DHDI


groupe de travail Droits de l'Homme et Dialogue Interculturel

Christoph Eberhard 20/01/97






Quelques réflexions sur :

La question de la limitation de l'Etat par le droit

(à l'origine : Devoir en Théorie de L'Etat chez Prof. M. Troper

lors du DEA 1996-1997 en Théorie du Droit de l'Académie Européenne de Théorie du Droit à Bruxelles)

On peut comprendre la “question de la limitation de l'Etat par le droit” de multiples manières. La première façon dont on peut la comprendre et qui semble venir la plus spontanément au juriste, surtout si celui-ci est constitutionnaliste, est la limitation de la puissance étatique par le droit, ce qui semble nous placer d'emblée dans une perspective dualiste où “Etat” et “Droit” seraient deux réalités irréductibles dont la seconde pourrait limiter la première. En outre, nous arrêter sur cette première façon de voir restreindrait implicitement notre recherche à l'exposition de théories sur la limitation par le droit de l'Etat de droit qu'il soit formel ou matériel, ou de l'Etat légal. Or, en tant que théoricien du droit, nous devons aller au delà des évidences et chercher à creuser un peu plus loin sous les apparences. En effet il n'est pas question dans l'ennoncé d'”Etat de droit” mais uniquement d'”Etat”. Nous ne pouvons donc pas nous contenter de réfléchir sur la limitation de l'”Etat” compris sous sa forme de puissance publique par le droit ce qui nous ménerait à nous interroger uniquement sur la limitation de la puissance étatique soit, d'un point de vue iusnaturaliste, par un droit supérieur à lui et s'imposant à lui dans l'exercice de ses fonctions soit, d'un point de vue plus positiviste, à son autolimitation par les règles qu'il édicte (Troper 1996a: 27-30). Nous devons au contraire pousser plus loin notre réflexion, jusqu'à nous interroger sur la notion même d'”Etat” en en faisant une théorie juridique, ce qui nous ménera à réfléchir sur les liens conceptuels et les déterminations réciproques des concepts d'”Etat” et de “Droit”. Comme le dit si bien Norbert Rouland, “on ne peut définir le droit, mais seulement le penser” (Rouland 1989: 77). Or comme le remarque Michel Troper, concernant cette fois ci non pas le droit mais l'Etat: “seule une théorie générale de L'Etat est aujourd'hui en mesure de parvenir à une véritable compréhension de l'Etat” car “elle diffère profondément aussi bien de la science juridique que des sciences empirique” en raison de son présupposé tout à fait explicite que “l'Etat n'est qu'un concept juridique, ce qui signifie que les théories de la souveraineté, de la représentation, de l'organe, n'ont pas le statut de théories scientifiques, mais que l'Etat n'est pas autre chose que l'ensemble de ces théories.” (Troper 1994a: 7). Ainsi dans les pages suivantes, afin d'éclairer la question de la limitation de l'Etat par le droit, nous nous efforcerons à penser l'Etat en pensant le droit, à “rechercher la relation entre ce système de principes et de concepts (l'Etat) et la structure générale du système juridique”, à “analyser la spécificité de ce type de discours (sur l'Etat) et de tenter de l'expliquer par la forme du droit” (Troper 1994a: 22). La question de la limitation de l'Etat par le droit prend ainsi un sens tout à fait nouveau: il s'agit de comprendre comment le concept de droit, de système juridique même, limite celui d'Etat en éclairant le lien dialectique qui existe entre “penser le droit” et “penser l'Etat”. Nous commencerons notre étude par la réfutation du dualisme entre Etat et Droit et l'affirmation de l'identité de l'Etat et du Droit par Kelsen (A). Ceci nous permettra de montrer l'impossibilité d'un Etat de droit compris comme un Etat soumis à un droit qui lui serait extérieur et qui pourrait ainsi être limité par lui (B). Mais la théorie de l'identité de l'Etat et du Droit nous permettra de pousser encore plus loin notre réflexion puisqu'elle nous permettra de réfléchir sur l'Etat de droit en tant qu'Etat agissant au moyen du droit, ce dernier limitant ainsi le premier de par sa structure même (C). Ces réflexions nous ménerons finalement à nous interroger à la fonction légitimatrice du droit quant à l'Etat, au lien de la légalité et de la légitimité de la souverainté étatique et à la manière dont par cette fonction légitimatrice du droit l'Etat se trouve limité par le droit, sa forme concrète ne pouvant originer que de la forme juridique qui lui est sous-jacente et qui d'ailleurs le légitime autant qu'il la légitime (D).

