Le Partenariat
pour les forts du Bassin du Congo entre non-droit et droit. Contribution
lÕtude de la responsabilit des acteurs,
Thse pour le Doctorat en droit, Facult
de Droit, Universit de Gand (Belgique), 2009, 467 p, dfendue le 18 mars 2009
par
Jury
Prsident : M. Piet TAELMAN,
Professeur lÕUniversit de Gand, Doyen de la Facult de Droit.
Promoteur : M. Eduard SOMERS,
Professeur lÕUniversit de Gand, Facult de Droit, Chef de Dpartement de
Droit international public.
Membres :
M. Frank MAES, Professeur lÕUniversit
de Gand, Facult de Droit
M. Mark Van HOECKE, Professeur
lÕUniversit de Gand, Facult de Droit, Directeur de lÕAcadmie Europenne de
Thorie du Droit (Bruxelles)
M. Gervais NTIRUMENYERWA M. KIMONYO,
Professeur lÕUniversit de Kinshasa, Facult de Droit
M. Rudy DOOM, Professeur lÕUniversit
de Gand, Facult des Sciences Politiques et Sociales.
Rsum de la thse
Cette thse traite du Partenariat sign
en marge du Sommet Mondial pour le Dveloppement Durable (Johannesburg 2002)
entre les Etats dÕAfrique Centrale et dÕautres Etats du monde, des institutions
internationales ainsi que des acteurs privs pour la gestion et la sauvegarde
durable des forts du Bassin du Congo. LÕauteur analyse les problmes de droit
que pose ce type de dÕassociation qui regroupe aussi bien les acteurs publics
que privs aux statuts juridiques diffrents.
DÕentre de jeu, lÕtude rappelle que
lÕintrt pour le Bassin du Congo ne date pas dÕaujourdÕhui. En effet, depuis
la Confrence gographique de Bruxelles de 1876 jusquÕ celle de Berlin de
1885, cette partie dÕAfrique Centrale a t au centre de nombreux enjeux
gostratgiques caractriss notamment par diverses campagnes dÕexploration, de
dcouvertes et donnant parfois lieu de grandes rivalits entre diffrentes
puissances. CÕest dans ce contexte que lÕActe issu de la Confrence de Berlin
consacrera lÕinternationalisation de ce bassin. Cependant, lÕvolution des
relations internationales et les changements des rapports de force entre
puissances concernes ont amen rviser cet Acte, dÕabord par la Dclaration
et lÕActe de Bruxelles, issus de la Confrence de Bruxelles de 1890, ensuite,
par la Convention de Saint-Germain-en-Laye de 1919. La signature dÕun trait
cet gard, nÕa pas empch que des Etats parties sÕopposent cette fois sur
lÕinterprtation et lÕapplication de certaines dispositions, tant les intrts
poursuivis taient plus remarquables dans leur divergence que dans la cohsion
des objectifs assigns, savoir la libert du commerce et de la navigation sur
le fleuve Congo. LÕaffaire Oscar Chinn qui a oppos le Royaume-Uni la Belgique devant la Cour
Permanente de Justice Internationale en 1934, illustre parfaitement ce qui
prcde. Il nÕen demeure pas moins que le statut internationalis du bassin
conventionnel cessa de manire dfinitive avec lÕaccession la souverainet
internationale des Etats qui sÕy trouvent.
A la suite de la crise cologique qui se
trouve dsormais au centre des proccupations de la communaut internationale
par le biais des questions relatives la protection de lÕenvironnement et au
dveloppement durable, le Bassin du Congo a, une fois de plus, retenu
lÕattention des Etats, des Institutions internationales, des Organisations non
gouvernementales et autres groupes privs, particulirement pour ses ressources
forestires. En effet, lÕAfrique Centrale abrite le deuxime massif forestier
au monde, aprs celui de lÕAmazonie. LÕtude relve que sa biodiversit est
dÕimportance considrable la fois par le nombre dÕespces florales et
fauniques qui nÕexistent nulle part ailleurs sur la plante. Plus prcisment,
les forts du Bassin du Congo sont habites par lÕassemblage le plus diversifi
de plantes et dÕanimaux. Ce nÕest que sur ces vastes tendues dÕAfrique
Centrale quÕon trouve des lphants de fort, de gorilles, de buffles de fort,
des bongos et des okapis en grand nombre. Certains chercheurs conjecturent mme
que les lointains anctres de lÕhomme sont peut-tre originaires de cette
rgion qui abrite encore nos trois plus proches parents, savoir, le gorille,
le chimpanz et le bonobo. De plus, rien que par leur taille, ces massifs
forestiers constituent une rserve de carbone dÕimportance mondiale pour la
rgulation du gaz effet de serre. Ils ont aussi un rle rgulateur sur le
climat rgional et local ; assurent le recyclage de lÕeau, denre rare
pour de nombreux pays et vritable problme pour une grande partie de
lÕAfrique. Il est par ailleurs fait remarquer que la richesse de la diversit
de ces forts constitue une ressource incommensurable pour des dizaines de
millions dÕtres humains en Afrique Centrale.
