Peuples autochtones et gouvernance en contexte Canadien : 

difficultŽs de lÕautonomie gouvernementale autochtone et perspectives de recherche

 

Pierre Noreau

AndrŽe Lajoie

 

Centre de recherche en droit public

UniversitŽ de MontrŽal

 

 

(premire version dÕun article paru dans Christoph Eberhard (Žd.), Droit, gouvernance et dŽveloppement durable,

Cahier d'anthropologie du Droit 2005, Paris, Karthala, 376 p (165-179)

 

 

 

Le thme de la gouvernance appara”t dans le contexte politique contemporain comme lÕoccasion inŽdite de rŽflŽchir dans une nouvelle perspective les conditions du vivre-ensemble. Sur le plan intellectuel, il offre cependant aussi la possibilitŽ dÕune analyse plus complte et plus fine des conditions de la vie sociale et des modalitŽs par lesquelles sՎtablissent les grandes orientations de chaque collectivitŽ. Par extension, il favorise lÕexploration des modalitŽs de la communautŽ de destin. Comme tous les mots (redevenus) ˆ la mode, lÕemploi du concept est rendu difficile du fait de sa polysŽmie. ExploitŽ politiquement, il rŽfre tout autant ˆ lÕimposition dÕun modle unique dÕopŽration (la Ē bonne Č gouvernance) quÕaux conditions dÕune prise en charge des collectivitŽs par leurs propres moyens.

 

1.   Gouvernance autochtone : Contexte et enjeux

 

Au plan analytique, on sÕentend gŽnŽralement pour voir dans la notion de gouvernance lÕoccasion dÕun Žlargissement de notre dŽfinition de lÕaction publique et de lÕordonnancement social (Lajoie, 2000; Baron, 2003). CÕest lÕusage quÕon en fait ici. Dans lÕesprit des membres dÕune Žquipe que nous avons formŽe au cours des dernires annŽes et qui sÕapprte ˆ travailler sur les enjeux de la gouvernance autochtone au Canada [1], le concept de gouvernance rŽfre aux reprŽsentations, aux mŽcanismes, aux processus et aux moyens qui, au sein dÕune collectivitŽ, concourent ˆ la dŽfinition des orientations collectives et, de faon plus gŽnŽrale encore, aux conditions du vivre-ensemble. Cette dŽfinition volontairement ouverte sÕinscrit dans les orientations proposŽes par de nombreux auteurs quŽbŽcois et canadiens (Plumptre, 1998 ; Paquet, 2001). Elle reprend plusieurs des aspects de la dŽfinition offerte dans ces pages par ƒtienne LeRoy et met lÕaccent sur les processus sociaux davantage que sur les structures politiques. Elle sÕoppose ainsi ˆ une conception strictement institutionnelle des choix collectifs, mme si elle ne lÕexclut pas. Les travaux encore rŽcents de la Commission du droit du Canada sur la question sont particulirement Žclairants ˆ ce propos. Ils mettent en perspective la nŽcessitŽ dÕune dŽfinition extensive de lÕorganisation et de la normativitŽ juridique en reconnaissant les dimensions relationnelles, paradigmatiques et normatives de toute activitŽ susceptible de structurer ou dÕorienter la destinŽe dÕune communautŽ sinon dÕune sociŽtŽ. Il rŽsulte de cette conception Žlargie de la gouvernance une reconsidŽration des rgles de droit positif, en tant que seuls mŽcanismes de rŽgulation sociale, et un Žlargissement de la notion de gouvernement telle quÕelle est traditionnellement dŽfinie; or, cette approche implique la prise en compte dÕautres dimensions essentielles ˆ lÕordonnancement social (Macdonald, 2002). De faon plus explicite encore, elle favorise lՎtude des conditions de lÕautonomie gouvernementale et, par extension, lՎtude des relations de gouvernance Ē entre Č sociŽtŽs diffŽrentes, liŽes les unes aux autres (Tully, 2000). Ainsi sՎtablissent les frontires respectives des sphres de gouvernance et leurs modes dÕinteraction (Macklem, 2001).

 

La rŽalitŽ autochtone au Canada pose de faon exemplaire les termes de ce questionnement. LՎtude que nous entreprenons doit par voie de consŽquence dŽboucher sur la dŽfinition de diffŽrentes modalitŽs, sinon de diffŽrents modles, dÕajustement mutuels possibles entre formes de gouvernances autochtones et non autochtones.

 

La cohabitation sur un mme territoire des Autochtones et des non-Autochtones offre dans ce sens lÕoccasion dÕune rŽflexion Žtendue sur les fondements sociaux, politiques et juridiques de la gouvernance. Elle pose ˆ sa faon cette question centrale : comment vivre ensemble ? Il sÕagit dÕenjeux importants alors que le droit international tente de dŽfinir les termes dÕune nouvelle DŽclaration des droits des peuples autochtones et que, sur le plan canadien, lÕarticle 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 exige une reconsidŽration importante et continue des droits ancestraux et issus de traitŽs (Otis, 2004; McNeil, 1996; Morin, 2000). Paralllement, la mobilisation autochtone favorise lՎmergence dÕun questionnement nouveau sur lÕautonomie gouvernementale autochtone et ses consŽquences sur les rapports entre Autochtones et non-Autochtones (Slattery, 1995). CÕest  une perspective Žgalement favorisŽe par les conclusions de la Commission royale dÕenqute sur les peuples autochtones (1996). De nombreuses expŽriences, comme celles qui ont conduit au rŽamŽnagement des pouvoirs autochtones dans le Nord du QuŽbec et ailleurs, sont Žgalement venues alimenter ces orientations (Gagnon, 2002; Lajoie et al., 2000a). Elles ont Žlargi les perspectives de recherche et le dŽbat public sur les enjeux entourant la gouvernance contemporaine, tant au Canada que dans lÕensemble des AmŽriques, en Australie, en Nouvelle-ZŽlande ou dans les contrŽes du nord de lÕEurope (Stoker, 1998; Price, 2000).