A. L'identité entre Etat et Droit selon Kelsen

Kelsen remarque que la doctrine traditionnelle sur l'Etat est marquée par un dualisme entre Etat et Droit (pour une vue plus approfondie de ce dualisme: Chevallier 1988: 347 ss) . En effet la doctrine traditionnelle réussit à présenter l'Etat comme différend du droit et cependant comme un “être de droit” (“Rechtswesen”) en le construisant comme un sujet de droits et d'obligations (Rechtspflichten und Berechtigungen), donc comme personne, tout en lui attribuant une existence indépendante de l'ordre juridique (Kelsen 1960: 288). Or pour Kelsen ce dualisme a uniquement une fonction idéologique visant à renforcer l'autorité de l'Etat et n'a pas pour but d'aider à l'élucidation de l'”essence” (“Wesen”) même de l'Etat (Kelsen 1960: 289). En effet, cette présentation idéologique s'explique par le fait que ce n'est qu'en présentant l'Etat comme une personne différente du droit que ce dernier peut être vu comme le légitimant. En effet, dans la perspective d'un Etat qui produit le droit et qui se soumet ensuite à lui (autolimitation de l'Etat), la soumission de l'Etat au droit ne peut légitimer l'Etat que si la nature du droit est fondamentalement opposée à celui de l'Etat, l'Etat étant caractérisé par la puissance et le droit par référence à un ordre juste. Ce n'est que dans ces conditions de stricte extranéité des deux ordres juridique et étatique qu'une limitation effective de l'Etat par le droit peut être pensée puisqu'on conçoit mal une limitation d'un ordre par un autre, si ces deux ordres se ramènent en définitive à un seul, surtout si le deuxième qui est censé originer du premier (le droit) est censé limiter ce premier (Kelsen 1960: 288).

Or pour l'approche positiviste de Kelsen cette position idéologique est intenable. En effet, le positivisme dont il se revendique se caractérise par le désir de faire une science objective du droit en tant que réalité empirique. Il n'a pas pour souci d'élaborer une théorie métaphysique du droit et de l'Etat pouvant les légitimer car ceci l'obligerait à prendre en compte des valeurs ou des considérations métaphysiques forcément subjectives et donc de par leur nature même inconnaissables empiriquement. Le positivisme de Kelsen se veut science de ce qui est et non pas de ce qui devrait être et se veut donc libre de toute idéologie (Kelsen 1960: 1, 112-113; Troper 1994b: 35ss). Ainsi Kelsen constate que l'Etat est usuellement défini comme une organisation politique or celle-ci se caractérise par le fait qu'elle est une “Zwangsordnung”, un ordre de contrainte, ce qui le mène à dire que l'Etat comme organisation politique est un ordre juridique, une “Rechtsordnung”. Mais pas n'importe laquelle: l'Etat est cet ordre juridique qui se distingue de l'ordre juridique primitif ou superétatique par sa relative centralisation (Kelsen 1960: 289). De plus Kelsen fait remarquer que les trois éléments considérés comme traditionnellement constitutifs de l'Etat, la population de l'Etat (Staatsvolk), le territoire de l'Etat (Staatsgebiet) et la puissance d'Etat (Staatsgewalt) ne peuvent être déterminés que juridiquement puisqu'ils ne peuvent être compris que comme validité (Geltung) et domaine de validité (Geltungsbereich) d'un ordre juridique (Rechtsordnung) (Kelsen 1960: 290 ss). Ainsi l'Etat n'est rien d'autre que la personnification d'un ordre de contrainte relativement centralisé (relativ zentralisierte Zwangsordnung), donc d'un ordre juridique. Si on comprend ceci on réalise que le dualisme entre Etat et Droit n'est que la résultante de l'hypostase de la personnalité juridique de l'Etat. Or dans cette constatation le dualisme entre Etat et Droit se dissout (Kelsen 1960: 319) ce qui transforme la formule d'”Etat de droit” en pléonasme, tout Etat étant forcément un ordre juridique (dann enthüllt sich der Versuch, den Staat als “Rechts”-Staat zu legitimieren, darum als völlig untauglich, weil (...) jeder Staat in diesem Sinn ein Rechtstaat sein muss, dass jeder Staat eine Rechtsordnung ist”) (Kelsen 1960: 320).

Voyons les conséquences de cette thèse sur la conception de la limitation d'un Etat par un droit qui lui serait supérieur dans le cadre d'une conception dualiste de l'Etat et du Droit, conséquences qui semblent se cristalliser dans l'impossibilité de la limitation de l'Etat par le droit, et donc dans l'impossibilité de l'Etat de Droit.