Aprs avoir prsent lÕimmense potentiel
dont dispose les forts du Bassin du Congo, lÕauteur souligne que leur
exploitation est au cĻur de plusieurs enjeux :
„ Sur le plan
conomique, le commerce
des bois, leur certification, lÕindustrialisation de la filire et lÕexpansion
du march des bois tropicaux justifient lÕarrive massive de nouveaux acteurs
dans la rgion la recherche de concessions forestires exploiter.
„ Au
niveau social et culturel, les forts du Bassin du Congo sont au
centre du mouvement de dvolution de la gestion des ressources forestires aux
populations locales. Environ 65 millions de personnes dpendent encore trs
largement des ressources spontanes de la fort pour complter leur
agriculture, pour des soins de mdecine traditionnelle en lÕabsence dÕaccs aux
soins de sants modernes. Dans certaines rgions de la RDC, du Cameroun et du
Gabon, cette tendance sÕest rcemment accentue cause de la situation
conomique quÕengendre le retour de populations urbaines sans emploi la
chasse en fort afin de subvenir leurs besoins fondamentaux ainsi quÕ ceux
de leurs familles. Aussi, les forts contribuent-elles lÕidentit culturelle
de nombreuses communauts autochtones et jouent-elles un rle esthtique et
spirituel significatif.
„ Sur
le plan scientifique, il
existe de nombreux dfis relever pour tendre vers lÕamnagement durable de
ces forts, parmi lesquels une bonne prdiction de lÕvolution des cosystmes
forestiers, une gestion durable des populations animales.
„
Au niveau politique, chaque Etat, considrant que les forts
implantes sur son territoire constituent une richesse nationale sur laquelle
chacun exerce sa souverainet permanente, adopte des mesures
Ē nationalistes Č privilgiant avant tout ses intrts.
„ Sur
le plan environnemental,
la dgradation des ressources forestires produit des effets ngatifs pouvant influencer
des phnomnes globaux tels que les changements climatiques, la
dsertification, lÕhabitat des populations forestires elles-mmes.
Bien quÕune grande partie de leur
superficie soit encore prserve, lÕtude mentionne que ces cosystmes forestiers
dÕAfrique Centrale restent confronts plusieurs menaces directes et
indirectes constituant des risques levs qui ncessitent une action globale
concerte pour les empcher dÕadvenir.
„ Pour les menaces
directes : le
braconnage et le commerce de viande de brousse, lÕagriculture, lÕexploitation
du bois, lÕexploitation minire, lÕexploitation du ptrole et du gaz, la pche,
les maladies, les conflits arms et la pollution.
„ SÕagissant
de menaces indirectes,
il y a les changements
climatiques, lÕurbanisation, les conflits arms et dplacements des populations, la croissance dmographique,
le dfaut de bonne gouvernance, lÕabsence de capacit institutionnelle,
lÕinsuffisance des financements long terme, le manque de comprhension des
problmes dÕchelle, le manque de capacit des ONG et organisations
communautaires locales de suivi et dÕvaluation des activits entreprises sur
les forts.
Face cette situation, le cadre
juridique international relatif aux forts est loin de donner des signaux de convergence,
dans la mesure o il ressemble encore Ē une terre de contrastes Č.
