Peuples autochtones et gouvernance en
contexte Canadien :
difficults de lÕautonomie
gouvernementale autochtone et perspectives de recherche
Pierre Noreau
Andre Lajoie
Centre de recherche en droit public
Universit de Montral
(premire
version dÕun article paru dans Christoph Eberhard (d.), Droit, gouvernance
et dveloppement durable,
Cahier d'anthropologie
du Droit 2005, Paris, Karthala, 376 p (165-179)
Le thme de la gouvernance apparat dans
le contexte politique contemporain comme lÕoccasion indite de rflchir dans
une nouvelle perspective les conditions du vivre-ensemble. Sur le plan intellectuel, il
offre cependant aussi la possibilit dÕune analyse plus complte et plus fine
des conditions de la vie sociale et des modalits par lesquelles sÕtablissent
les grandes orientations de chaque collectivit. Par extension, il favorise
lÕexploration des modalits de la communaut de destin. Comme tous les mots
(redevenus) la mode, lÕemploi du concept est rendu difficile du fait de sa
polysmie. Exploit politiquement, il rfre tout autant lÕimposition dÕun
modle unique dÕopration (la Ē bonne Č gouvernance) quÕaux
conditions dÕune prise en charge des collectivits par leurs propres moyens.
1. Gouvernance autochtone : Contexte et enjeux
Au plan analytique, on sÕentend
gnralement pour voir dans la notion de gouvernance lÕoccasion dÕun
largissement de notre dfinition de lÕaction publique et de lÕordonnancement
social (Lajoie, 2000; Baron, 2003). CÕest lÕusage quÕon en fait ici. Dans lÕesprit
des membres dÕune quipe que nous avons forme au cours des dernires annes et
qui sÕapprte travailler sur les enjeux de la gouvernance autochtone au
Canada [1], le concept
de gouvernance rfre aux reprsentations, aux mcanismes, aux processus et
aux moyens qui, au sein dÕune collectivit, concourent la dfinition des
orientations collectives et, de faon plus gnrale encore, aux conditions du
vivre-ensemble.
Cette dfinition volontairement ouverte sÕinscrit dans les orientations
proposes par de nombreux auteurs qubcois et canadiens (Plumptre, 1998 ;
Paquet, 2001). Elle reprend plusieurs des aspects de la dfinition offerte dans
ces pages par tienne LeRoy et met lÕaccent sur les processus sociaux davantage
que sur les structures politiques. Elle sÕoppose ainsi une conception
strictement institutionnelle des choix collectifs, mme si elle ne lÕexclut
pas. Les travaux encore rcents de la Commission du droit du Canada sur la
question sont particulirement clairants ce propos. Ils mettent en perspective
la ncessit dÕune dfinition extensive de lÕorganisation et de la normativit
juridique en reconnaissant les dimensions relationnelles, paradigmatiques et
normatives de toute activit susceptible de structurer ou dÕorienter la
destine dÕune communaut sinon dÕune socit. Il rsulte de cette conception
largie de la gouvernance une reconsidration des rgles de droit positif, en
tant que seuls mcanismes de rgulation sociale, et un largissement de la
notion de gouvernement telle quÕelle est traditionnellement dfinie; or, cette
approche implique la prise en compte dÕautres dimensions essentielles
lÕordonnancement social (Macdonald, 2002). De faon plus explicite encore, elle
favorise lÕtude des conditions de lÕautonomie gouvernementale et, par
extension, lÕtude des relations de gouvernance Ē entre Č socits
diffrentes, lies les unes aux autres (Tully, 2000). Ainsi sÕtablissent les
frontires respectives des sphres de gouvernance et leurs modes dÕinteraction
(Macklem, 2001).
La ralit autochtone au Canada pose de
faon exemplaire les termes de ce questionnement. LÕtude que nous entreprenons
doit par voie de consquence dboucher sur la dfinition de diffrentes
modalits, sinon de diffrents modles, dÕajustement mutuels possibles entre
formes de gouvernances autochtones et non autochtones.
La cohabitation sur un mme
territoire des Autochtones et des non-Autochtones offre dans ce sens lÕoccasion
dÕune rflexion
tendue sur les fondements sociaux, politiques et juridiques de la gouvernance.