B. L'impossibilité de la limitation de l'Etat par le droit, et donc de l'Etat de Droit, dans la compréhension dualiste de l'Etat et du Droit

Dans l'approche dualiste l'Etat de Droit est compris comme un Etat soumis dans son action à un droit qui lui serait extérieur (Troper 1996a: 29). Cependant extérieur ne doit pas nécessairement signifier que le droit limitant l'Etat devrait forcément avoir son origine hors de l'Etat. En effet il pourrait tout aussi bien s'agir d'un droit originant de l'Etat, mais s'autonomisant ensuite et s'imposant ainsi à lui (Chevallier 1988: 347-348). Nous pouvons donc distinguer une “hétérolimitation” de l'Etat correspondant à l'hypothèse d'un Etat limité par un droit qui lui est radicalement extérieur (Chevallier 1988: 352 ss) et une “autolimitation” de l'Etat correspondant à l'hypothèse de la limitation de l'Etat par un droit qui tout en originant de lui ne se confond pas avec lui et s'impose à lui (Chevallier 1988: 348 ss). Nous nous efforcerons d'abord à éclairer l'”hétérolimitation” de l'Etat par le point de vue que nous offre la théorie de l'identité de l'Etat et du Droit (1). Puis nous nous intéresserons dans la même perspective à l'”autolimitation” de l'Etat (2).

(1) L'hétérolimitation de l'Etat est bien illustrée par le jusnaturalisme. En effet, dans la perspective jusnaturaliste, en vue de permettre la liberté des citoyens, l'Etat doit être limité de manière à empêcher des décisions arbitraires de sa part qu'il pourrait ensuite imposer par sa puissance aux citoyens. Les citoyens ne peuvent ainsi être libres que dans la mesure où ils ne sont pas soumis au bon vouloir des gouvernants mais uniquement aux lois qui elles même ne doivent pas uniquement être l'expression de la volonté des gouvernants. Pour réaliser cet objectif il faut donc soumettre les gouvernants et leur action législative à des droits qui leur seraient supérieurs et qui s'imposeraient à eux dans l'exercice de leurs fonctions. La théorie jusnaturaliste pense trouver ces droits en la forme de droits naturels. Ces droits naturels ne prennent plus leur naissance dans l'Etat mais dans un principe qui lui est supérieur et antérieur comme par exemple Dieu, la Nature ou la Société. L'Etat quant à lui devient le simple “scribe” de ces lois qui s'imposent à lui et ainsi la liberté des citoyens est garantie (Chevallier 1988: 352). Le problème avec cette vue d'un point de vue positiviste affirmant l'identité de l'Etat et du Droit et se refusant à prendre en compte des réalités non obsevables empiriquement est qu'elle se place explicitement sur le terrain métaphysique donc sur un terrain qui n'est plus directement observable et analysable mais sur lequel on ne peut faire tout au plus des conjectures. La vue jusnaturaliste se place ainsi hors du terrain du strict positivisme juridique. Or comme on ne peut ni connaitre, ni dire quoi que ce soit sur le droit naturel qui ne soit pas normatif mais descriptif, la limitation de l'Etat par lui devient douteuse. En effet, il découle de cette constatation l'argument à mon avis le plus décisif qu'on peut développer à l'encontre de l'idée de la limitation de l'Etat par le droit naturel et qui est comme le dit Michel Troper que: “Dans la réalité, cet Etat, prétenduement soumis à un droit supérieur, est nécessairement lui aussi un gouvernement des hommes et non des lois, car ces lois, auxquelles on veut qu'il soit soumis, ne se donnent pas à voir immédiatement.” ce qui fait qu'elles doivent être découvertes, interprétées (Troper 1996a: 31). Or cette interprétation ne peut se faire que par un juge, qui est une partie du système juridique qu'il représente dans sa fonction de juger et qui lui impose dans une certaine mesure sa logique. Or le système juridique se confondant avec l'Etat, le juge en se conformant au droit naturel à travers son système juridique, devient en fait le porte parole non plus du droit naturel mais de l'Etat et ainsi s'effondre la limitation de l'Etat par le droit naturel. Une illustration frappante de cette constatation est le fait comme le remarque Michel Troper que la doctrine de l'Etat de droit matériel n'est nullement écartée par les régimes totalitaires comme par exemple le troisième Reich (Troper 1996a: 32). Qu'en est-il alors de la thèse de l'autolimitation de l'Etat?