Primo, lÕtat mondial des forts plutt
proccupant, le rgime international ne renvoie quÕun Ē cho
assourdi Č de cette situation. Contrairement aux questions relatives la
diversit biologique et au changement climatique, ayant donn lieu la
signature des conventions internationales en 1992, les forts nÕont gure fait
lÕobjet dÕun tel instrument juridique dans le cadre de la Confrence des
Nations Unies pour lÕEnvironnement et le Dveloppement (CNUED). Des tentatives
ont pourtant t faites dans ce sens, mais lÕide dÕune convention forestire,
souhaite par certains (les Etats du Nord, les Etats-Unis et la Grande-
Bretagne, en lÕoccurrence) et combattue par dÕautres (les pays du Sud, en
majorit), a t rondement touffe dans lÕĻuf. Les vellits
pro-conventionnelles se sont estompes. Et faute dÕun trait, les Etats se sont
tout de mme accords sur un texte de nature rsolutoire. CÕest la Dclaration
de principes, non juridiquement contraignante mais faisant autorit, pour un
consensus mondial sur la gestion, la conservation et lÕexploitation
cologiquement viable de tous les types de fort qui apparat ainsi comme un palliatif
lÕabsence dÕun instrument conventionnel, alors que de par sa nature, cet
instrument relve de la soft law,
cÕest--dire du Ē droit vert Č. De lÕimpasse conventionnelle, on sÕest content dÕun simple
compromis dclaratoire.
Secundo, lÕtude relve galement un contraste
entre les enjeux internationaux que reprsente la gestion commune de
lÕcosystme forestier et les politiques forestires des Etats. Estimant que
les menaces qui psent sur lÕquilibre climatique remettent en cause Ē les
conditions mme de la vie sur la plante Č et sont susceptibles de porter
atteinte Ē aux intrts les plus vitaux de ŌlÕhumanit toute entireÕ, le
monde industrialis a arrt une stratgie visant obtenir la prservation de
ces forts. Pour cela, le principe de libre disposition des ressources
naturelles devrait tre adapt aux besoins des gnrations futures par des
nouveaux moyens de coopration, mais galement par des mesures dÕingrence,
lgitimes par les impratifs de la scurit cologique internationale. De son
ct, arguant que la destruction des forts tropicales sÕeffectue pour une part
dterminante afin de rpondre aux besoins conomiques et aux exigences
financires du monde industrialis, le Tiers-Monde met en avant la
responsabilit particulire des pays riches dans lÕapparition et la propagation
de ce flau. Aussi, les Etats en dveloppement estiment-ils que les forts
constituent une richesse nationale sur laquelle chacun exerce sa souverainet
permanente, en vertu de la rsolution 1803 (XVII) adopte par lÕAG de lÕONU.
Cette rsolution fait dsormais partie intgrante du droit international
positif au mme titre que le droit des peuples disposer dÕeux-mmes dont il
constitue dÕailleurs un Ē lment fondamental Č. Le principe de
souverainet permanente indique, en effet, que toute mesure prise aux fins de
la rsolution 1515 (XV) Ē doit se fonder sur la reconnaissance du droit
inalinable quÕa tout Etat de disposer librement de ses richesses et de ses
ressources naturelles, conformment ses intrts nationaux et dans le respect
de lÕindpendance conomique des Etats Č. LÕAssemble gnrale des Nations
Unies ajoute dans cette perspective que Ē la violation des droits
souverains des peuples et des nations sur leurs richesses et leurs ressources
naturelles va lÕencontre de lÕesprit et des principes de la Charte des
Nations Unies et gne le dveloppement de la coopration internationale et
le maintien de la paix Č. Ainsi, se fondant sur ces diffrentes
rsolutions, des Etats du Sud adoptent des politiques forestires nationales
visant se protger des influences extrieures aux tendances
internationalisantes des massifs forestiers.
Tertio, il existe aussi une disproportion entre
les multiples drames et les moyens mobiliss pour y faire face. LÕune des
catastrophes les plus terribles de notre histoire est la tragdie humaine
exprime par lÕextrme pauvret qui expose des millions des populations, en particulier les
communauts riveraines des forts du Bassin du Congo, exacerbant ainsi des
conflits qui mettent en danger, par voie de consquence, la paix et la scurit
dans les rgions touches. Les drames biologique et climatique restent
dÕactualit. Cependant, les mcanismes juridique, institutionnels et financiers
mis en place restent loin de rpondre aux attentes suscites par les
proccupations ci-dessus esquisses.
CÕest dans ce contexte que fut sign le
Partenariat pour les forts du Bassin (PFBC). Celui-ci est simplement dfini
comme tant une association conclue lÕamiable et non juridiquement
contraignante de gouvernements, dÕentreprises prives et de la socit civile
constitue pour mettre en excution le calendrier convenu au SMDD.
