

[19] James FAIRHEAD, indigenous technical knowledge and natural resource management in Africa : a critical Review, Communication to Social Research Council, 1982.

[20] la place nous manque ici pour appréhender tous les aspects.

[21] Voir en ce sens E. NAIM-GESBERT, Expertise scientifique et droit de l'environnement, <<in Quel avenir pour le droit de l'environnement>> ?., F. OST et S. GUTWIRTH (dir.)., Bruxelles, Publications des Facultés Universitaires Saint-Louis, 1996, P. 43-88.

[22] Il s'agit de la singularité occidentale des relations entre la science et le droit, fondement de l'ordre conceptuel contemporain (M. Serre, le contrat naturel, Paris,  François Bourrin, 1990, P. 43.

[23] M. Serres, la philosophie et le climat, in pollution, atmosphère et climat (Colloque de Lassay), Paris, Larousse, 1989, P. 55.

[24] Martine REMOND - GOUILLOUD, Du droit de détruire, essai sur le droit de l'environnement, Paris, P.U.F, 1989, P. 11.

[25] SINIAVSKI A., la rivière et le champ, in <<les usages de la nature>>, le Genre humain, n° 12, P. 26.

[26] François OST, op.cit., P.28..

[27] Jean Pierre MAGNANT, <<les normes foncières traditionnelles en Afrique Noire>> in la terre, l'eau et le droit en Afrique, à Madagascar et à l'île Maurice (dir.), de François et Gérard Conac, Bruylant, Bruxelles, 1998, P. 60.

[28] Norbert ROULAND, Aux confins du droit, Odile Jacob, Paris, 1991, P. 242.

[29] Martine REMOND GOUILLOUD, op.cit., P. 12.

[30] R. DESCARTES, Discours de la méthode, in oeuvres, Paris, Gallimard, la pléiade, 1962, P. 168.

[31] Conception qui postule l'existence d'un principe vital rendant la matière vivante et organisée. Elle s'oppose radicalement au mécanisme. La philosophie horlogère contribue à <<dévitaliser>> la nature. Les automates deviennent le symbole d'une maîtrise parfaite de la nature, comme la circularité incurvé dans les montres.

[32] D. DUCLOS, la peur et le savoir. La société face à la science, la technique et leurs dangers, Paris, La Découverte, 1989, P. 7.

[33] E. MORIN, science avec conscience, Paris, Fayard, 1982, P. 29.

[34] Sur ce point, G. FOUREZ, la construction des sciences modernes. Les logiques des inventions scientifiques. Introduction à la philosophie et à l'éthique des sciences. Bruxelles, De Boeck, Université, 2ème édition revue, 1992, P. 125.

[35] Martine REMOND GOUILLOUD, du droit de détruire, op.cit. ,P. 12.

[36] Étienne LEROY, l'appropriation delà terre en Afrique Noire, in Droit et environnement, Propos pluridisciplinaires sur un droit en construction, coll. du Laboratoire de théorie juridique, Volume 7, Presses universitaires d'Aix-Marseille, 1995, P. 73.

[37] ibid., P. 74.

[38] J A MCNEELY et al., human influences or diversity, in global biodiversity assessment, V. H. Heywood (dir.), Cambridge, University Press, 1955, P. 711-821.

[39] François TERRE, Archives de philosophie de droit, cité par  Martine REMOND GOUILLOUD, op.cit., P. 15

[40] W. FAULKNER , The unvanquished, cité par M. REMOND GOUILLOUD, op.cit., P. 15

[41] ATTALI J., Au propre et au figuré, Fayard, 1988, P.58.

[42] MADJARIAN G., le droit de l'homme à disposer du monde, in <<la valeur>>, le Genre humain, n° 14, Ed. Complexe, 1986, P. 135 S.

[43] Ibid., P. 138.

[44] Genèse 2 : 15 <<L'Éternel Dieu prit l'homme, et le plaça dans le jardin d'Éden pour le cultiver et le garder>>. Voir Genèse 1 : 26; 1: 11; 2: 15

[45] F. OST., op.cit., P.11..

[46] B. LATOUR, Nous n'avons jamais été modernes. Essai d'anthropologie symétrique, Paris, La Découverte, 1991, PP. 23-190.

[47] Conception mise en lumière par Serge GUTWIRTH, dans sa thèse de doctorat, Vrije Universiteit, Brussel, 1992.

