Sous la direction de
M. Philippe MARCHESIN Juillet 1996
Je remercie mon Directeur de mémoire M. Philippe Marchesin
qui a accepté de diriger ce travail malgré les charges qui sont
les siennes.
Puisse cette direction bienveillante augurer d'une collaboration
franche et harmonieuse pour des travaux à venir.
A mon épouse Suzie, pour sa présence fidèle et généreuse de
tous les instants.
A l'absent, si loin si près de moi.
INTRODUCTION GENERALE
PREMIERE PARTIE : LA COOPERATION FRANCAISE EN AFRIQUE :
PRAGMATISME POLITIQUE OU
CLIENTELISME ?
CHAPITRE 1 : POUR UNE RELECTURE PREALABLE DU "DISCOURS
DE LA BAULE"
1. Un texte d'anticipation et de prudence
2. Une conditionnalité effective cependant
CHAPITRE 2 : L'APD FRANCAISE : DES MECANISMES COMPLEXES
ET OPAQUES AU SERVICE DE CHOIX POLITIQUES
PRECIS
1. Un système marqué par sa compléxité
2. Un fonctionnement sans grande lisibilité
CHAPITRE 3 : ETUDE DE DEUX CAS CONTRASTES : LE BENIN ET LE
GABON
1. Le BENIN : Modèle de transition réussie par excellence
2. Le GABON : Une évolution politique beaucoup plus
heurtée
DEUXIEME PARTIE : LA "
PRIME A LA DEMOCRATIE " A L'EPREUVE DES FAITS
CHAPITRE 4 : ANALYSE COMPAREE DES CHIFFRES DE L'AIDE AU
BENIN ET AU GABON DE 1990 A 1994
1. Les données brutes
2. L'Analyse critique de ces données
CHAPITRE 5 : " LA PARISTROIKA " INCIDENCES POLITIQUES
1. Une évolution institutionnelle apparente
2. Une démocratisation en trompe l'oeil ?
CHAPITRE 6 : VERS UNE NECESSAIRE REDEFINITION DE LA
POLITIQUE FRANCAISE DE COOPERATION EN
RAPPORT AVEC LE FAIT DEMOCRATIQUE EN
AFRIQUE
1. L'aide Française face à la question démocratique en Afrique
2. La problématique de la démocratie en Afrique
CONCLUSION
INTRODUCTION GENERALE
Le thème de l'Aide publique de la FRANCE au développement n'est
ni nouveau, ni particulièrement original. En effet, de nombreux
spécialistes se sont depuis plusieurs années
régulièrement penchés sur cette question en aboutissant
presque toujours aux mêmes conclusions, celles de la nécessité
de reformer entièrement le système.
Notre propos, ne consistera donc pas à mener une étude
générale de plus sur l'aide, mais plutôt à essayer
de l'accoupler à un élément nouveau : la
démocratisation en Afrique. Certes, le lien entre ces deux
éléments d'actualité ne ressort pas de prime abord.
Mais en prenant du recul, on se souvient assez rapidement de la doctrine
en vogue dans le début des années 1990, et qui associait volontiers
l'aide Française à la démocratisation en Afrique.
A l'origine de cette actualité, le "discours de la BAULE" et la nouvelle
donne qu'elle a généré consciemment ou inconsciemment,
la "prime à la démocratie". Il s'agissait d'une promesse
présidentielle de la FRANCE qui conditionnait désormais l'octroi
de son aide aux pays Africains à l'ouverture démocratique.
A l'opposée, cette doctrine annonçait aussi une menace, celle
de réduire voire de suspendre cette même aide aux pays qui
rechigneraient à aller vers plus de liberté. Il est donc question
(et c'est en cela que notre interrogation est nouvelle) de mesurer l'impact
de l'aide au service de la démocratisation en Afrique.
Initialement, nous avions le projet de "piéger" en quelque sorte,
la coopération Française en nous contentant simplement de
vérifier si dans les faits la prime à la démocratie
a été appliquée. Au fil de nos recherches et de nos
premières lectures, nous nous sommes rendus très vite compte
que n'aborder que ce seul aspect de la question était non seulement
réducteur mais surtout cela nous empêchait de révéler
l'ensemble des questions sous jacentes à cette interrogation et les
véritables possibilités d'ouverture qu'elles offraient. Car,
en effet quel peut être l'intérêt d'une telle étude
?
Aborder la question de l'aide et son lien éventuel d'avec la
démocratisation en Afrique, c'est aller à la source de toute
la philosophie de la politique de coopération, mais c'est aussi remettre
sur la table la problématique de la démocratie en Afrique.
C'est en tenant compte d'une part de la richesse du champs de la recherche
qui se présentait à nous et d'autre part de la difficulté
évidente à mener une étude exhaustive dans ce cadre
forcément étriqué du mémoire de DEA que nous
avons trouvé utile de donner une orientation précise à
notre analyse sans que cette orientation soit forcément la plus large
possible. Notre interrogation principale est donc de rechercher l'impact,
ou mieux les incidences de la prime à la démocratie. sur
l'évolution démocratique des pays Africains.
Esquisser une forme de réponse à cette question suppose cependant
la satisfaction de certains préalables : préciser ce qu'est
la prime à la démocratie, prouver qu'il y' a bien eu au delà
du discours à effet d'annonce une doctrine. Vérifier enfin
que cette doctrine a été appliquée. Un tel déblayage
est nécessaire en ce qu'il permet de ne pas tomber dans le piège
de l'étude ne reposant sur aucune matérialité. En outre,
notre but ultime étant de rechercher les incidences sur les processus
de démocratisation en Afrique, ce retour au texte s'avérait
primordial.
Nous avons choisi pour rechercher notre application deux pays Africains que
tout oppose : l'histoire, la réalité économique et
commerciale, les liens antérieurs d'avec la FRANCE, et l'évolution
politique de ces dernières années. Pour être plus
précis, le but premier étant de vérifier si la menace
ou la promesse présidentielle étaient appliquée à
tous et en tout temps, il fallait nécessairement choisir deux pays
différents pour mieux établir notre comparaison. Les chiffres
bruts de l'aide nous serviront alors d'indicateurs pour mesurer ce taux
d'application.
Au regard de ce que nous venons de voir, une première partie introductive
s'imposait. Elle servira notamment à resituer le texte dans son contexte
et à justifier le choix de notre méthode de travail. Cet
éclairage est nécessaire avant le choc des données,
l'analyse de ces données et l'ébauche des réponses à
nos interrogations.
PREMIER
PARTIE :
CHAPITRE 1 : POUR UNE RELECTURE PREALABLE DU
DISCOURS DE LA BAULE
1. Un texte d'anticipation et de prudence
Il était de bon ton, au début des années 90, de ranger
au chapitre des causes directes du déclenchement des processus de
démocratisation en Afrique, le célèbre "discours de
la baule". C'est qu'il avait suffit, au Président Français,
François MITTERAND, lors du 16e sommet des chefs d'Etat de France
et d'Afrique, en Juin 1990, de prononcer cette phrase d'apparence anodine
mais aux conséquences politiques importantes : "...la FRANCE liera
tout son effort de contribution aux efforts qui seront accomplis pour aller
vers plus de liberté". En son temps, cette phrase avait largement
été interprétée, d'une part, comme un encouragement
tacite de la France au démantèlement des anciens régimes
autoritaires, et d'autre part, comme une préfuguration d'un changement
radical de ce qu'avait jusqu' alors été la philosophie de la
politique de coopération. Certes, cette phrase n'était pas
tout le discours, elle n'en était pas le résumé, mais
elle en avait été le moment fort, le grain de sel dans une
soupe jusque là fade, cette conditionnalité, clairement
énoncée supposait en effet, que désormais, la FRANCE
qui jusque là avait soutenu les régimes autoritaires s'était
enfin décidée, comme mue par le vent de l'est, à jouer
la transparence, elle supposait aussi que loin de s'en tenir à une
certaine neutralité qui aurait alors ressemblé à de
la passivité, la France s'engageait clairement à encourager
avec les moyens conséquents, les efforts vers les changements politiques.
Cet optimisme, résultante d'une lecture partielle voire naïve
du texte du discours de la Baule, pouvait au moins se justifier par un argument
de géopolitique et de géostratégie : le communisme
étant tombé à l'est, il n'y avait plus à priori
de "menace rouge" en Afrique qui aurait justifié le soutien parfois
aveugle aux dirigeants autocrates, ou le maintien absolu du statu quo. Le
désengagement des Etats Unis, largement alors entamé sur le
continent, constituait à cet égard un repère de plus.
Il ne faut donc pas s'étonner de voir les analystes parmi les plus
avisés, les journaux, et les peuples en Afrique, au début de
ces années 90, considérer la Baule comme point de départ,
d'un renouveau des relations Franco-Africaines, d'une "PARISTROIKA" qui allait
influer directement sur la démocratisation en Afrique : quelques
années plus tard, peut-on réellement considérer cette
lecture du discours de la Baule comme complète ? M. Mitterand a t-il
vraiment décidé en Juin 1990 de tout faire pour aider à
la démocratisation de l'Afrique ?
A sa relecture, il semble bien que le discours du Président MITTERAND
a été sinon galvaudé, au moins largement restreint,
la plupart des analystes et des destinataires n'en ayant retenu que la seule
phrase énonçant la conditionnalité entre aide enthousiaste
et la démocratisation. Avec le recul, il nous semble aujourd'hui que
ce texte faisait ressortir trois éléments inhérents
à la situation politique de l'époque, et dont la prise en compte
en son temps aurait aidé à relativiser la conditionnalité
aide-démocratisation : ces trois éléments sur lesquels
nous revenons en détail sont la prudence de ton et d'attitude, la
nécessité de l'anticipation, et enfin la stratégie
politique.
En terme de prudence, il n'est pas besoin d'en référer au "discours
de chaillot" (1) pour observer que M. MITTERAND apportait déjà
un bémol à sa conditionnalité en précisant que
chacun devait aller à son rythme selon ses modalités vers cette
liberté : cette ambiguïté de ton et de texte, que le
président MITTERAND justifiait par un refus d'entrer dans ce qu'il
considérait comme étant une nouvelle forme de colonialisme,
a pour conséquence de ne donner ni des modalités ni de rythme
à ces processus. D'ailleurs, et c'est en cela que cette
ambiguïté prend tout son relief, on constate aisément
qu'au delà de cette énonciation, aucune véritable mesure
d'accompagnement n'est prise, au Ministère de l'économie et
des finances pour venir appuyer le discours.
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(1) lors du 4e sommet de la francophonie tenu au palais de Chaillot, M. MITTERAND allait apporter
un vrai bémol à ses propos de la BAULE en réaffirmant la nécessité de laisser chaque pays
Africain aller à son rytume vers la démocratisation
Le Conseil Economique et social dans un rapport
présenté en 1993 (2) relève bien cette contradiction
qui existe entre l'énonciation du principe, et l'application de ce
principe en termes institutionnels. Certes, on peut noter la mise en place,
au sein du ministère de la coopération d'un département
chargé du développement institutionnel, mais son inefficacité
naturelle (nous y reviendrons plus loin) à appliquer une
conditionnalité par ailleurs assez floue renforce cette observation
de prudence. Il apparaît donc clairement que le discours de la Baule,
en même temps qu'il aborde une question jusqu' alors éludée,
se situe dans la prudence : l'absence de cadre institutionnel à une
conditionnalité touchant à un domaine complexe (l'aide publique
au développement) est à cet égard
révélatrice.