Elle pose sa faon cette question centrale : comment vivre
ensemble ? Il sÕagit dÕenjeux importants alors que le droit international
tente de dfinir les termes dÕune nouvelle Dclaration des droits des
peuples autochtones
et que, sur le plan canadien, lÕarticle 35 de la Loi constitutionnelle de
1982 exige une
reconsidration importante et continue des droits ancestraux et issus de
traits (Otis, 2004; McNeil, 1996; Morin, 2000). Paralllement, la mobilisation
autochtone favorise lÕmergence dÕun questionnement nouveau sur lÕautonomie
gouvernementale autochtone et ses consquences sur les rapports entre
Autochtones et non-Autochtones (Slattery, 1995). CÕest une perspective galement favorise par
les conclusions de la Commission royale dÕenqute sur les peuples
autochtones
(1996). De nombreuses expriences, comme celles qui ont conduit au
ramnagement des pouvoirs autochtones dans le Nord du Qubec et ailleurs, sont
galement venues alimenter ces orientations (Gagnon, 2002; Lajoie et al., 2000a). Elles ont largi les
perspectives de recherche et le dbat public sur les enjeux entourant la
gouvernance contemporaine, tant au Canada que dans lÕensemble des Amriques, en
Australie, en Nouvelle-Zlande ou dans les contres du nord de lÕEurope
(Stoker, 1998; Price, 2000).
2. Limites et contraintes de
la gouvernance autochtone
Plus spcifiquement, la question
autochtone exige une reconsidration des rfrents sociaux, idologiques et
juridiques qui prsident notre conception de la souverainet. Elle suppose un
dpassement de la notion traditionnelle de gouvernement, sinon une
reformulation des catgories qui servent penser la vie collective et les
mcanismes qui concourent la dfinir, sinon lÕorienter (Eberhard, 2004). Au
sein de la tradition intellectuelle occidentale, une conception largement
inspire de la philosophie politique a longtemps servi de support ce
questionnement (Morin, 1997; Rouland, Pierr-Cap et Poumarde, 1996). Elle
suppose, pour lÕessentiel, que la mise en ordre des rapports sociaux et la
dfinition des choix collectifs sont toujours le produit dÕune activit
rationnelle et transparente. LÕtat et le droit, tels quÕils sont ordinairement
abords par la pense librale et le positivisme juridique, y occupent
invitablement une place dterminante (Noreau, 2003). Cette perspective
sÕappuie sur une conception centralise de lÕaction publique et une dfinition
hgmonique du territoire et de la souverainet (Borrows, 2000). Elle suppose
une dfinition unifie et homogne de la nation. Or, ce sont ces prmisses que
remet en cause la dfinition dÕune gouvernance autochtone, ne serait-ce que
parce quÕelle exige une reconsidration des conceptions classiques de la
souverainet, de lÕautorit politique et du territoire (Hogg, 1995; Johnston,
2003). Ce retournement des perspectives implique cependant un dfi intellectuel
important.
Sur un plan plus empirique, toute
rflexion sur les conditions de lÕautonomie gouvernementale autochtone exige
cependant un inventaire des contraintes qui sÕopposent sa ralisation. Ces
contraintes sont dÕordre historique, idologique et sociologique. Leur prise en
compte est essentielle, encore que lÕinventaire quÕon peut en faire nÕest
jamais totalement exhaustif.
2.1 Les
contraintes dÕordre historique
Toute forme de gouvernance
autochtone ne peut se dfinir quÕen comparaison une situation antrieure,
souvent marque par la dpendance vis--vis de laquelle on entend sÕaffranchir.
Cette dpendance tient la fois aux conditions historiques du colonialisme, aux
tensions entre ordres de gouvernance autochtones, au poids des compromis
politiques tablies, la rsilience des formes de gouvernance tablie et la
dpendance mutuelle des ordres de
gouvernance autochtones et non-autochtones.
Le colonialisme interne. La premire de ces contraintes
tient la nature des rapports tablis jusquÕici entre socits autochtones et
non autochtones. Ceux-ci sÕinscrivent dans le cadre dÕun rgime de type
colonial qui trouve une traduction juridique claire dans la fonction fiduciaire
de la Couronne vis--vis des populations autochtones. Cette responsabilit
fiduciaire est largement encadre par les termes de la Loi sur les
Indiens [2], adopte en 1951 [3],
et dans les dispositions dÕun certain nombre de traits signs tout au cours du
XIXme sicle. Certains auteurs ont pu parler, sÕagissant des
peuples autochtones, dÕune forme de colonialisme interne. Les relations entre Autochtones
et non-Autochtones sÕtant dveloppes ultrieurement dans ce cadre
particulier, elles sont gnralement venues renforcer, par ajouts successifs,
la condition de dpendance des communauts autochtones vis--vis des autorits
politiques canadiennes. Ce faisant, les fondements idologiques de ces
dpendances se sont constamment trouvs confirms et renforcs.