[48] VIRALLY M. la notion de programme, un instrument de la coopération technique multilatérale, A.F.D.I., 1968, P. 531.

[49] VIRALLY M., Le phénomène juridique, R.D.P., 1966, P. 10, note 6.

[50] E . EHRLICH, gründlegung des soziologie des rechts, Munich et Leipzig, Duncker et Humblot, 1913, Cf., pour une approche éclairante de cette oeuvre, D. TOURET, Introduction à la sociologie et à la  philosophie du droit. La biologique du droit, Paris, litec, 1995, P. 171.

[51] G. GUTVICH., l'idée du droit social, Thèse Lettres, Paris, Sirey, 1931, P. 152.

[52] P.F. GONIDEC, les Droits africains. Évolutions et sources, Paris, LGDP, 1968, P. 269.

[53] The future of law in Africa . Record of proceedings, Butterworth&C, Londres, 1960, PP. 45_46.

[54] A. RAMANGASOAVINA, Du droit coutumier aux codes modernes malgaches, Rec. Penant, 1962, P. 345.

[55] ibid., P. 345.

[56] Jean CARBONNIER, Flexible droit. Pour une sociologie du droit sans rigueur, Paris, LGDJ, 8ème éd. P. 17.

[57] G. VEDEL, Indéfinissable mais présent, Droits, n°11, 1990, P. 67-71.

[58] S. GOYARD -FABRE, les fondements de l'ordre juridique, Paris, P.U.F., Coll. l'interrogation philosophique, 1992, P. 32.

[59] Cf. entre autres, le De jure belli ac pacis (1625) de Grotius et le Léviathan (1651).

[60] H. KELSEN, Théorie pure du droit, Dalloz, traduction C. EISENMANN, I962, P. 462.

[61] J. CARBONNIER, op.cit., P. 7.

[62] J. B. AUBRY, prescription juridique et production juridique, R.D.P., mai-juin 1998, P. 673.

[63] Cf. P. AMSELEK (dir.)., Théorie du droit et science, Paris, P.U.F, 1994, notamment la seconde partie : Convergence. La théorie du droit est-elle une science ?, P. 147 et S.

[64] F. GENY, in  C. ATIAS, Épistémologie juridique, Paris, P.U.F., Collection Droit fondamental, 1985, P. 36.

[65] J. UNTERMAIER, les mécanismes juridiques de la gestion de l'avifaune en France, Revue écologique (terre-vie) Supplément n° 4, 1987, P. 285.

[66] J. CARBONNIER, Flexible droit. Pour une sociologie du droit sans rigueur, op.cit., P. 273.

[67] R ROMI, propriété privée et protection de l'environnement, Droit - Environnement, n° 20, juillet-août-septembre, P. 93.

[68] Pour une bibliographie conséquente, S. GUTWIRTH et E. NAIM-GESBERT, science et droit de l'environnement : réflexion pour le cadre conceptuel du pluralisme de vérités, R. I.E.J., n° 34, 1995, P. 61-63..

[69] François OST, La nature hors la loi. L'écologie à l'épreuve du droit, op. cit., P. 15.

[70] Ibid.

[71] SITACK YOMBATINA Béni., Impact du projet d'exploitation de la gomme arabique de DARNA sur la vie des populations rurales au Tchad : Le cas des cantons Kadada et Elfass. Mémoire de Maîtrise en Sciences Sociales, Université Catholique D'Afrique Centrale, Yaoundé, Cameroun, 1999, 100 P.

[72] Entretien à l'Université de Paris1 Sorbonne, le 7 juin 2000. Alain ROCHEGUDE est Consultant en Aménagement Institutionnel et Professeur associé à l'Université de Paris1.

[73] Étienne LEROY, L'appropriation de la terre en Afrique Noire, op.cit., P. 72.

[74] Maurice KAMTO, Droit de l'environnement en Afrique, op.cit., P.27.

[75] ibid.

[76] Stratégies arrêtées par la conférence mondiale chargée d'évaluer les résultats de la décennie des Nations-Unies pour la femme.

[77] SITACK YOMBATINA B., op.cit., PP. 65-66.

[78] Il s'agit de la Résolution 2398 (XXIII).

[79] Ainsi que de nombreux spécialistes du Nord s'occupant de développement du Tiers- Monde.