Au delà de la prudence, le texte du 20 Juin 1990 apparaît aussi
comme étant un formidable exercice d'anticipation politique : Il ne
faut pas oublier qu'à cette période, les troubles ont
déjà largement gagné le continent, la question de fond
qui se pose alors en FRANCE est moins de savoir comment aider l'Afrique à
se démocratiser que comment faire en sorte que l'Afrique, notamment
les pays du champs reste sous son influence ? Autrement dit, comment maintenir
les mêmes relations et sauvegarder les mêmes intérêts
quitte à opérer ici ou là des sacrifices ou des rafistolages
? Cette capacité d'anticipation est révélée par
Claude WAUTHIER (3) à propos du BENIN : il montre bien à partir
de l'exploitation d'une note confidentielle du directeur de cabinet du
Président du BENIN, comment la FRANCE en monnayant son aide contre
un changement au BENIN avait su anticiper l'évolution dans ce pays
pionnier. Le président gabonais OMAR BONGO dans ses entretiens avec
Christian CASTERAN confirme cette dimension : " Pour moi, le discours de
la Baule était un cri d'alarme lancé par le Président
MITTERAND . . . Maintenant messieurs, vous allez avoir la démocratie.
Sachez l'appliquer . . . " (4)
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(2) André DUFFAURE Développement du tiers monde et croissance Française CES 1993 p. 23
(3) Claude WAUTHIER Qauatre présidents et l'Afrique Paris Seuil 1995 p. 550
(4) Omar BONGO Confidences d'un Africain Paris Albin Michel 1994 p. 72
Le dernier élément qu'exprime le discours de la Baule c'est
qu'il s'agit visiblement d'un exercice de stratégie politique. Pour
comprendre cet élément, il faut se situer dans le contexte
politique de l'époque, marqué d'une part par un environnement
international favorable à la démocratisation, et d'autre part
par des situations internes proches du chaos en Afrique. Dans un article
précurseur, Jean François BAYARD (5) montre bien l'importance
de l'environnement international sur la position de la France face à
la démocratisation. Il met en lumière l'hostilité
affichée par certains partenaires de la France (BELGIQUE, CANADA,
ETATS-UNIS) face au maintien du statu quo, et l'isolement politique dans
lequel un non-réajustement de la politique française dans ce
domaine l'aurait entraîné. On sait par exemple que la Belgique
a pesé de tout son poids dans l'abandon du ZAIRE (6) comme pays hôte
du quatrième sommet de la Francophonie en 1991.
Outre l'environnement international il est aussi plus que probable que le
président Mitterand ait pris la réelle mesure de la
dégradation irréversible de la situation intérieure
des Etats Africains. En effet au plan politique, les débuts des
années 90 sont marqués par la désintégration
des systèmes de partis uniques. Ces systèmes originaux censés
forger l'unité nationale et assurer le développement
économique se révélaient en réalité n'avoir
été rien d'autre que le creuset de manifestations de tous les
phénomènes néo-patrimonialistes dont le paroxysme allait
à contrario précipiter la fin. Cet éclatement des partis
uniques dont on se rendait brusquement compte qu'ils n'étaient pas
des partis de masses allait de pair avec une crise économique et
financière aiguë dont les conséquences sociales ne pouvaient
qu'inciter à la révolte. La difficulté par ailleurs
affirmée d'appliquer les plans d'ajustement structurels tendait à
créer un lien entre la démocratisation et le développement.
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(5) Jean-François BAYARD La problématique de la démocratie en Afrique LA BAULE et puis
après ? in POL AFRI N° 43
(6) Sylvie BRUNEL Le gaspillage de l'aide publique Paris Seuil 1993 p. 87
En clair, la stratégie de François
MITTERAND a donc consisté à tenir compte de ces deux
éléments pour anticiper dans la prudence. Dans cette optique,
faut-il donner raison à MONGO BETI (7) qui parle de "la Baule et autres
fables" en ce sens que pour lui l'Elysée n'a tenté que de prendre
le train en marche sans vraiment comprendre la nature ni la portée
des événements qui se déroulaient en Afrique . . ."
ou mieux encore à Antoine GLASER et Stephan SMITH (8) qui ont du discours
de la Baule une vision simplement anecdotique, les auteurs insistant surtout
sur le fait que MITTERAND n'a fait que lire un discours (très
contesté) écrit complaisamment par Eric ORSENNA ?
En fait, notre intérêt est de savoir si le discours de la Baule
et la doctrine qu'il véhicule peut être considérée
comme un engagement, au moins politique de la FRANCE vis à vis de
la démocratisation. Une telle recherche est non seulement
recommandée (pour mieux comprendre le sens de l'histoire) mais aussi
nécessaire en ce qu'elle rendrait pertinente ou non notre démarche
d'ensemble. Autrement dit, si le discours de la BAULE ne se révélait
être autre chose que cette "fable" de MONGO BETI ou ce beau texte
d'ORSENNA, alors la question ne se poserait même pas de savoir si la
"prime à la démocratie" a influé ou non sur la
démocratisation des pays Africains dès lors que l'inexistence
de la réalité politique et institutionnelle de cette "prime
à la démocratie" aura été révélée.
(7) MONGO BETI La France contre l'Afrique Paris La Découverte 1993 p. 112
(8) Antoine GLASER et Stephen SMITH L'Afrique sans les Africains Pariis Stock
1994 p. 100
2. Une conditionnalité effective
cependant
Ici, il s'agira moins de lire entre les lignes afin de savoir si la mise
en garde est contenue de façon explicite ou non dans le texte, que
de rechercher dans les politiques de l'époque, dans les déclarations
des hommes politiques, dans le non-dit, dans les réorganisations
structurelles éventuelles des ministères, des éléments
permettant de retrouver même de façon implicite, l'affirmation
de l'existence et de la réalité de cette conditionnalité.
Autrement dit, au lieu de se demander si dans le discours (qui n'est finalement
qu'un instantané), le Président MITTERAND est oui ou non prudent,
il faut plutôt voir si dans ses actes et dans les événements
d'alors, il y' a réalité d'une volonté politique
(intéressée ou non) de lier l'aide Française, aux efforts
de démocratisation.
L'analyse des événements qui ont précédé
le sommet de la Baule révèle que le discours qui y a
été prononcé pour "révolutionnaire" qu'il a pu
paraître, n'est ni un acte isolé, ni une erreur de langage.
Il faut en effet se souvenir que les années 89, 90 sont celles au
cours des quelles beaucoup de personnalités Françaises (sans
doute par calcul politique) commencent ouvertement à parler de la
démocratisation. Si l'on se souviendra aisément du "Coffre-fort
de KOUCHNER adressé à MOBUTU" (9) il faut se rappeler que Jacques
Pelletier, Ministre de la coopération, puis Michel ROCARD avaient
largement commencé à évoquer la nécessité
de la démocratisation en la rendant indissociable du développement
(10). Cette période est aussi celle au cours de laquelle Michel ROCARD
commande au député Alain VIVIEN un rapport dont les conclusions
apparaîtront particulièrement dérangeantes (11). Il ne
faut donc pas s'étonner que la France apporte un sérieux coup
de main aux opposants Béninois dès 1989 en contraignant grâce
à un chantage financier le Président KEREKOU à abandonner
le Marxisme et à convoquer une conférence nationale souveraine.
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(9) Sylvie BRUNEL Op Cit p. 86
(10) Claude Wauthirt Op Cit p. 537
(11) Alain VIVIEN La rénovation de la coopération française Paris La documentation française 1990
Tous ces faits qui paraissent de prime abord
anodins donnent pourtant une idée de ce qu'était la philosophie
générale de l'époque, ce qui peut expliquer le
caractère réellement objectif de notre conditionnalité.
Pour revenir à l'acteur principal, le Président MITTERAND,
il semble aussi qu'il ait lui même réellement souhaité
cette conditionnalité. En effet, il faut se souvenir que quelques
jours avant le sommet de la Baule, au cours d'un voyage effectué dans
l'océan Indien (Seychelles, Maurice, Comores, Madagascar), François
Mitterand prend ouvertement position pour le multipartisme en félicitant
la démocratie mauricienne et en dressant clairement à Madagascar
une liste de critères dont la France tiendrait désormais compte
pour mesurer son aide " institutions fondées sur des élections
libres, c'est à dire le suffrage universel, indépendance de
la presse, indépendance de la magistrature, multipartisme, abolition
de la censure . . . " (12). En annonçant donc la conditionnalité
à la Baule, on peut dire que M. MITTERAND s'inscrit dans un certain
continuum . Cette position est d'autant plus logique que les premières
actions qui suivent le sommet semblent s'inscrire clairement dans ce renouveau,
cette "paristroïka" dont la presse se fait l'écho. Le Zaïre
est ainsi écarté de l'organisation du sommet de la Francophonie
(sous l'insistance, il est vrai de la Belgique) quand à Houphouët
BOIGNY le président Ivoirien, il à dû lui même
essuyer le refus de Paris de déployer dans la capitale le Bataillon
Français d'infanterie de Marine en 1989.
Au delà de ces actes qui à notre sens concourrent à
justifier la réalité de la conditionnalité
aide-démocratisation, il est nécessaire de voir ce qui au plan
institutionnel a participé de ce renouveau. Certes, le rapport VIVIEN
comme bien d'autres avant le sien n'a pas été suivi de
réalisations concrètes. Certes, on ne peut pas dire qu'il y
ait eu révolution en la matière mais on notera quand même
que dès la fin de l'année 1991, à l'occasion du centenaire
de la Caisse centrale de la coopération économique (qui allait
devenir la caisse Française de
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(12) Claude WAUTHIER Op Cit p. 559
développement), cette conditionnalité
était réaffirmée en ces termes "Au moment où
la démocratie et l'économie de marché s'imposent partout,
le rôle de la caisse centrale est irremplaçable pour appliquer
concrètement les conditionnalités de tous ordres qui sont
appliquées à notre aide" (13).
A la suite de cette réaffirmation il a été mis en place
au sein du Ministère de la coopération, un département
chargé du développement institutionnel. Son rôle tel
que défini dans le rapport d'activité 1995 du Ministère
consiste à veiller dans les Etats Africains, à la mise en place
et la consolidation des Etats de droits, au respect des libertés
fondamentales, et à renforcer l'appareil juridique et les services
de police. Dans le même ordre d'idées, des décisions
ont été prises allant dans le sens de l'aide aux projets visant
à moderniser les administrations douanières et fiscales, et
des moyens sont engagés depuis le début des années 90
en faveur de la décentralisation.
Sans doute faut-il relativiser la portée et l'efficacité de
ces mesures (nous le ferons quand nous aborderons plus loin les questions
relatives à la complexité et à l'opacité du
dispositif de l'aide), mais notre but dans l'immédiat n'est pas
d'approfondir la question, il s'agissait simplement dans le deuxième
versant de cette relecture de retrouver des éléments
matériels susceptibles d'être considérés comme
corollaires institutionnels de la conditionnalité énoncée
lors du sommet de la Baule.
On peut donc se permettre, au terme de cette relecture, d'affirmer que la
"Prime à la démocratie" a bien existé. On peut donc
en faire un objet d'étude dès lors que nous aurons au
préalable présenté sommairement le système de
l'APD Française et nos deux exemples le BENIN et le GABON.