Les tensions entre les ordres
de gouvernances autochtones. Un
des principaux effets du cadre juridique impos par la Loi sur les
Indiens [4] vient de ce que la
reconnaissance des droits autochtones est largement fonction de leur rattachement la bande plutt
quÕ la Nation autochtone. Cette modalit de reconnaissance centre sur des
communauts territorialises de dimension rduite a dÕabord eu pour consquence
de favoriser la reconnaissance de la communaut autochtone sur celle de la
Nation laquelle elles se rattachent sur le plan ethnoculturel [5].
Ce choix comporte lui-mme de nombreuses consquences, dont lÕinstitution dÕun
ordre de gouvernement communautaire particulier (le conseil de bande)
diffrents des ordres juridiques et politiques traditionnels, et susceptibles
dÕentrer en comptition avec ceux-ci (Lajoie et al, 1998). Du point de vue de lÕautonomie
gouvernementale autochtone, cet tat de fait pose cependant aussi le problme
de lÕtablissement du sige ventuel de la gouvernance autochtone : la
Nation ou la communaut.
Le poids des compromis
politiques tablies. Corollairement,
les rapports de dpendance des collectivits autochtones vis--vis de la
socit non-autochtone sont galement caractriss par la diversit des
arrangements politiques et juridiques particuliers qui les lient aux autorits
politiques canadiennes et provinciales (notamment par voie de traits
spcifiques), et en vertu desquelles la reconnaissance ou lÕexercice de
certains droits ancestraux ont pu tre limits, au cours du dernier sicle et
demi. En contrepartie, lÕarticle 35(1) de la Loi constitutionnelle de 1982
raffirme et pose de faon urgente lÕobligation dÕune redfinition (dÕune
rengociation) des modalits dÕexercice de ces droits aux contours imprcis.
Cet tat de fait nouveau ouvre prcisment, aujourdÕhui, la porte une
reconsidration des conditions dÕexercice de lÕautonomie gouvernementale
autochtone.
La rsilience des formes de
gouvernance imposes. Toute
rflexion sur les conditions de lÕautonomie gouvernementale autochtone ne peut
par ailleurs faire lÕconomie dÕune analyse de lÕtat du droit tel quÕil a pu
contribuer, au cours du dernier sicle et demi, faonner les rapports de
gouvernance au sein des communauts autochtones. Ainsi, bien que la dlimitation
des rserves et lÕimposition des conseils de bande puisse aujourdÕhui tre
considres comme lÕexpression du colonialisme, on ne peut nier les
consquences structurantes que cet encadrement juridique a pu avoir sur la vie
des communauts au cours des 125 dernires annes. Ici encore, toute dmarche
en vue dÕtablir une forme de gouvernance autochtone ne doit pas tre fonde
sur le mythe dÕun retour improbable une gouvernance totalement
ĒtraditionnelleČ dont les fondements sont souvent oublis, non plus quÕelle ne
peut sÕaffranchir totalement des formes de gouvernances exprimentes
socialement jusque-l en recourant la dfinition dÕune gouvernance fonde
dans lÕabsolu.
La dpendance mutuelle des
ordres de gouvernance. Finalement,
les enjeux de la gouvernance autochtone ne peuvent tre abords en dehors de
ses rapports avec les autres ordres de gouvernance. Aucun ordre de gouvernance
ne peut dÕailleurs sÕaffirmer en dehors de son rapport aux autres comme en
tmoigne lÕhistoire des relations entre tats Ē souverains Č. Il
sÕensuit que la dfinition ou lÕexprimentation dÕune forme ou dÕune autre de
gouvernance autochtone est ncessairement fonde sur la dfinition de ses
rapports avec les ordres de gouvernance institues (au plan national comme au
plan continental et international)
et comporte une dimension dynamique. De ce point de vue, les difficults
conceptuelles qui attendent la redfinition de nouvelles formes ou de nouveaux
ordres de gouvernance autochtones ne diffrent pas de celles qui sÕimposent au
chercheur intress aux conditions de dveloppement du pluralisme juridique.
Tous sont confronts au problme de la forme que prennent les relations entre
ordres juridiques centrs sur des sources diffrentes de normativit et
dÕautorit (Rocher, 1996).
2.2 Les
contraintes dÕordre idologique
Au-del du poids de lÕhistoire,
dÕautres problmes, dÕordre idologique ceux-l, viennent limiter le
dploiement de lÕautonomie gouvernementale autochtone : la difficult de
fonder la gouvernance sur des rfrences de type traditionnel ou dÕtablir de
nouvelles rfrences collectives lgitimes, mais galement la difficult de
sÕaffranchir des catgories juridiques tablies et dÕune conception archaque
de la vie autochtone.