[80] Voir à ce sujet, Alexandre-Charles KISS et Jean Didier SICAULT, <<la conférence des nations unies sur l'environnement>> Stockholm, 5-16 juin 1972, AFDI, 1972, PP. 603-628.

[81] Organisée du 4 au 13 juin 1972 dans la ville Suisse de ce nom : voir le texte du rapport de cette conférence dans PNUE- Sauvegarde. Les textes fondamentaux sur l'environnement FOUNEX. Stockholm Cocoyoc, Nairobi, PNUE - Environnement, quatre-vingt un PP. 1-14

[82] PNUE-Environnement, les textes fondamentaux sur l'environnement, op.cit., P. 39

[83] Cité par A. Ch. KISS et J. D. SICAULT, op.cit., P. 624.

[84] Propos d'un délégué Latino-américain à la conférence de Stockholm, cités par Mohamed Ali MEKOUAR, <<sur la contribution de l'O.N.U.>>. P. 175, note 13.

[85] Voir plan d'action de Stockholm, Recommandation 1.

[86] Voir plan d'action de Stockholm, Recommandation 103 a.

[87] ibid., Recommandation 103 b..

[88] Voir A. Ch. KISS et J. D. SICAULT, op.cit., P. 12 et 625.

[89] PNUE, choisir pour l'avenir. D'autres modes de vie et de développement, Nairobi, PNUE, Série cadres 2, 1982, P. 48.

[90] PNUE, première conférence ministérielle africaine sur l'environnement, Le Caire, 16-18 décembre 1985, Le Caire, UNEP, AEC 1/2..

[91] Cité par WOLGANG BURHENE et W.A. IRWIN, World charter of nature, Berlin, Erich Schmitt Verlag Gmblt, 1983, P. 14.

[92] Voir Commission Économique pour l'Afrique : DOC. ECA/ENV. UNCED/AFRICOM/ABJ/1 nov. 1991.

[93] Voir Péter EISNER, <<challenge for Earth Discussed in RIO 92>> Jornal Do Brazil, English édition, june1, 1992 P. 10.

[94] Voir la Déclaration de WILLIAM REILLY, chef de l'agence américaine pour la protection de l'environnement et chef de la délégation américaine à la conférence, cité par Daniel ABASSI, <<financial debate assumes central role>> Earth Summit times, june 4, 1992, P. 4.

[95] Voir Joy ELLIOTT,<<urgent need for convention on desert>>, Earth Summit times, june 4, 1992, P. 5.

[96] Maurice KAMTO, op.cit., P. 41.

[97] ibid. , P.42

[98] ibid., 39.

[99] ibid., P.40

[100] 34 États seulement ont signé la convention de Bâle; 105 États ont signé l'Acte final de la conférence. En Afrique, le Congo, le Togo et le Gabon ont refusé de signer le document final.

[101] SITACK YOMBATINA B., Impact du projet d'exploitation de la gomme arabique, op.cit., P. 65-80

[102] Maurice KAMTO, op.cit., P. 93.

[103] ibid.

[104] SITACK YOMBATINA B., op.cit., P. 73.

[105] Maurice KAMTO <<l'engagement en matière de politique environnementale au Cameroun>>, Rapport au séminaire des 15 et 16 juillet 1993 dans le cadre de la<<concertation nationale sur l'environnement>> Ministère de l'environnement et des forêts du Cameroun, Juillet 1993.

[106] Voir J. M. BRETON, <<Droits fonciers, problèmes agro-fonciers, protection des forêts (principalement les pays d'Afrique Noire Francophone) >>. Rapport de synthèse au Colloque de Limoges des 7 et 8 novembre 1994 organisé par le Réseau <<Droit de l'environnement>> de l'AUPELF/UREF sur le thème <<Droits, forêts et développement durable>>.

[107] Voir C. F, FISIY, Power and privilege in the administrations of law reforms and social differentiation in cameroon, Africa Studies Centre, Leiden, The Netherlands, 1992, P. 24 et A. D. TDJOUEN, droits domaniaux et techniques fonciers en droit camerounais, Paris, Économica, 1982.

[108] Voir E. LEROY, <<Les droits des populations autochtones et les forêts principalement dans certains pays francophones d'Afrique Noire>>, Rapport de synthèse au Colloque du Réseau <<Droit de l'environnement>> précité.