 

2. Limites et contraintes de la gouvernance autochtone

 

Plus spŽcifiquement, la question autochtone exige une reconsidŽration des rŽfŽrents sociaux, idŽologiques et juridiques qui prŽsident ˆ notre conception de la souverainetŽ. Elle suppose un dŽpassement de la notion traditionnelle de gouvernement, sinon une reformulation des catŽgories qui servent ˆ penser la vie collective et les mŽcanismes qui concourent ˆ la dŽfinir, sinon ˆ lÕorienter (Eberhard, 2004). Au sein de la tradition intellectuelle occidentale, une conception largement inspirŽe de la philosophie politique a longtemps servi de support ˆ ce questionnement (Morin, 1997; Rouland, PierrŽ-Cap et Poumarde, 1996). Elle suppose, pour lÕessentiel, que la mise en ordre des rapports sociaux et la dŽfinition des choix collectifs sont toujours le produit dÕune activitŽ rationnelle et transparente. LՃtat et le droit, tels quÕils sont ordinairement abordŽs par la pensŽe libŽrale et le positivisme juridique, y occupent inŽvitablement une place dŽterminante (Noreau, 2003). Cette perspective sÕappuie sur une conception centralisŽe de lÕaction publique et une dŽfinition hŽgŽmonique du territoire et de la souverainetŽ (Borrows, 2000). Elle suppose une dŽfinition unifiŽe et homogne de la nation. Or, ce sont ces prŽmisses que remet en cause la dŽfinition dÕune gouvernance autochtone, ne serait-ce que parce quÕelle exige une reconsidŽration des conceptions classiques de la souverainetŽ, de lÕautoritŽ politique et du territoire (Hogg, 1995; Johnston, 2003). Ce retournement des perspectives implique cependant un dŽfi intellectuel important.

 

Sur un plan plus empirique, toute rŽflexion sur les conditions de lÕautonomie gouvernementale autochtone exige cependant un inventaire des contraintes qui sÕopposent ˆ sa rŽalisation. Ces contraintes sont dÕordre historique, idŽologique et sociologique. Leur prise en compte est essentielle, encore que lÕinventaire quÕon peut en faire nÕest jamais totalement exhaustif.

 

            2.1       Les contraintes dÕordre historique

Toute forme de gouvernance autochtone ne peut se dŽfinir quÕen comparaison ˆ une situation antŽrieure, souvent marquŽe par la dŽpendance vis-ˆ-vis de laquelle on entend sÕaffranchir. Cette dŽpendance tient ˆ la fois aux conditions historiques du colonialisme, aux tensions entre ordres de gouvernance autochtones, au poids des compromis politiques Žtablies, ˆ la rŽsilience des formes de gouvernance Žtablie et ˆ la dŽpendance mutuelle  des ordres de gouvernance autochtones et non-autochtones.

 

Le colonialisme interne. La premire de ces contraintes tient ˆ la nature des rapports Žtablis jusquÕici entre sociŽtŽs autochtones et non autochtones. Ceux-ci sÕinscrivent dans le cadre dÕun rŽgime de type colonial qui trouve une traduction juridique claire dans la fonction fiduciaire de la Couronne vis-ˆ-vis des populations autochtones. Cette responsabilitŽ fiduciaire est largement encadrŽe par les termes de la Loi sur les Indiens [2], adoptŽe en 1951 [3], et dans les dispositions dÕun certain nombre de traitŽs signŽs tout au cours du XIXme sicle. Certains auteurs ont pu parler, sÕagissant des peuples autochtones, dÕune forme de colonialisme interne. Les relations entre Autochtones et non-Autochtones sՎtant dŽveloppŽes ultŽrieurement dans ce cadre particulier, elles sont gŽnŽralement venues renforcer, par ajouts successifs, la condition de dŽpendance des communautŽs autochtones vis-ˆ-vis des autoritŽs politiques canadiennes. Ce faisant, les fondements idŽologiques de ces dŽpendances se sont constamment trouvŽs confirmŽs et renforcŽs.

 

Les tensions entre les ordres de gouvernances autochtones. Un des principaux effets du cadre juridique imposŽ par la Loi sur les Indiens [4] vient de ce que la reconnaissance des droits autochtones est largement fonction de  leur rattachement ˆ la bande plut™t quՈ la Nation autochtone. Cette modalitŽ de reconnaissance centrŽe sur des communautŽs territorialisŽes de dimension rŽduite a dÕabord eu pour consŽquence de favoriser la reconnaissance de la communautŽ autochtone sur celle de la Nation ˆ laquelle elles se rattachent sur le plan ethnoculturel [5]. Ce choix comporte lui-mme de nombreuses consŽquences, dont lÕinstitution dÕun ordre de gouvernement communautaire particulier (le conseil de bande) diffŽrents des ordres juridiques et politiques traditionnels, et susceptibles dÕentrer en compŽtition avec ceux-ci (Lajoie et al, 1998). Du point de vue de lÕautonomie gouvernementale autochtone, cet Žtat de fait pose cependant aussi le problme de lՎtablissement du sige Žventuel de la gouvernance autochtone : la Nation ou la communautŽ.

 

Le poids des compromis politiques Žtablies. Corollairement, les rapports de dŽpendance des collectivitŽs autochtones vis-ˆ-vis de la sociŽtŽ non-autochtone sont Žgalement caractŽrisŽs par la diversitŽ des arrangements politiques et juridiques particuliers qui les lient aux autoritŽs politiques canadiennes et provinciales (notamment par voie de traitŽs spŽcifiques), et en vertu desquelles la reconnaissance ou lÕexercice de certains droits ancestraux ont pu tre limitŽs, au cours du dernier sicle et demi. En contrepartie, lÕarticle 35(1) de la Loi constitutionnelle de 1982 rŽaffirme et pose de faon urgente lÕobligation dÕune redŽfinition (dÕune renŽgociation) des modalitŽs dÕexercice de ces droits aux contours imprŽcis. Cet Žtat de fait nouveau ouvre prŽcisŽment, aujourdÕhui, la porte ˆ une reconsidŽration des conditions dÕexercice de lÕautonomie gouvernementale autochtone.