La piste brouille des
rfrences traditionnelles. La
longue cohabitation de la majorit des communauts autochtones avec les
communauts non-autochtones (dÕorigines occidentale) pose invitablement, sur
le temps long, le problme dÕune lente acculturation, qui rend moins
disponibles les rfrents traditionnels (mythes fondateurs, structures
dcisionnelles, valeurs de rfrence) qui pourraient fonder la lgitimit et la
pratique dÕun gouvernance autochtone spcifique. La conservation, la
connaissance et lÕusage des langues autochtones dÕorigine constitue ici un
enjeu particulirement important et rvlateur. Cet tat de fait rencontre des
variations importantes et exige quÕon vite les gnralisations abusives. La
premire tient la diversit des traditions autochtones de rfrence qui correspondent
largement celles des diffrentes Nations autochtones concernes [6].
La seconde est lie la situation culturelle trs variable dans laquelle se
trouvent les Nations autochtones compte tenu de lÕhistoire de leurs rapports et
de leurs changes centenaires avec la socit non-autochtone, cette histoire
tant en partie fonction de la proximit plus ou moins grande de ces
collectivits, des modes de colonisation favoriss chaque poque et de
lÕaccessibilit relative des territoires autochtones.
La difficult dÕune
redfinition des rfrences partages. Cet loignement dÕavec les rfrences
traditionnelles se double dÕune difficult corollaire, dÕun tout autre
ordre : celle dÕtablir la signification contemporaine de ces rfrences.
Les communauts autochtones ne bnficient pas toujours des ressources
ncessaires au dveloppement dÕune rflexion complte et totalement autonome
sur les paramtres dÕune gouvernance autochtone spcifique. On pense ces agences
dÕhistoricit
auxquelles rfre Alain Touraine (1973 : 100), qui comprennent la fois
les cadres, les intellectuels et les institutions susceptibles de contribuer au
dveloppement dÕune rflexion multi-rfrentielle sur les conditions dÕune
forme viable et valorise dÕautonomie qui serait inspire de fondements
reconnus collectivement, recomposs en fonction des valeurs privilgies et des
mcanismes sociaux propres chaque culture ou de chaque collectivit de
rfrence. Or, malgr les importants efforts investis par le milieu associatif
autochtone Š on pense par exemple lÕAssociation des Premires Nations du
Qubec et du Labrador Š lÕabsence de telles ressources met plusieurs de
ces communauts en situation de dpendance vis--vis des catgories offertes,
sinon imposes. par la socit occidentale, notamment en matire de
gouvernance. Cette situation a souvent favoris une rduction des
revendications autochtones leur contenu juridique tabli. En contrepartie,
certaines nations autochtones comme les Nations Cri ou Mohawk ont, depuis une vingtaine
dÕanne, favoris la formation dÕune nouvelle gnration, plus scolarise,
susceptible de contribuer au dveloppement dÕune capacit rflexive nouvelle au
sein des communauts [7].
De tels choix collectifs nÕenlvent cependant rien au dfi dÕune jonction des
savoirs traditionnels et contemporains et de leur lgitimit respective :
mythes, shamanisme, cosmologie, droit et science politique.
Le pige des catgories
juridiques et politiques tablies. En rponse lÕenfermement quÕimpose le discours juridique
et plus spcifiquement le recours aux catgories traditionnelles proposes par
le droit occidental (public ou priv), toute rflexion sur lÕautonomie
gouvernementale autochtone implique un dpassement des termes sur lesquels sont
actuellement poss les rapports entre Autochtones et non-Autochtones. Elle
suppose la dfinition dÕautres catgories de rfrence. Nous avons rappel plus
haut les diffrences importantes que cache le recours aux notions de souverainet ou de territoire selon quÕelles sont abordes en
contexte autochtone ou non-autochtone. De mme, cÕest le rattachement la
bande et la rserve qui conduit la dfinition du statut dÕautochtone
Ē hors rserve [8] Č ;
cÕest la reconnaissance du statut dÕĒ Indien Č qui pose les balises
de la reconnaissance du statut Ē Mtis Č. Plus encore, ce sont les
fondements idologiques de ces catgories qui posent problme, la prsence des
prmisses implicites du droit occidental et du positivisme juridique (souvent
fondes sur une conception individualise du droit), pouvant se trouver en
porte--faux avec les reprsentations qui fondent la lgitimit dÕun ventuel
pouvoir autochtone (en partie fond sur la notion de droits collectifs).
LÕcueil dÕune conception
archaque des droits ancestraux. Paralllement, lÕidal thorique dÕune gouvernance
autochtone tout fait singulire dans ses principes et ses modalits repose
souvent sur une conception rigide et archaque des droits ancestraux. CÕest une
approche largement reprise par les tribunaux qui, depuis lÕarrt Van der
Peet,
reconnaissent comme droits ancestraux que ceux quÕexeraient les Autochtones
avant leurs premiers contacts avec les Europens [9].