Ses objectifs sont essentiellement la protection des massifs
forestiers dÕAfrique Centrale et la lutte contre la pauvret, travers
lÕamlioration du niveau de vie des populations riveraines desdites forts, le
tout dans une perspective du dveloppement durable.
Contrairement aux partenariats classiques
des bailleurs des fonds avec des institutions nationales ou rgionales que lÕon
peut qualifier de Type I, celui qui a fait lÕobjet de la thse est de Type II.
Il se caractrise par une logique multiacteurs (bailleurs des fonds, Etats,
Administrations, Institutions intertatiques, ONG, secteur priv, socit
civile, etc.) sur des thmatiques transversales ( protection de lÕenvironnement
par lÕamnagement durable des forts, lutte contre la pauvret). Ainsi, se
trouvent runis en son sein des acteurs aussi bien publics que privs.
Le PFBC compte ce jour 45 partenaires
(acteurs) engags. Des acteurs publics, sujets de droit international, et
privs, non sujet de droit international. Pour les acteurs publics, il y a les
Etats (Afrique du Sud, Allemagne, Belgique, Burundi, Cameroun, Canada,
Commission europenne, Congo, Espagne, Etats-Unis, France, Gabon, Grande-Bretagne,
Guine Equatoriale, Japon, Pays-Bas, Rpublique Centrafricaine, RDC, Rwanda,
Sao Tom et Principe, Tchad) et les Organisations intergouvernementales ou
Institutions internationales (BAD, BM, COMIFAC, FAO, OIBT, PNUD, PNUE,
UNESCO) ; alors que pour les acteurs privs, nous avons des ONG et
instituts de recherche (African Wildlife Fundation (AWF), Conservation
International, Forest Trends, Union internationale pour la conservation de la
nature (UICN), Wildlife Conservation Society (WCS), Center for International
Forestry Research (CIFOR), Jane Goodall Institute, World Resources Institute
(WRI), Conservation International (CI), Fond mondial pour la nature (WWF),
Forest Trends, Centre de coopration internationale en recherche agronomique
pour le dveloppement (CIRAD), Dutch Development Organisation (SNV), TRAFFIC,
rseau pour le suivi du commerce en faune sauvage) et des Entreprises
multinationales ou structures relevant du secteur priv (Association
technique internationale des bois tropicaux (AITBT), International American
Forest and Paper Organization, Interafrican Association of Forest Industries
(IFIA), Society of American Foresters, Precious Woods Holding).
Au-del de sa nature, le Partenariat
ainsi prsent suscite galement de nombreux problmes juridiques. En effet,
comment comprendre quÕune association dÕEtats, dÕorganisations internationales,
dÕentreprises prives et de la socit civile existe sur base dÕaucun
instrument juridique. Quelles sont les rgles de son fonctionnement ?
Pourrait-elle atteindre efficacement ses objectifs sans outils juridiques
rgulant ses activits et sur base desquels certains conflits ventuels
seraient rgls ? En vertu de quelle rgle certains partenaires
librent-ils des contributions financires? (SÕagissant des contributions
financires, et ce, titre indicatif, lÕtude fait constater que dj en
janvier 2003, Ē The United States pledged up to $53 million through 2005
via USAID's Central Africa Regional Program for the Environment CARPE). EU
countries have begun or finished projects amounting to 151.9 million Euros
($177,511,335.25). Broken down, this funding includes (some pledges/figures are
only estimates or indicative):
ECOFAC is investing 65 million Euros in biodiversity in the Congo Basin
($75,959,425.88). France noted contributions of 15 million Euros
($17,529,098.28) over 3 years; and French Development Agency could increase
loan-based financing for forest concession management plans to 30 million Euros
($35,058,196.56) over three year period. French GEF will earmark 5 million
Euros ($5,843,032.76) for biodiversity in the Congo Basin. Germany ongoing
cooperation projects of 20 million Euros and pledges 5 million Euros for FY
03-07 ($29,215,163.80). Belgium 4 million Euros over three years.