 

La rŽsilience des formes de gouvernance imposŽes. Toute rŽflexion sur les conditions de lÕautonomie gouvernementale autochtone ne peut par ailleurs faire lՎconomie dÕune analyse de lՎtat du droit tel quÕil a pu contribuer, au cours du dernier sicle et demi, ˆ faonner les rapports de gouvernance au sein des communautŽs autochtones. Ainsi, bien que la dŽlimitation des rŽserves et lÕimposition des conseils de bande puisse aujourdÕhui tre considŽrŽes comme lÕexpression du colonialisme, on ne peut nier les consŽquences structurantes que cet encadrement juridique a pu avoir sur la vie des communautŽs au cours des 125 dernires annŽes. Ici encore, toute dŽmarche en vue dՎtablir une forme de gouvernance autochtone ne doit pas tre fondŽe sur le mythe dÕun retour improbable ˆ une gouvernance totalement ĒtraditionnelleČ dont les fondements sont souvent oubliŽs, non plus quÕelle ne peut sÕaffranchir totalement des formes de gouvernances expŽrimentŽes socialement jusque-lˆ en recourant ˆ la dŽfinition dÕune gouvernance fondŽe dans lÕabsolu.

 

La dŽpendance mutuelle des ordres de gouvernance. Finalement, les enjeux de la gouvernance autochtone ne peuvent tre abordŽs en dehors de ses rapports avec les autres ordres de gouvernance. Aucun ordre de gouvernance ne peut dÕailleurs sÕaffirmer en dehors de son rapport aux autres comme en tŽmoigne lÕhistoire des relations entre ƒtats Ē souverains Č. Il sÕensuit que la dŽfinition ou lÕexpŽrimentation dÕune forme ou dÕune autre de gouvernance autochtone est nŽcessairement fondŽe sur la dŽfinition de ses rapports avec les ordres de gouvernance instituŽes (au plan national comme au plan continental et international)  et comporte une dimension dynamique. De ce point de vue, les difficultŽs conceptuelles qui attendent la redŽfinition de nouvelles formes ou de nouveaux ordres de gouvernance autochtones ne diffrent pas de celles qui sÕimposent au chercheur intŽressŽ aux conditions de dŽveloppement du pluralisme juridique. Tous sont confrontŽs au problme de la forme que prennent les relations entre ordres juridiques centrŽs sur des sources diffŽrentes de normativitŽ et dÕautoritŽ (Rocher, 1996).

 

            2.2       Les contraintes dÕordre idŽologique

Au-delˆ du poids de lÕhistoire, dÕautres problmes, dÕordre idŽologique ceux-lˆ, viennent limiter le dŽploiement de lÕautonomie gouvernementale autochtone : la difficultŽ de fonder la gouvernance sur des rŽfŽrences de type traditionnel ou dՎtablir de nouvelles rŽfŽrences collectives lŽgitimes, mais Žgalement la difficultŽ de sÕaffranchir des catŽgories juridiques Žtablies et dÕune conception archa•que de la vie autochtone.

 

La piste brouillŽe des rŽfŽrences traditionnelles. La longue cohabitation de la majoritŽ des communautŽs autochtones avec les communautŽs non-autochtones (dÕorigines occidentale) pose inŽvitablement, sur le temps long, le problme dÕune lente acculturation, qui rend moins disponibles les rŽfŽrents traditionnels (mythes fondateurs, structures dŽcisionnelles, valeurs de rŽfŽrence) qui pourraient fonder la lŽgitimitŽ et la pratique dÕun gouvernance autochtone spŽcifique. La conservation, la connaissance et lÕusage des langues autochtones dÕorigine constitue ici un enjeu particulirement important et rŽvŽlateur. Cet Žtat de fait rencontre des variations importantes et exige quÕon Žvite les gŽnŽralisations abusives. La premire tient ˆ la diversitŽ des traditions autochtones de rŽfŽrence qui correspondent largement ˆ celles des diffŽrentes Nations autochtones concernŽes [6]. La seconde est liŽe ˆ la situation culturelle trs variable dans laquelle se trouvent les Nations autochtones compte tenu de lÕhistoire de leurs rapports et de leurs Žchanges centenaires avec la sociŽtŽ non-autochtone, cette histoire Žtant en partie fonction de la proximitŽ plus ou moins grande de ces collectivitŽs, des modes de colonisation favorisŽs ˆ chaque Žpoque et de lÕaccessibilitŽ relative des territoires autochtones.

 

La difficultŽ dÕune redŽfinition des rŽfŽrences partagŽes. Cet Žloignement dÕavec les rŽfŽrences traditionnelles se double dÕune difficultŽ corollaire, dÕun tout autre ordre : celle dՎtablir la signification contemporaine de ces rŽfŽrences. Les communautŽs autochtones ne bŽnŽficient pas toujours des ressources nŽcessaires au dŽveloppement dÕune rŽflexion complte et totalement autonome sur les paramtres dÕune gouvernance autochtone spŽcifique. On pense ˆ ces agences dÕhistoricitŽ auxquelles rŽfre Alain Touraine (1973 : 100), qui comprennent ˆ la fois les cadres, les intellectuels et les institutions susceptibles de contribuer au dŽveloppement dÕune rŽflexion multi-rŽfŽrentielle sur les conditions dÕune forme viable et valorisŽe dÕautonomie qui serait inspirŽe de fondements reconnus collectivement, recomposŽs en fonction des valeurs privilŽgiŽes et des mŽcanismes sociaux propres ˆ chaque culture ou de chaque collectivitŽ de rŽfŽrence. Or, malgrŽ les importants efforts investis par le milieu associatif autochtone Š on pense par exemple ˆ lÕAssociation des Premires Nations du QuŽbec et du Labrador Š lÕabsence de telles ressources met plusieurs de ces communautŽs en situation de dŽpendance vis-ˆ-vis des catŽgories offertes, sinon imposŽes. par la sociŽtŽ occidentale, notamment en matire de gouvernance. Cette situation a souvent favorisŽ une rŽduction des revendications autochtones ˆ leur contenu juridique Žtabli. En contrepartie, certaines nations autochtones comme les Nations Cri ou Mohawk ont, depuis une vingtaine dÕannŽe, favorisŽ la formation dÕune nouvelle gŽnŽration, plus scolarisŽe, susceptible de contribuer au dŽveloppement dÕune capacitŽ rŽflexive nouvelle au sein des communautŽs [7]. De tels choix collectifs nÕenlvent cependant rien au dŽfi dÕune jonction des savoirs traditionnels et contemporains et de leur lŽgitimitŽ respective : mythes, shamanisme, cosmologie, droit et science politique.