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(13) André DUFFAURE Op Cit p. 87
CHAPITRE 2 : L'APD FRANCAISE : DES MECANISMES
COMPLEXES ET OPAQUES AU SERVICE DE
CHOIX POLITIQUES PRECIS
1. Un système marqué par sa
complexité
Il n'est pas aisé de parler de l'aide publique au développement
de la France au moins pour deux raisons. La première, c'est que l'on
ne sait généralement pas quel contenu mettre dans cette notion,
la seconde c'est qu'il est extrêmement difficile d'avoir les chiffres
complets (nous reviendrons sur cet aspect précis dans la deuxième
partie de notre travail) qui permettent d'esquisser le moindre bilan de cette
aide. Il est inutile dans ces conditions de révéler la
difficulté qui a été la nôtre de rencontrer un
responsable à même de nous parler en gros du dispositif et de
son mode de fonctionnement. Ceci étant déjà valable
pour l'ensemble de l'APD. Cela est encore plus vrai pour l'aide bilatérale
qui nous intéresse mais dont les critères de distribution
apparaissent fort peu compréhensibles (Il s'agit là aussi d'une
question sur laquelle nous nous étendrons). C'est l'ampleur de toute
cette difficulté qui nous a contraint (dans un souci d'efficacité
et pour éviter la dispersion) de nous intéresser qu'à
trois aspects de la question : le dispositif de l'APD, son volume, et ses
bénéficiaires. Ce faisant, nous avons donc volontairement
laissé de côté les aspects relatifs au vote du budget,
et autres procédures d'adoption dont l'intérêt évident
est hélas à la mesure de la complexité de la question.
Complexe, le système de l'aide publique au développement de
la France l'est largement au regard de son fonctionnement. D'une comparaison
sommaire avec certains autres pays Européens à la multiplication
des rapports souvent commandés à des experts ou des parlementaires
un seul constat s'impose, ce dispositif est extraordinairement complexe.
Ce qui frappe d'abord dans ce dispositif, c'est la multiplicité des
acteurs politiques qui se partagent la responsabilité de la gestion
et de la distribution de cette aide. Car outre le Ministère de la
coopération qui est chargé de ventiler 12% de l'APD (14), il
y' a également le Ministère des Affaires étrangères
qui gère 8%, le Ministère de la Recherche 6%, d'autres
Ministères (dont ceux de l'Agriculture et de l'Education) 4% et enfin
le véritable détenteur des responsabilités : le
Ministère de l'économie, des finances, et du budget qui gère
près de la moitié (49%) de l'APD totale sans compter les 8%
dévolus à la CFD (Caisse Française de Développement).
Une telle multiplicité d'acteurs politiques s'occupant de l'aide
apparaît d'autant plus paradoxale qu'elle fait face à une
quasi-inéxistance (ou tout au moins à une grande pauvreté)
des opérateurs.La CFD étant le seul à jouer le
rôle.
Si nous nous amusions à établir une comparaison avec d'autres
grands pays pourvoyeurs d'aide, on comprend mieux la complexité du
système : l'Allemagne par exemple n'a qu'un seul acteur politique,
le ministère fédéral de la coopération
économique qui se situe au sommet de deux séries d'agences
: les opérateurs chargés d'accorder des prêts : le KFW
(qui accorde des crédits pour la reconstruction) le DEG (qui finance
les investissements) et les opérateurs qui octroient des dons : le
GTZ (qui s'occupe de la coopération technique) le DSE (chargé
du développement international) et enfin le DED (qui est
réservé aux volontaires).
A côté de ce dispositif simplifié de l'Allemagne, il
y' a celui encore plus simple de la SUEDE : An effet, ici, il n' y a qu'un
seul acteur politique (le secrétariat à la coopération
internationale pour le développement) rattaché au ministère
des affaires étrangères qui coiffe cinq agences : le SIDA (qui
s'occupe du développement international), le BITS (chargé de
la coopération technique), le SAREC (auquel est dévolu la
coopération scientifique), le SWEFUND (dont le champs d'action est
celui de la coopération industrielle) enfin l'IMPOD (qui assure la
promotion des produits importés).
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(14) Ministère de la coopération Rapport d'activité 1995 p. 13
Certes on pourra toujours dire que l'aide
Allemande ou Suédoise est inférieure à celle de la France
mais cette remarque ne justifie en rien l'extrême complexité
du système, d'autant plus que proportionnellement au P.I.B, l'aide
Française n'est pas si écrasante face à celle de la
Suède et en volume elle est tout juste supérieure (en ne comptant
pas la digestion de l'Allemagne de l'est) à celle de l'Allemagne.
Cette multiplicité d'acteurs politiques pose d'autant plus problème
qu'il n'existe pas de grande coordination entre ces acteurs. Cette absence
de coordination est observable aussi bien en amont (dans la phase
préparatoire) qu'en aval (dans le processus de programmation): les
anecdotes sont nombreuses qui illustrent des situations où face à
certains pays, les acteurs de l'aide sont entrés en concurrence ouverte
: témoin de ces contradictions, la CFD qui depuis la décision
prise au sommet de la Baule de ne plus octroyer que des dons aux pays les
plus pauvres a vu ses attributions changer, ainsi, elle ne se contenterait
plus d'accorder des prêts pour des projets économiques, mais
elle interviendrait aussi désormais dans le champs du ministère
de la coopération en accordant des interventions aux pays les plus
pauvres faisant ainsi double emploi avec la FAC (fond d'aide à la
coopération). Le manque évident de coordination entre ces divers
acteurs de l'aide à permis de remettre à l'ordre du jour la
question d'harmonisation et de la simplification du système.
Dans un rapport au Premier ministre remis en 1990, le député
Alain VIVIEN (15) propose ainsi, pour réformer tout cela, la
création d'un "haut conseil de la coopération et du
développement" qui aurait, d'après lui, pour rôle d'assurer
le pilotage de l'ensemble du dispositif, son action serait de faire de
l'évaluation et de la prospective. Dans un autre rapport cette fois-ci
du conseil économique et social présenté en 1993 par
André Duffaure (16).
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(15) Alain VIVIEN Op Cit p. 28
(16) André DUFFAURE Op Cit p.25
Ce dernier évoque et fait sienne une proposition enregistrée
le 14 Octobre 1992 à l'Assemblée Nationale et qui envisageait,
toujours dans un souci d'harmonisation et de simplification, "la mise en
commun des moyens financiers et humains de la CFD et du Ministère
de la coopération" afin de créer une "agence centrale du
développement". L'OCDE quand à elle à travers le Bulletin
du CAD (17) rappelle en 1994 une proposition de Serge Michaïlof à
propos de la rénovation de la coopération : "...Mais il nous
faut pour cela, dans un souci d'efficacité, envisager un
redéploiement de ses moyens financiers ainsi qu'une simplification
et une clarification de son cadre institutionnel".
En somme, et comme on le voit, le dispositif de l'Aide publique au
développement de la FRANCE est complexe. Cette complexité,
qui met en lumière un manque évident de coordination entre
les acteurs rend pénible toute tentative de recherche dans ce domaine.
Elle est aussi le fruit d'une volontaire opacité qui s'ajoute à
elle et qui constitue incontestablement l'autre caractéristique majeure
du système .
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(17) CAD Série d'examens en matière de coopération pour le développement (FRANCE) Paris
OCDE 1994 p. 18
2. Un dispositif sans grande lisibilité
Il nous semble que la complexité du système de l'Aide publique
au développement est la résultante de deux situations politiques
précises : la volonté de maintenir ce système dans une
certaine opacité, et la genèse même de cette aide qui
est avant tout au service d'objectifs politiques précis.
En effet, on se souviendra que c'est à la fin des années cinquante
alors que la majorité des anciennes colonies s'apprêtent à
accéder à l'indépendance que le général
DE GAULLE met en place un système d'aide publique au développement.
Il s'agit clairement pour ce dispositif de prendre le relais des liens coloniaux.
Ceci se fera d'autant plus facilement que les dirigeants de ces nouveaux
états indépendants ont dans leur grande majorité
été intronisés par la FRANCE. On comprend mieux la part
importante de cette aide réservée au bilatéral (qui
constitue notre objet d'étude) et aux seuls pays du champs (nous
reviendrons plus loin sur cette spécificité).
De fait aujourd'hui encore seuls 25% de l'aide publique totale au
développement sont réservées aux organismes
multilatéraux, et corollaire de cette situation, 99% de cette aide
est concentrée entre les mains du gouvernement. Il y' a donc visiblement
une absence totale de délégation qui affaiblit
considérablement les organisations non gouvernementales
françaises.
Pour revenir à notre question, il faudrait remarquer que lors de chacune
de ses cessions auxquelles, le comité d'aide au développement
(CAD) de l'OCDE s'interroge toujours sur cette complexité et cette
opacité. Il n'est pas le seul à critiquer cette situation.
En réalité, les critiques contre les dérives de l'aide
publique au développement de la France sont plus anciennes. Dès
1963, le rapport JEANNENEY mettait déjà en garde les
autorités françaises contre la tentation de vouloir rentabiliser
l'aide. Plus précis et plus virulent, le rapport GORCE en 1970
s'insurgeait clairement contre une vision et une pratique de l'aide
inféodée aux intérêts commerciaux.
Certes, la FRANCE en la circonstance n'a pas innové. On sait par exemple
que le projet Américain "FOOD FOR PEACE" des vivres pour la paix,
qui est à l'origine de l'aide alimentaire et qui a vu le jour par
le biais de la loi PL de 1954 disait clairement que nourrir des populations
affamées était le meilleur moyen d'ouvrir des nouveaux
marchés. Il n'en demeure pas moins que la part de l'aide Américaine
destinée aux organismes multilatéraux est autrement plus
importante.
En outre, on ne saurait dire que cette vision mercantile de l'aide soit
comparable avec les véritables subventions aux exportations ou
clientélisme politique que l'on retrouve dans l'APD Française.
Certains éléphants blancs, responsables en partie de l'importance
de la dette des pays Africains sont le fait d'une conjonction
d'intérêts ou mieux d'un complot entre entreprises Françaises,
l'APD Française, et les dirigeants Africains. Il n'est pas lieu ici
d'en dresser la liste : Tout de même, quand l'abus pousse le FAC (Fond
d'aide à la coopération chargé de financer par des dons,
des rapports conçus pour lutter contre la pauvreté et permettre
le développement) à acheter pour 34 Millions de Francs un
Mystère 20 en 1987 au Président Centrafricain (18) peut-on
vraiment bien comprendre le sens de cette APD ? de même quand quelques
années plus tard le même FAC va financer le
réaménagement intérieur du DC 8 du Président
BONGO (19), on peut difficilement ne pas croire en une opération de
clientélisme politique et de corruption d'autant que derrière
tout cela, généralement signés de juteux contrats. Il
apparaît donc clairement, derrière les discours officiels, que
l'APD Française par son organisation même se veut volontairement
un outil non pas de coopération au sens strict du terme mais un outil
de diplomatie et de bonnes affaires. Notre étude pourrait cependant
nous amener à confirmer ou infirmer ce qui n'est pas encore un postulat
mais une simple hypothèse de travail.
_______________________________________________________________
(18) Sylvie BRUNEL Op. Cit p. 22
(19) Sylvie BRUNEL Op Cit p. 23
CHAPITRE 3 : ETUDE DE DEUX CAS CONTRASTES : LE BENIN ET
LE GABON
C'est à dessein que nous avons choisi pour mener notre étude
de nous inspirer de ces deux exemples contrastés du BENIN et du GABON.
Notre but ultime étant de vérifier dans quelles mesures la
"Prime à la démocratie" a été mise en application,
quelles sont les limites de son usage et surtout quelles incidences a t-elle
sur l'évolution des processus de démocratisation, il nous a
semblé que prendre en exemple deux pays que tout oppose (le milieu
naturel, le passé politique, les relations d'avec la France, la
réalité politique) était la meilleure manière
d'opérer cette comparaison en nous en tenant aux seuls chiffres de
l'aide bilatérale Française.