Or, cette conception des droits ancestraux fait reposer la dfinition et la
reconnaissance de ces droits sur des pratiques et des reprsentations dÕautant
plus difficiles tablir quÕelles tirent leur origine de socits de tradition
orale. Malgr la reconnaissance par la Cour de la ncessit de voir certaines
pratiques traditionnelles adaptes aux conditions de la modernit, les
orientations nanmoins empruntes dans le cadre de dcisions rcentes tendent
souvent fixer dans le temps lÕimage de la vie autochtone en la rduisant
ses dimensions ethnographiques [10].
Il sÕensuit une forme de folklorisation de lÕidentit autochtone et un dni des
formes contemporaines que peuvent prendre ces droits ancestraux et lÕexercice
dÕune gouvernance autochtone rpondant aux critres de lÕautonomie
gouvernementale. Il est difficile ne pas y voir une forme de dni des aspirations
de ces communauts la modernit.
2.3 Les
contraintes dÕordre sociologique et conomique
Le dfi pos par lÕtablissement
de lÕauto-gouvernance autochtone rside finalement dans la spcificit de leur
situation, tenant la dimension restreinte des communauts autochtone, la
gravit des problmes sociaux auxquelles elles sont confrontes et la
dpendance conomique de ces collectivits et de leurs membres,
La Ē dimension Č des
communauts. Le
rattachement la rserve prsente lui-mme des consquences conomiques et
sociologiques importantes. DÕun ct, en limitant le territoire autochtone
des frontires quasi-municipales, on a considrablement restreint les
conditions matrielles de lÕautonomie conomique des communauts. DÕun autre,
ces choix viennent galement limiter la dimension des communauts de rfrence
au sein desquelles sÕexerce la gouvernance autochtone. La vie communautaire
autochtone nÕchappe ainsi aucune des difficults rencontres par les trs
petites collectivits, quelles quÕen soient les caractristiques
ethnoculturelles : complexit des rapports de proximit en contexte de
conflit, capacits limites dÕintervenir sur certains problmes sociaux, accs
plus restreint une multitude des services publics et aux expertises ncessaires
un dveloppement conomique et social autonome, etc.
La gravit des problmes
collectifs contemporains. DÕautres
difficults tiennent la situation sociale et conomique instable des
communauts autochtones elles-mmes. Au sein de plusieurs dÕentre elles, la
statistique rappelle le caractre endmique de certains problmes sociaux,
souvent associs aux consquences dÕune certaine alination culturelle et
conomique et dÕune pauvret chronique : taux de suicide lev,
toxicomanie, violence, problmes de sant et problmes sociaux. Cet tat de
fait tient galement lÕacculturation dont les communauts sont victimes, au
bouleversement de leurs activits traditionnelles, la trs grande mobilit
gographique de leurs membres et leur accs restreint aux avantages dÕune
modernit ajuste aux conditions culturelles et sociales de leur collectivit.
Elle place un niveau trs lev la complexit des problmes auxquels est
confronte la gouvernance autochtone.
LÕabsence dÕautonomie
conomique. En
toute tat de cause, lÕautonomie gouvernementale et le dveloppement dÕune
gouvernance proprement autochtones ncessite des moyens financiers concrets
auxquels nÕont gnralement pas accs les communauts, pour des raisons que
nous avons voques plus haut et qui tiennent aux assises conomiques fragiles
de plusieurs communauts [11].
Or, cet tat de fait, sÕil ne trouve pas de solution, rend illusoire toute
possibilit dÕautonomie concrte, toute forme dÕautonomie gouvernementale tant
gnralement fonction dÕune forme ou dÕune autre dÕautonomie conomique.
3. Peuples autochtones et
gouvernance : esquisse dÕun projet systmatique
On constate, la lecture de ce qui
prcde, que lÕtude des conditions de la gouvernance autochtone contemporaine
ne peut faire lÕconomie dÕune tude en deux temps. La premire fonde une
investigation des caractristiques actuelles de la gouvernance autochtone au
Canada, tant dans ses dimensions sociales, culturelles, conomiques et
politiques que dans ses dimensions juridico-institutionnelles et
paradigmatiques. Ces distinctions fondent dj les limites de trois chantiers
distincts. La seconde exige une rflexion tendue sur lÕavenir de la
gouvernance autochtone, que celle-ci soit fonde sur la redfinition thorique
de modles de gouvernance alternatifs ou sur lÕanalyse dÕexpriences nouvelles
et concluantes en matire de gouvernance. Ces orientations pavent la voie trois grandes
questions, qui sont autant de chantiers de recherche complmentaires. Chacune
ne peut cependant tre explore de faon satisfaisante quÕ la faveur dÕune
approche interdisciplinaire, et chaque chantier lie de faon diffrente les
dimensions relationnelles,
juridiques et
paradigmatiques
de la gouvernance:
1.