(2) Dans la théorie de l'”autolimitation” de l'Etat il n'y a pas de droit antérieur et supérieur à l'Etat - le droit est toujours le produit de l'Etat mais l'Etat se soumet au droit qu'il a lui même posé (Chevallier 1988: 348). Cette variante du dualisme Etat/Droit se rapproche déjà plus de la thèse de l'identité de l'Etat et du Droit puisque Droit et Etat ne sont plus considérés comme deux phénomènes radicalement différents mais comme deux phénomènes étroitement liés dont l'un semble même avoir la prééminence sur l'autre. En effet, c'est d'abord l'Etat qui crée le droit et décide après de s'y soumettre. Ainsi une limitation de l'Etat par le droit paraît douteuse puisque celle-ci dépend en dernière analyse du bon vouloir de l'Etat. “Puisque l'Etat est à l'origine du droit, puisque c'est de lui que dépend le contenu de l'ordonnancement juridique, le droit ne saurait constituer pour lui une contrainte externe, une limite objective (...)” (Chevallier 1988: 350). On peut donc dans cette perspective tout au plus argumenter que l'Etat a intérêt à respecter le Droit pour ne pas saper l'assise même de son institution et pour se conformer à la pression sociale (Chevallier 1988: 350). Pour sortir de cette impasse on pourrait envisager l'Etat comme étant subordonné à un droit qui lui serait antérieur et qui serait celui des premiers constituants. Or cette approche soulève quand même deux difficultés majeures: premièrement même si le droit était antérieur à l'Etat actuel il resterait néanmoins un droit positif originant de l'Etat “originel”. L'Etat serait donc tout au plus autolimité et on voit mal dans cette théorie ce qui pourrait bien empécher l'Etat actuel de modifier ce droit originel (Troper 1996a: 32-33). En effet celui-ci étant un droit positif, même si antérieur, n'est pas supérieur au droit positif actuel de l'Etat. Il n'a donc aucun moyen de limiter ou de contraindre l'Etat puisque celui-ci peut toujours changer son droit et ainsi les limites qu'il s'impose. Deuxièmement même si on pouvait pour une raison ou une autre considérer qu'un droit constitutionnel antérieur est supérieur au droit actuel, en considérant par exemple que la constitution originelle est le fruit d'un contrat social qui a abouti à l'institution d'un Etat doté d'un droit “juste” justifiant son institutionnalisation est qui doit donc être respectée par tous les gouvernants subséquents puisqu'elle a initialement instiué l'ordre juste dand lequel nous nous trouvons encore, il resterait toujours l'objection que nous avons déjà relevé à l'encontre de la limitation de l'Etat par le droit naturel et qui réside dans la nécessité qu'a ce droit à être interprété par les juges actuels du système juridique actuel qui peuvent se révéler plus la “bouche” de l'Etat actuel que du droit constitutionnel antérieur comme ils sont censés l'être.

Ainsi nous avons vu qu'à la lumière de la thèse de l'identification de l'Etat et du Droit la limitation de l'Etat par le droit, et donc l'existence de l'Etat de Droit, fondé sur un dualisme Etat/Droit et prenant soit la forme de l'”hétérorlimitation” soit la forme de l'”autolimitation”, se révèle impossible. Intéressons nous donc à une autre manière de comprendre la limitation de l'Etat par le droit et donc l'Etat de droit. Il s'agit ici non plus de considérer l'Etat comme limité par un droit qui lui est extérieur mais comme un Etat limité par le droit dans la mesure où il agit au moyen du droit.

C. L'impossibilité de la limitation de l'Etat par le droit dans une conception de l'Etat de droit comme Etat agissant au moyen du droit

L'idée d'Etat de droit comme Etat agissant au moyen de droit consiste à concevoir la limitation de l'Etat par le Droit par le fait que l'Etat, ou plutôt les autorités de l'Etat ne doivent agir qu'en vertu d'une norme générale et impersonnelle, d'une loi. Ainsi l'Etat de droit est compris comme un type d'organisation du pouvoir où il existe une hiérarchie des normes (Troper 1996a: 33). On peut comprendre cette hiérarchie des normes de deux manières ce qui débouche sur deux conceptions possibles de l'Etat de droit. On peut d'abord concevoir la hiérarchie des normes de manière statique ce qui signifie que pour être valide le contenu de toute norme doit être conforme au contenu d'une norme plus générale. Ensuite on peut concevoir la hiérarchie des normes de manière dynamique ce qui signifie que toute norme n'est valide que dans la mesure où elle a été édictée conformément à une procédure prescrite, c'est à dire qu'elle n'est valide que lorsqu'un certain nombre de conditions d'émission comme par exemple sa prescription par une autorité compétente sont remplies. Pour Kelsen la morale est un ordre statique alors que l'ordre juridique est un ordre dynamique (Troper 1996b: 11-12). Si on suit l'analyse de Kelsen et qu'on considère que l'ordre juridique est uniquement dynamique il en découle une conception strictement formelle de l'Etat de droit dans laquelle l'Etat est uniquement soumis à des règles formelles. Si par contre on considère comme Michel Troper que l'ordre juridique est à la fois statique et dynamique (Troper 1996b: 13) il en découle une conception matérielle de l'Etat de droit dans laquelle l'Etat se trouve en outre limité par des règles de fond (Troper 1996a: 33). Nous nous intéresserons d'abord à la limitation de l'Etat par le droit dans une conception formelle de l'Etat de droit (1), puis nous nous pencherons sur cette problématique de limitation de l'Etat par le droit dans une conception matérielle de l'Etat de droit (2).