[109] Maurice KAMTO, Droit de l'environnement en Afrique, op.cit.,

[110] M. BOTHE, tendances actuelles de la politique et du droit de l'environnement, IUCN, Suisse, 1980.

[111] Jean-Marc LAVIEILLE, Droit international de l'environnement, Paris, Éd. Marketing S.A, 1998, P. 12.

[112] Michel PRIEUR, Droit de l'environnement, 2ème édition, Paris, Dalloz, 1991, P. 17.

[113] Voir R. ROMI <<sur la notion de patrimoine commun de l'humanité en droit de l'environnement>>, Quot. Jur. : 9 septembre 1989 : la notion figure par exemple dans le traité sur l'Antarctique du 1er décembre 1959 (Washington), dans la convention de Canberra sur la conservation de la faune et de la flore de l'Antarctique du 2 mai 1980. V. A.C. KISS,<<la notion de patrimoine commun de l'humanité>> Recueil des cours de l'Académie internationale de la Haye, T. 175, P. 103 et S.

[114] M. RÉMOND - GOUILLOUD, Du droit de détruire, op.cit., P. 148-151.

[115] Le livre Collectif, <<l'homme, la nature et le droit>>, Édition Bourgeois, 1988.

[116] selon l'expression de Maurice KAMTO, << les nouveaux principes du droit international>> , RJE1, 1993, P. 1

[117] << Une Europe à quatre vitesses>>, Courrier International, Mai 1992, << Europe 93 : alerte à l'écologie>>, P. 67.

[118] Michel PRIEUR, Droit de l'environnement, 2ème Éd. op.cit., P . 18.

[119] Raphaèl ROMI, Droit et administration de l'environnement, op.cit., P. 40.

[120] J O CEE C 68 24-3- 1986.

[121] Voir Hans Joachim GLAESNER, <<l'environnement comme objet d'une politique communautaire>>in <<la protection de l'environnement par les communautés européennes>>, sous la direction de J. Charpentier, Pedone, 1988, P.1 et S

[122] Pour plus de détails, voir Nicolas DE SADELEER, les principes comme instruments d'une plus grande cohérence et d'une effectivité accrue du droit de l'environnement in Quel avenir pour le droit de l'environnement ? Sous la direction de François OST et Serge GUTWIRTH, Publications des Facultés Saint-Louis, Bruxelles, 1996. P. 239-259. Aussi X. THUNIS et N. DE SADELEER, le principe du pollueur-payeur : idéal régulateur ou règle de droit positif ? in Amenagement-Environnement, n° Spécial Urbanisme et Environnement : réparations et sanctions, 1995.

[123] Proposition de la loi constitutionnelle A. SANTINI tendant à inclure le droit de l'environnement dans la liste des matières dont la loi fixe les règles, ASS. Nat. n° 1559, 28 juin 1990 et proposition de M. BARNIER, rapport du 11 avril 1990 à l'Assemblée Nationale en vue d'une loi organique complétant l'article 34 de la constitution pour faire entrer l'environnement dans le domaine législatif.

[124] H. KELSEN, Théorie pure du droit, op.cit., P. 314.

[125] Maurice KAMTO, droit de l'environnement en Afrique, op.cit., P. 65.

[126] G . SCELLE, Introduction à l'étude du droit, Rousseau, Paris, 1971, t1, P. 15.

  

[127] ROULAND N., Anthropologie juridique, Paris, P.U.F, 1988, P. 447.

[128] P. F. GONIDEC, les Droits africains. Évolutions et Sources, op. cit., P. 227.

[129] Voir G. A. KOUASSIGAN, <<objet et évolution des droits fonciers coutumiers>> in Encyclopédie juridique de l'Afrique, tome 5, 1982, P. 29 et S.

[130] Maurice KAMTO,op. cit., P. 93.

[131] Jean Pierre MAGNANT, <<les normes foncières traditionnelles en Afrique Noire>>, étude du 22 février, réalisée à l'université de Perpignan, mars 1993, voir notamment, PP. 11-13.

[132] Entretien avec le chef de village d'Amdjouada (Tchad) le 22 décembre 1998, cité dans <<Impact du projet d'exploitation de la gomme arabique de DARNA>>, op. cit., P. 41.

[133] Pour plus de détails, cf.;, Edmond JOUVE, L' OUA, P.U.F, 1984; BOUTROS BOUTROS-GHALI, l'OUA, Colin, 1969; AENZA Konaté, O.U.A. et la protection de l'environnement, Thèse, Limoges, mars 1998.