Chantier
1 : Quelles sont les conditions sociales, culturelles, conomiques et
politiques qui
prsident la dfinition actuelle et la redfinition venir de
lÕauto-gouvernance autochtone ?
2.
Chantier
2 : Quels mcanismes et
quelles normes caractrisent
les rapports de gouvernance inscrits historiquement dans le droit des
Autochtones et
quels sont les mcanismes et les normes susceptibles dÕen favoriser la
redfinition ?
3.
Chantier
3 : Quels paradigmes ou
postulats thoriques sont
au fondement des dfinitions antrieures et venir de la gouvernance autochtone
et des rapports entre socits autochtones et non autochtones ?
3.1 LÕtude
des conditions sociales, conomiques et culturelles du pouvoir autochtone
LÕtude des conditions sociales,
conomiques et culturelles du pouvoir autochtone rfre aux dimensions
relationnelles de la gouvernance au sein des communauts et des Nations
autochtones, entre ces communauts et ces Nations et entre socits autochtones
et non autochtones. Quatre perspectives permettent lÕexploration des conditions
relationnelles de la
gouvernance : 1) la reconnaissance de la spcificit culturelle par les
autorits canadiennes; 2) lÕamnagement du pouvoir politique autochtone dans
son rapport la gouvernance tatique; 3) les conditions de lÕautonomie
conomique autochtone et 4) la gestion des conflits sociaux au sein des
communauts.
Le problme de la reconnaissance
de la spcificit culturelle autochtone par les autorits politiques canadiennes touche
la fois la reconnaissance des modes de vie propres la priode prcdant les
premiers contacts avec les Occidentaux (question dont nous avons parl), mais
galement la spcificit du type de rapports que les Autochtones entretiennent,
encore aujourdÕhui, avec le territoire et lÕespace. Pour sa part, lÕtude de lÕamnagement
du pouvoir politique
autochtone suppose plutt lÕtude des conventions politiques, juridiques et
administratives qui balisent, dans plusieurs champs, les relations entre
socit occidentale et socit autochtone, et dterminent la vritable sphre
dÕaction du pouvoir autochtone contemporain. Au-del des structures, cette
investigation touche cependant aussi les rapports de pouvoir qui sÕtablissent
de faon plus dynamique dans le cadre de la mise en Ļuvre des politiques
publiques. LÕtude de la gouvernance autochtone suppose de mme lÕanalyse des relations
de type conomique
qui sont au fondement de lÕautonomie financire des collectivits. Il faut se
pencher plus particulirement ici sur les spcificits de la gouvernance au
sein des entreprises (personnelles ou collectives) autochtones et sur
lÕencadrement juridique de la proprit intellectuelle, tant en matire
dÕexploitation des savoirs traditionnels quÕen matire dÕauthentification des
Ļuvres artistiques autochtones ; deux enjeux nvralgiques pour lÕautonomie
conomique des communauts et des Nations. Dans une perspective diffrente, il
faut galement tudier les mcanismes de rgulation des conflits au sein des communauts, et
entre les communauts. On doit notamment sÕarrter aux principes de justice
rparatrice qui sont souvent mobiliss au sein des communauts, par les cercles
de sentence ou les cercles de justice qui inscrivent gnralement leur
intervention dans le cadre de rapports continus avec la justice occidentale.
Sur une autre chelle, lÕtude des conflits intercommunautaires permet
lÕanalyse des effets structurants de la vie associative autochtone et lÕanalyse
de modalits de rsolution des conflits entre communauts ou entre Nations,
notamment en matire de revendication territoriale.
3.2 LÕtude
des fondements de la normativit juridique autochtone
Les caractristiques sociales,
conomiques et culturelles de la socit autochtone s'inscrivent cependant,
aussi, nous lÕavons vu, dans le cadre de rapports de nature juridique tablis
dans des contextes historiques et sociaux particuliers. Ici, lÕtude des
balises juridiques de la gouvernance autochtone exige celle des fondements intellectuels, normatifs, identitaires et cosmologiques qui fondent le droit des
autochtones. Or ces fondements prennent souvent la forme de postulats
implicites qui ncessitent une tude des idologies de rfrence.