En conséquence, pour étudier tour à tour ces deux pays,
nous en ferons à chaque fois une brève présentation,
nous parlerons sommairement de leur évolution politique de ces cinq
dernières années, avant de faire le point de leurs relations
commerciales (nous verrons plus loin, en quoi cet aspect nous a semblé
important) d'avec la FRANCE.
1. LE BENIN : Le modèle de transition
réussie par excellence
a) brève présentation
Ancienne colonie Française indépendante comme nombre de ses
pairs en 1960, le BENIN (anciennement DAHOMEY avant le changement de nom
imposé par le Président KEREKOU en 1975) est un petit pays
de 112 622 km2 (le 1/5 de la superficie de la FRANCE) qui compte 4,9 Millions
d'habitants selon les estimations de la BAD (Banque Africaine de
Développement) en 1992. Situé en Afrique de l'ouest, il est
limité au nord par le BURKINA FASO et le NIGER à l'ouest par
le TOGO et à l'est par le NIGERIA.
Du point de vue de la situation économique, le BENIN avec un Produit
Intérieur Brut de 380 dollars par habitant en 1992 est classé
parmi les pays les moins avancés. Il faut dire qu'à la
différence de ses voisins potentiellement riches, le BENIN ne peut
pas compter sur la rente procurée par l'exportation des produits du
sous-sol. L'Agriculture (avec 36,8% du PIB) constitue encore avec les
activités de service (46,7% du PIB) le secteur prédominant.
On comprend mieux que dans le cadre de la répartition de la population,
le taux d'urbanisation n'atteigne que 38% alors qu'il s'agit d'une population
jeune (47 habitants sur 100 ont moins de 14 ans).
Depuis l'indépendance, le BENIN a connu une évolution politique
tourmentée manquée par deux périodes distinctes : la
période de l'instabilité qui part de 1960 à 1972, et
la période du Parti Unique Marxiste Leniniste de 1972 à 1989.
En effet, à l'indépendance, M. HUBERT MAGA premier président
instaure une organisation politique proche de celle de la 5e république
Française, le multipartisme qui semble de lui même s'imposer
naturellement va pourtant s'effriter sous les coups de boutoirs des grèves
incessantes et les mouvements d'étudiants. La culture syndicale et
la culture tout court des béninois semblent à contrario jouer
contre la stabilité politique : En 1963 M. MAGA est renversé
et mis en résidence surveillée. Commence alors une longue
période d'instabilité marquée par des coups d'Etats
(quatre au total) qui aboutissent presque toujours au même scénario
: remise du pouvoir aux civils, incapacité de ces derniers à
s'entendre jusqu'au nouveau coup d'état. Il y' a alors une succession
de présidents à la tête de ce qui est encore le DAHOMEY.
APITHY, SOGLO, ALLEY, ZINSOU, AHOMADEGBE, se passent donc le pouvoir jusqu'en
Octobre 1972 et le coup d'Etat du commandant KEREKOU.
Cette date marque un tournant dans la vie politique du DAHOMEY car le nouveau président dissoudra bientôt tous les autres partis avant d'instaurer à son tour un parti unique : le Parti de la Révolution Populaire Béninoise (PRPB) en 1975. La même année le Dahomey deviendra le BENIN. Mais ce n'est pas la seule instauration du parti unique qui va modifier la donne et altérer les rapports entre le BENIN et la FRANCE. Outre donc le parti unique et ses corollaires (confusion entre le parti et l'état avec prééminence du parti sur l'Etat, néopartimonialisme, toute puissance d'un seul homme . . .etc) c'est surtout l'orientation idéologique du nouveau régime (le Marxisme-léninisme) qui modifiera ses rapports d'avec ses anciens partenaires : Ainsi dès 1976 la FRANCE suspend toute aide au BENIN. Cette suspension de l'aide ne fait qu'empirer la situation car le BENIN, qui reçoit finalement peu de l'URSS (formation d'étudiants beninois à l'Université LUMUMBA de Moscou) de la CHINE de la COREE ou de la BULGARIE (initiation de quelques projets économiques), s'appuiera surtout sur son puissant voisin, le NIGERIA, qui se trouve être en froid alors avec la FRANCE pour cause de soutien de cette dernière aux biaffrais.
C'est finalement la chute des prix du pétrole qui va pousser, au
début des années 80 le BENIN à se retourner vers l'ouest
notamment les Etats Unis et la France, le voyage effectué en 1983
à Cotonou par le président MITTERAND marque le revirement.
b) l'Evolution politique de ces dernières
années.
Jusqu'en 1989 donc, le BENIN a vécu sous l'impulsion du RPRB. Mais
entre temps, depuis le milieu des années 80, divers phénomènes
sociaux et économiques déclenchent les troubles. La chute des
échanges commerciaux avec la FRANCE (du 1er semestre 1987 au 1er semestre
1988 les importations de produits Français passent de 325,9 M FF à
275,2 M FF et les exportations vers la France de 12,8 M FF à 5,6 M
FF) traduit le désarroi de l'économie. La constante
dépréciation du naïra (la monnaie nigériane) rend
peu viables les projets industriels puisque la production locale du BENIN
ne peut concurrencer les biens manufacturés importés
frauduleusement du grand voisin.
Après le soulèvement des étudiants et la Fronde des
factions d'extrême gauche, la contestation atteint l'armée.
Mars et Juin 1988 voient la sécurité déjouer deux coups
d'état militaire dont le deuxième est conduit par deux proches
du Président : son ancien aide de camp et l'ancien responsable de
la sécurité. En fait, la réalité de la situation
en cette année 1988 est comme le remarque ADAMON est que les caisses
du pays sont vides, les salaires des fonctionnaires et les bourses des
étudiants sont payés (quand ils le sont) avec plusieurs mois
de retard. Malgré ce mécontentement généralisé,
le président KEREKOU se fait réélire en Août 1989
par son assemblée nationale. Mais la pression des bailleurs de fonds
se fait de plus en plus permanente.
Michel CAMDESSUS (directeur général du Fond Monétaire
International) déclarera à propos du BENIN : "notre
expérience au F.M.I. nous montre qu'une politique économique
musclée réussit le mieux quand les dirigeants politiques sont
en mesure d'obtenir un consensus populaire en faveur de leur stratégie
économique grâce à un véritable dialogue avec
la population" (20). On ne peut être plus clair.
_______________________________________________________________
(20) ADAMON Le renouveau démocratique au BENIN Paris l'Harmattan 1994
p. 23
Ce sont d'ailleurs ces bailleurs de fonds, le F.M.I. en tête qui
accepteront d'avancer trois mois d'arriérés de salaires, et
la FRANCE qui accordera 160 Millions de Francs contre l'abandon du Marxisme
léninisme et la tenue d'une conférence nationale souveraine,
qui pousseront KEREKOU au Multipartisme, aux élections libres, et
à la liberté de la presse.
La Conférence nationale souveraine, terme nouveau dans le vocabulaire
de la science politique a donc lieu du 19 au 28 Février 1990 après
une minutieuse préparation. Elle dépouille intégralement
le Président de l'ensemble de ses pouvoirs qu'elle transmet au Premier
Ministre chargé de gérer la période transitoire lui
même élu par la conférence. La dissolution de l'ancien
parti unique est confirmée, une amnistie est prononcée à
l'endroit des exilés politiques, des institutions nouvelles conformes
à la vie politique dans un Etat de droit sont mises en place : Des
élections libres, démocratiques sont organisées, elles
permettent non seulement le renouvellement de l'assemblée nationale
désormais majoritairement tenue par l'opposition et présidée
par un ancien exilé M. Adrien HOUGBEDJI mais les élections
permettent surtout l'alternance au pouvoir. M. Nicéphore SOGLO remplace
KEREKOU à la tête du BENIN.
Le déroulement de cette transition, l'excellence de ses résultats,
et le changement radical observé aussi bien dans les moeurs et les
pratiques politiques que dans les orientations économiques ont fait
dire à nombre d'analystes que la transition béninoise constituait
l'exemple même de transition réussie. Cette réussite
parait si éclatante que la formule de la conférence nationale
a été adoptée (avec une inégale réussite
cependant) par d'autres pays Africains dont le GABON. Aujourd'hui ce
système politique semble toujours si bien fonctionner, il semble si
bien fonctionner qu'il a consacré une nouvelle alternance au pouvoir
au mois de Mars dernier. M. KEREKOU est revenu au pouvoir après avoir
devancé au deuxième tour le président sortant
Nicéphore SOGLO. Avec un tel processus démocratique, nous verrons
de quelle manière la prime à la démocratie a été
appliquée. Mais avant cela, faisons le point sur les relations
commerciales voire politiques entre le BENIN et la FRANCE.
c) Le point des relations commerciales et de la coopération avec la
France.
Comme je notais plus haut, c'est le voyage du président MITTERAND
en 1983 qui a amorcé la reprise de la coopération entre le
BENIN et la FRANCE. Les premiers éléments de cette reprise
allaient être l'achat par le BENIN de véhicules blindés,
ainsi que la demande officielle d'une coopération militaire. Cependant
du fait de certains obstacles idéologiques en particulier, les liens
entre le BENIN et son ancien colonisateur n'ont vraiment jamais été
aussi chaleureux par exemple que ceux qui unissent la FRANCE au GABON. Le
commerce entre les deux pays s'en ressentira car, même si l'on peut
considérer aujourd'hui que les relations commerciales entre les deux
pays sont privilégiées. Il n'en demeure pas moins vrai que
celles-ci ne sont pas semblables (en volume et en dynamisme) à celles
que la France entretient avec le GABON.
L'évolution des échanges Franco-béninois entre 1989
et 1992 fait apparaître une hausse continue et significatives des
importations béninoises qui passent de 498 595 000 francs en 1989
à 785 045 000 francs trois ans plus tard. Les exportations
béninoises ne suivant pas la même évolution en volume
dans la même période, il en résulte un solde commercial
largement positif au profit de la FRANCE. Dans la même période,
le nombre d'entreprises Françaises commerçant officiellement
au BENIN a augmenté passant de 744 en 1991 à 1072 en 1992.
Malgré cette embellie, on peut dire que le commerce de la FRANCE vers
le BENIN demeure globalement timide à cause de deux raisons principales
: l'étroitesse du marché (ou la faiblesse du pouvoir d'achat)
mais surtout la concurrence des produits nigérians. En gros, on peut
dire que le BENIN n'est pas vraiment un grand client de la FRANCE, et que
cette situation justifiera peut être plus loin (du moins en partie)
la nature des rapports de coopération et d'aide qui existent d'avec
la FRANCE.
2. LE GABON : UN EXEMPLE D'EVOLUTION PLUS
HEURTEE
a) Brève présentation :
Ancienne colonie Française membre de l'AEF (Afrique Equatoriale
Française) le GABON est un exemple atypique : En effet, avec une
superficie de 267 667 km2 (soit environ la moitié de la France) le
recensement effectué en 1993 ne lui donne qu'à peine 1 million
d'habitants. De plus avec 2/3 de ce chiffre vivant dans les villes
(principalement Libreville la capitale) il s'agit d'un pays où le
secteur agricole est faible et n'a que tardivement suscité l'attention
des politiques. Le GABON vit donc largement de la rente pétrolière
(c'est le 3e producteur de l'Afrique noire après le Nigeria et l'Angola)
et de l'extraction du Manganèse et de l'Uranium. Quand au bois longtemps
unique ressource du pays, il subit aujourd'hui de plein fouet la concurrence
des bois asiatiques. Le GABON est classé parmi les pays à revenu
intermédiaire. Il occupe le premier rang pour l'Afrique subsaharienne
(devant l'Afrique du sud) pour le PNB par tête d'habitant.