 

Le pige des catŽgories juridiques et politiques Žtablies. En rŽponse ˆ lÕenfermement quÕimpose le discours juridique et plus spŽcifiquement le recours aux catŽgories traditionnelles proposŽes par le droit occidental (public ou privŽ), toute rŽflexion sur lÕautonomie gouvernementale autochtone implique un dŽpassement des termes sur lesquels sont actuellement posŽs les rapports entre Autochtones et non-Autochtones. Elle suppose la dŽfinition dÕautres catŽgories de rŽfŽrence. Nous avons rappelŽ plus haut les diffŽrences importantes que cache le recours aux notions de souverainetŽ ou de territoire selon quÕelles sont abordŽes en contexte autochtone ou non-autochtone. De mme, cÕest le rattachement ˆ la bande et ˆ la rŽserve qui conduit ˆ la dŽfinition du statut dÕautochtone Ē hors rŽserve [8] Č ; cÕest la reconnaissance du statut dÕĒ Indien Č qui pose les balises de la reconnaissance du statut Ē MŽtis Č. Plus encore, ce sont les fondements idŽologiques de ces catŽgories qui posent problme, la prŽsence des prŽmisses implicites du droit occidental et du positivisme juridique (souvent fondŽes sur une conception individualisŽe du droit), pouvant se trouver en porte-ˆ-faux avec les reprŽsentations qui fondent la lŽgitimitŽ dÕun Žventuel pouvoir autochtone (en partie fondŽ sur la notion de droits collectifs).

 

LՎcueil dÕune conception archa•que des droits ancestraux. Paralllement, lÕidŽal thŽorique dÕune gouvernance autochtone tout ˆ fait singulire dans ses principes et ses modalitŽs repose souvent sur une conception rigide et archa•que des droits ancestraux. CÕest une approche largement reprise par les tribunaux qui, depuis lÕarrt Van der Peet, reconnaissent comme droits ancestraux que ceux quÕexeraient les Autochtones avant leurs premiers contacts avec les EuropŽens [9]. Or, cette conception des droits ancestraux fait reposer la dŽfinition et la reconnaissance de ces droits sur des pratiques et des reprŽsentations dÕautant plus difficiles ˆ Žtablir quÕelles tirent leur origine de sociŽtŽs de tradition orale. MalgrŽ la reconnaissance par la Cour de la nŽcessitŽ de voir certaines pratiques traditionnelles adaptŽes aux conditions de la modernitŽ, les orientations nŽanmoins empruntŽes dans le cadre de dŽcisions rŽcentes tendent souvent ˆ fixer dans le temps lÕimage de la vie autochtone en la rŽduisant ˆ ses dimensions ethnographiques [10]. Il sÕensuit une forme de folklorisation de lÕidentitŽ autochtone et un dŽni des formes contemporaines que peuvent prendre ces droits ancestraux et lÕexercice dÕune gouvernance autochtone rŽpondant aux critres de lÕautonomie gouvernementale. Il est difficile ne pas y voir une forme de dŽni des aspirations de ces communautŽs ˆ la modernitŽ.

 

            2.3       Les contraintes dÕordre sociologique et Žconomique

Le dŽfi posŽ par lՎtablissement de lÕauto-gouvernance autochtone rŽside finalement dans la spŽcificitŽ de leur situation, tenant ˆ la dimension restreinte des communautŽs autochtone, ˆ la gravitŽ des problmes sociaux auxquelles elles sont confrontŽes et ˆ la dŽpendance Žconomique de ces collectivitŽs et de leurs membres,

 

La Ē dimension Č des communautŽs. Le rattachement ˆ la rŽserve prŽsente lui-mme des consŽquences Žconomiques et sociologiques importantes. DÕun c™tŽ, en limitant le territoire autochtone ˆ des frontires quasi-municipales, on a considŽrablement restreint les conditions matŽrielles de lÕautonomie Žconomique des communautŽs. DÕun autre, ces choix viennent Žgalement limiter la dimension des communautŽs de rŽfŽrence au sein desquelles sÕexerce la gouvernance autochtone. La vie communautaire autochtone nՎchappe ainsi ˆ aucune des difficultŽs rencontrŽes par les trs petites collectivitŽs, quelles quÕen soient les caractŽristiques ethnoculturelles : complexitŽ des rapports de proximitŽ en contexte de conflit, capacitŽs limitŽes dÕintervenir sur certains problmes sociaux, accs plus restreint ˆ une multitude des services publics et aux expertises nŽcessaires ˆ un dŽveloppement Žconomique et social autonome, etc.

 

La gravitŽ des problmes collectifs contemporains. DÕautres difficultŽs tiennent ˆ la situation sociale et Žconomique instable des communautŽs autochtones elles-mmes. Au sein de plusieurs dÕentre elles, la statistique rappelle le caractre endŽmique de certains problmes sociaux, souvent associŽs aux consŽquences dÕune certaine aliŽnation culturelle et Žconomique et dÕune pauvretŽ chronique : taux de suicide ŽlevŽ, toxicomanie, violence, problmes de santŽ et problmes sociaux. Cet Žtat de fait tient Žgalement ˆ lÕacculturation dont les communautŽs sont victimes, au bouleversement de leurs activitŽs traditionnelles, ˆ la trs grande mobilitŽ gŽographique de leurs membres et ˆ leur accs restreint aux avantages dÕune modernitŽ ajustŽe aux conditions culturelles et sociales de leur collectivitŽ. Elle place ˆ un niveau trs ŽlevŽ la complexitŽ des problmes auxquels est confrontŽe la gouvernance autochtone.