[134] François OST, La nature hors la loi. l'écologie à l'épreuve du droit, op. cit., P. 110.

[135] Jacqueline MORAND-DEVILLIER, le droit de l'environnement, op.cit., P. 4.

[136] Cf. << Notre avenir à tous >>, Éditions du Fleuve, Montréal, 1988, P. 46-47, 51.

[137] CHAMBERS, R., Développement rural, la pauvreté cachée, Karthala, Paris, 1990.

[138] Cf. la Mégamachine, Éditions La Découverte, Série Bibliothèque du mouvement anti-utilitariste dans les sciences sociales, 1995, P. 120 et 122.

[139] Presses de sciences politiques, la Bibliothèque du citoyen, 1998, P. 81

[140] François OST, op.cit., P. 15-17.

[141] <<Où en est le droit international de l'environnement ?>>, RGDIP 1997-4, P. 877.

[142] Le droit international à RIO et à côté de RIO, RJE 1993, n°1, P. 73-74.

[143] Mélanges d'Alexandre KISS, <<les hommes et l'environnement>>, Éditions Frison-Roche, 1998, P. 245 et S.

[144] Édith BROWN WEISS, Justice pour les générations futures. Droit international, patrimoine commun et Équité intergénérations, Édition Sang de la terre, Paris, 1993.

[145] Voir le vocabulaire juridique de l'Association Henri Capitant (sous la direction de Gérard CORNU), Paris, P.U.F, 1987, notamment P. 613 et le Dictionnaire encyclopédique de théorie et de sociologie du droit. L.G.D.J., Story-Scienta, 1988.

[146] Jean Marc LAVIEILLE, Droit international de l'environnement, Éditions ELLIPSES, Paris, 1998.

[147] Pierre Marie DUPUY <<le droit international de l'environnement et la souveraineté des États>> in l'avenir du droit international, Colloque de la Haye 12-14 novembre 1984, Martinus Nijhoff Publishers, 1985, P. 29.

[148] Voir entre autres Mohammed BEDJAOUI, pour un nouvel ordre économique international, Paris, UNESCO, 1979; Brigitte STERN, un nouvel ordre économique international ? Paris, Économica, 1983.

[149] Voir sur ce principe, Dominique ROSENBERG, la souveraineté permanente des États sur leurs ressources naturelles, Thèse, Paris, L.G.D.J., 1986.

[150] Consacré par la résolution 1514 (XV) du 14 décembre 1960 de l'Assemblée Générale de l'ONU.

[151] Cf. Aspects juridiques d'Agenda 21, pour le Ministère de l'Environnement, CRIDEAU-CNRS, sous la direction de Stéphane Doumbé-Billé, Rapport décembre 1995, P. 7.

[152] Entretien du 5 Juin 2000, à l'Université Paris1 Panthéon Sorbonne, LAJP1.

[153] Environnement et Développement, La Documentation française, Problèmes politiques et sociaux, n° 363, 2( mai 1979.

[154]  À noter cependant la reconnaissance d'un droit à un niveau de vie adéquat et à un niveau de santé le plus élevé par le Pacte des nations Unies du 18 décembre 1966 sur les droits économiques, sociaux et culturels.

[155] Cf.; Édith, BROWN WEISS, In faitness to future generations, New-York Transnational Publishers, 1989, PP. 289-291.

[156] Martine REMOND-GOUILLOUD, <<À la recherche du futur : la prise en compte du long terme par le droit de l'environnement>>, Revue juridique de l'environnement, n° 1, 1992, PP. 5-16.

[157] Léopold A., A sand  country Almanac, New-York, 1966 (1ère éd. 1949) P. 219 et 238.

[158] Meyer Abichko, Aufstand fürdie Natur, 1990, Vienne, Munich

[159] SERRES M., Le contrat naturel, Paris, 1990.

[160] François OST, op. cit.,

[161] Cf., G. MARTIN, le droit de l'environnement. De la responsabilité pour fait de pollution au droit à l'environnement, Lyon, Publications périodiques spécialisées, 1978, P. 128 et S; Ali MEKOUAR, <<le droit à l'environnement dans ses rapports avec les autres droits humains>>, in Études en droit de l'environnement, Rabat, Édition OKAD, 1988 P. 61; Adrew STEER, <<l'union de l'environnement et du développement>>, Finances et Développement, juin 1992, PP. 18 et S.