Au plan politique, la société gabonaise reste marquée
par une longue prééminence du parti unique. En effet, le
multipartisme n'a duré que quatre années de 1960 à 1964.
Par la suite, le régime du président Léon MBA ayant
été victime d'un coup d'état qui n'échouera que
grâce à l'intervention des forces aéroportées
Françaises à Libreville (21), les principaux responsables de
l'UDSG (Union Démocratique et Sociale du Gabon, principal parti
d'opposition) furent arrêtés accusés d'avoir eu partie
liée avec les militaires putschistes. Le coup d'arrêt porté
au pluralisme sera institutionnalisé dès le 12 Mars 1968. Le
successeur de Léon MBA, le président BONGO qui arrive au pouvoir
en 1967 va dissoudre l'ensemble des partis préexistants pour les remplacer
par un parti unique : le P.D.G (Parti Démocratique Gabonais).
_______________________________________________________________
(21) François GAULME Le GABON et son ombre Paris Karthala p. 32
Cette mise en place du parti unique, malgré son accompagnement par
un arsenal de règles institutionnelles ayant toutes les unes comme
les autres pour objectif d'aérer, de créer au sein même
du parti une espèce de micro démocratie, malgré cela
disions nous, le système allait rapidement montrer ses limites freinant
plus qu'il ne devait favoriser le développement. C'est que, le parti
se confondant puis se substituant comme partout ailleurs à l'Etat,
les organes directeurs du parti (comité central, bureau politique)
jouant le rôle normalement dévolu au gouvernement et au et au
parlement. On assista de plus en plus inévitable du clientélisme
politique sur l'ensemble du tissu social. Cet ensemble fragile a cependant
tenu tant que le pétrole se vendait bien et que l'ensemble de la
population pouvait bénéficier de la rente ainsi procurée
par la redistribution. Les débuts des années 90 coïncidant
avec une grave crise financière ont marqué le point de départ
de l'implosion de ce système.
b) Evolution politique de ces dernières
années
A la différence du Bénin, le Gabon a plus ou moins vécu
dans une sorte d'apathie politique dès 1968. Les rares tentatives
de remise en cause de l'ordre ont été rapidement canalisés.
On a pu ainsi voir les militants du MORENA (Mouvement de Redressement National,
parti clandestin) arrêtés et mis en prison en 1981, Pierre
MAMBOUMDOU (opposant accusé par le pouvoir gabonais d'avoir fomenté
un coup d'Etat) expulsé de la FRANCE vers le SENEGAL en 1989 . . .
etc.
Cependant, ce qui se passait ailleurs finit par atteindre le Gabon dès
1989. Il y'a eu une conjugaison de phénomènes qui ont concouru
à cette explosion. L'implosion lente mais progressive d'un parti unique
que la rente ne permettait plus de faire vivre créant en son sein
des aigris, les étudiants ouverts sur le monde et qui éprouvaient
de plus en plus le besoin de souffler, l'immense majorité de la population
enfin en grande partie citadine et qui s'était habituée à
un certain niveau de vie que tendait à remettre en cause la baisse
des recettes pétrolières et son corollaire immédiat,
les programmes d'ajustement structurels du Fond Monétaire International.
Pris de court, le régime a bien tenté de reprendre en main
la situation en anticipant sur les événements par trois
décisions d'importance : dissolution de l'ancien parti unique,
création d'un parti unifié ayant vocation à réunir
en son sein l'ensemble des sensibilités politiques du pays, organisation
d'une conférence nationale dite consultative qui aurait eu pour mission
d'amender justement les statuts du nouveau parti unifié.
Mais le mécontentement était déjà tel que tout
ceci n'empêchera pas l'instauration du multipartisme dès 1990.
Hélas la suite du processus a été moins limpide qu'au
BENIN : les élections législatives qui ont suivi ont donné
l'occasion d'une fraude massive, qui permit au parti au pouvoir (dont l'annonce
de la dissolution avait été entre temps annulée) de
sauver de justesse une majorité à l'assemblée nationale.
Quand aux élections présidentielles de 1993, elles furent l'objet
d'une grande farce. En effet, la fraude fut importante que le Ministère
de l'intérieur proclama la victoire du Président BONGO alors
même que le dépouillement était loin d'être
terminé. Cette fraude plongea d'ailleurs le GABON dans une crise politique
aiguë qui vit l'opposition former parallèlement son gouvernement.
C'est finalement sous l'égide de la France que furent signés
les "accords de PARIS" entérinant le principe du résultat
électoral de 1993 moyennant : une promesse écrite du
Président BONGO de confier l'organisation des élections futures
à une commission indépendante du Ministère de
l'intérieur, la formation d'un gouvernement d'unité nationale
accueillant largement en son sein des membres de l'opposition, et la
transformation de la garde présidentielle en une garde républicaine.
Pour autant, le climat politique est loin d'être serein à l'approche
des élections législatives de Juillet 1996. Les troubles ont
recommencé et l'opposition accuse de nouveau le pouvoir de ne pas
respecter ses engagements n'essayant pour se maintenir que "d'acheter" les
opposants de faible conviction.
En somme et on le voit bien, on ne peut vraiment pas dire, à la
différence du BENIN que le processus de démocratisation est
bien amorcé. Au contraire, le GABON semble bien symboliser l'expression
de cette démocratie de façade sur laquelle nous nous interrogerons
dans la dernière partie de notre travail et dans laquelle nombre d'anciens
dirigeants africains semblent être passés maîtres. Ce
qui ajoute à l'amertume de ce constat c'est la complaisance, voire
la complicité que la coopération Française établit
parfois avec certains de ces régimes. Sans empiéter d'ores
et déjà sur l'objet de notre étude, nous nous souviendrons
que c'est l'armée Française qui en 1990 sauva à Port
Gentil le régime gabonais, et que c'est la coopération qui
appuya l'accélération des fraudes de l'élection
présidentielle de 1993 en supervisant les accords de PARIS. A l'heure
du compte, nous verrons si l'aide à tenu compte de ces trajectoires
politiques.
c) Le point des relations commerciales et de coopération d'avec la
France
Il a fallu un livre entier à Pierre PEAN (22) pour ébaucher
simplement la complexité, la profondeur, et l'étroitesse des
relations de commerce ou de coopération qui peuvent exister entre
la FRANCE et le GABON. La profondeur de ces relations est telle qu'il est
arrivé d'après Pierre PEAN que le Président Gabonais
donne son avis sur la nomination du Ministre Français de la
Coopération, qu'il finance tel ou tel parti politique, ou qu'il menace
ouvertement par voie de presse (lors des événements de PORT
GENTIL en 1990) une grande société comme ELF. De même,
la FRANCE va jusqu'à choisir le Président du GABON (23) si
l'on en croit Jacques FOCCART.
Une telle entrée en matière préfigure déjà
de ce que seront les relations commerciales entre "l'Emirat équatorial"
(24) pour reprendre le terme de Philippe DECRAENE et la France au point d'en
faire son "chouchou" (selon l'expression de François Xavier VERSCHAVE).
Qu'en est-il donc des relations commerciales entre la France et le Gabon
?
La France est le premier partenaire économique du GABON. Malgré
la dévaluation du Franc CFA en 1994, elle reste le premier fournisseur
avec 150,4 Milliards de F CFA ce qui équivaut à 40% des
importations totales du GABON (25). A l'opposé, la France importe
du Manganèse, du bois et de l'Uranium. En tenant compte du pétrole,
la balance commerciale est bénéficiaire pour le GABON. Par
comparaison avec les autres pays Africains, le GABON a été
en 1994 le 7eme fournisseur Africain de la France et le 10e client Africain
en termes de volume d'achats (26).
_______________________________________________________________
(22) Pierre PEAN Affaires Africaines Paris Fayard 1983 340 p.
(23) Jeune Afrique Extraits de FOCCART 1995
(24) Philippe DECREANE L'Afrique Centrale
(25) Centre Français du Commerce Extérieur Le GABON 1995 p. 34
(26) Ambassade du GABON en France - Bulletin d'informations Mars 1996
En fait, au GABON, la FRANCE est à l'abri de la concurrence pour
l'accès aux matières premières stratégiques que
sont le pétrole, l'Uranium, et le Manganèse : François
Xavier VERSHAVE considère même que le GABON est le "réservoir
officiel" des matières premières Françaises. Outre le
CEA (Commissariat à l'Energie Atomique), THOMSON CSF, les CHARBONNAGES
de FRANCE, qui y prospèrent, il y' a surtout ELF qui extrait près
de 85% de sa production pétrolière du pays.
Au delà du simple commerce entre états, il apparaît donc
clairement que les liens de coopération entre le GABON et la FRANCE
sont beaucoup plus profonds mais également plus troubles. Il s'agit
là pour nous de la meilleure façon de mesurer le degré
d'application de notre conditionnalité et de ses limites. Observer
entre un pays politiquement sain (du point de vue de l'évolution
démocratique) mais ou la FRANCE ne dispose pas de grands
intérêts économiques et commerciaux, et un pays au processus
démocratique tumultueux (mais qui est la réserve en matières
stratégiques), observer disions-nous la répartition et le volume
de l'aide conditionnelle tel est notre projet.
DEUXIEME PARTIE
LA "PRIME A LA DEMOCRATIE" A L'EPREUVE DES
FAITS
Après une partie introductive dont la raison d'être était
de resituer le texte (du discours de la BAULE) dans son contexte, nous allons
maintenant mesurer le degré de mise en application de cette
conditionnalité.
Ici, il s'agira moins de tenir compte du volume de l'aide bilatérale
Française accordée aux deux pays, que de mener une étude
comparative et proportionnelle de l'évolution de cette aide. Le but
est de partir des chiffres bruts (qui sont au départ nécessairement
épars) de les ordonner et de comparer leur évolution à
l'évolution de la situation politique dans ces deux pays. Sachant
par avance que le processus de démocratisation a évolué
presque de façon parfaite au BENIN et qu'il connaît d'énormes
difficultés au GABON, la tendance des chiffres devrait donc, en toute
logique prendre la même courbe. En revanche, si l'évolution
des chiffres ne correspondait pas à cette évolution politique,
alors il faudra essayer de comprendre cette inadéquation.
Enfin, le dernier élément de cette analyse consistera à
aller au delà des données globales pour analyser les postes
privilégiées dans l'octroi de l'aide. Ainsi, on se demandera
bien volontiers si l'aide est octroyée pour créer ou appuyer
une entreprise ou améliorer la santé ou l'éducation
des enfants ou si au contraire elle vise à équilibrer les finances
publiques ou à participer au maintien de l'ordre.
En clair, à partir de données souvent peu lisibles,
éparpillées entre la direction du trésor, la CFD ou
le FAC, il s'agira de faire un bilan de la "prime à la démocratie"
et d'en tirer les enseignements qui s'imposent non seulement au regard de
la coopération Française mais également par rapport
à la problématique de la démocratisation en Afrique.