 

LÕabsence dÕautonomie Žconomique. En toute Žtat de cause, lÕautonomie gouvernementale et le dŽveloppement dÕune gouvernance proprement autochtones nŽcessite des moyens financiers concrets auxquels nÕont gŽnŽralement pas accs les communautŽs, pour des raisons que nous avons ŽvoquŽes plus haut et qui tiennent aux assises Žconomiques fragiles de plusieurs communautŽs [11]. Or, cet Žtat de fait, sÕil ne trouve pas de solution, rend illusoire toute possibilitŽ dÕautonomie concrte, toute forme dÕautonomie gouvernementale Žtant gŽnŽralement fonction dÕune forme ou dÕune autre dÕautonomie Žconomique.

 

3. Peuples autochtones et gouvernance : esquisse dÕun projet systŽmatique

 

On constate, ˆ la lecture de ce qui prŽcde, que lՎtude des conditions de la gouvernance autochtone contemporaine ne peut faire lՎconomie dÕune Žtude en deux temps. La premire fonde une investigation des caractŽristiques actuelles de la gouvernance autochtone au Canada, tant dans ses dimensions sociales, culturelles, Žconomiques et politiques que dans ses dimensions juridico-institutionnelles et paradigmatiques. Ces distinctions fondent dŽjˆ les limites de trois chantiers distincts. La seconde exige une rŽflexion Žtendue sur lÕavenir de la gouvernance autochtone, que celle-ci soit fondŽe sur la redŽfinition thŽorique de modles de gouvernance alternatifs ou sur lÕanalyse dÕexpŽriences nouvelles et concluantes en matire de gouvernance. Ces orientations  pavent la voie ˆ trois grandes questions, qui sont autant de chantiers de recherche complŽmentaires. Chacune ne peut cependant tre explorŽe de faon satisfaisante quՈ la faveur dÕune approche interdisciplinaire, et chaque chantier lie de faon diffŽrente les dimensions relationnelles, juridiques et paradigmatiques de la gouvernance:

1.     Chantier 1 : Quelles sont les conditions sociales, culturelles, Žconomiques et politiques qui prŽsident ˆ la dŽfinition actuelle et ˆ la redŽfinition ˆ venir de lÕauto-gouvernance autochtone ?

2.     Chantier 2 : Quels mŽcanismes et quelles normes caractŽrisent les rapports de gouvernance inscrits historiquement dans le droit des Autochtones et quels sont les mŽcanismes et les normes susceptibles dÕen favoriser la redŽfinition ?

3.     Chantier 3 : Quels paradigmes ou postulats thŽoriques sont au fondement des dŽfinitions antŽrieures et ˆ venir de la gouvernance autochtone et des rapports entre sociŽtŽs autochtones et non autochtones ?

 

3.1     LՎtude des conditions sociales, Žconomiques et culturelles du pouvoir autochtone

 

LՎtude des conditions sociales, Žconomiques et culturelles du pouvoir autochtone rŽfre aux dimensions relationnelles de la gouvernance au sein des communautŽs et des Nations autochtones, entre ces communautŽs et ces Nations et entre sociŽtŽs autochtones et non autochtones. Quatre perspectives permettent lÕexploration des conditions relationnelles  de la gouvernance : 1) la reconnaissance de la spŽcificitŽ culturelle par les autoritŽs canadiennes; 2) lÕamŽnagement du pouvoir politique autochtone dans son rapport ˆ la gouvernance Žtatique; 3) les conditions de lÕautonomie Žconomique autochtone et 4) la gestion des conflits sociaux au sein des communautŽs.

 

Le problme de la reconnaissance de la spŽcificitŽ culturelle autochtone par les autoritŽs politiques canadiennes touche ˆ la fois la reconnaissance des modes de vie propres ˆ la pŽriode prŽcŽdant les premiers contacts avec les Occidentaux (question dont nous avons parlŽ), mais Žgalement la spŽcificitŽ du type de rapports que les Autochtones entretiennent, encore aujourdÕhui, avec le territoire et lÕespace. Pour sa part, lՎtude de lÕamŽnagement du pouvoir politique autochtone suppose plut™t lՎtude des conventions politiques, juridiques et administratives qui balisent, dans plusieurs champs, les relations entre sociŽtŽ occidentale et sociŽtŽ autochtone, et dŽterminent la vŽritable sphre dÕaction du pouvoir autochtone contemporain. Au-delˆ des structures, cette investigation touche cependant aussi les rapports de pouvoir qui sՎtablissent de faon plus dynamique dans le cadre de la mise en Ļuvre des politiques publiques. LՎtude de la gouvernance autochtone suppose de mme lÕanalyse des relations de type Žconomique qui sont au fondement de lÕautonomie financire des collectivitŽs. Il faut se pencher plus particulirement ici sur les spŽcificitŽs de la gouvernance au sein des entreprises (personnelles ou collectives) autochtones et sur lÕencadrement juridique de la propriŽtŽ intellectuelle, tant en matire dÕexploitation des savoirs traditionnels quÕen matire dÕauthentification des Ļuvres artistiques autochtones ; deux enjeux nŽvralgiques pour lÕautonomie Žconomique des communautŽs et des Nations. Dans une perspective diffŽrente, il faut Žgalement Žtudier les mŽcanismes de rŽgulation des conflits au sein des communautŽs, et entre les communautŽs. On doit notamment sÕarrter aux principes de justice rŽparatrice qui sont souvent mobilisŽs au sein des communautŽs, par les cercles de sentence ou les cercles de justice qui inscrivent gŽnŽralement leur intervention dans le cadre de rapports continus avec la justice occidentale. Sur une autre Žchelle, lՎtude des conflits intercommunautaires permet lÕanalyse des effets structurants de la vie associative autochtone et lÕanalyse de modalitŽs de rŽsolution des conflits entre communautŽs ou entre Nations, notamment en matire de revendication territoriale.