[162] Maurice KAMTO, op. cit., P. 52.

[163] Intitulé : <<le Droit au développement comme un droit de l'homme>>. Cours publié dans la Revue des Droits de l'Homme, vol. n°° 2-3. PP. 505-534.

[164] Rapport de Founex, Chapitre 2, in Sauvegarde..., op. cit., P. 11.

[165] En particulier, à propos du soutien apporté par la Banque à des projets de colonisation dans des forêts du Brésil ou d'Indonésie; cf., Ph. le PRESTRE, The World bank and the Environmental Challenge, Granbury, 1989.

[166] Extraits du Rapport de la Banque Mondiale pour 1992; il est publié sous le titre "le développement et l'environnement". New-York, 1992.

[167] Cf. Ph. LE PRESTRE, The World Bank and The Environmental Challenge, op. cit.

[168] Entretien du 13 juin 2000 avec le Professeur Camille KUYU MWISSA, Professeur à l'Université de Paris1 et chercheur au Laboratoire d'Anthropologie Juridique de Paris1 Panthéon Sorbonne (LAJP1).

[169] Lors de l'entretien du 16 juin 2000 avec le Professeur Étienne LEROY au Laboratoire d'Anthropologie Juridique de Paris1 Sorbonne, celui-ci insista sur l'absence de l'État de droit en Afrique, condition sine qua non pour tout développement (nous soulignons). Lire aussi à ce sujet, un ouvrage collectif sous le titre "les avatars de l'État en Afrique" Édition Karthala, Paris, 1997.

[170] Ce fut d'ailleurs l'une des mise en garde faites par le Professeur Camille KUYU M., entretien du 13 juin 2000, op. cit.

[171] Voir R. ROMI,<<le droit de l'environnement, lien entre droit et science>>, AJDA, 1991. P. 4.

[172] C'est une des dimensions intéressantes de la problématique de M. Serres, <<le contrat naturel>>, François Bourin, 1989.

[173] François OST., auto organisation économique des entreprises, un jeu sans conflit et sans règles ? in Revue Interdisciplinaire d'Études juridiques, 1992, 287

[174] Le Seuil, Paris 1993, 224 p.

[175] Fabien EBOUSSI BOULAGA, la crise du Muntu, Authenticité africaine et philosophie, Présence Africaine, 1977, P. 68.

[176] Elikia M' BOKOLO, Afrique Noire. Histoire et Civilisations, tome II, XIXè-XXè siècle Hatier Paris, décembre 1992. P. 531.

[177] Rapport présenté au XXVè Congrès International des Orientalistes, Moscou, du 9 au 16 août 1960.

[178] Voir la thèse de J. HYMANS, sur la pensée de L. S. SENGHOR, ainsi que L. S. SENGHOR, Liberté1. Négritude et Humanisme, le seuil, 1964.

[179] L. S. SENGHOR, <<éléments constitutifs d'une civilisation d'inspiration négro-africaine>>,Présence Africaine, numéro spécial, 1959, Tome I : l'unité des cultures négro-africaines, P. 249-279.

[180] Abdoulaye WADE, l'Afrique doit-elle élaborer un droit positif ?   Rec. Penant, 1963.

[181] Souligné dans le texte.

[182] L. S. SENGHOR,<<Éléments constitutifs d'une civilisation d'inspiration négro-africaine>>, op. cit., P. 276-277.

[183] Cité par Elikia M'BOKOLO, Afrique Noire. Histoire et Civilisations, op. cit., P. 538.

[184] Cité par Présence Africaine (éditorial), numéro spécial, 1959, op; cit., P. 6.

[185] ibid.

[186] G. DAVIES, P. Richards, <<Rain Forest in Mende life : Ressources and subsistence strategies in Rural Communities around the Gola North Forest Reserve>>, Rapport pour ESCOR, Overseas Development Administration 1991.

[187] pour plus de détails, voir Politique Africaine n° 53, L'homme et la nature en Afrique, Karthala, 1994.

[188] François OST., auto organisation économique des entreprises, un jeu sans conflit et sans règles ? op. cit.

[189] Elikia M'BOKOLO, op. cit., P. 502.