($4,674,426.21). Japan supports CBFP through ITTO contributions $152,000 for
SFM; $25,000 for Forest Law Enforcement in Africa; $200,000 for Remote Sensing
Technology use in Republic of Congo total $377,000 pledged in 2002 for Congo
Basin activities plus Official Development Assistance (Bilateral aid) of 1.3
billion dollars to the 6 Congo Basin countries in FY01 (includes all assistance
for econ development, poverty alleviation and governance, not forest
specific)Č). En cas de non respect ou de violation des engagements pris par un
ou plusieurs partenaires, quel droit invocable pour lÕtablissement de leur
responsabilit ?
Dans son effort de comprhension des
problmes ci-haut relevs, lÕtude part de lÕhypothse selon laquelle le PFBC
fonctionne principalement dans un cadre non juridiquement dfini en mme temps
que son excution gnre progressivement un ordre juridique qui contribue
partiellement sa propre rgulation. Subsidiairement, il est probable que
lÕinexistence dÕun ordre juridique spcifique cette association de multiples
acteurs aux statuts juridiques diffrents soulve des difficults du point de
vue du droit international, mais nÕexclut pas lÕinvocation de la thorie
gnrale du droit en vue de lÕtablissement de la responsabilit des diffrents
partenaires pour non respect des engagements souscrits.
La mthode utilise pour vrifier cette
hypothse relve dÕune approche interdisciplinaire qui a permis lÕauteur
dÕintgrer lÕutilisation de plusieurs disciplines dans une perspective unique
et cohrente. Ainsi, lÕtude fait interagir la mthode du positivisme
juridique, les approches historique et sociologique du droit.
LÕinterdisciplinarit supposant, par dfinition, le choix dÕune
Ē discipline matresse Č qui encadre lÕensemble du raisonnement
scientifique, cÕest lÕapproche positiviste qui a servi de cadre principal de
rfrence.
Le travail est structur en trois
parties. La premire sÕoccupe identifier le droit applicable au Bassin du
Congo et la question du dveloppement durable. La deuxime analyse ensuite le
PFBC et les moyens juridiques mis en place pour sa ralisation. Enfin, la
troisime partie porte sur le droit de la responsabilit des diffrents
partenaires engags en cas de non respect des engagements souscrits.
LÕtude aboutit aux rsultats
suivants :
„ SÕagissant
du rgime juridique applicable au Bassin du Congo, lÕauteur fait constater
quÕil a vari en fonction de lÕvolution des relations internationales et des
problmes qui se posaient. Ainsi, il est pass dÕun statut international (1885)
un autre (2005), mais avec des diffrences spcifiques. Alors quÕil tait un
bassin conventionnel consacr par lÕActe de Berlin qui y avait dcrt la
libert de commerce et de navigation pour les puissances berlinoises, il est
aujourdÕhui aux soumis aux rgles de la Commission des forts dÕAfrique
Centrale (COMIFAC), cre par le Trait de Brazzaville du 5 fvrier 2005.
„ LÕinexistence
dÕun droit partenarial pouvant accompagner les activits dans le Bassin du
Congo.
„ LÕabsence
dÕune dfinition claire du partenariat lui-mme constitue une aporie. Cette
lacune a pour consquence le morcellement des centres de dcision et dÕaction,
ne dÕune pluralit de structures institutionnelles formelles ou informelles
(la Confrence des Chefs dÕEtats dÕAfrique Centrale, le Secrtariat excutif de
la COMIFAC, la Facilitation, etc.).
„ Le
dveloppement durable qui constitue la raison dÕtre du partenariat oscille
entre du non-droit et du droit. Non-droit dans la mesure o cÕest plus des
textes de compromis politiques qui dterminent les modalits de sa mise en
Ļuvre. Quand bien mme il y aurait des textes juridiques, ces derniers, au
regard de la faiblesse de leur normativit, sont considrs par le positivisme
juridique comme du non-droit ou la rigueur de la soft law sans mesures contraignantes devant
accompagner le dveloppement.
„ Le
droit a pris une forme conventionnelle, particulirement pour les Etats
dÕAfrique Centrale avec le Trait de Brazzaville la suite du Processus de
Yaound, mais cela nÕest
pas suffisant car tous les partenaires impliqus ne sont pas concerns par
lÕordre juridique du 5 fvrier 2005. Il y a une asymtrie qui ncessite
lÕintervention du droit, car il reste peu comprhensible que la
Ē Facilitation Č (exerce depuis 2002 par les USA, France et
Allemagne) assume une aussi importante mission sans rgles juridiques
auxquelles elle serait soumise et en vertu desquelles elle rendrait compte ou
serait value.