 

3.2         LՎtude des fondements de la normativitŽ juridique autochtone

 

Les caractŽristiques sociales, Žconomiques et culturelles de la sociŽtŽ autochtone s'inscrivent cependant, aussi, nous lÕavons vu, dans le cadre de rapports de nature juridique Žtablis dans des contextes historiques et sociaux particuliers. Ici, lՎtude des balises juridiques de la gouvernance autochtone exige celle des fondements intellectuels, normatifs, identitaires et cosmologiques qui fondent le droit des autochtones. Or ces fondements prennent souvent la forme de postulats implicites qui nŽcessitent une Žtude des idŽologies de rŽfŽrence.

 

Ainsi, en regard des postulats intellectuels qui fondent le droit des autochtones, de nombreux aspects doivent tre explorŽs. On pense notamment ˆ lÕentretien de certains postulats thŽoriques implicites au sein des milieux de la recherche autochtone et dans les milieux intellectuels, mais surtout ˆ lÕentretien de certaines dŽfinitions anthropologiques rŽtrogrades de la vie ou de la culture autochtone dans le cadre des dŽcisions judiciaires et ˆ lÕopposition potentielle entre la promotion des droits individuels et la revendication dÕune forme dÕautonomie culturelle autochtone, fondŽe sur la notion de droit collectif. Au plan des postulats normatifs, lՎtude historique du droit international ou des rapports entre ordres juridiques autochtone et non autochtone sous le rŽgime franais comme sous le rŽgime britannique permet la comparaison des systmes de rŽfŽrence en fonction desquels les rapports de souverainetŽ entre les autoritŽs europŽennes et autochtones ont pu historiquement sՎtablir. Mais cette perspective met du coup en Žvidence lÕopposition dÕordres normatifs de types coloniaux et prŽ-coloniaux. Ces clivages normatifs apparaissent Žgalement en droit international dans lÕopposition des orientations privilŽgiŽes par les grands organismes internationaux (International human rights law) et des revendications autochtones en matire dÕautodŽtermination (self determination). Les clivages qui traversent ces paradigmes de rŽfŽrence ouvrent potentiellement la porte ˆ lՎlaboration dÕune vŽritable thŽorie juridique autochtone. LՎtude des fondements paradigmatiques de la normativitŽ juridique comporte aussi des aspects identitaires. Or, ces enjeux sont particulirement mis en Žvidence dans la question du statut juridique des MŽtis, qui pose le problme complexe du statut autochtone. Se posent finalement les enjeux entourant la dimension religieuse du territoire comme repre identitaire, et la cosmologie comme rŽfŽrent collectif affirmŽe par les Nations autochtones, tant sur le plan national quÕinternational. LՎtude du droit sert surtout ici dÕanalyseur des fondements paradigmatiques de la normativitŽ en matire de droit des Autochtones et offre une perspective transversale et peu explorŽe sur les conditions de la gouvernance autochtone (Noreau, 2000).

 

3.3   LՃtat des fondements politiques des rapports entre sociŽtŽs autochtones et non autochtones

 

Finalement les rapports de gouvernance peuvent tre abordŽs en tant que Ē systme de relations Č entre sociŽtŽs autochtones et non autochtones. Les problmes de la gouvernance se confondent alors avec les dŽbats entourant le fŽdŽralisme, le rŽgime de citoyennetŽ, la structuration des rapports de nŽgociation et la politique de la reconnaissance entre communautŽs autochtones et non autochtones (Webber, 1994). On aborde par ce biais les aspects directement politiques et culturels Š plut™t que strictement juridiques - des relations intercommunautaires.

 

Dans lÕespace politique canadien, les Žtudes sur le fŽdŽralisme permettent notamment celle des amŽnagements institutionnels de la gouvernance (forme souvent citŽe de pluralisme intra-Žtatique). Elle portent sur les principes actifs des rŽgimes fŽdŽraux, mais Žgalement sur les mŽcanismes du fŽdŽralisme canadien susceptibles dՐtre Žtendus aux autoritŽs autochtones et sur les formes postcoloniales du fŽdŽralisme, telles quÕelles sÕexpriment par la constitutionnalisation des droits ancestraux. Dans une perspective plus dynamique, on doit Žgalement explorer le thme du RŽgime de citoyennetŽ. Quatre angles dÕanalyse doivent tre privilŽgiŽs ici : 1) lՎtude des principes diffŽrents qui fondent les gouvernances autochtones et non autochtones en regard des notions de lŽgitimitŽ, dÕautoritŽ et de responsabilitŽs, influent sur la dynamique des institutions intergouvernementales; 2) lՎtude des mutations de la citoyennetŽ sociale et de ses consŽquences sur les rapports entre ƒtat et sociŽtŽs autochtones; 3) lՎtude de la citoyennetŽ en tant que mode dÕinteraction entre les Nations autochtones; et 4) lՎtude des rapports hommes-femmes en tant quÕenjeu des rapports entre sociŽtŽs autochtones et non autochtones. Une troisime perspective doit permettre lÕexploration des systmes de rŽfŽrence et de reprŽsentation en jeu dans le contexte des nŽgociations continues entre Autochtones et non-Autochtones ou dans le contexte de nŽgociations clefs situŽes ˆ certains moments plus prŽcis de lÕhistoire de ces relations. En contexte canadien, on doit finalement tirer avantage dÕune exploration des consŽquences dÕune approche fondŽe sur une politique de la reconnaissance exploitant la notion Ē dÕaccommodement raisonnable Č, qui offre, notamment en contexte quŽbŽcois, un espace dÕajustement aux valeurs et aux pratiques minoritaires et, potentiellement, aux besoins de reconnaissance de la diversitŽ autochtone.