[190] Gazette de Liège, La Libre Belgique, 117è année, N° 222, Mercredi 9 août 2000, P. 11.

[191] La reconnaissance des intérêts écologiques in Droits et Intérêts : Entre droit et non-droit, l'intérêt, droit positif, Droit comparé  et Histoire du Droit, 1989, Bruxelles, FUSL, P. 185.

[192] ibid.

[193] Elikia M'BOKOLO, op.cit., P. 508.

[194] Introduction à la pensée complexe, Paris, ESF, 1990, P. 27.

[195] VERDIER R., <<problématique des droits de l'homme dans les droits traditionnels d'Afrique Noire>>, Droits et cultures, n° 5, PP. 97 à 103.

[196]Jean Marc LAVIEILLE, droit international de l'environnement, op. cit., P. 56.

[197]Martine REMOND GOUILLOUD, l'environnement, sagesse de la propriété, in droits de propriété et environnement, (dir.) de MAX FALQUE et Michel MASSENET, Éd, Dalloz, Paris, 1997, P. 44.

[198] Elikia M'BOKOLO, op. cit., P. 518.

[199] Maurice KAMTO, op.cit., P. 56.

[200] Édith BROWN WEISS, op cit.

[201] Jean Marc LAVIEILLE, op cit., P. 101.

[202] RICOEUR P., <<postface au temps de la responsabilité>>, in Lectures1. Autour du politique, Paris, 1991, P. 270.

[203] KANT E., Fondements de la Métaphysique des Moeurs, Paris, 1971, P. 150.

[204] Cité dans INFO TCHAD, Bulletin quotidien d'Informations  édité par l' Agence Tchadienne de Presse (ATP), n° 4503 du 31 mai 2000, P. 5-6.

[205] Jean Marc LAVIEILLE, op.cit.

[206] Cours d'Anthropologie juridique dispensé à l'Académie Européenne de Théorie du Droit, année académique 1999-2000.

[207] Michel ALLIOT, cité par Ibra Ciré N'Diaye, Chargé d'enseignement à l'Université de Paris1 Sorbonne et chercheur au Laboratoire d'Anthropologie Juridique de Paris1 (LAJP). Entretien du 14 juin 2000 au LAJP1.

[208] <<Notre avenir à tous>>Éditions du Fleuve, Montréal, 1988, P. 347 et 348.

[209] B. KALAORA et G. R. LARRIERE,<<les sciences sociales et les sciences de la nature au péril de leur rencontre>>, in N. Mathieu et M. JOLLIVET (sous la dir. de), Du rural à l'environnement. La question de la nature aujourd'hui. Association des ruralistes français, Paris, 1989? P. 82.

[210] Pour une étude approfondie des relations de récursivité, voir E . MORIN, la Méthode,I. la nature de la nature, le Seuil, Paris, 1977.

[211] La Bible, Louis SEGOND, Genèse 4 : 8-15, Édition, la Société Biblique de Genève, version revue, 1975.

[212] M. MERLEAU PONTY, <<Interrogation et dialectique>>, in le visible et l'invisible, Gallimard, Paris, 1964, P. 129-130.

[213] Préambule de la convention de Berne du 19 septembre 1979 relative à la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel de l'Europe entrée en vigueur en 1982 (décret n° 90_756 du 22 août 1990, J. O. 28 août 1990).

[214] Dimanche, Hebdomadaire Catholique de Bruxelles (Région de la Wallonie), n° 30 du 13 août 2000.

[215] Le commandant COUSTEAU a lancé dans le monde entier une gigantesque pétition pour une <<Déclaration des Droits des générations futures>>. Le texte a été adopté le 26 février 1994 dans la ville de Laguna, à Tenerife par des experts de l'UNESCO et l'équipe COUSTEAU.

[216] Elikia M'BOKOLO, Afrique Noire. Histoire et Civilisations, op.cit., P. 499.

[217] François OST, la nature hors la loi. l'écologie à l'épreuve du droit., op. cit., P. 341.

[218] C'est une initiative du Professeur Camille KUYU MWISSA, enseignant à l'Université de Paris1 Panthéon-Sorbonne et chercheur au Laboratoire d'Anthropologie Juridique de Paris1. Il est le Directeur de L'Académie  Africaine de Théorie du Droit qui ouvre ses portes à la rentrée académique 2000-2001.

[219] Extrait des objectifs de l'Académie.