(1) D'après la conception formelle de l'Etat de droit, l'Etat est limité, et ainsi le citoyen protégé contre sa puissance, par le fait que le citoyen est exclusivement soumis aux lois qui sont générales et impersonnelles, et non pas au bon vouloir des gouvernants. La puissance de l'Etat se trouve donc limitée sous la forme de ses gouvernants et de leur exercice du pouvoir par le fait que tous leurs commandements ne peuvent originer que d'une loi. Or si le législateur ne peut pas appliquer lui même ses commandements, c'est à dire s'il-y-a une séparation des pouvoirs, l'Etat ne pourra plus prendre de mesures arbitraires envers le citoyen puisqu'il ne pourra pas prévoir à qui ses lois seront appliqués et n'a pas la possibilité de les changer au cas par cas. De cette absence de prédiction possible résulte aussi une certaine modération du législateur car ceux qui font la loi savent qu'elle peut leur être appliquée (Troper 1996a: 34-35). Or le problème de cette vue dans le cadre d'une conception formelle de l'Etat de droit est la suivante: si on considère l'ordre juridique comme uniquement dynamique la norme applicable au citoyen peut avoir tous les contenus qu'on veut puisque la validité de la norme ne dépend pas de la correspondance du contenu de la norme à la loi mais uniquement de l'édiction formellement correcte de cette norme. Ainsi le citoyen soumis à une telle norme, qui peut très bien être une norme individuelle, n'est plus véritablement soumis à la loi mais à l'arbitraire et au gré de l'Etat ou du moins de l'autorité édictant la norme, ce qui revient au même puisque celle-ci peut être considérée comme représentante de l'Etat (Troper 1996a: 38). L'Etat de droit formel ne permet ainsi pas de concevoir une limitation de l'Etat par le droit. Qu'en est-il de l'Etat de droit matériel?

(2) D'après la conception matérielle de l'Etat de droit la limitation de l'Etat résulte du double caractère dynamique et statique de l'ordre juridique. Outre sa conformité aux règles d'édiction de normes, une norme pour être valide dans son rapport statique avec ses normes supérieures doit être conforme ou du moins compatible à celles-ci. Elle doit en effet soit être directement déduite du contenu plus général de la norme supérieure au moyen d'un syllogisme pratique, soit doit pouvoir être subsumé sous le contenu de la norme supérieure dans le cas où la norme supérieure ne pose qu'un cadre général pour l'édiction des normes inférieures tout en leur laissant une certaine liberté quant à leur concrétisation (Troper 1996a: 38). On peut ainsi penser à première vue que dans cette conception, contrairement à la précédente, le citoyen sera effectivement soumis à la loi et non plus au bon vouloir étatique. En effet toutes les normes le touchant puisqu'elles font partie d'un ordre juridique qui est une hiérarchie à la fois statique et dynamique sont nécessairement l'expression directe de la loi qui elle est générale et impersonnelle. Cependant on peut objecter à cette vue que la soumission exclusive du citoyen à la loi qui est censé assurer la limitation de l'Etat par le droit repose sur l'idée que la loi est générale et impersonnelle or les Etats modernes illustrent premièrement la nécessité d'adopter des lois particulières à certaines catégories de sujets à côté des lois générales et impersonnelles s'appliquant à tous et deuxièmement rendent de plus en plus évidente la nécessité de l'interprétation de la loi en vue de son application (Troper 1996a: 37). La deuxième objection se trouve renforcée par la constatation qu'il ne peut exister de normes à cent pour cent conformes à leurs normes supérieures, entièrement déduites d'elles. Comme le remarque Kelsen on ne peut pas dire que le contenu de la norme inférieure est déduit du contenu de la norme supérieure mais seulement qu'il lui est subsumable. Ainsi s'effondre la limitation de l'Etat par le droit dans une perspective d'Etat de droit matériel puisque la conception de cette limitation était intrinsèquement liée à l'idée que la loi garantissait l'individu contre le pouvoir arbitraire de l'Etat de par sa certitude - or si cette certitude est remise en cause (et elle l'est comme nous l'avons vu par la liberté d'interprétation inhérente à tout texte et par l'édiction par l'Etat de lois ciblées sur certains groupes de personnes) il n'y a plus de fondement solide à une limitation de l'Etat par le droit au moyen de la loi (Troper 1996a: 39).

Ainsi il semble que le concept d'”Etat de Droit” compris comme Etat agissant au moyen de droit n'est pas plus qu'un simple pléonasme et ne permet pas plus de mettre en évidence la limitation de l'Etat par le Droit que ne l'ont permi les concepts d'Etat de Droit reposant sur un dualisme Etat/Droit que nous avons étudié plus haut. Nous sommes ainsi mené à pousser plus loin notre réflexion sur la limitation de l'Etat par le Droit en nous plaçant dans une perspective de théorie juridique de l'Etat qui nous permettra de saisir les liens entre légitimité étatique et légalité, entre Etat et système juridique qui le sous-tend, tout autant qu'il en est l'expression, et qui nous permettra ainsi de voir dans quelle mesure on peut, malgré toute l'analyse dévastatrice que nous avons mené jusqu'à maintenant, tout de même parler d'une limitation de l'Etat par le droit.