 

Conclusion : ƒthique et partenariat

 

Une des grandes difficultŽs des Žtudes sur la gouvernance autochtone vient de quÕelles doivent contourner le risque de perpŽtuer le regard bienveillant du colonialiste de bonne foi auquel rŽfre Georges Memmi (1985). LՎtude de la gouvernance, dans la mesure o elle se penche sur le principe de lÕautonomie gouvernementale, doit rŽpondre ˆ une condition incontournable : elle ne peut se faire sans la contribution active des chercheurs dÕorigine autochtone ni sans celle des organisations autochtones elles-mmes. Cette nŽcessitŽ fonde une des conditions Žthiques de la recherche en milieu autochtone. Ces relations continues impliquent cependant aussi une mise en forme particulire des conclusions des travaux menŽs par les chercheurs. Cette mise en forme doit tre adaptŽe aux conditions de leur auditoire particulier et utile ˆ lՎtablissement de choix ŽclairŽs par les populations autochtones concernŽes. En contrepartie, les conditions mme dÕune plus grande autonomie gouvernementale, exige que les conclusions de la recherche empruntent une forme analytique et offrent une diversitŽ dÕoptions entre lesquelles les Autochtones eux-mmes devront faire leur choix.

 

Bibliographie

 

BARON, C., 2003, Ē La gouvernance : dŽbats autour dÕun concept polysŽmique Č, Droit et sociŽtŽ, vol. 54, p. 329-351.

BORROWS, J.,  2000, Ē Remise en cause du titre du Canada sur les terres : la primautŽ du droit, les peuples Autochtones et le colonialisme Č, dans Commission du droit du Canada (British Columbia Treaty Commission), Parlons franchement ˆ propos des traitŽs, Ottawa : Commission du droit du Canada, p. 37-76.

COMMISSION DÕENQUęTE SUR LES PEUPLES AUTOCHTONES (ƒrasmus-Dussault), 1996, Ė l'aube d'un rapprochement : Points saillants du Rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones, Ottawa, Ministre des approvisionnements et services, No de cat. Z1-1991/1-6F.

EBERHARD C., 2004, ĒDroit, gouvernance et developpement durable : Quelques reflexions preliminairesČ, Revue Interdisciplinaire d'Etudes Juridiques, n” 53, decembre, p 81-122.

GAGNON, A.-G. et G. ROCHER, 2002, Regard sur la convention de la Baie-James et du Nord quŽbŽcois, MontrŽal, ƒditions QuŽbec AmŽrique.

HOGG, P. et M.E. TURPEL, 1995, Ē Implementing Aboriginal Self-Government : Constitutional and Juridicational Issues Č, Canadian Bar Review, vol. 74, no 2, p. 187-224.

JOHNSTON, D., 2003, Litigating Identity : The Challenge of Aboriginality, Masters of Law : Graduate Department of the Faculty of Law, University of Toronto.

LAJOIE A., H. QUILLINAN, R. MACDONALD et G. ROCHER, 1998, ĒPluralisme juridique ˆ KahmawakeČ, Cahiers de droit, Vol. 39, 681-716

LAJOIE, A., 2000, Ē Gouvernance et sociŽtŽ civile Č dans La Gouvernance au 21e sicle : Actes dÕun colloque tenu en novembre 1999 sous les auspices de la SociŽtŽ Royale du Canada, Toronto : University of Toronto Press, p. 143-159.

LAJOIE, A., H. MELAN‚ON, G. ROCHER  et R. JANDA, 2000 a, Ē QuebecÕs Conceptions of Aboriginal Rights Č dans C. COOK et J.D. LINDAU (Žds.), Aboriginal Rights and Self-Governement : The Canadian and Mexican Experience in North American Perspective, Montreal, McGill-QueenÕs University Press, p. 168-185.

MACDONALD, R., 2002, The Governance of Human Agency, document inŽdit prŽparŽ pour le ComitŽ spŽcial du SŽnat sur les drogues illŽgales, Ottawa.

MACKLEM, P., 2001, Indigenous Difference and the Constitution of Canada, Toronto, University of Toronto Press, 334 pages.

MEMMI G, 1985, Portrait du colonisŽ, Paris, Gallimard/NRF, (1re Ždition 1957), 164 page

McNEIL, K., 1996, Ē Aboriginal Governments and the Canadian Charter of Rights and Freedoms Č, Osgoode Hall Law Journal, vol. 34, no 1, p. 61-99.

MORIN, M., 1997, LÕusurpation de la souverainetŽ autochtone : le cas des peuples de la Nouvelle-France et des colonies anglaises de lÕAmŽrique du Nord,  MontrŽal: BorŽal.

MORIN, M., 2000, Ē Quelques rŽflexions sur le r™le de lÕhistoire dans la dŽtermination des droits ancestraux et issus de traitŽs Č, Revue juridique ThŽmis, vol. 34, p. 329-368.

NOREAU, P., 2000, Ē La norme, le commandement et la loi : le droit comme objet dÕanalyse interdisciplinaire Č, Politique et sociŽtŽs, vol. 19, no 2-3, p. 153-177.

NOREAU, P., 2003, Ē Le politique ˆ lՎpreuve du droit : les lendemains juridique de la Gouvernance Č, dans P.  Favre,  J. Hayward et Y. Schemeil (dir.), ętre gouvernŽ, Žtudes en lÕhonneur de Jean Leca, Paris : Presses de Sciences Po, p. 181-198.

OTIS, G., 2004, Ē ƒlection, gouvernance traditionnelle et droits fondamentaux chez les peuples autochtones du Canada Č, Revue de droit de McGill, vol. 49, p.  393-417.

PAQUET, G., 2001, Ē La gouvernance en tant que manire de voir : le paradigme de lÕapprentissage collectif Č, dans L. CARDINAL et C. ANDREW (dir.), La dŽmocratie ˆ lՎpreuve de la gouvernance, Ottawa : Les Presses de lÕUniversitŽ dÕOttawa, p. 9-41.