Ainsi, en regard des postulats
intellectuels
qui fondent le droit des autochtones, de nombreux aspects doivent tre
explors. On pense notamment lÕentretien de certains postulats thoriques
implicites au sein des milieux de la recherche autochtone et dans les milieux
intellectuels, mais surtout lÕentretien de certaines dfinitions anthropologiques
rtrogrades de la vie ou de la culture autochtone dans le cadre des dcisions
judiciaires et lÕopposition potentielle entre la promotion des droits
individuels et la revendication dÕune forme dÕautonomie culturelle autochtone,
fonde sur la notion de droit collectif. Au plan des postulats normatifs, lÕtude historique du droit
international ou des rapports entre ordres juridiques autochtone et non
autochtone sous le rgime franais comme sous le rgime britannique permet la
comparaison des systmes de rfrence en fonction desquels les rapports de
souverainet entre les autorits europennes et autochtones ont pu
historiquement sÕtablir. Mais cette perspective met du coup en vidence
lÕopposition dÕordres normatifs de types coloniaux et pr-coloniaux. Ces
clivages normatifs apparaissent galement en droit international dans
lÕopposition des orientations privilgies par les grands organismes
internationaux (International human rights law) et des revendications autochtones en
matire dÕautodtermination (self determination). Les clivages qui traversent ces
paradigmes de rfrence ouvrent potentiellement la porte lÕlaboration dÕune
vritable thorie juridique autochtone. LÕtude des fondements paradigmatiques
de la normativit juridique comporte aussi des aspects identitaires. Or, ces enjeux sont
particulirement mis en vidence dans la question du statut juridique des
Mtis, qui pose le problme complexe du statut autochtone. Se posent finalement
les enjeux entourant la dimension religieuse du territoire comme repre
identitaire, et la cosmologie comme rfrent collectif affirme par les Nations
autochtones, tant sur le plan national quÕinternational. LÕtude du droit sert
surtout ici dÕanalyseur des fondements paradigmatiques de la normativit en
matire de droit des Autochtones et offre une perspective transversale et peu
explore sur les conditions de la gouvernance autochtone (Noreau, 2000).
3.3 LÕtat des fondements politiques
des rapports entre socits autochtones et non autochtones
Finalement les
rapports de gouvernance peuvent tre abords en tant que Ē systme de
relations Č entre socits autochtones et non autochtones. Les problmes
de la gouvernance se confondent alors avec les dbats entourant le fdralisme, le rgime de citoyennet, la structuration des rapports
de ngociation
et la politique de la reconnaissance entre communauts autochtones et non
autochtones (Webber, 1994). On aborde par ce biais les aspects directement
politiques et culturels Š plutt que strictement juridiques - des relations
intercommunautaires.
Dans lÕespace politique canadien, les
tudes sur le fdralisme
permettent notamment celle des amnagements institutionnels de la gouvernance
(forme souvent cite de pluralisme intra-tatique). Elle portent sur les
principes actifs des rgimes fdraux, mais galement sur les mcanismes du fdralisme
canadien susceptibles dÕtre tendus aux autorits autochtones et sur les
formes postcoloniales du fdralisme, telles quÕelles sÕexpriment par la
constitutionnalisation des droits ancestraux. Dans une perspective plus
dynamique, on doit galement explorer le thme du Rgime de citoyennet. Quatre angles dÕanalyse doivent
tre privilgis ici : 1) lÕtude des principes diffrents qui fondent les
gouvernances autochtones et non autochtones en regard des notions de lgitimit, dÕautorit et de responsabilits, influent sur la dynamique des
institutions intergouvernementales; 2) lÕtude des mutations de la citoyennet
sociale et de ses consquences sur les rapports entre tat et socits
autochtones; 3) lÕtude de la citoyennet en tant que mode dÕinteraction entre
les Nations autochtones; et 4) lÕtude des rapports hommes-femmes en tant
quÕenjeu des rapports entre socits autochtones et non autochtones. Une
troisime perspective doit permettre lÕexploration des systmes de rfrence et
de reprsentation en jeu dans le contexte des ngociations continues entre Autochtones et
non-Autochtones ou dans le contexte de ngociations clefs situes certains
moments plus prcis de lÕhistoire de ces relations. En contexte canadien, on
doit finalement tirer avantage dÕune exploration des consquences dÕune
approche fonde sur une politique de la reconnaissance exploitant la notion
Ē dÕaccommodement raisonnable Č, qui offre, notamment en contexte
qubcois, un espace dÕajustement aux valeurs et aux pratiques minoritaires et,
potentiellement, aux besoins de reconnaissance de la diversit autochtone.