D. La limitation de l'Etat par le droit dans une optique de théorie juridique de l'Etat mettant en évidence le lien dialectique entre structure de l'ordre juridique et légitimation de l'Etat

Il est utile pour engager notre réflexion suivante de partir de la définition classique de l'Etat de Max Weber qui écrit: “Nous entendons par Etat une “entreprise politique de caractère institutionnel” (politischer Anstaltsbetrieb) lorsque et en tant que sa direction administrative revendique avec succès dans l'application des règlements le monopole de la contrainte physique légitime.” (Weber 1971: 57 cité dans Troper 1996b, 1). Selon cette définition l'Etat se caractérise donc comme ayant le monopole de la contrainte physique légitime, comme étant un ordre de contrainte légitime. Dans le cadre de notre réflexion nous nous interrogerons plus particulièrement sur le caractère “légitime” de cet ordre de contrainte pour voir si cette “légitimité” est liée à la limitation de l'Etat par le droit. Nous avons vu dans les pages précédentes qu'il n'y avait de véritable limitation de l'Etat par le droit ni si on se situait dans la perspective dualiste d'un Etat limité par un droit qui lui serait extérieur ni si on se situait dans la perspective d'un Etat qui se limiterait par le fait qu'il n'agirait qu'au moyen du droit. “Légitime” ne peut donc pas signifier, si on se place dans une perspective positiviste, “résultant de la limitation de l'Etat par le droit”. Mais que signifie alors “légitime”? Pour répondre à cette question il est utile de mettre en parallèle la définition de l'Etat de Weber avec celle de Kelsen pour qui l'Etat ne se caractérise pas par le monopole de la contrainte légitime mais par le monopole de la contrainte tout court (Troper 1996b: 2). Les deux définitions semblent à premier abord se différencier sensiblement l'une faisant référence à la légitimité et l'autre non, mais comme le fait remarquer Michel Troper les deux définitions doivent être considérées comme identiques puisque “(d)ans l'expression “monopole de la contrainte légitime”, le mot “légitime” ne désigne pas en réalité autre chose que le monopole, qui lui même s'identifie à la légalité”, de sorte que la définition de Kelsen ne doit être comprise que comme la traduction de celle de Weber dans des termes juridiques (Troper 1996b: 2). Or dans ce cas nous aboutissons à la définition de l'Etat comme “nom que l'on donne au pouvoir politique lorsqu'il s'exerce dans la forme juridique, caractérisée par un mode de justification spécifique.” (Troper 1996c: 5). Or ce qui caractérise la forme juridique est comme nous l'avons vu sa structuration en une hiérarchie statique et dynamique qui valide et justifie une décision si celle-ci peut apparaître comme étant prise par une autorité habilitée à cet effet par une autorité supérieure et conformément à une décision ayant un caractère plus général qu'elle même et émanant d'une autorité plus élevée qu'elle (Troper 1996c: 5). La constatation de la nécessité du caractère légitime du monopole de la violence caractérisant l'Etat se ramène donc à la constatation de l'identité de l'Etat et du Droit et ne dit donc rien sur une éventuelle limitation de l'Etat par le droit. Elle se borne a poser l'équation légitimité égal légalité ce qui est renforcé par le fait que d'un point de vue positiviste, sur lequel se placent aussi bien Kelsen que Weber, la légitimité du monopole de la contrainte étatique ne peut s'analyser qu'en termes strictement internes, c'est à dire en se plaçant sur un point de vue strictement interne au système étatique, et non pas en des termes externes ce qui découlerait de la comparaison du système ou de normes du système à des normes ou valeurs extra-systémiques (Troper 1996b: 4-5). Dans la perspective positiviste doit donc uniquement être considéré comme légitime, comme le remarque Weber, ce qui est considéré comme légitime (“Der Staat ist ein, ebenso wie die ihm geschichtlich vorausgehenden politischen Verbände, ein auf das Mittel der legitimen (das heisst: als legitim angesehen) Gewaltsamkeit gestütztes Herrschaftsverhältnis von Menschen über Menschen.” cité par Troper 1996b: 5). Nous commençons maintenant à entrappercevoir la manière dont l'Etat peut être conçu comme limité par le droit. En effet nous avons noté plus haut que selon Kelsen l'Etat pouvait uniquement se concevoir juridiquement (voir dans notre (A) et aussi notre introduction). Or comme le remarque Michel Troper: “Un concept juridique est un concept nécessaire au fonctionnement du droit. Les concepts d'Etat sont donc des produits non de la science du droit, mais du droit lui-même. (...) Ce n'est pas l'Etat qui définit le droit, mais le droit, la forme juridique, qui définit et constitue l'Etat.” (Troper 1994d: 158-159). La question de la limitation de l'Etat par le droit se pose donc moins en termes d'une limitation directe de l'Etat par le droit qu'en termes d'une “limitation indirecte” s'opérant par le biais d'une légitimation de l'Etat et d'une cristallisation de théories de l'Etat par référence à la structure de son système juridique même. Ainsi deviennent plus clairs les implications de la définition de l'Etat comme “pouvoir politique lorsqu'il s'exerce dans la forme juridique, caractérisée par un mode de justification spécifique” que nous avons donné plus haut. L'Etat n'est pas une forme éternelle et universelle de pouvoir politique qui en tant que telle pourrait être limitée par un droit de quelque manière qu'on le comprenne, mais est au contraire une forme politique spécifique apparue en Europe vers les 17ème et 18ème siècles et se caractérisant par le fait qu'elle s'exprime et se justifie par un ordre juridique à la fois statique et dynamique, l'exercice du pouvoir prenant ainsi la forme de délégation de compétences d'instances supérieures à des instances subordonnées et où les contenus des décisions des instances inférieures doivent être conformes à ceux des décisions des instances supérieures (Troper 1996b: 13 et 1994d: 158). Cette manière de voir outre le fait qu'elle permet de comprendre que ce que l'on appelle Etat n'est rien d'autre que le système normatif qui se met en place au 17ème siècle, permet de mettre en évidence le parallélisme de la structure étatique avec la dogmatique juridique qui est le mode de raisonnement des juristes modernes et permet d'éclairer les deux séries de légitimation de L'Etat par la limitation du droit que nous avons vu: celle de sa légitimation par sa limitation par un droit extérieur (1) et celle de sa légitimation par sa limitation en tant qu'il n'agit qu'au moyen du droit (2).