PLUMPTRE, T., 1998, Vers un plan de recherche sur la gouvernance, document inŽdit prŽparŽ pour la Commission du Droit du Canada, Ottawa.

PRICE, R., 2000, Ē Arrangements et conventions provisoires en Nouvelle-ZŽlande ou comment assembler des parcelles de certitudes Č dans Commission du droit du Canada (British Columbia Treaty Commission), Parlons franchement ˆ propos des traitŽs, Ottawa : Commission du droit du Canada, p. 147-175.

ROCHER G., 1996, Sociologie du droit et de lՎthique. MontrŽal, ƒditions ThŽmis, 327 pages.

ROULAND Norbert, S. PIERRƒ-CAP et J. POUMARéDE, 1996, Droits des minoritŽs et peuples autochtones, Paris, Paris, Presses universitaires de France, 581 pages.

SLATTERY, B., 1996, Ē The Organic Constitution : Aboriginal Peoples and the Evolution of Canada Č, Osgoode Hall Law Journal, vol. 34 no.1, p.  101-112.

STOKER, G., 1998, Ē Cinq propositions pour une thŽorie de la gouvernance Č, Revue internationale des sciences sociales, vol. 155, p. 19-30.

TOURAINE A., 1973, Production de la sociŽtŽ, Paris, Seuil (coll. Sociologie), 543 pages.

TULLY, J., 2000, Ē RŽexamen du processus dՎtablissement des traitŽs en Colombie-Britannique Č, dans Commission du droit du Canada (British Columbia Treaty Commission), Parlons franchement ˆ propos des traitŽs, Ottawa : Commission du droit du Canada, p. 5-20.

WEBBER, J.H.A., 1994, Reimagining Canada : Language, Culture, Community and the Canadian Constitution, Kingston : McGill-QueenÕs University Press.



[1] Le projet Peuples autochtones et Gouvernance porte sur la dŽfinition des rapports de gouvernance au sein des sociŽtŽs autochtones et entre sociŽtŽs autochtones et non autochtones, dans le contexte canadien et, selon les enjeux, sur le plan international. Compte tenu de la diversitŽ et de la complexitŽ des questions en jeu, le caractre interdisciplinaire du projet est rapidement apparu indispensable et enrichissant. Le projet regroupe 37 chercheurs, autochtones et non autochtones (33 cochercheurs et 4 collaborateurs), rattachŽs ˆ 18 universitŽs diffŽrentes dont 15 universitŽs canadiennes. Les membres de lՎquipe sont issus de la plupart des disciplines des sciences humaines et sociales. Elle bŽnŽficie de lÕimplication de plusieurs gŽnŽrations de chercheurs et de la contribution dÕune quarantaine dՎtudiants de tous les cycles universitaires. LՎquipe regroupe des chercheurs dont les travaux sont trs connus dans le domaine autochtone. Ils ont, dans le cadre de ce projet, la possibilitŽ de combiner leurs compŽtences. La programmation proposŽe ouvre la porte ˆ une vaste collaboration et permet de pallier lÕisolement des chercheurs Ļuvrant dans ce champ de recherche, ˆ une pŽriode-charnire de lՎvolution des rapports entre Autochtones et non-Autochtones au Canada et dans de nombreux autres pays. La rŽpartition gŽographique des institutions universitaires impliquŽes permet par ailleurs lՎtude dÕune diversitŽ de situations et dÕenjeux. Le projet consolide une expertise unique, dÕenvergure internationale. Il met en Ļuvre une multitude de mŽthodes de recherche complŽmentaires : observation directe, travail dÕarchive et analyse ethnohistorique, entrevues, Žtude des politiques publiques, mesures statistiques et analyse de contenu.

[2] L.R.C. (1985), c. I-5.

[3] Cette loi est elle-mme la dernire de toute une sŽrie de lŽgislation antŽrieures, qui se sont succŽdŽes depuis lÕadoption de la Loi des sauvages de 1876.

[4] Ibid.

[5] Le QuŽbec constitue sous ce rapport une exception, le statut de Nation autochtone ayant ŽtŽ reconnu dans la foulŽe dÕune rŽsolution adoptŽe par lÕAssemblŽe nationale, en 1985. La nŽcessitŽ dÕune reconnaissance des Nations autochtones a par ailleurs ŽtŽ dŽfendue par la Commission royale dÕenqute sur les peuples autochtones (1996).

[6]  On distingue ainsi les premires nations des peuples Inuits et, au sein des premires nations, plusieurs diffŽrentes

[7]  Cela Žtant, le problme de lÕacculturation se pose encore lˆ de faon importante.

[8]  DÕo la multiplication de statuts particuliers, comme celui dÕindien enregistrŽ, mais non-membre, apparu depuis 1985 avec lՎlargissement des critres de reconnaissance du statut autochtone.

[9] Van der Peet, [1996] 2 R.C.S. 507.

[10] Les dŽcisions de la Cour sont, sous ce rapport, parfois moins cohŽrentes quÕon pourrait sÕy attendre. Ainsi, si le recours au fusil plut™t quՈ lÕarc a pu tre considŽrŽ comme justifiŽ dans le domaine de la chasse, et conforme aux pratiques ancestrales, le remplacement du troc par lÕusage du numŽraire dans le cadre du commerce nÕa pas ŽtŽ jugŽ conforme aux pratiques traditionnelles des autochtones alors quÕil aurait pu tre acceptŽ comme la transposition contemporaine dÕune pratique commerciale plus ancienne. Lire R. c. N.T.C. Smokehouse Ltd., [1996] 2 R.C.S. 672.

[11]  En contrepartie, certaines communautŽs sÕen tirent mieux, comme cÕest le cas de celle de Essipit, engagŽe dans lÕindustrie touristique et de plusieurs communautŽs cries dans la foulŽe dÕaccords particuliers avec les gouvernements.