CHAPITRE 4 : LES CHIFFRES DE L'AIDE , ANALYSE
COMPAREE
1. Les données brutes
C'est à ce niveau de notre étude que la complexité et
l'opacité de l'A.P.D Française dont nous avons parlé
en première partie prend toute son importance. En effet, s'il est
déjà peu facile d'avoir les chiffres de l'aide pays par pays
et département par département, c'est surtout la coordination
de ces chiffres qui pose encore plus de problèmes. Il y' a ainsi des
départements comme le ministère de la coopération (27)
qui donnent un chiffre certes global mais qui ne concerne que le seul
ministère, le centre français du commerce extérieur
qui donne des chiffres prétendument globaux mais exprimés en
Francs CFA introduisant une vraie difficulté quand à leurs
volumes (la dévaluation du Franc CFA étant intervenue en 1994)
et enfin le ministère de l'économie et des finances qui argue
du secret (28) pour ne pas entrer dans les détails de certains
décaissements. Face à cette difficulté, la tendance
est grande de n'en référer qu'aux chiffres fournis par les
instances internationales, l'OCDE, le FMI ou le PNUD. Mais dans cette optique
nous perdrions définitivement la possibilité de mener une analyse
plus qualitative de cette aide, ce qui forcément nuirait à
la profondeur de notre étude. Ainsi les chiffres que nous donnerons
ici font donc l'objet d'un arbitrage assez serré et ne peuvent
hélas, compte tenu du cadre étriqué de ce travail, (il
ne s'agit ici que d'un modeste mémoire de DEA) être
considérés comme exhaustifs.
_______________________________________________________________
(27) Ministère de la coopération - Rapport d'activité 1994-1995 pp 17-21
(28) intérrogée par le député Jacques MYARD au sujet des activités de la COFACE, Madame le
Secretaire d'Etat au commerce extérieur a évoqué la nécessaire discrétion pour s'opposer à toute
réforme (débats parlementaires Avril 1996).
2. L'Analyse critique de ces données
Comme nous le laissions déjà remarquer dans les pages
précédentes, il apparaît d'abord que l'aide de la FRANCE
au BENIN est nettement inférieure en volume à celle qu'elle
accorde au GABON. Il s'agit là d'une situation qui résulte
sans doute de l'histoire politique (le BENIN ayant choisi en 1975 le marxisme
léninisme, ses liens avec la FRANCE s'en sont trouvés distendus)
et de l'étroitesse ou non des relations qui existent entre chacun
de ces deux pays et la FRANCE. On peut quand même observer puisque
l'on parle de l'aide que le BENIN est rangé parmi les pays les moins
avancés, alors que la coopération Française range le
GABON dans le giron des pays à revenu intermédiaire (ce qui
le rendrait moins prioritaire dans l'octroi de l'aide). Ce n'est donc pas
la différence en volume de l'aide aux deux pays qui nous interpelle
(encore qu'il s'agisse d'une énorme différence) c'est plutôt
l'évolution de ces flux d'aides en rapport avec l'évolution
politique intérieure de ces pays qui fait vraiment l'objet de notre
étude.
Le tableau 1 qui prend les pourcentages de l'aide depuis 1970 fait clairement
apparaître déjà à cette date, une part plus importante
de l'aide Française destinée au GABON (1,6% de l'APD totale)
face à celle du BENIN. Cette différence atteint son paroxysme
dans les années 1980-1981 et pour cause, le BENIN n'entretient plus
alors de rapports avec la FRANCE (ceux-ci ne reprendront qu'en 1983 avec
le voyage à Cotonou du Président MITTERAND). Les chiffres font
apparaître un changement presque brutal en 1989-1990. Alors que les
flux d'aide au GABON se maintiennent, l'aide au BENIN connaît une brusque
remontée : il s'agit là incontestablement d'une "prime à
la démocratie" qui récompense ainsi le pays des efforts
engagés non seulement pour aller vers le pluralisme , mais également
pour assainir ses finances publiques. Cette embellie atteint son paroxysme
en 1990-1991 lorsque le pourcentage de l'aide Française destinée
au BENIN atteint 1% se rapprochant ainsi de celui du GABON.
Si l'on a assisté là au paroxysme, on a assisté aussi
à la fin de l'embellie. Alors que le BENIN fait plus que jamais en
Afrique et dans le monde figure d'exemple à suivre en matière
d'évolution démocratique, alors qu'il vient de connaître
une alternance politique sans heurts au pouvoir, la part de l'aide
française qui lui est destinée chute vertigineusement en 1991-1992.
Dans le même temps, elle est maintenue au GABON qui doit faire face
à des tripatouillages électoraux, des soulèvements
populaires (réprimés à PORT-GENTIL par l'opération
REQUIN). A ce niveau de l'analyse, on peut s'interroger sur la continuité
de la prime à la démocratie, mais il ne faut pas s'arrêter
sur ce seul aspect des choses, car la France n'a pas encore arrêté
d'aider le BENIN et il convient d'aller dans les profondeurs de cette aide.
Le deuxième tableau qui fait apparaître l'évolution de
l'aide Française (en comparaison avec celle d'autres pays membres
du comité d'aide au développement) depuis le début des
processus de démocratisation (en 1989) jusqu' en 1993 permet de voir
que si l'aide est octroyée de façon continue, son volume
hélas est de plus en plus irrégulier. Hormis les trois années
de référence (1989, 1990, 1991) les années qui suivent
ne permettent pas de parler d'une évolution. Les chiffres ont tendances
à baisser alors même que le BENIN ne s'est jamais si bien
portée politiquement. A contrario, on voit émerger de nouveaux
donateurs comme l'Allemagne, la Suisse, ou les Etats-Unis qui semblent vraiment
encourager le processus de démocratisation. La perplexité dans
laquelle la lecture de ces chiffres laisserait tout observateur est encore
accrue avec les chiffres de l'aide au GABON sur le tableau 3. En effet, entre
1985 et 1990, l'aide Française a augmenté de façon
régulière et conséquente par rapport au volume, il semble
ici que l'évolution politique à l'intérieur de ce pays
ne soit pas un facteur essentiel à la réception de l'aide.
Cette inadéquation révélée progressivement entre
l'évolution politique et l'octroi de l'aide apparaît clairement
à la lecture des tableaux 4 et 5. Ici, il s'agit de données
brutes, récentes prises à des périodes politiques
charnières de ces deux pays. Si l'APD Française destinée
au GABON double littéralement de 1993 à 1994, en revanche elle
évolue modestement dans la même période pour le BENIN.
Ce sont des années charnières car il y' a eu des élections
présidentielles au GABON en 1993 dont le résultat a été
largement contesté. Il en a résulté une grave crise
qu'il a fallu résoudre pour le pouvoir en payant le prix fort :
démission du gouvernement, constitution d'un gouvernement d'unité
nationale, refus de reconnaissance au ministère de l'intérieur
le pouvoir d'organiser les élections futures . . . etc. Autant de
preuves de reconnaissance de la fraude, c'est donc pendant cette période
trouble que la France décide de doubler son aide au GABON. Quand au
BENIN, la stabilité politique est loin d'être de fait
récompensée.
Cette analyse, qui n'est encore que quantitative de l'aide nous permet d'ores
et déjà d'aboutir à deux conclusions : la première
c'est s'agissant du BENIN, la "prime à la démocratie" n'a
fonctionné que pendant trois ans entre 1989 et 1991. Par la suite,
les objectifs politiques habituels, les intérêts économiques
et commerciaux qui sont ici peu importants ont repris leurs droits. Il ne
pouvait d'ailleurs en être autrement face à une structure (le
système de l'APD) qui n'avait pas connu de changement véritable
malgré le discours de la BAULE. La deuxième conclusion est
que si la prime à la démocratie est applicable (du moins
temporairement) sur des pays pauvres, elle l'est plus difficilement sur des
pays à fortes potentialités. L'invariabilité de l'aide,
sa régularité et son volume (au plus fort des troubles et des
fraudes) prouvent bien que lorsqu'il s'agit de sauvegarder des
intérêts, les conditionnalités politiques passent au
second rang.
Nous n'allons cependant pas nous arrêter là, car outre la
quantité, il faut aussi s'intéresser à la qualité
: nous allons donc voir en quoi proportionnellement a consisté en
cette période l'APD française.
S'il est un outil (le seul) qui a vu le jour pour justifier dans les faits
la volonté de l'aide et la coopération Française en
général à s'adapter à la donnée Afrique,
c'est le département du développement institutionnel mis en
place pour pallier l'inadaptation des structures existantes à un
environnement en pleine mutation. Ce département qui développe
ses actes selon quatre axes : l'appui institutionnel, la protection des personnes
et des biens, la formation du citoyen, la décentralisation, n'a pas
non plus pu présenter un bilan permettant de conclure en la
réalité de la conditionnalité. Si dans le cadre de l'Etat
de droit et des libertés publiques, il peut se targuer d'avoir aidé
à organiser des élections pluralistes, le NIGER, cité
comme exemple de cette collaboration (29) parait se présenter comme
un exemple malheureux si l'on tient compte de la situation politique actuelle
de ce pays où les militaires après avoir renversé (avec
la reconnaissance de la FRANCE) les civils élus sont en passe de
s'installer durablement au pouvoir.
Ce n'est pas à ce seul niveau qu'on notera l'ambiguïté
de cet appui institutionnel aux états. Car si le concours de la
coopération est notable dans la mise en oeuvre des processus
électoraux de pays pauvres (comme le BENIN) il ne peut être
observé dans des pays à fort potentiel comme le GABON qui peuvent
donc ne pas faire appel à des observateurs internationaux (sauf ceux
qui sont acquis à leur cause). L'autre facteur qui tend à confirmer
les limites de la conditionnalité et la dérive de la
coopération française face à démocratisation
est le contenu des aides. Nous avons vu que ces aides au BENIN se maintenaient
sans évoluer alors qu'elles doublaient d'année en année
pour le GABON. Si l'on s'en tient aux seuls décaissements pour l'Etat
de Droit et les libertés publiques du FAC les postes de la
sécurité civile sont les postes les plus importants. 50% des
décaissements sont ainsi effectués au compte de la police.
Comme si la stabilité et le maintien de l'ordre (thèmes dominants
du sommet de Libreville en 1992) étaient les éléments
les plus importants de l'Etat de droit. En revanche, au niveau du renforcement
des institutions judiciaires, au lieu de se pencher sur la question essentielle
en Afrique et ailleurs de l'indépendance de la justice et de la
séparation des pouvoirs, le département se penche plutôt
sur les questions de mise à jour des textes législatifs et
donne l'exemple de sa coopération avec la JUSTICE GUINEENNE. Quand
on sait ce qui s'y est passé à l'issue de la mutinerie d'une
partie de l'armée, on est en droit de s'interroger.
_______________________________________________________________
(29) Les élections Nigériennes sont présentéess par le Ministère de la coopération comme exemple
Op Cit p. 37
CHAPITRE 5 : LA "PARISTROIKA" INCIDENCES SUR
L'EVOLUTION POLITIQUE ET LIMITES
1. Un développement institutionnel
apparent
Même si, comme nous venons de le voir par les chiffres, la "prime à
la démocratie" n'a pas été appliquée durablement,
même si elle n'a pas été appliquée à tous
avec la même rigueur, force est de constater que son énonciation
a incontestablement eu un impact sur l'évolution des transitions
démocratiques en Afrique. On ne saurait trop ne pas rappeler que c'est
grâce à la pression française que le président
KEREKOU au BENIN a été obligé de lâcher du lest.
On peut encore se souvenir que c'est contre le payement par la FRANCE et
le FMI de trois mois d'arriérés de salaire que ce même
KEREKOU a accepté d'aller à la conférence nationale,
accepté de perdre l'ensemble de ses prérogatives favorisant
ainsi l'ouverture démocratique qui sert de référence
en Afrique.