(1) Michel Troper remarque que ce n'est que lorsque se forme un ordre juridique, c'est à dire un ordre normatif hiérarchique dynamique et statique (qui nous l'avons vu caractérise, voir est, l'Etat moderne) qu'apparaissent aussi les théories de la souveraineté, c'est à dire des théories justificatives de l'Etat en rapport avec la structure de cet ordre juridique (Troper 1996b: 14). Ces théories apparaissent dans cette optique profondément différentes des théories de la “souveraineté” du moyen-âge, qui était caractérisé par l'existence de systèmes normatifs uniquements dynamiques, et dans lequel il suffisait donc de doctrines affirmant la supériorité d'une autorité et justifiant la place de celle-ci au sommet de la hérarchie par la déclaration de sa qualité surnaturelle par exemple (Troper 1996b: 14). Or dans les théories de la souverainté “moderne” on ne peut pas se contenter de cette explication. Il faut expliquer en plus de la position du souverain comme autorité délégatrice supérieure, sa capacité de produire les normes les plus élevées. Il faut donc expliquer dans les mots de Michel Troper le “pouvoir de tout faire” du souverain (Troper 1996b: 14). Classiquement cette justification se fait par recours au droit naturel qui permet de prolonger vers le haut les hiérarchies dynamiques et statiques de l'ordre juridique positif et permet ainsi de légitimer l'Etat par sa limitation par un ordre supérieur juste dans la forme du droit naturel, le pouvoir du souverain, par exemple du roi, étant désormais vu comme résultant d'une délégation par le haut et se trouvant limité puisque le contenu des règles qu'il édicte doivent apparaître comme découlant du contenu du droit naturel (Troper 1996b: 14-15). Nous avons vu le caractère insatisfaisant de cette invocation du droit naturel comme limitant le souverain et donc l'Etat dans notre (B) mais nous nous rendons compte maintenant à quel point cette légitimation est inscrite dans la structure du système juridique même et de quelle manière le champ de légitimation possible de l'Etat se trouve donc réduit par l'existence d'une certaine forme d'ordre juridique. De nos jours on retrouve certains de ces aspects de la justification jusnaturaliste dans la mesure où est encore fait appel à une subordination de l'Etat à ceratins principes métapositifs. Mais la légitimation moderne se différencie de la précédente en ce qu'elle présente l'Etat comme un Etat de droit qui agit au moyen du droit (comme nous l'avons vu dans notre (C).

(2) Nous avons déjà analysé la justification de l'Etat par sa limitation par le droit par le fait qu'il agit au moyen du droit dans notre (C). Nous n'y reviendrons donc pas et nous bornerons à constater qu'ici aussi la légitimation se fait directement par référence à l'ordre juridique dynamique et statique. En effet le citoyen est conçu comme libre, et donc l'Etat comme limité, puisqu'il est vu comme étant uniquement soumis à la loi générale et impersonnelle qui est la même pour tous (à cause du critère dynamique du système) et que cette loi elle même est perçue comme juste ce qui le rend libre (à cause du critère statique du système) (Troper 1996b: 15).