„ La
responsabilit des Etats reste encore difficile envisager dans le cadre strict
du PFBC. CÕest seulement sur base des dispositions du droit international
gnral et du droit de lÕenvironnement que certaines possibilits peuvent tre
trouves. Le problme ne se poserait pas pour les Etats membres de la COMIFAC.
Or, la COMIFAC nÕest pas le PFBC.
„ Le
droit de la responsabilit des Organisations intergouvernementales (OIG)
partenaires dans le Bassin du Congo nÕexiste pas. Si ces OIG peuvent engager
leur responsabilit, notamment pour violation des droits fondamentaux des
populations autochtones, ou pour violation de rgles de protection de
lÕenvironnement lors de leurs activits, ce nÕest pas sur base dÕun ordre
juridique rgissant la partenariat, mais, au contraire, en vertu du droit
international gnral. Aussi, sÕil sÕest avr que la COMIFAC peut voir sa
responsabilit engage, cÕest non en fonction dÕun systme juridique tabli par
le PFBC mais sur base de son ordre juridique propre et de lÕordre juridique
international rgissant les organisations internationales.
„ En
examinant la possibilit de mettre en jeu la responsabilit de partenaires
privs dans le Bassin du Congo, lÕtude montre que la nature du partenariat
auquel ils participent tait lÕobstacle majeur. Pour lÕauteur, il parat
hasardeux, en lÕtat actuel du partenariat, dÕinvoquer un quelconque rgime
juridique sur base duquel la responsabilit des acteurs privs serait engage.
„ La
possibilit dÕappliquer le droit international gnral ne couvre pas lÕensemble
des problmes poss par le partenariat. Les considrations faites sur les
objectifs et le fonctionnement du PFBC ont montr la possibilit, dans certains
cas, de recourir aux dispositions du droit international, notamment dans les
domaines de lÕenvironnement et des droits de lÕhomme qui sont concerns en lÕespce.
Le recours ces dispositions se justifierait, en lÕoccurrence, dans une
situation de violation flagrante des droits consacrs par diffrents
instruments internationaux relatifs aux droits de lÕhomme, particulirement les
droits conomiques, sociaux et culturels, et de non respect des rgles
relatives la protection de lÕenvironnement par les partenaires. Cette
possibilit, bien quÕenvisageable, trouverait des obstacles rsultant non
seulement du fait que, par exemple, certains partenaires ne seraient pas
parties ces instruments, et surtout quÕen pratique, ce mcanisme serait lourd
appliquer tous les partenaires. Somme toute, lÕexistence du droit
international gnral ne remplace pas la ncessit de doter le PFBC dÕun ordre
juridique spcifique cens mieux rencontrer les proccupations des acteurs qui
ont accept de sÕassocier pour des objectifs dfinis.
Au final, restant essentiellement sur des
considrations juridiques et compte tenu des lacunes releves, tant sur le plan
du fondement quÕau niveau du fonctionnement, lÕauteur estime appropri, titre
de lege ferenda, de
proposer la dotation du partenariat des instruments juridiques ncessaires sa
rgulation. La pluralit dÕinstruments quÕil propose est dicte par la
classification que fait le droit international sur ses sujets et les personnes
prives. A titre suggestif, il y a lieu, dÕune part, dÕenvisager la conclusion
dÕun trait entre diffrents partenaires (riverains et non riverains du Bassin
du Congo), sujets de droit international, pour combler les insuffisances
juridiques releves. Ce instrument ainsi conclu dterminerait les droits et
obligations de chaque partenaire et son existence serait un atout majeur dans
lÕtablissement de la responsabilit des partenaires en cas de violation des
obligations souscrites dans le cadre du partenariat. DÕautre part, lÕide dÕun
contrat dÕEtat conclu, dans le cadre du partenariat, entre les Etats riverains
du Bassin du Congo avec les acteurs privs menant des activits sur leurs
territoires respectifs, contribuerait rsoudre les problmes conscutifs au
dficit normatif ci-haut stigmatis. Ainsi, chaque partenaire partie ce
contrat connatrait ses droits et devoirs, de sorte que lorsquÕil nÕy a pas
respect des engagements souscrits, la responsabilit soit dtermine sur base
du droit prvu par ledit contrat.
Jean-Paul SEGIHOBE BIGIRA