Faut-il dans cet ordre d'idée considérer comme une simple
coïncidence ou alors faut-il ranger ces faits dans les corollaires du
discours de la Baule ? En tous les cas, on observe ainsi que les chefs d'Etats
Africains qui avaient le plus marqué leur désapprobation à
LA BAULE sont tour à tour éjectés du pouvoir : HISSENE
HABRE perd ainsi le pouvoir dès la fin de l'année 1990,
chassé par IDRISS DEBY qui est accompagné pour la circonstance
d'un officier de la DGSE (30) même si interrogé sur le sujet,
le ministre de la coopération de l'époque Jacques PELLETIER
affirmait que la FRANCE s'était cantonnée dans cette affaire
dans une stricte neutralité. Quelques mois après HABRE, c'est
MOUSSA TRAORE autre récalcitrant qui perdait le pouvoir après
un bain de sang. Coïncidence ou corollaire, PARIS accordera en un mois
au MALI une aide d'urgence de 90 Millions de Francs (l'équivalent
de ce qu'elle lui avait accordé pour toute l'année 1990).
_______________________________________________________________
(30) L'officier en question se nomme FONTBONNE et est devenu plus tard le conseiller du Président
DEBY. Voir Antoine GLASER et Stephen SMITH Ces messieux Afrique p. 210
Il apparaît donc clairement, au vu de ce petit rappel des
événements que la prime à la démocratie a sinon
déclenché les changements, au moins servi de catalyseur en
un certain temps et dans certains pays. Aussi est-on passé rapidement
d'un climat de frilosité ambiante dans les instances supérieures
des pouvoirs africains à une ruée forcée vers la mise
en place d'un pluralisme politique. Ce dernier supposait presque toujours
la tenue d'une conférence nationale, l'instauration du multipartisme,
la libéralisation de la presse, la mise en place d'institutions comme
celles qui régissent une démocratie aussi vieille et "exemplaire"
que celle qui leur servait de modèle : la démocratie
française. Ces chefs d'Etats Africains allaient d'autant plus vite
vers le changement que les oppositions en Afrique, croyant savoir la France
derrière elles, élevaient les enchères.
On a donc pu à l'orée des années 1992-1993 observer
le même type de scénario dans l'ensemble des pays africains
sous influence Française. Abandon et parfois dissolution de l'ancien
parti unique, création d'un nombre incalculable de partis politiques
(au GABON, pays d' à peine 1 Million d'habitants, plus de 50 associations
politiques ont participé à la conférence nationale,
en 1993 pour l'élection présidentielle, 13 candidats ont pris
le départ), adoption d'une constitution qui semble toujours être
la réplique Ivoirienne, Gabonaise, Béninoise de la constitution
de la cinquième république Française.
En clair, l'évolution institutionnelle étant visible car l'ensemble
de ces pays s'était doté de l'arsenal complet de tout pays
démocratique. Quelques années plus tard, on est désormais
en droit de s'interroger sur la réalité de cette évolution
démocratique car si le modèle démocratique basé
sur le pluralisme est celui qui a fait ses preuves, on n'arrive pas en Afrique
à trouver le point de convergence entre cette démocratie et
le développement auquel tous les hommes aspirent.
L'adoption de ces modèles institutionnels pour parfaite qu'elle parait
n'en demeure pas moins étonnante. Non seulement elle ne déclenche
pas le développement dans la plupart des cas, mais en plus elle ne
met pas fin aux maux décriés sous le parti unique. La question
ethnique, le néopatrimonialisme, les détournements de fond
ne semblent pas régresser, au contraire le multipartisme semble les
accélérer. Dans ces conditions, grande est la tentation de
revenir en arrière, ce qui justifie que les coups de force ou tentatives
de coup de force perpétrés ces derniers mois n'ont pas vraiment
été désapprouvés par les peuples car après
tout si l'on avait choisi le multipartisme c'était pour améliorer
le quotidien.
2. Une démocratisation en trompe l'oeil
?
Si l'on a pu penser que la prime à la démocratie a servi en
certaines circonstances de catalyseur des jeunes démocraties Africaines,
on demeure cependant perplexe devant l'importance des échecs de tous
les ordres et des obstacles qui semblent freiner aujourd'hui cette
évolution. L'ampleur et la nature de ces freins incitent forcément
à s'interroger sur les incidences réelles de cette prime à
la démocratie sur l'évolution des processus de
démocratisation en Afrique et à mieux disséquer les
causes de ces échecs.
L'un de ces échecs les plus notables est d'abord celui des "cohabitations
à l'Africaine". En effet, corollaire de la "paristroïka", un
certain nombre de pays africains dans lesquels les anciens dirigeants
s'étaient maintenus tant bien que mal au pouvoir avait choisi cependant
pour faire bonne figure, de se doter d'un Premier Ministre ayant un profil
de gestionnaire. Il s'agissait de rassurer les institutions financières
internationales, mais surtout de rechercher la prime à la bonne gestion
qui avait été la doctrine de la coopération française
lors du sommet de Libreville en 1992.
La COTE D'IVOIRE (arrivée à la primature de M. ALASSANE OUATTARA
ancien fonctionnaire de la Banque Mondiale) et le GABON (nomination comme
Premier Ministre de M. CASIMIR OYEMBA, ancien gouverneur de la Banque des
Etats de l'Afrique Centrale) qui avaient notamment choisi cette voie ont
dû tous les deux constater l'inefficacité d'une formule qui
en niant la réalité de la problématique politique (on
a préféré penser que c'est la seule gestion qui était
en cause) portait en elle même les germes de son échec.
L'autre phénomène marquant de cette évolution en dents
de scie est lié à l'actualité. Il s'agit de la recrudescence
des coups d'Etats ou des tentatives de coups d'Etats remettant en cause les
résultats électoraux sans que ni les peuples, ni la France
ne contestent véritablement ces remises en cause. Il en est ainsi
des COMORES mais surtout du NIGER où les militaires sont en passe
de s'installer durablement au pouvoir comme si l'élection
présidentielle libre qui s'était tenue quelques mois plus tôt
et à laquelle en apparence tous avaient semblé adhérer
n'avait été qu'une vaste mascarade.
On peut ranger dans le cadre des échecs, les défaites
électorales de ceux que l'on considérait volontiers il y' a
quelques années comme représentatifs d'une nouvelle classe
politique Africaine, ces jeunes "technocrates" le plus souvent formés
à l'occidentale et qui avaient été les grands vainqueurs
des premières élections libres. C'est le cas du béninois
SOGLO battu par l'ancien dictateur, le revenant Mathieu KEREKOU. Ailleurs
sur le continent, au CONGO, SAO TOME, on annonce ainsi les retours probables
des anciens dictateurs. Certes, on peut toujours interpréter ce
phénomène comme étant la preuve même du bon
fonctionnement de la démocratie, mais on a du mal à croire
que tous ces anciens tenants du parti unique ont déjà accomplit
leur mue et sont ainsi devenus sinon des démocrates au moins respectueux
du pluralisme.
Au delà des échecs au sommet dont nous venons de faire un
aperçu, il est intéressant aussi de voir ce qui dans le fond,
au niveau du fonctionnement et du bouillonnement même de la
société, doit être considéré comme des
obstacles patents. Si l'on parle avec insistance de la politisation de
l'ethnicisme et des conséquences de cette situation comme on a pu
le voir au RWANDA et au BURUNDI ou au CONGO, c'est davantage à des
phénomènes comme la banalisation et le développement
de la criminalité, ou à la montée de l'inflation, qu'il
faut se référer pour bien montrer qu'au total, en dehors de
la liberté de la presse qui semble aujourd'hui constituer une
avancée réelle, on observe comme une stagnation quand il n'
y a pas franchement régression. Comment expliquer ce phénomène
à l'envers, cette sorte de retour au bâton alors même
que la démocratie est censée permettre d'améliorer les
choses. Enfin, quel lien peut-il y avoir entre la "Paristroïka" et les
difficultés de démocratisation en Afrique ?
Incontestablement, l'une des raisons de cette difficulté est en relation
directe avec le développement en Afrique de ce que l'on appelé
les "démocratisation en trompe l'oeil" ou démocratie de
façade. En effet, il s'agit le plus souvent pour certains dirigeants
de pays de se parer de tous, les attributs institutionnels et juridiques
d'un Etat démocratique et de se montrer ainsi au monde. C'est un processus
qui commence par l'organisation de conférences nationales factices
dites consultatives (cas du GABON et du TOGO) ou d'organiser des élections
surprises et non préparées (cas du CAMEROUN ou de la COTE
D'IVOIRE). Ce faisant, on essaie surtout de prendre à témoin
la communauté internationale et de se donner une certaine image
d'ouverture, cette entreprise réussit d'autant plus facilement que
les opposants sont la plupart du temps des anciens membres du parti unique
qui en ont été écartés un temps donné
et qui se servent du multipartisme pour accéder au pouvoir à
tous les prix. Là sont donc posés deux types de problèmes.
D'une part celui de l'usage de la démocratie de l'autre celui des
élités qui se complaisent dans une sorte de démocratie
imposée par le haut.
Pour le premier point, il n'est pas nécessaire d'être observateur
attentif de la politique Africaine pour voir qu'il y' a réappropriation
de la "Prime à la démocratie" par certains Etats Africains.
Certains se sont en effet servis de cette doctrine pour se parer rapidement
de tous les attributs de la démocratie pour mieux réclamer
l'aide française. Pour ce faire, il leur a suffi d'importer ce que
l'historien KI ZERBO appelle les prêts à porter institutionnels
d'en habiller l'ancien parti unique de "fabriquer" parfois quelques opposants
alimentaires pour faire bonne mesure. Ainsi, la course à la prime
à la démocratie devient-elle la nouvelle source de chantage,
ou la démocratisation n'est qu'une opération de communication
destinée à charmer l'extérieur. Ces limites
révélées de la prime à la démocratie sont
d'autant plus nettes que les pays qui se livrent à ce jeu sont de
toutes les manières des pays où l'importance des
intérêts Français aurait rendu difficile un durcissement
de ton.
Le dernier point explicatif de cette démocratisation en trompe l'oeil
est la pratique ou la confiscation au débat politique par la seule
élité. On a donc l'impression que l'élite (pouvoir et
opposition) semble parler au nom du peuple dont elle aurait eu mandat. Il
en découle nécessairement une forme de démocratisation
imposée par le haut dans laquelle les peuples ne comprennent pas grand
chose . . . Ceci peut expliquer l'absentéisme électoral surprenant
dans un contexte de liberté comme cela a été le cas
du MALI lors de l'élection de KONARE.
CHAPITRE 6 : POUR UNE NECESSAIRE REDEFINITION DE LA
POLITIQUE DE COOPERATION EN RAPPORT
AVEC LE FAIT DEMOCRATIQUE EN AFRIQUE
1. L'aide face à la question
démocratique en Afrique
Notre étude pour sommaire qu'elle est n'en a pas moins
révélé la complexité et l'ambiguïté
des relations entre l'aide et la démocratisation. En fait, il s'agit
surtout ici de mettre en évidence le caractère parfois peu
logique ou rationnel d'une incitation financière sur la disposition
d'un pays à aller vers plus de démocratie. Mais avant de prendre
la mesure de cette complexité, il importe déjà de savoir
si l'incitation est réelle ou feinte et si, selon qu'elle sera
réelle ou feinte, cela influera différemment sur l'évolution
des processus de démocratisation.
Dans le cas du BENIN même si l'incitation de 1989 obéit à
d'autres mobiles (il s'agissait alors avant tout d'acculer le président
KEREKOU contre le mur afin de plus facilement obtenir de lui l'abandon du
Marxisme léninisme), il est clair que celle-ci a joué un rôle
de catalyseur en permettant notamment la tenue d'une conférence nationale.