Ainsi en éclairant sous différents angles la question de la limitation de l'Etat par le droit nous nous sommes rendus compte qu'on ne peut pas véritablement parler d'une limitation “au sens strict” de l'Etat par le droit celui n'étant rien d'autre dans une perspective positiviste que justement la personnification de l'ordre juridique. S'effondrent ainsi les théories de limitation de l'Etat par un droit qui serait fondamentalement différend de lui de par sa nature, qu'on adopte la théorie de l'”hétérolimitation” ou celle de l'”autolimitation”, ainsi que celles basant la limitation de l'Etat par la droit sur le fait qu'il n'exerce son pouvoir qu'au moyen du droit. On comprend ainsi qu'on ne peut parler de la limitation de l'Etat par le droit que dans le sens où la structure de l'ordre juridique même, dont l'Etat est l'expression, limite le champ ouvert aux diverses légitimation possibles de l'Etat. Notons ici, comment de manière à première vue paradoxale, se rejoignent une approche positiviste de théorie du droit et une approche de sciences sociales qui est celle de l'anthropologie juridique et qui peut se caractériser par l'exigence de toujours ramener les phénomènes observées, les pratiques et les discours, aux logiques qui les sous-tendent, afin de pouvoir les comprendre (cf dans ce sens: Rouland 1988: 11-12). En nous interrogeant d'une manière positiviste sur la limitation de l'Etat par le droit c'est exactement ce que nous avons fait en dégagent dans la forme du système juridique la logique qui sous-tendait les discours sur l'Etat. Nous en sommes ainsi arrivé à dévoiler que le discours de la limitation de l'Etat par le droit n'était qu'un discours normatif légitimant la forme d'organisation sociale dans laquelle nous vivons (l'Etat) et n'était pas un discours descriptif de réalités objectives et que de plus ce discours était lié à la structure, à première vue cachée, de notre ordre juridique même. Ainsi nous avons montré que nous “pensons l'Etat comme nous pensons le droit” et avons de ce fait mis en évidence la relativité de notre manière de penser la société, l'Etat et le Droit n'étant pas deux réalités données dont l'une serait le siège de la puissance et l'autre de la limitation de cette puissance, mais deux réalités construites en accord avec notre vue du monde. C'est avec cette idée d'ouverture vers la compréhension de formes juridiques différentes des notres (dans l'espace et dans le temps) vers laquelle nous a mené cette analyse positiviste en nous relevant la relativité de nos propres catégories et de leur agencement que j'aimerais terminer en citant Michel Alliot, anthropologue du droit, pour qui “penser Dieu c'est penser le Droit” (voir Rouland 1988: 401) et qui écrit que ce qui permet d'éclairer et de comprendre les phénomènes juridiques ce ne sont pas des universaux mais le fait que toutes les sociétés construisent leur “propre univers mental, porteur de modèles fondamentaux et dispensateurs de sens, que révèlent à la fois la vision du monde visible et invisible de chacun de ses membres, sa vision des peuples, de sa société, des groupes auxquels il appartient ou avec lesquels il est en rapport et sa vision de lui même.” (Alliot 1983: 214).





Bibliographie


ALLIOT Michel,1983, “Anthropologie et juristique”, 1953-1989 Recueil d'articles, contributions à des colloques, textes du Recteur Michel Alliot” , Paris, LAJP, p 207-241

CHEVALLIER Jacques, 1988, “L'Etat de Droit”, Revue du Droit Public et de la Science Politique en France et à l'Etranger, Mars-Avril, n°2, p 313-380

KELSEN Hans, 1960, Reine Rechtslehre, Autriche, Verlag Franz Deuticke Wien, 2ème éd., 534 p

REDOR Marie-Joëlle, 1992,De l'Etat légal à l'Etat de droit - L'évolution des Conceptions de la Doctrine Publiciste Française 1879-1914, Paris, Economica, Col. Droit Public Positif, 389 p

ROULAND Norbert, 1988, Anthropologie juridique, France, PUF, Col. Droit fondamental Droit politique et théorique, 496 p

ROULAND Norbert, 1989, “Penser le droit”, Droits, n°10, p 77-79

TROPER Michel, 1994, Pour une Théorie Juridique de l'Etat, France, PUF, Col. Léviathan, 358 p:

1994a: “Sur la théorie juridique de l'Etat” (5-22)

1994b: “Le positivisme juridique” (28-55)

1994c: “Kelsen, la théorie de l'interprétation et la structure de l'ordre juridique” (86-94)

1994d: “Réflexions autour de la théorie kelsenienne de l'Etat” (143-160)

1994e: “Système juridique et Etat” (161-176)

1994f: “Y-at-il eu un Etat nazi?” (177-182)




Textes distribués lors du cours

TROPER Michel, 1996a, “Le concept d'Etat de Droit”

TROPER Michel, 1996b, “Le monopole de la contrainte légitime - Légitimité et légalité dans l'Etat moderne”

TROPER Michel, 1996c, “Le titulaire de la souveraineté”

TROPER Michel, 1996d, “L'évolution de la notion de séparation de pouvoirs”