Conclusion :
thique et partenariat
Une
des grandes difficults des tudes sur la gouvernance autochtone vient de
quÕelles doivent contourner le risque de perptuer le regard bienveillant du colonialiste
de bonne foi
auquel rfre Georges Memmi (1985). LÕtude de la gouvernance, dans la mesure
o elle se penche sur le principe de lÕautonomie gouvernementale, doit rpondre
une condition incontournable : elle ne peut se faire sans la
contribution active des chercheurs dÕorigine autochtone ni sans celle des
organisations autochtones elles-mmes. Cette ncessit fonde une des conditions
thiques de la recherche en milieu autochtone. Ces relations continues
impliquent cependant aussi une mise en forme particulire des conclusions des
travaux mens par les chercheurs. Cette mise en forme doit tre adapte aux
conditions de leur auditoire particulier et utile lÕtablissement de choix
clairs par les populations autochtones concernes. En contrepartie, les
conditions mme dÕune plus grande autonomie gouvernementale, exige que les
conclusions de la recherche empruntent une forme analytique et offrent une
diversit dÕoptions entre lesquelles les Autochtones eux-mmes devront faire
leur choix.
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[1] Le projet Peuples autochtones et Gouvernance porte sur la dfinition des rapports de gouvernance au sein des socits autochtones et entre socits autochtones et non autochtones, dans le contexte canadien et, selon les enjeux, sur le plan international. Compte tenu de la diversit et de la complexit des questions en jeu, le caractre interdisciplinaire du projet est rapidement apparu indispensable et enrichissant. Le projet regroupe 37 chercheurs, autochtones et non autochtones (33 cochercheurs et 4 collaborateurs), rattachs 18 universits diffrentes dont 15 universits canadiennes. Les membres de lÕquipe sont issus de la plupart des disciplines des sciences humaines et sociales. Elle bnficie de lÕimplication de plusieurs gnrations de chercheurs et de la contribution dÕune quarantaine dÕtudiants de tous les cycles universitaires. LÕquipe regroupe des chercheurs dont les travaux sont trs connus dans le domaine autochtone. Ils ont, dans le cadre de ce projet, la possibilit de combiner leurs comptences. La programmation propose ouvre la porte une vaste collaboration et permet de pallier lÕisolement des chercheurs Ļuvrant dans ce champ de recherche, une priode-charnire de lÕvolution des rapports entre Autochtones et non-Autochtones au Canada et dans de nombreux autres pays. La rpartition gographique des institutions universitaires impliques permet par ailleurs lÕtude dÕune diversit de situations et dÕenjeux. Le projet consolide une expertise unique, dÕenvergure internationale. Il met en Ļuvre une multitude de mthodes de recherche complmentaires : observation directe, travail dÕarchive et analyse ethnohistorique, entrevues, tude des politiques publiques, mesures statistiques et analyse de contenu.
[2] L.R.C. (1985), c. I-5.
[3] Cette loi est elle-mme la dernire de toute une srie de lgislation antrieures, qui se sont succdes depuis lÕadoption de la Loi des sauvages de 1876.
[4] Ibid.
[5] Le Qubec constitue sous ce rapport une exception, le statut de Nation autochtone ayant t reconnu dans la foule dÕune rsolution adopte par lÕAssemble nationale, en 1985. La ncessit dÕune reconnaissance des Nations autochtones a par ailleurs t dfendue par la Commission royale dÕenqute sur les peuples autochtones (1996).
[6] On distingue ainsi les premires nations des peuples Inuits et, au sein des premires nations, plusieurs diffrentes
[7] Cela tant, le problme de lÕacculturation se pose encore l de faon importante.
[8] DÕo la multiplication de statuts particuliers, comme celui dÕindien enregistr, mais non-membre, apparu depuis 1985 avec lÕlargissement des critres de reconnaissance du statut autochtone.
[9] Van der Peet, [1996] 2 R.C.S. 507.
[10] Les dcisions de la Cour sont, sous ce rapport, parfois moins cohrentes quÕon pourrait sÕy attendre. Ainsi, si le recours au fusil plutt quÕ lÕarc a pu tre considr comme justifi dans le domaine de la chasse, et conforme aux pratiques ancestrales, le remplacement du troc par lÕusage du numraire dans le cadre du commerce nÕa pas t jug conforme aux pratiques traditionnelles des autochtones alors quÕil aurait pu tre accept comme la transposition contemporaine dÕune pratique commerciale plus ancienne. Lire R. c. N.T.C. Smokehouse Ltd., [1996] 2 R.C.S. 672.
[11] En contrepartie, certaines communauts sÕen tirent mieux, comme cÕest le cas de celle de Essipit, engage dans lÕindustrie touristique et de plusieurs communauts cries dans la foule dÕaccords particuliers avec les gouvernements.