Mais ce principe n'est-il pas inconsciemment à l'origine d'une politique
d'assistanat (le BENIN apparaît dans les années 90-91-92 comme
l'un des pays Africains les plus aidés) qui en généralisant
une sorte de culte du cargo détruirait ainsi toutes les
velléités locales. Bien sur pour un pays qui repart à
zéro, un minimum d'appui extérieur n'est pas une mauvaise chose
mais faut-il en faire la règle ? Ne doit-on pas aller à la
source des problèmes en négociant la dette par exemple ou en
lui permettant d'exporter ?
Pour revenir à notre problème, si dans le cas du BENIN (du
moins dans les premières années) cette incitation est réelle,
par la suite et les chiffres le prouvent, cette incitation tombe. A
l'opposée, dans le cas du GABON par exemple jamais la
conditionnalité n'a été appliquée au contraire.
Le développement rapide d'une mascarade démocratique semble
obéir non pas à une volonté d'ouverture qui serait plus
tard éventuellement récompensée mais à un savant
jeu de rôle du maître qui menace de sévir tout en sachant
par ailleurs qu'il n'en a pas les moyens et de l'élève qui
fait semblant de se plier tout en n'ignorant pas que de toutes les façons
il ne sera pas puni loin s'en faut. Au total, la conditionnalité n'est
appliquée que de moitié car il n' y a pas de structure
adéquate pour en faire un système et la volonté politique
en ce domaine est absente sinon elle ne s'exprime que pour maintenir le statu
quo garant de la stabilité, et face aux pays un peu plus nantis la
conditionnalité n'est même pas évoquée dès
lors que c'est la sauvegarde des intérêts à court terme
qui est le leitmotiv.
Quand à la complexité des liens qui existeraient entre incitation
financière et démocratisation le résultat auquel nous
aboutissons commande une certaine réserve : faut-il nécessairement
inciter au risque de voir se développer des modèles de
démocratisation en trompe l'oeil ? question complexe qui renvoient
à des débats aussi actuels que celui du devoir d'ingérence
ou de la recolonisation. Il n'est malheureusement pas lieu d'en discuter
ici mais nous devons tout de même observer que s'il ne s'agit pas de
s'ingérer il n'est pas non plus sain pour la France de coopérer
avec toutes les formes de régimes. Une des pistes de sortie de ce
débat serait que l'aide prenne de moins en moins le visage d'un assistanat
(ce qu'elle n'est d'ailleurs pas au regard des intérêts coupables
qu'elle génère) et de plus en plus celui d'un partenariat comme
le suggère ELIKIA MBOKOLO (5). Il s'agira moins de parler de la
coopération de la France en Afrique que la coopération
Franco-Africaine où en entrant en rapports de partenariat, la France
et l'Afrique coopéreraient. L'impératif démocratique
apparaîtrait alors non pas comme un ordre imposé par la France
mais comme un besoin intérieur à satisfaire.
2. La problématique de la démocratie
en Afrique
Dans les pages précédentes nous avons montré de quelle
manière la démocratie pouvait être ressentie par les
acteurs du continent comme besoin de l'intérieur. Il est primordial
que la question démocratique soit posée en ce sens car autrement
elle demeurera toujours au même titre que l'Etat, un produit importé
que les élites seules se réapproprieraient afin de le mettre
à leur service par le haut, dans le mépris total des peuples
qui n'en seraient à l'occasion que la chair à canon.
Cette réflexion s'impose d'autant plus que six ans après les
débuts tonitruants des processus de démocratisation en cours,
à l'heure des premiers bilans on ne peut se montrer réellement
satisfait ni pour la situation actuelle, ni en termes de prévision.
Au delà du retour annoncé voire programmé de certains
ardents défenseurs du parti unique aux affaires, ce sont surtout les
faits sur place qui poussent à l'inquiétude : le regain du
problème ethnique même dans les pays où cela n'ira pas
à l'affrontement physique, les lourdeurs de l'administration,
l'aggravation de la dette, l'accélération des détournements
de fonds publics fait toujours penser que le continent n'est pas sorti du
parti unique. Cette accélération des maux est si prononcée
que les sceptiques de toujours recommencent à évoquer avec
nostalgie la période du parti unique. Pour ne pas aller jusque là
il importe tout de même d'esquisser l'inventaire des obstacles à
la démocratisation afin de penser une démocratie africaine.
Tour à tour nous aborderons la question ethnique, celle des élites,
et certaines autres questions secondaire comme la culture politique ou le
rôle des armées.
Les élites, il s'agit ici des élites intellectuelles certes
mais aussi commerciales et économiques, tous ceux qui occupent une
position sociale leur permettant de participer en tant qu'acteurs au débat
politique. C'est dans cette élite qu'est recruté l'ensemble
du personnel politique. Or depuis les années 70, on peut constater
que cette élite qu'elle soit membre des pouvoirs ou des oppositions,
n'a pas été renouvelée. C'est une élite qui
aujourd'hui a presque confisqué le débat politique l'imposant
du haut et en écartant les femmes dont le rôle social et
économique en Afrique est capital. La résolution de la question
des élites constitue une des voies de la démocratisation
véritable.
L'ethnicisme ou mieux la politisation du fait ethnique est à l'origine
de nombre de problèmes que certaines jeunes démocraties ont
rencontré. Au CONGO, au RWANDA, au BURUNDI mais aussi au GABON, au
CAMEROUN et en COTE D'IVOIRE le facteur ethnique fait l'objet d'une exploitation
politique préjudiciable à la démocratisation.
On aurait tout aussi pu évoquer la question des armées de leurs
mues, le problème de la culture politique, celui de l'importation
du modèle et du mimétisme, autant de questions centrales qui
entrent bien dans la problématique de la démocratie en Afrique
et dont il n'est malheureusement pas lieu de parler ici.
CONCLUSION
Au terme de ce travail et même si à priori nous reconnaissons
n'être pas entrés dans la profondeur des chiffres et par voie
de conséquence de l'analyse, nous pouvons cependant dégager
un certain nombre de points que la vérification de nos hypothèses
de départ nous permet.
En premier lieu et pour revenir au texte, force est de reconnaître
que le discours de la BAULE qui est à l'origine de la doctrine de
la "Prime à la démocratie" était bien plus ambiguë
qu'on a bien voulu le croire en son temps. Il semble d'ailleurs avec le recul
que l'on ne puisse pas dire avec certitude, si ce texte relève
sincèrement d'une volonté délibérée d'aider
les pays Africains à se démocratiser (comme on a pu le croire
en cette période donnée), s'il relève comme l'affirme
MONGO BETI (1) du calcul politique d'un homme voulant demeurer dans le vent
de l'histoire, ou si au contraire (comme nous le croyons) ce discours fait
partie des errements et des tergiversations d'une politique de coopération
qui reste cependant accrochée à deux termes clés, la
stabilité, et la sauvegarde des intérêts
Français.
Malgré le constat, la lecture attentive de ce texte ainsi que l'analyse
du contexte nous permettent aujourd'hui de dire même s'il n'y a pas
eu révolution en la demeure. La prime à la démocratie
est bien une doctrine qui a existé autrement que dans les paroles
mais qui a du s'arrêter aux limites liées de ses capacités.
Car telle qu'énoncée, cette doctrine n'aurait pu s'appliquer
durablement et avec efficacité, que si au préalable le
système même de l'APD Française avait été
entièrement changé. En effet, conditionner l'aide à
l'ouverture démocratique supposait prendre le contre pied total et
de la philosophie et de ses objectifs non seulement du système mais
également de l'ensemble de la politique de la coopération
Française. Cela suppose qu'il aurait fallu clarifier le système,
définir des critères connus de tous, rénover des organismes
comme la COFACE, regrouper autant que faire se peut l'ensemble du
dispositif.
_______________________________________________________________
(1) MONGO BETI Op. Cit p. 152
Comme nous l'avons vu, si cette pratique de
la conditionnalité a pu s'exercer pendant trois ans avec le BENIN,
c'est précisément parce que avec ce pays, les liens commerciaux
ou de clientélisme n'ont jamais été bien importants.
En revanche, avec le GABON, la prime à la démocratie, coquille
vide de toute autorité institutionnelle a vécue pour ne pas
dire qu'elle n'a jamais vu le jour.
Dans cette optique y'a t-il eu incidences sur l'évolution politique
et cette parenthèse est-elle de nature à modifier quelque chose
dans les relations entre la France et l'Afrique autrement dit préfigure
t-elle d'un changement dans les orientations de cette politique ?
S'il y' a eu des incidences sur l'évolution politique des nouvelles
"démocraties" Africaines, elles ne sont pas forcément celles
que l'on attendait. Que le BENIN ait continué son ouverture malgré
une aide de plus en plus modeste de la FRANCE et que le GABON ait poursuivi
dans la voie de la fuite en avant de la démocratie de façade
malgré des aides de plus en plus importantes apparaît comme
un phénomène paradoxal. Comme si à la limite, il fallait
être le moins soutenu possible pour trouver sa voie car ici, ce que
l'aide semble surtout générer c'est ce que Stephen SMITH appelle
la concurrence pour la "rente démocratique (2) qui n'est pas le meilleur
fondement d'une ouverture démocratique véritable. Quand à
une modification éventuelle des rapports entre la France et l'Afrique,
c'est ignorer que la prime à la démocratie n'a justement
été qu'une parenthèse que d'imaginer que la politique
de coopération aura radicalement changé. A ce propos, il nous
semble que les événements récents sur le continent,
ceux qui sont en cours et ceux qui sont à venir sont de bons indicateurs
pour donner la mesure des changements intervenus depuis le discours de la
BAULE.
_______________________________________________________________
(2) Stephen SMITH Libération le 29/04/91
En république centrafricaine d'abord, l'intervention Française
qui a sauvé le pouvoir d'Ange PATASSE ne s'est pas décidée
sans heurts, il semble, selon AFRICA INTERNATIONAL (3), qu'elle ait
été précédée d'un vif affrontement entre
ceux qui étaient partisans d'une intervention limitée à
la seule protection des français et des étrangers (Dominique
de VILLEPIN) et ceux qui souhaitaient sauver aussi "un président élu
démocratiquement".
Le président de la République a finalement choisi de se ranger
à l'avis de Jacques FOCCART pour qui en protégeant PATASSE
on rassurait aussi les autres chefs d'Etats de la région. Au TCHAD,
il semble finalement que la FRANCE a choisi IDRISS DEBY, quand au GABON,
Jacques CHIRAC a choisi de s'y rendre en Juillet en pleine période
de campagne électorale . . . comme quoi la "prime à la
démocratie" choisit ses récipiendaires.
Et la démocratisation Africaine dans tout cela me diriez-vous ? Elle
évolue au gré de ces errements d'où la nécessité
pour elle de rechercher sa propre voie. Comme on l'a vu dans le cas du GABON,
la démocratie de façade n'est pas la démocratie, elle
fait presque autant de mal que le parti unique. Le seul multipartisme non
plus n'est pas la démocratie. Il faut aux pays Africains tout en
conservant le principe (de peur de donner raison à ceux qui ne leur
reconnaissent pas la maturité et la capacité de se
démocratiser), inventer leur modèle démocratique. Pour
cela, même si l'aide des pays occidentaux peut s'avérer
nécessaire, elle ne peut constituer la seule motivation à la
source de la conscience démocratique.
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(3) AFRICA INTERNATIONAL 16/06/96
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